La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/02/1970 | CANADA | N°[1970]_R.C.S._502

Canada | Vinnal c. R., [1970] R.C.S. 502 (5 février 1970)


Cour suprême du Canada

Vinnal c. R., [1970] R.C.S. 502

Date: 1970-02-05

Armilde Vinnal (Demanderesse) Appelante;

et

Sa Majesté la Reine du Chef de la province d’Ontario, représentée par le Ministre de la Voirie de la province d’Ontario (Défenderesse) Intimée,

et

Renate Sorra (Défenderesse — s’ étant désistée).

1969: les 10 et 11 décembre; 1970: le 5 février.

Présents: Le Juge en Chef Cartwright et les Juges Martland, Ritchie, Hall et Spence.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL D’ONTARIO.

APPEL d’un

jugement de la Cour d’appel d’Ontario, infirmant un jugement du Juge Donohue. Appel accueilli, les Juges Martland et Ritchie étant dissident...

Cour suprême du Canada

Vinnal c. R., [1970] R.C.S. 502

Date: 1970-02-05

Armilde Vinnal (Demanderesse) Appelante;

et

Sa Majesté la Reine du Chef de la province d’Ontario, représentée par le Ministre de la Voirie de la province d’Ontario (Défenderesse) Intimée,

et

Renate Sorra (Défenderesse — s’ étant désistée).

1969: les 10 et 11 décembre; 1970: le 5 février.

Présents: Le Juge en Chef Cartwright et les Juges Martland, Ritchie, Hall et Spence.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL D’ONTARIO.

APPEL d’un jugement de la Cour d’appel d’Ontario, infirmant un jugement du Juge Donohue. Appel accueilli, les Juges Martland et Ritchie étant dissidents.

B.J. Thomson, c.r., pour la demanderesse, appelante.

K.D. Finlayson, c.r., et P.H. Howden, pour la défenderesse, intimée.

[Page 504]

LE JUGE EN CHEF — D’autres juges de cette Cour ont exposé les faits pertinents et indiqué le résultat des procédures en première instance et en appel.

Je suis d’accord avec la décision de mon collègue le Juge Hall et aussi avec ses motifs, sauf sur les points suivants.

Je ne trouve pas nécessaire de déterminer si, en vertu de l’art. 106 de The Highway Traffic Act, S.R.O. 1960, c. 172, il incombait à l’appelante d’établir que Mme Sorra n’avait commis aucune négligence. Il me semble que les paroles du Vicomte Dunedin, dans l’affaire Robins v. National Trust Co. Ltd.[1] s’appliquent à la présente affaire:

[TRADUCTION] Cependant, la question du fardeau de la preuve ne peut se soulever pour juger une cause que si le tribunal en vient à la conclusion que la preuve de l’affirmative et celle de la négative s’équilibrent si bien qu’il ne puisse en arriver autrement à une conclusion. Alors la fardeau de la preuve décide de l’affaire. Cependant si le tribunal, après avoir entendu et apprécié la preuve, en arrive à une conclusion définie, le fardeau de la preuve n’a rien à y voir, et il n’est pas nécessaire d’y avoir recours.

Quoi qu’il en soit, dans l’affaire qui nous occupe nous sommes tous d’avis que Mme Sorra a fait preuve de négligence et que cette négligence a contribué à l’accident. La question sur laquelle les avis sont partagés est celle de savoir si l’intimée a commis, en ne signalant pas suffisamment le danger, une négligence qui est une cause prochaine de l’accident. Je suis d’accord avec mon collègue le Juge Hall qu’on ne nous a pas fourni de motif suffisant pour qu’il soit possible d’adopter à ce sujet un avis différent de celui du savant juge de première instance.

Je suis d’avis de disposer du pourvoi comme le propose mon collègue le Juge Hall.

