N° P.22.0486.F - P.22.0694.F
I. M. A., né à Seraing le 29 août 1972, domicilié à Seraing, rue Ferrer, 28,
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Ricardo Bruno et Nabil Khoulalene, avocats au barreau de Charleroi,
II. ASSOCIATION INTERCOMMUNALE DE TRAITEMENT DES DECHETS LIEGEOIS, ayant fait élection de domicile en l’étude de Maître Luc Tilkin, huissier de justice, de résidence à Liège, rue du Coq, 56,
partie civile,
demanderesse en cassation et requérante en inscription de faux,
ayant pour conseil Maître Elisabeth Kiehl, avocat au barreau de Liège-Huy, et représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation,
contre
M. A., mieux qualifié ci-dessus,
prévenu,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 11 mars 2022 par la cour d’appel de Liège, chambre correctionnelle.
Les demandeurs invoquent deux moyens, chacun dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Par une requête remise le 23 mai 2022 au greffe de la Cour et inscrite au greffe sous le numéro de rôle P.22.0694.F, la demanderesse s’est inscrite en faux contre, d’une part, la considération figurant à la page 114 de l’arrêt attaqué, suivant laquelle son conseil a indiqué à l’audience que la société Intradel ne fondait sa réclamation que sur l’escroquerie libellée sous la prévention M.129 et, d’autre part, contre le procès-verbal de l’audience de relevée du 19 janvier 2022 en ce qu’il mentionne que ledit conseil a exprimé cette restriction.
L’avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions au greffe le 21 septembre 2022.
A l’audience du 5 octobre 2022, le président chevalier Jean de Codt a fait rapport et l’avocat général précité a conclu.
Le demandeur a déposé, le 25 octobre 2022, une note en réponse par application de l’article 1107, alinéa 3, du Code judiciaire.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
La procédure en inscription de faux ayant été introduite au soutien du second moyen invoqué à l’appui du pourvoi de la demanderesse, il y a lieu de joindre les causes et de statuer sur celles-ci par un seul et même arrêt.
A. Sur le pourvoi d’A. M. :
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
Le moyen est pris, notamment, de la violation de l’article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Le demandeur fait valoir, pour la première fois devant la Cour, qu’il n’a pas bénéficié d’un procès équitable dès lors que le siège qui l’a jugé était composé de trois magistrats ne présentant pas les garanties d’impartialité objective imposées par la disposition conventionnelle invoquée.
Le grief est entièrement pris de ce que le président Farina et les conseillers Crabeels et Drisket ont rendu, le 21 septembre 2020, un arrêt statuant sur la peine de confiscation encourue, dans la même affaire de corruption, par une autre prévenue, la société de droit français Inova. Selon le demandeur, les deux causes sont liées de sorte que le siège ayant connu de la première ne pouvait plus connaître de la seconde.
Le demandeur précise qu’il n’a pas été à même de récuser les magistrats qui l’ont jugé, parce qu’il n’a découvert qu’après la prononciation de l’arrêt attaqué, que ceux-ci avaient également rendu la décision du 21 septembre 2020.
La circonstance qu’un juge a déjà, dans une procédure distincte, statué sur la peine accessoire encourue par un autre prévenu, ne suffit pas, en elle-même, pour jeter le doute sur son aptitude à connaître, de manière impartiale, de l’action publique exercée à charge d’une personne poursuivie ultérieurement pour les mêmes faits.
Il n’en va autrement que si la première décision contient une appréciation prématurée quant à la culpabilité de la personne visée par la seconde cause.
Sous les préventions F.50 et O.134, l’arrêt attaqué déclare le demandeur coupable de corruption passive et de contravention au Code de la taxe sur la valeur ajoutée.
En ce qui concerne la seconde prévention, le demandeur ne soutient pas que, par leur arrêt du 21 septembre 2020, les juges d’appel aient émis quelque considération que ce soit dont il puisse se déduire qu’ils auraient préjugé de la culpabilité d’A. M. du chef de fraude fiscale.
Quant à la corruption passive, le préjugé dénoncé par le moyen ne ressort ni de l’arrêt du 21 septembre 2020 ni des extraits cités par le demandeur.
