R. c. Baig, [1987] 2 R.C.S. 537
Mohsin Majeed Baig Appelant
c.
Sa Majesté La Reine Intimée
répertorié: r. c. baig
No du greffe: 19446.
1987: 22 octobre; 1987: 19 novembre.
Présents: Les juges Beetz, Estey, McIntyre, Lamer, Wilson, Le Dain et L'Heureux‑Dubé.
en appel de la cour d'appel de l'ontario
POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario (1985), 20 C.C.C. (3d) 515, 46 C.R. (3d) 222, 16 C.R.R. 300, 9 O.A.C. 266, qui a accueilli un appel du ministère public à l'encontre de l'acquittement de l'accusé à l'égard d'une accusation de meurtre au premier degré et a ordonné un nouveau procès. Pourvoi rejeté.
John R. McGregor, pour l'appelant.
Edward Then, pour l'intimée.
Version française du jugement rendu par
1. La Cour—Il s'agit en l'espèce d'un pourvoi de plein droit. L'appelant a été accusé de meurtre et a subi son procès devant la Cour suprême de l'Ontario siégeant avec un jury. Il a été acquitté par suite d'un verdict imposé. Ce verdict a été prononcé après qu'une déclaration de l'accusé eut été exclue de la preuve. La déclaration a été exclue en vertu du par. 24(2) de la Charte canadienne des droits et libertés, le juge du procès ayant conclu qu'il y avait eu violation du droit que l'al. 10b) de la Charte garantit à l'accusé d'avoir recours à l'assistance d'un avocat et d'en être informé. La Cour d'appel a annulé l'acquittement et ordonné un nouveau procès, concluant qu'il n'y avait pas eu violation des droits de l'accusé aux termes de la Charte: (1985), 20 C.C.C. (3d) 515, 46 C.R. (3d) 222, 16 C.R.R. 300, 9 O.A.C. 266.
2. Voici en résumé les faits pertinents.
Les faits
3. Le prévenu, Mohsin Majeed Baig, a été arrêté vers 13 h 50 le 20 septembre 1982 et accusé de meurtre. Les agents de police ont rencontré l'accusé à l'extérieur de sa maison. L'accusé est monté dans le véhicule de la police et il a alors eu la conversation suivante avec l'agent Kelly:
[TRADUCTION]
Kelly:O.K. Mohsin! Vous êtes en état d'arrestation pour le meurtre de Navneet Uppal . . . Maintenant, avant que vous ne disiez quoi que ce soit, écoutez ce que j'ai à dire. Vous n'êtes pas tenu de dire quoi que ce soit à moins que vous ne désiriez le faire, mais tout ce que vous direz sera noté par écrit et pourra être présenté à titre de preuve . . . Je dois vous informer que vous avez le droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat; comprenez‑vous?
Baig: Comment pouvez‑vous le prouver?
Kelly: Nous pouvons très bien le prouver.
4. L'accusé a ensuite été conduit au quartier général de la police. En route, il n'y a pas eu d'autre conversation. À son arrivée, l'accusé a été amené dans une salle d'interrogatoire où a eu lieu la conversation suivante:
[TRADUCTION]
Kelly:O.K. Mohsin, vous avez eu le temps de réfléchir en chemin. Anees et Raza ont été arrêtés et nous savons exactement ce qui s'est passé alors il vaut mieux que vous nous en parliez.
Baig: Vous avez arrêté Anees et Raza?
Kelly:Oui, nous pouvons aussi vous dire que nous avons également arrêté Kumerjeet. Vous étiez le dernier que nous devions arrêter.
Baig: O.K., O.K. Je vais tout vous dire.
Kelly:Un instant. Vous comprenez bien que la mise en garde que je vous ai faite lors de votre arrestation s'applique toujours.
Baig: Oui, je le sais.
L'accusé a alors fait une déclaration concernant ce qu'il savait du meurtre de Uppal et son implication dans celui‑ci. L'agent Kelly a pris la déclaration par écrit.
5. Kelly a ensuite dactylographié la déclaration sur un formulaire à cet effet qui contenait les trois questions suivantes:
[TRADUCTION]
1. Comprenez‑vous l'accusation?
2. Comprenez‑vous la mise en garde?
3. Je dois vous informer que vous avez le droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat. Le comprenez‑vous?
Le formulaire a été lu à l'accusé qui a répondu par l'affirmative à chacune des trois questions. L'accusé a ensuite lu et signé la déclaration.
Dispositif
6. Nous sommes essentiellement d'accord avec la Cour d'appel. Comme il n'était et n'est pas nécessaire de déterminer si, dans les circonstances de l'espèce, la conduite de l'accusé équivalait à une renonciation de son droit d'avoir recours à un avocat, nous préférons ne pas nous prononcer sur cette question. Nous sommes d'accord avec ce qu'a dit le juge Tarnopolsky dans l'arrêt R. v. Anderson (1984), 10 C.C.C. (3d) 417 (C.A. Ont.), à la p. 431:
[TRADUCTION] . . . je suis d'avis que, en l'absence d'éléments de preuve indiquant que l'accusé n'a pas compris qu'il avait le droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat lorsqu'il en a été informé, il lui incombe de démontrer qu'il a demandé à exercer ce droit mais qu'on le lui a refusé ou qu'on lui a même refusé la possibilité de le demander. Aucun élément de preuve à cet effet n'a été présenté en l'espèce.
En l'espèce, l'accusé n'a pas présenté de preuve selon laquelle on lui avait refusé la possibilité de demander les services d'un avocat et cela ne ressort pas du dossier. En l'absence des circonstances que mentionne le juge Tarnopolsky, lorsque les agents de police se sont conformés aux exigences de l'al. 10b), en avisant sur le champ l'accusé de son droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat, ils n'ont aucune obligation corrélative jusqu'à ce que l'accusé, s'il choisit de le faire, indique qu'il désire exercer son droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat.
7. Le présent pourvoi est rejeté.
Pourvoi rejeté.
Procureur de l'appelant: John R. McGregor, Toronto.
Procureur de l'intimée: Le ministère du Procureur général, Toronto.