Le jugement des Juges Martland et Ritchie a été rendu par

LE JUGE MARTLAND (dissident) — Mon collègue le Juge Hall résume dans ses motifs les faits de la présente affaire. Il cite également les

[Page 505]

conclusions du savant juge de première instance sur la négligence de l’intimée comme suit:

[TRADUCTION] A. Si l’on tient compte de l’accentuation du virage montré à la pièce n° 9A, il aurait fallu mettre un panneau de limite de vitesse bien à l’est de la courbe.

B. La flèche que l’on peut voir à la pièce n° 9A était trompeuse, du fait qu’elle laissait prévoir une courbe légère plutôt qu’un virage prononcé.

C. Les préposés de la défenderesse étaient au courant qu’il y avait du gravier sur la chaussée à un endroit dangereux, après le nivelage du 23 octobre. Je conclus qu’il y en avait l’équivalent de deux seaux ordinaires, soit un ou deux pieds cubes de gravier, sur la chaussée à l’endroit le plus dangereux, et que le défaut d’examiner la route et d’enlever ce gravier constitue une négligence.

D. La route était mal construite du fait que le bombement rendait difficile pour un conducteur de prendre le virage à la vitesse-limite permise, soit 50 milles à l’heure.

En ce qui a trait aux deux premières conclusions, je ne vois pas comment on peut prétendre que l’absence d’un panneau de limite de vitesse ou la forme du panneau indiquant la courbe aient été des causes prochaines de l’accident, quand la preuve indique la présence d’un panneau à damier jaune et noir de quatre pieds de largeur à environ 100 pieds à l’est du début du virage. Ce genre de panneau a un sens universel: il signale un danger. La conductrice de la voiture dans laquelle l’appelante voyageait n’a jamais vu ce panneau.

En ce qui concerne les deux dernières conclusions, je suis d’avis que l’intimée n’est pas obligée de fournir en tout temps des routes bien construites et exemptes de gravier. Comme mon collègue le Juge Hall le signale, l’état de la route, y compris la nature de la courbe, était temporaire, c’est-à-dire qu’elle était en cours de réfection. Si l’état de la route à ce moment-là et à cet endroit présentait un danger pour les automobilistes qui y circulaient à une vitesse normale, l’intimée était tenue de les en aviser. Elle s’est acquittée de cette obligation en posant le panneau de signalisation.

La seule cause de cet accident a été le fait que la conductrice n’a pas vu le panneau de signalisation, s’engageant par conséquent dans

[Page 506]

le virage à une vitesse qui ne lui a pas permis de conserver la maîtrise de sa voiture. Elle déclare ne pas avoir vu le panneau à cause de la poussière soulevée par la voiture de son fils, qui la précédait. Mais, elle déclare également qu’elle est entrée dans le nuage de poussière au moment de s’engager dans le virage et qu’elle n’a vu la poussière qu’à la toute dernière minute. Elle aurait dû voir le panneau avant de s’engager dans, la courbe.

En résumé, à mon avis, la seule obligation de l’intimée, dans les circonstances de la présente affaire, était d’installer une signalisation suffisante, ce que, selon moi, elle a fait.

Je ne crois pas nécessaire d’entreprendre d’interpréter l’art. 106 de The Highway Traffic Act, S.R.O. 1960, c. 172. Le résultat du présent pourvoi ne dépend pas du fardeau de la preuve. Même si cet article ne s’applique pas, l’appelante n’a pas, à mon avis, réussi à prouver que l’intimée a commis une négligence quelconque qui ait été la cause de l’accident.

Je rejetterais le pourvoi avec dépens.

Le jugement des Juges Hall et Spence a été rendu par

LE JUGE HALL — Le pourvoi est à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario qui infirme un jugement du Juge Donohue par lequel ce dernier avait conclu à la responsabilité de l’intimée et adjuge $22,086.16 à l’appelante à titre de dommages.

La poursuite résulte de blessures que l’appelante a subies le 25 octobre 1964, alors qu’elle voyageait dans un véhicule automobile appartenant à une dénommée Renate Sorra et conduite par cette dernière, celle-ci ayant perdu la maîtrise de sa voiture qui a fait un tonneau dans une courbe sur la route n° 124, dans le district de Parry Sound, Ontario, à environ 2 milles et demi à l’est de l’intersection des routes nos 69 et 124.