D’une part, les magistrats ayant rendu cet arrêt statuaient comme juridiction de renvoi après une cassation partielle intervenue le 11 décembre 2019. En cette qualité, ils n’étaient saisis que du calcul du montant de la confiscation par équivalent ordonnée à charge de la société de droit français Inova. Le rôle imputé au demandeur dans l’attribution du marché relatif à la construction d’un incinérateur de déchets n’était pas compris dans leur saisine.
D’autre part, les énonciations reprises au moyen comme susceptibles de révéler le parti pris des juges d’appel, ne le révèlent pas.
Selon l’arrêt du 21 septembre 2020, la corruption réalisée pour le compte de la société Inova a entraîné la mise en place de moyens spécifiques pour permettre le versement de l’argent aux personnes concernées.
Ni par la considération susdite, ni par l’affirmation que le prix de la corruption a été répercuté sur le maître de l’ouvrage, ni par l’évaluation à 5.965.000 euros de la somme à confisquer, ni par aucun autre motif de l’arrêt du 21 septembre 2020, les juges d’appel n’ont laissé prématurément entendre qu’ils se seraient forgés, avant l’entame de son procès, une conviction quant à l’existence d’un pacte de corruption impliquant A. M..
Cet arrêt n’identifie pas les fonds qu’il confisque à ceux que le demandeur aurait reçus.
Le demandeur n’a pas saisi la cour d’appel d’un grief invoquant un manque d’impartialité dans le chef des magistrats qui l’ont jugé.
De ce qu’il a, selon ses dires, découvert après la prononciation de l’arrêt attaqué, l’existence d’un autre arrêt rendu par le même siège, alors qu’il n’apparaît pas que la première décision ait préjugé de la seconde, il ne saurait se déduire que l’appréhension a posteriori du demandeur quant à l’impartialité du siège puisse passer pour raisonnablement justifiée.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
Le demandeur a déposé des conclusions invoquant le défaut d’impartialité et d’indépendance du magistrat instructeur.
Dans la mesure où il est pris de la violation de l’article 149 de la Constitution, alors qu’il ne dénonce pas un défaut de réponse mais critique la réponse elle-même, le moyen manque en droit.
L’article 56, § 1er, du Code d’instruction criminelle, dont le demandeur accuse également la violation, ne prévoit pas de sanction en ce qui concerne la régularité de la procédure pour les actes du juge d’instruction qui a méconnu cette disposition légale.
En tant qu’il suggère que les juges du fond étaient tenus de conclure à l’irrecevabilité de l’action publique du seul fait que des actes de l’instruction préparatoire sont, d’après lui, entachés de déloyauté, le moyen manque en droit.
Le demandeur fait valoir que, dans l’exposé des faits introduisant les commissions rogatoires, le juge d’instruction a tenu des propos qui méconnaissent la présomption d’innocence et ont pu influencer la réponse attendue des autorités étrangères.
Selon les juges d’appel, la lecture intégrale des pièces incriminées et leur compréhension à la lumière des devoirs invoqués pour justifier les demandes d’entraide, n’accréditent pas les griefs invoqués.
Contestant cette appréciation en fait et requérant, pour son examen, une vérification en fait des éléments de la cause, laquelle échappe au pouvoir de la Cour, le moyen est irrecevable.
Le demandeur a fait valoir, pour le surplus, que
- la déloyauté du magistrat instructeur est attestée par le fait qu’il a agi en dehors de sa saisine ;
- le juge d’instruction a communiqué son dossier au ministère public le 30 septembre 2013, sans attendre la réponse que le demandeur, lors de son audition du 9 juillet 2013, avait été invité à fournir concernant la provenance de l’argent ayant servi à effectuer divers payements en espèces ;
- le juge d’instruction n’a pas estimé utile de faire vérifier la situation financière de Ph. L., alors que celui-ci a bénéficié de sommes provenant de la fausse facturation ;
- la chronologie de l’instruction et des informations publiées à son sujet dans la presse traduit une volonté de bloquer la carrière politique du demandeur.
