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09/03/2022 | BELGIQUE | N°P.22.0286.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 09 mars 2022, P.22.0286.F


N° P.22.0286.F
B. S.,
inculpé, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Denis Philippe, Brieuc Maingain et Deborah Albelice, avocats au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 25 février 2022 par la cour d’appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Tamara Konsek a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II.

LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Le demandeur, qui avait été extradé d’Italie, a ...

N° P.22.0286.F
B. S.,
inculpé, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Denis Philippe, Brieuc Maingain et Deborah Albelice, avocats au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 25 février 2022 par la cour d’appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Tamara Konsek a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Le demandeur, qui avait été extradé d’Italie, a été incarcéré à la prison de Saint-Gilles sur la base d’un mandat d’arrêt décerné contre lui le 4 février 2022.
Le moyen soutient que l’arrêt attaqué viole la foi due à l’arrêt de la cour d’appel de Venise du 3 décembre 2021 qui a ordonné la remise du demandeur aux autorités belges.
L’arrêt de la cour d’appel de Venise rappelle d’abord qu’à l’audience du 23 octobre 2021, le demandeur a fait valoir le risque d’être soumis à un traitement inhumain ou dégradant en cas de remise aux autorités belges, en raison des conditions de détention dans les prisons belges et que la cause a été remise à l’audience du 16 novembre 2021 afin que le ministère public s’informe auprès des autorités de manière détaillée et individualisée desdites conditions.
Il constate que les parties ont été informées du contenu d’une note du directeur de la prison de Leuze-en-Hainaut, mentionnant un régime de détention semi-communautaire, deux sorties par jour, des possibilités d’activités sportives et un espace individuel de 8,66 mètres carrés en cellule de deux détenus, ainsi que la demande du directeur d’un contact préalable en cas d’extradition en raison de la capacité maximale de la prison qui est sur le point d’être atteinte. Il ajoute que le conseil du demandeur a encore déposé des articles de presse concernant l’urgence actuelle dans les prisons, liées à la pandémie.
Cet arrêt énonce ensuite que les documents récents produits par la défense indiquent, notamment, que la Belgique occupe la deuxième place en Europe en raison de la surpopulation carcérale et qu’il existe des préoccupations relatives à l’augmentation d’infections au Covid-19 dans les prisons. Il précise que, si les documents les plus récents s’appliquent, en général, à toute situation de surpopulation et à l’urgence pandémique, partout en Europe, le document le plus ancien met en évidence un problème structurel qui est cependant, dans le cas concret, démenti par les informations fournies par l’Etat requérant puisque celui-ci propose le placement de la personne dont la remise est demandée dans une prison à régime semi-ouvert, en cellules simple ou double, avec plus de sept mètres carrés d’espace disponible par personne, mobilier exclu. Il ajoute que, s’il est admis que l’autorité judiciaire de l’Etat d’exécution puisse exceptionnellement ne pas se fier aux déclarations reçues de l’autorité de l’Etat d’émission et refuser d’exécuter le mandat d’arrêt européen, sur la base d’éléments précis, en raison du risque que l’intéressé subisse une violation des droits fondamentaux, ce danger n’existe pas, compte tenu des garanties offertes au plus haut niveau par l’Etat requérant.
L’arrêt attaqué énonce d’abord que la cour d’appel de Venise a notamment souligné que le directeur de la prison de Leuze-en-Hainaut avait demandé un contact préalable en cas d’extradition du demandeur en raison du nombre limité des places disponibles, de telle sorte qu’il n’y avait aucune garantie que la détention préventive s’effectue dans cet établissement pénitentiaire, et que, après avoir analysé les informations qui lui ont été soumises, cette juridiction a rejeté les contestations du demandeur relatives aux conditions de détention en Belgique, estimant qu’il n’existe pas d’élément précis révélant le risque, pour le demandeur, de subir une violation des droits fondamentaux, vu les garanties offertes par la Belgique.
Par ces énonciations, qui reviennent à considérer que l’arrêt de la cour d’appel de Venise n’a pas pris en compte les conditions de détention à la prison de Leuze-en-Hainaut pour décider la remise du demandeur aux autorités belges, l’arrêt attaqué viole la foi due à cette décision.
Le moyen est fondé.
Il n’y a pas lieu d’examiner le surplus du mémoire qui ne saurait entraîner une cassation sans renvoi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l’arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt cassé ;
Réserve les frais pour qu’il soit statué sur ceux-ci par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause à la cour d’appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation, autrement composée.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, Sidney Berneman, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du neuf mars deux mille vingt-deux par Françoise Roggen, conseiller faisant fonction de président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.22.0286.F
Date de la décision : 09/03/2022
Type d'affaire : Droit pénal

Analyses

Lorsque la cour d’appel de l’Etat d’exécution a ordonné l’exécution du mandat d’arrêt européen après avoir considéré, d’une part, que l’Etat belge requérant propose le placement de la personne dont la remise est demandée dans une prison à régime semi-ouvert, en cellule simple ou double, avec plus de sept mètres carrés d’espace disponible par personne et, d’autre part, que s’il est admis que l’autorité judiciaire de l’Etat d’exécution puisse exceptionnellement ne pas se fier aux déclarations reçues de l’autorité de l’Etat d’émission et refuser d’exécuter le mandat d’arrêt européen, sur la base d’éléments précis, en raison du risque que l’intéressé subisse une violation des droits fondamentaux, ce danger n’existe pas, compte tenu des garanties offertes au plus haut niveau par l’Etat requérant, l’arrêt de la chambre des mises en accusation qui considère que cet arrêt de la cour d’appel de l’Etat d’exécution n’a pas pris en compte les conditions de détention à la prison de Leuze-en-Hainaut pour décider la remise de l’inculpé aux autorités belges, viole la foi due à cette décision.

PREUVE - MATIERE REPRESSIVE - Preuve littérale - Foi due aux actes


Composition du Tribunal
Président : ROGGEN FRANCOISE
Greffier : GOBERT FABIENNE
Ministère public : VANDERMEERSCH DAMIEN
Assesseurs : BERNEMAN SIDNEY, DE FORMANOIR DE LA CAZERIE ERIC, KONSEK TAMARA, STEVENART MEEUS FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-03-09;p.22.0286.f ?

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