La route n° 124 est devenue une route provinciale en 1955; avant cette date, elle était constituée d’une suite de chemins vicinaux. Elle relie les routes nos 11 et 69. Dans le secteur où s’est produit l’accident, des travaux de réfection ont débuté en novembre 1962 pour se terminer en octobre 1963. Ces travaux ont été faits par les propres équipes du ministère de la Voirie. On avait l’intention de redresser la route de façon à

[Page 507]

la rendre presque droite jusqu’à Parry Sound. Entretemps, la partie de la route remise à neuf en 1962 et 1963 se raccordait temporairement à l’ancien chemin; c’est aux environs de ce raccordement que se trouvait la courbe où l’accident est survenu.

Circulant généralement d’est en ouest, Mme Sorra se dirigeait vers la courbe en cause sur la nouvelle route, qui était droite sur une longueur d’à peu près un demi-mille avant la courbe. La nouvelle route se terminait au commencement de la courbe, mais il n’y avait pas de panneau de signalisation à cet effet. Il y avait toutefois deux panneaux de signalisation, l’un portant une flèche recourbée pour indiquer que la route tournait vers la gauche et l’autre, plus loin, un damier jaune et noir. La limite de vitesse sur cette section de la route, d’après la signalisation, était de 50 milles à l’heure, et il n’y avait pas d’indication qu’il fallait réduire la vitesse, ni dans la courbe ni avant la courbe.

Le revêtement de la route dans la courbe était temporaire, puisqu’on avait l’intention de le rendre conforme aux normes provinciales à la reprise des travaux. Au début, la courbe était de 3° sur la gauche; 350 pieds plus loin, elle était de 10°. La transition de 3° à 10° créait ce qu’on appelle une courbe composée. Cette courbe n’était pas relevée de la façon habituelle, c’est-à-dire revêtue d’un pavage plus élevé à l’extérieur qu’à l’intérieur. Cette technique d’usage courant s’appelle le «dévers». En réalité, certaines parties de la route dans la courbe étaient inclinées du centre vers l’extérieur; en langage technique, il y avait un «bombement». La raison pour laquelle on relève la route dans une courbe, en partant du bord intérieur vers l’extérieur est naturellement bien connue et l’on considère que c’est la technique qui s’impose en matière de construction de routes. L’appelante a allégué que le bombement joint à la variation de courbure de 3° à 10° constituait un piège pour les usagers de la route et équivalait à un manque d’entretien.

Mme Sorra a témoigné qu’elle conduisait à une vitesse de 40 à 45 milles à l’heure et avait vu un panneau près de McKellar indiquant que la vitesse maximum permise était de 50 milles à l’heure. Elle a déclaré n’avoir vu aucune autre signalisation de limite de vitesse et rien dans la

[Page 508]

preuve n’indique qu’il y en ait eu d’autre. Elle suivait la voiture que conduisait son fils, O.F. Sorra. D’après le témoignage de ce dernier, quand il s’est engagé dans la courbe à une vitesse de 45 à 50 milles à l’heure, sa mère le suivait et il pouvait voir sa voiture par le rétroviseur. Il a déclaré qu’il y avait du gravier sur la partie ouest de la chaussée, sur une distance de 30 à 50 verges. Comme il franchissait la courbe, les roues arrière de sa voiture ont dérapé sur le gravier vers la droite et jusque sur l’accotement, ce qui a soulevé un nuage de poussière. A ce momentlà, il a perdu de vue la voiture de sa mère. Après avoir passé le virage, il s’est arrêté pour l’attendre. Comme elle n’arrivait pas il a fait demi-tour et a trouvé sa mère, l’appelante et la voiture renversée à 8 ou 10 verges de l’accotement gauche de la route.