A ces conclusions, l’arrêt oppose que
- les actes de l’instruction n’ont eu d’autre objet que des faits compris dans la saisine du magistrat instructeur, celle-ci opérant de manière réelle et non personnelle ;
- le demandeur a disposé du droit de consulter le dossier, de solliciter des actes d’instruction complémentaires, notamment au stade du règlement de la procédure, ou encore de postuler le contrôle de l’instruction par application de l’article 235bis du Code d’instruction criminelle ;
- le déroulement de l’instruction a été rythmé par l’immunité parlementaire du demandeur et non par une volonté de lui nuire ;
- il n’est pas démontré que les fuites dans la presse émanent du juge d’instruction ou des enquêteurs.
Par ces considérations gisant en fait, les juges d’appel, qui n’étaient pas tenus de suivre le prévenu dans le détail de son argumentation, ont régulièrement motivé et légalement justifié leur décision suivant laquelle le grief de déloyauté imputé au juge d’instruction ne peut être retenu.
A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la troisième branche :
Le demandeur a déposé à la cour d’appel des conclusions soutenant que les enquêteurs ont mené leurs investigations avec la conviction préconçue de sa culpabilité.
Le parti-pris dont il accuse les enquêteurs est associé à une affiche décorant le bureau de l’un d’entre eux, ainsi qu’à leur comportement, leur manière d’interroger le suspect ou de critiquer ses réponses, la rédaction des procès-verbaux qui contiennent des affirmations inexactes, ou encore la circonstance que des devoirs à décharge n’ont pas été réalisés.
A ces conclusions, l’arrêt oppose en substance que les sentiments ou même les convictions des enquêteurs, tels qu’ils peuvent apparaître de leurs procès-verbaux ou de leur comportement, ne vicient pas nécessairement la procédure, et qu’ils ne l’invalident pas en l’espèce dès lors que les pièces, les faits ou les actes incriminés ne révèlent pas une déloyauté telle qu’il faille la sanctionner par une décision d’irrecevabilité des poursuites.
L’arrêt précise que, même s’ils ont émis une conviction personnelle, laquelle n’a pas à être prise en compte par le juge, les enquêteurs se sont bornés à confronter les explications du suspect avec leurs propres constatations, qu’ils ont mis en exergue les éléments importants à déduire, selon eux, de ces confrontations et qu’ils ont souligné, parmi les justifications avancées par le prévenu, celles qui ne leur paraissaient pas plausibles au regard des éléments recueillis.
Par cette appréciation qui répond à la défense invoquée, l’arrêt ne viole ni l’article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ni l’article 28bis, § 3, alinéa 2, du Code d’instruction criminelle, invoqués par le demandeur.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 6.1 et 6.2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 149 de la Constitution et 24 du Code judiciaire, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense et de la notion juridique de présomption de fait.
Quant à la première branche :
Le demandeur soutient que sa condamnation du chef de corruption passive repose sur l’autorité de la chose jugée que la cour d’appel a prêtée, au mépris de ses droits de défense, à l’arrêt qu’elle a rendu le 1er juillet 2019, cause intéressant d’autres prévenus et à laquelle il n’était pas lui-même partie.
L’autorité de la chose jugée en matière répressive n’est pas régie par le Code judiciaire mais constitue un principe général du droit pénal consacré par différentes dispositions de ce même droit.
Dans la mesure où il invoque une violation de l’article 24 dudit code, le moyen manque en droit.
L’autorité susdite ne s’attache qu’à ce qui a été certainement et nécessairement jugé par le juge pénal, concernant l’existence des faits mis à charge du prévenu, et en prenant en considération les motifs qui sont le soutien nécessaire de la décision répressive.
Cette autorité ne peut pas empêcher le prévenu, à peine de méconnaître ses droits de défense, de contester chacun des éléments constitutifs de l’infraction mise à sa charge et déclarée établie en cause d’autres prévenus jugés antérieurement.
Lorsqu’une première décision, passée en force de chose jugée, a déclaré le pacte de corruption établi et condamné le corrupteur, le juge pénal saisi ensuite de l’action publique exercée ultérieurement à charge de la personne soupçonnée de corruption passive, ne peut pas décider que ce pacte est inexistant. En revanche, la chose jugée à cet égard ne l’empêche nullement de décider que cette personne n’a pas participé à la corruption ou qu’elle y a été partie prenante, ou encore qu’elle ne s’identifie pas à la personne qui en a accepté le prix ou, au contraire, qu’elle s’identifie à celle-ci.
