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10/12/2021 | BELGIQUE | N°C.21.0014.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 10 décembre 2021, C.21.0014.F


N° C.21.0014.F
1. F. B., et
2. N. P.,
demandeurs en cassation,
représentés par Maître François T’Kint, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,
contre
BUREAU D’ARCHITECTES H. C., société à responsabilité limitée,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant l

a Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 12 février 2020 par la cour d’appel ...

N° C.21.0014.F
1. F. B., et
2. N. P.,
demandeurs en cassation,
représentés par Maître François T’Kint, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,
contre
BUREAU D’ARCHITECTES H. C., société à responsabilité limitée,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, chaussée de La Hulpe, 177/7, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 12 février 2020 par la cour d’appel de Liège.
Le 23 novembre 2021, l’avocat général Philippe de Koster a déposé des conclusions au greffe.
Le président de section Michel Lemal a fait rapport et l’avocat général Philippe de Koster a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, les demandeurs présentent un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Sur la première fin de non-recevoir opposée au moyen par la défenderesse et déduite de ce que le grief fait à l’arrêt de méconnaître le droit à la preuve des demandeurs en décidant que l’expertise sollicitée est inutile est déduit du grief de contradiction allégué par les demandeurs :
S’agissant de la décision critiquée que la mesure d’expertise sollicitée est inutile, le moyen fait valoir que, pour les motifs qu’il expose, l’arrêt « méconnaît […] le […] droit [à la preuve] des demandeurs et, de surcroît, est entaché de contradiction ».
Le grief fait à l’arrêt de méconnaître le droit à la preuve des demandeurs n’est dès lors pas déduit du grief de contradiction allégué.
Sur la deuxième fin de non-recevoir opposée au moyen par la défenderesse et déduite du défaut d’intérêt :
D’une part, dès lors que l’arrêt refuse d’ordonner la mesure d’expertise sollicitée au motif que cette mesure « n’aurait pour effet que de retarder inutilement l’issue du litige », le motif que cette mesure « retarderait » l’issue du litige n’est pas distinct de celui, critiqué par le moyen, qu’une telle mesure serait inutile.
D’autre part, la cassation du motif qu’une telle mesure retarderait inutilement l’issue du litige, si le moyen était fondé, ôterait tout caractère surabondant au motif, critiqué par le moyen, qu’« en cours d’expertise, il était loisible aux [demandeurs] de solliciter une extension de la mission confiée à l’expert [judiciaire] pour connaître son avis sur la valeur de l’immeuble, ce qu’ils n’ont pas demandé ».
Sur la troisième fin de non-recevoir opposée au moyen par la défenderesse et déduite de ce qu’il critique une appréciation en fait :
Si le juge du fond apprécie en fait, en respectant les droits de la défense, l’utilité d’une mesure d’expertise pour la solution du litige, la Cour vérifie toutefois si ce juge n'a pas déduit des faits qu'il a constatés des conséquences qu'ils ne peuvent justifier.
Les fins de non-recevoir ne peuvent être accueillies.
Sur le fondement du moyen :
Le droit à la preuve est celui de toute partie au procès de produire les éléments de preuve dont elle dispose et de demander au juge que les éléments de preuve dont elle ne dispose pas soient recueillis par l’exécution de mesures d’instruction, que le juge apprécie.
Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que le jugement non entrepris du 29 avril 2015 ordonne une mesure d’expertise ayant pour objet l’examen et la description des interventions et travaux réalisés par les entrepreneurs et l’architecte, la description des éventuels inachèvements, désordres, vices et malfaçons et des travaux propres à y remédier ainsi que de leur coût, que les travaux ont été poursuivis et achevés pendant l’expertise, que le rapport d’expertise a été déposé le 4 mai 2017 et que, dans ses conclusions, l’expert a retenu un dépassement du coût des travaux par rapport au budget fixé par les demandeurs.
Dans leurs conclusions après expertise, les demandeurs ont réclamé la réparation du préjudice engendré par ces dépassements budgétaires et, en réponse aux contestations opposées par la défenderesse à cette demande, ont fait valoir que la valeur vénale de leur immeuble n’avait pas augmenté jusqu’à concurrence desdits dépassements budgétaires et, à titre subsidiaire, ont sollicité un complément d’expertise pour établir cette valeur vénale en produisant, à l’appui de leur demande, un rapport de leur conseil technique.
Le jugement entrepris rejette leur demande d’indemnisation ainsi que la demande de complément d’expertise et, dans leurs conclusions d’appel, les demandeurs réitéraient ces demandes.
Après avoir décidé que la défenderesse, en qualité d’architecte, « a commis une faute en n’évaluant pas correctement le coût de la construction et en n’avertissant pas les maîtres de l’ouvrage, [les demandeurs], de l’incidence financière des modifications sur le budget défini » et que « le dépassement du budget imputable à l’architecte s’élève à 117.158,59 euros hors T.V.A. », l’arrêt considère que « les maîtres de l’ouvrage ne peuvent obtenir de l’architecte une indemnisation correspondant au supplément du coût de la construction lorsqu’ils ont pu in fine, comme en l’espèce, bénéficier des travaux effectués en dépassement du budget » et que « les maîtres de l’ouvrage ne subissent pas un préjudice équivalent au supplément payé puisqu’ils se retrouvent à la tête d’un patrimoine immobilier d’une plus grande valeur ».
L’arrêt, qui, après avoir considéré que « le rapport établi unilatéralement par le [conseil technique des demandeurs] est tardif » car « il a été établi le 11 août 2018, soit plus d’un an après le dépôt du rapport d’expertise », et que, « par ailleurs, rien ne permet d’affirmer qu’actuellement, en 2020, la valeur vénale de l’immeuble serait inférieure au montant total décaissé », n’a pu, sans méconnaître le droit à la preuve des demandeurs, refuser d’ordonner la mesure d’expertise sollicitée aux motifs que cette mesure « n’aurait pour effet que de retarder inutilement l’issue du litige » et qu’« en cours d’expertise, il était loisible aux [demandeurs] de solliciter une extension de la mission confiée à l’expert [judiciaire] pour connaître son avis sur la valeur de l’immeuble, ce qu’ils n’ont pas demandé ».
Le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué en tant qu’il dit non fondée jusqu’à concurrence de la somme de 117.158,59 euros hors T.V.A. la demande des demandeurs de condamner la défenderesse au titre de dépassements budgétaires et qu’il statue sur les dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d’appel de Mons.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Mireille Delange, président, le président de section Michel Lemal, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Ariane Jacquemin et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du dix décembre deux mille vingt et un par le président de section Mireille Delange, en présence de l’avocat général Philippe de Koster, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.21.0014.F
Date de la décision : 10/12/2021
Type d'affaire : Droit civil

Analyses

Le droit à la preuve est celui de toute partie au procès de produire les éléments de preuve dont elle dispose elle-même et de demander au juge que les éléments de preuve dont elle ne dispose pas soient recueillis par l’exécution de certaines mesures d’enquête, que le juge apprécie (1). (1) Voir les concl. du MP.

PREUVE - MATIERE CIVILE - Généralités


Composition du Tribunal
Président : DELANGE MIREILLE
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : DE KOSTER PHILIPPE
Assesseurs : LEMAL MICHEL, ERNOTTE MARIE-CLAIRE, JACQUEMIN ARIANE, MARCHANDISE MAXIME

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-12-10;c.21.0014.f ?

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