Tant l’appelante que l’intimée ont fait appel au témoignage d’ingénieurs et d’experts, l’une pour démontrer que la courbe dans l’état mentionné plus haut constituait un piège ou un danger si l’on s’y engageait à la vitesse indiquée de 50 milles à l’heure environ et l’autre pour démontrer qu’entre 50 et 60 milles à l’heure, la courbe ne présentait pas de danger sérieux. L’accident est survenu vers 5h. 30 du soir, juste au moment où il commençait à faire noir. Mme Sorra a témoigné qu’elle roulait avec ses phares en code et qu’au moment de s’engager dans la courbe elle a pénétré dans un nuage de poussière qu’elle n’a vu qu’à la toute dernière minute. Il s’agissait de la poussière soulevée par la voiture de son fils. Au même moment son automobile s’est trouvée sur le gravier répandu sur la route et elle s’est mise à pivoter, pour ensuite tourner vers la gauche. Mme Sorra a alors perdu la maîtrise de sa voiture. Elle a témoigné qu’elle n’a vu ni le panneau à damier ni celui portant la flèche et elle impute le fait au nuage de poussière sus-mentionné. Elle ne savait pas qu’il y avait une courbe à cet endroit et elle ne s’en est rendu compte qu’à la toute dernière minute.

Après avoir passé en revue toute la preuve soumise, le savant juge de première instance a fait les constatations de fait suivantes, qu’il a énoncées dans ses motifs de jugement:

[TRADUCTION] 1. Mme Sorra conduisait à une vitesse de 40 à 50 milles à l’heure. La vitesse permise, selon

[Page 509]

la signalisation, était de 50 milles à l’heure. Sa voiture était en bon état et elle portait une attention suffisante. Ses phares étaient allumés et en code. M.O.F. Sorra, son fils, se trouvait à environ 100 verges en avant d’elle. Au moment de s’engager dans la courbe, celui-ci a touché le gravier sur la chaussée. L’arrière de sa voiture a dérapé vers la droite jusque sur l’accotement, ce qui a fait lever un nuage de poussière.

2. La poussière a caché le panneau à damier et Mme Sorra ne l’a pas vu.

3. Je crois que Mme Sorra a vu le panneau portant la flèche, mais que l’indication qu’il portait l’a amenée à s’attendre à un virage peu prononcé. Presque à l’instant où elle a rencontré le gravier sur la chaussée, elle s’est rendu compte qu’elle devait faire un virage à gauche beaucoup plus accentué. Le fait de tourner, ajouté à la présence du gravier a fait pivoter la voiture sur la droite de sorte qu’elle en a perdu la maîtrise. Il en est résulté que la demanderesse a été blessée.

Le juge de première instance a également conclu que l’intimée était en faute de la façon suivante:

[TRADUCTION] A; Si l’on tient compte de l’accentuation du virage montré à la pièce n° 9A, il aurait fallu mettre un panneau de limite de vitesse bien à l’est de la courbe.

B. La flèche que l’on peut voir à la pièce n° 9A était trompeuse, du faite qu’elle laissait prévoir une courbe légère plutôt qu’un virage prononcé.

C. Les préposés de la défenderesse étaient au courant qu’il y avait du gravier sur la chaussée à un endroit dangereux, après le nivelage du 23 octobre. Je conclus qu’il y en avait l’équivalent de deux seaux ordinaires, soit un ou deux pieds cubes de gravier, sur la chaussée à l’endroit le plus dangereux, et que le défaut d’examiner la route et d’enlever ce gravier constitue une négligence.

D. La route était mal construite du fait que le bombement rendait difficile pour un conducteur de prendre le virage à la vitesse-limite permise, soit 50 milles à l’heure.

et il en est venu à la conclusion que l’intimée était totalement responsable. Il a estimé les dommages de l’appelante à $22,086.16. Le montant des dommages ne fait l’objet d’aucune contestation dans le présent pourvoi.