Ce n’est pas parce que l’arrêt attaqué se réfère à la condamnation d’un autre prévenu du chef de corruption active que les juges d’appel se sont interdits d’apprécier, de manière autonome, si le demandeur était, ou non, la personne qu’il a corrompue.
Le demandeur s’est défendu de la prévention de corruption passive en soutenant que les accusations dirigées contre lui par Ph. L. n’étaient pas, en substance, crédibles pour les raisons suivantes :
- le dénonciateur a bénéficié du système de la fausse facturation et est soupçonné d’avoir détourné des fonds ;
- il reste très vague quant aux prétendues rencontres qu’il aurait eues avec A. M., et lorsqu’il donne des précisions, celles-ci sont infirmées par l’enquête ;
- Ph. L. semble avoir perçu des sommes provenant de prestations dont la réalité est douteuse ;
- aucun témoignage n’est venu étayer ses dires.
A cette défense, l’arrêt oppose notamment les éléments différents ou contraires suivants :
- Ph. L. cite le patronyme M. dès 2008, sans qu’il lui ait été suggéré par les enquêteurs ;
- il a été entendu à de multiples reprises et n’a jamais varié, pour l’essentiel, dans ses accusations contre A. M. ; ses dires sont mesurés quant à l’ampleur des sommes en jeu et ne révèlent aucune volonté de charger le suspect ;
- les déclarations de Ph. L. coïncident avec les termes de la dénonciation anonyme et sont corroborées par plusieurs courriels révélateurs des contacts politiques mis en place dans le cadre du marché, et de l’intérêt d’A. M. pour ce dernier ;
- un million d’euros a bien été versé à L-F. D., un ami de la famille M. ;
- l’existence de retraits en liquide et au moyen de cartes discrètes est avérée ;
- une lettre adressée par Ph. L. à K. Z. en décembre 2008 fait apparaître qu’un budget a servi à régler les demandes de trois personnalités ;
- les déplacements d’A. M. à Paris sont établis par ses propres déclarations et par des éléments matériels tels que l’usage d’une carte de crédit ou la réalisation de certains payements ;
- les hôtels qu’A. M. admet connaître à Paris sont ceux que Ph. L. cite comme étant les établissements où le demandeur séjournait ;
- l’enquête a objectivé plusieurs contacts téléphoniques entre les deux hommes ;
- l’analyse d’un fichier informatique de la commune de Seraing indique qu’A. M. a enregistré, de manière codée, l’adresse et le numéro de téléphone de Ph. L. ;
- les explications d’A. M. pour justifier ses nombreux contacts avec Ph. L. ne sont pas crédibles.
Il ne ressort pas de cette motivation et du débat contradictoire dont elle atteste la tenue, que les juges d’appel se soient interdits, au nom de la chose jugée par un arrêt antérieur, d’examiner la contestation élevée par le prévenu et de statuer de manière autonome sur la question de sa participation au pacte de corruption visé par la poursuite.
Dans la mesure où il est pris de la violation des articles 6.1 et 6.2 de la Convention ainsi que du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense, le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
Il ressort de la motivation de l’arrêt attaqué, telle que résumée ci-dessus dans la réponse à la première branche du moyen, que les juges d’appel n’ont pas élevé la dénonciation anonyme au rang de présomption principale de culpabilité à charge du demandeur mais se sont bornés à mentionner, parmi les multiples éléments de nature à corroborer les déclarations de Ph. L., la convergence existant entre celles-ci et les données figurant dans la lettre anonyme.
Reposant sur une lecture incomplète de l’arrêt, le moyen manque en fait.
Quant à la troisième branche :
Le demandeur soutient que la motivation de l’arrêt viole la présomption de son innocence en considérant qu’il s’est bien rendu dans des hôtels parisiens pour y recevoir de l’argent des mains de Ph. L. Le grief est pris de ce que ces rencontres ne sont accréditées par aucun élément objectif et matériel tangible. Il est reproché à la cour d’appel d’avoir renversé la charge de la preuve et méconnu la notion juridique de présomption de fait, en considérant que les rencontres à Paris étaient possibles et que l’absence de trace matérielle pouvait s’expliquer par la nécessaire discrétion susceptible d’entourer le transfert des enveloppes contenant le prix de la corruption.