On a prétendu qu’en vertu de l’art. 106 de The Highway Traffic Act, S.R.O. 1960, c. 172, il incombait à l’appelante d’établir Que Mme Sorra

[Page 510]

ne s’était rendue coupable d’aucune négligence. L’intimée soulève cette question dans son factum en considérant comme établi:

[TRADUCTION] Que la demanderesse-appelante a le fardeau d’établir que la conductrice de l’automobile, soit la défenderesse Renate Sorra, n’a commis aucune négligence, d’après les dispositions de The Highway Traffic Act, S.R.O. 1960, c. 172, art. 106.

Je ne puis voir en quoi l’art. 106 de The Highway Traffic Act pourrait s’appliquer dans la présente affaire. Le paragraphe (2) de l’art. 106 décrète expressément que l’article ne s’applique pas au cas de collision entre véhicules automobiles, ni à l’action intentée par une personne qui a subi des blessures en voyageant dans une automobile. L’article ne s’applique donc pas à la réclamation en dommages d’un passager pour blessures qu’il a subies comme passager et c’est le cas de l’appelante ici. En conséquence, on ne peut invoquer l’art. 106 pour disposer de la présente affaire. Il incombait à l’appelante d’établir qu’il y avait eu négligence de la part de l’intimée et à l’intimée d’établir qu’il y avait eu négligence de la part de Mme Sorra. En vertu de l’art. 2 de The Negligence Act, S.R.O. 1960, c. 261, s’il y a eu négligence de la part de Mme Sorra, l’appelante ne peut recouvrer la partie de la perte ou des dommages imputables à Mme Sorra.

En Cour d’appel, le Juge d’appel Schroeder, parlant également au nom du Juge d’appel Kelly, semble avoir reconsidéré la cause au fond et n’avoir pas tenu compte des conclusions de fait énoncées par le Juge Donohue d’après les témoignages contradictoires qu’il a entendus et départagés. Le Juge d’appel Schroeder a conclu que l’accident résultait de la seule négligence de Mme Sorra et que l’intimée n’avait pas été négligente. Tout en considérant qu’il y avait eu négligence de la part de Mme Sorra, le Juge d’appel Laskin a estimé qu’il y avait eu aussi négligence de la part de l’intimée et il aurait divisé la responsabilité également entre Mme Sorra et l’intimée.

Je ne vois pas ce qui pouvait justifier la majorité en Cour d’appel de faire abstraction des témoignages sur la manière dont la courbe était construite et entretenue, savoir la variation de la courbure de 3° à 10° et le fait qu’au lieu d’être relevée à l’extérieur elle était bombée au centre.

[Page 511]

ce que certains témoins ont décrit comme une construction fautive et dangereuse. Je ne puis donc accepter la conclusion que l’intimée n’ait fait preuve d’aucune négligence. D’autre part, le témoignage de Mme Sorra elle-même à l’effet qu’elle n’a aucunement vu ni la courbe, ni le panneau à damier prouve qu’elle ne portait pas suffisamment attention au moment de s’engager dans le virage et que le fait de n’avoir pas vu la signalisation était de nature à contribuer à l’accident qui s’est ensuivi et y a de fait contribué.

En conséquence, je suis de l’avis du Juge d’appel Laskin et je partage la responsabilité également entre Mme Sorra et l’intimée. J’adjuge la somme de $11,043.08 à l’appelante à titre de dommages, avec dépens en cette Cour, à la Cour d’appel et en première instance.

Appel accueilli avec dépens, les JUGES MARTLAND et RITCHIE étant dissidents.

Procureurs de la demanderesse, appelante: Thomson, Rogers, Toronto.

Procureurs de la défenderesse, intimée: Price, Barrett, Mills, Finlayson & Hollyer, Toronto.

[1] [1927] A.C. 515 à la p. 520.


Synthèse
Référence neutre : [1970] R.C.S. 502 ?
Date de la décision : 05/02/1970
Sens de l'arrêt : L’appel doit être accueilli, les juges martland et ritchie étant dissidents

Analyses

Négligence - Passagère gratuite blessée - Accident dans une courbe - Route mal construite - Conductrice n’a pas vu panneaux de signalisation - Responsabilité partagée.

La demanderesse a subi des blessures alors qu’elle voyageait dans un véhicule automobile appartenant à S et conduit par cette dernière, celle-ci ayant perdu la maîtrise de sa voiture qui a fait un tonneau dans une courbe. La courbe se trouvait à un endroit où des travaux de réfection étaient faits par les équipes du ministère de la Voirie pour redresser la route. A cet endroit la partie de la route remise à neuf se raccordait temporairement à l’ancien chemin. La nouvelle route se terminait au commencement de la courbe, mais il n’y avait aucune indication qu’il en était ainsi. Il y avait cependant deux panneaux de signalisation, l’un portant une flèche recourbée pour indiquer que la route tournait vers la gauche et l’autre, plus loin, un damier jaune et noir. La limite de vitesse d’après la signalisation était de 50 milles à l’heure, et il n’y avait pas d’indication qu’il fallait réduire la vitesse, ni dans la courbe, ni avant la courbe. La courbe était de 3°; 350 pieds plus loin, elle était de 10°. Cette courbe n’était pas relevée de la façon habituelle, c’est-à-dire revêtue d’un pavage plus élevé à l’extérieur qu’à l’intérieur. En réalité certaines parties dans la courbe étaient inclinées du centre vers l’extérieur.

S conduisait à une vitesse de 40 à 50 milles à l’heure et elle suivait la voiture que conduisait son fils. Ce dernier, quand il s’est engagé dans la courbe a déclaré qu’il y avait du gravier sur une distance de 30 à 50 verges. Les roues arrière de sa voiture

[Page 503]

ont dérapé sur le gravier vers la droite et jusque sur l’accotement, ce qui a soulevé un nuage de poussière. Au moment de s’engager dans la courbe, S a pénétré dans ce nuage de poussière. Au même moment son automobile s’est trouvée sur le gravier répandu sur la route et s’est mise à pivoter, pour ensuite donner vers la gauche. S a alors perdu la maîtrise de sa voiture. Elle a témoigné qu’elle n’a vu ni le panneau à damier ni celui portant la flèche et elle impute le fait au nuage de poussière.

Le juge de première instance a conclu à la responsabilité du ministère de la Voirie et a adjugé $22,086.16 à la demanderesse à titre de dommages. La Cour d’appel a infirmé ce jugement et a rejeté l’action. La demanderesse en appela à cette Cour.

Arrêt: L’appel doit être accueilli, les Juges Martland et Ritchie étant dissidents.

Le Juge en Chef Cartwright et les Juges Hall et Spence: Vu les témoignages sur la manière dont la courbe était construite et entretenue, la Cour d’appel n’était pas justifiée de conclure que l’intimée n’a fait preuve d’aucune négligence. D’autre part, la preuve est à l’effet que S ne portait pas suffisamment attention au moment de s’engager dans le virage et que le fait de n’avoir pas vu la signalisation était de nature à contribuer à l’accident qui s’est ensuivi et y a de fait contribué. La responsabilité doit être partagée également entre S et la défenderesse. En vertu de l’art. 2 de The Negligence Act, S.R.O. 1960, c. 261, la demanderesse ne peut recouvrer la partie de la perte ou des dommages imputables à S, et, en conséquence, la somme de $11,043.08 doit être adjugée à la demanderesse.

Les Juges Martland et Ritchie, dissidents: La demanderesse n’a pas réussi à prouver que l’intimée a commis une négligence quelconque qui ait été la cause de l’accident. La seule obligation de l’intimée, dans les circonstances de la présente affaire, était d’installer une signalisation suffisante. Elle s’est acquittée de cette obligation en posant le panneau de signalisation à environ 100 pieds avant le commencement de la courbe.


Parties
Demandeurs : Vinnal
Défendeurs : Sa Majesté la Reine
Proposition de citation de la décision: Vinnal c. R., [1970] R.C.S. 502 (5 février 1970)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1970-02-05;.1970..r.c.s..502 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award