Dans la mesure où il conteste l’appréciation en fait des éléments de la cause ou qu’il requiert, pour son examen, une vérification de ces éléments, laquelle n’est pas au pouvoir de la Cour, le moyen est irrecevable.
En tant qu’il fait valoir que le demandeur n’a pas pu procéder à un contre-interrogatoire de Ph. L., alors qu’il n’apparaît pas des conclusions du demandeur qu’il ait sollicité la convocation à l’audience de ce témoin à charge, le moyen, nouveau, est irrecevable.
Les considérations résumées ci-dessus, en réponse à la première branche, justifient légalement la déclaration de culpabilité. Contrairement à ce que le moyen suggère, celle-ci ne prend pas appui sur la seule affirmation qu’il est possible qu’A. M. et Ph. L. se soient rencontrés à Paris.
Les motifs que le moyen critique et qui se rapportent à la possibilité des contacts parisiens et à leur nécessaire discrétion, ne traduisent pas le refus des juges d’appel du droit, pour le demandeur, de contester la prévention mais répondent à sa défense en lui indiquant les raisons pour lesquelles ses dénégations n’ébranlent pas les éléments à charge recensés par ailleurs.
Le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
B. Sur le pourvoi de l’association intercommunale de traitement des déchets liégeois :
Sur le second moyen :
Le moyen est pris, notamment, de la méconnaissance du principe général du droit suivant lequel la renonciation à un droit est de stricte interprétation et ne peut se déduire que de faits non susceptibles d’une autre interprétation.
L’arrêt relève que la demanderesse a déposé des conclusions sollicitant, pour le cas où A. M. serait jugé coupable de tout ou partie des préventions, qu’il soit condamné à verser à la plaignante une indemnité provisionnelle d’un euro sur un dommage à évaluer ultérieurement en fonction des faits déclarés établis.
L’arrêt énonce, par ailleurs, qu’entendu en ses répliques à l’audience de relevée du 19 janvier 2022, le conseil de la partie civile a indiqué que celle-ci fondait ses réclamations « uniquement sur la prévention d’escroquerie » numérotée M.129.
Constatant qu’aucun fait délictueux n’a été déclaré établi sous cette dernière prévention, la cour d’appel s’est jugée sans compétence pour connaître de l’action civile exercée par la demanderesse, et elle l’en a déboutée.
Compte tenu des conclusions de la demanderesse, les juges d’appel n’ont pu, sans méconnaître le principe général invoqué, déduire des propos du conseil de la demanderesse l’existence d’une volonté certaine de renoncer à la surséance postulée afin de calculer le dommage réparable sur la base des infractions qui seraient jugées établies.
Le moyen est fondé.
Il n’y a pas lieu d’avoir égard au premier moyen, qui ne saurait entraîner une cassation plus étendue.
C. Sur la requête en inscription de faux :
En raison de la cassation, à prononcer ci-après, de l’arrêt attaqué, la requête de la demanderesse tendant à une inscription de faux est dénuée d’intérêt.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Joint les causes inscrites au rôle général sous les numéros P.22.0486.F et P.22.0694.F ;
Casse l’arrêt attaqué, en tant qu’il statue sur l’action civile exercée par la demanderesse contre A. M. ;
Rejette le pourvoi d’A. M., ainsi que la requête en faux incident pénal ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Condamne le demandeur aux frais de son pourvoi et la demanderesse aux frais de sa requête ;
Réserve les frais du pourvoi de la demanderesse pour qu’il soit statué sur ceux-ci par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d’appel de Liège, chambre correctionnelle, autrement composée.
Lesdits frais taxés à la somme de mille trois cent onze euros cinquante-six centimes dont I) sur le pourvoi d’A. M. : deux cent quarante et un euros vingt centimes dus et II) sur le pourvoi de l’association intercommunale de traitement des déchets liégeois : sept cent quatre-vingt-trois euros soixante-sept centimes réservés et deux cent huit euros trente-deux centimes payés par cette demanderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Eric de Formanoir, Tamara Konsek, François Stévenart Meeûs et Ignacio de la Serna, conseillers, et prononcé en audience publique du deux novembre deux mille vingt-deux par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.