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06/10/2021 | BELGIQUE | N°P.21.0382.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 06 octobre 2021, P.21.0382.F


N° P.21.0382.F
Z. F.,
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître François Dessy, avocat au barreau de Liège,
contre
H.M.,
partie civile,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 17 février 2021 par la cour d’appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le 20 août 2021, l’avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions au greffe de l

a Cour.
A l’audience du 6 octobre 2021, le conseiller Tamara Konsek a fait rapport et l’avocat général pré...

N° P.21.0382.F
Z. F.,
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître François Dessy, avocat au barreau de Liège,
contre
H.M.,
partie civile,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 17 février 2021 par la cour d’appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le 20 août 2021, l’avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions au greffe de la Cour.
A l’audience du 6 octobre 2021, le conseiller Tamara Konsek a fait rapport et l’avocat général précité a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l’action publique :
Sur le premier moyen :
Le moyen invoque la violation de la foi due aux actes. Il reproche aux juges d’appel d’avoir fondé leur conviction, notamment, sur un message du demandeur adressé au défendeur, alors que l’existence de ce message, contestée par le premier, n’est objectivée ni par l’audition du second, reprise au procès-verbal numéro NA.43.L3.000623/2017, ni par aucune autre pièce du dossier de la procédure.
Pour retenir, par adoption des motifs du premier juge et par motifs propres, ledit message à titre d’élément de preuve à charge, l’arrêt ne se réfère ni au procès-verbal indiqué par le demandeur, ni à une pièce de la procédure.
Partant, il ne saurait violer la foi due à ces actes.
Le moyen manque en fait.
Sur le deuxième moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 149 de la Constitution. Le demandeur soutient que la motivation de l’arrêt ne lui permet pas de comprendre pour quelle raison les juges d’appel se sont ralliés aux accusations du plaignant plutôt qu’aux contestations du prévenu. Selon le demandeur, la motivation de l’arrêt ne permet pas davantage de connaître les éléments ayant permis à la cour d’appel de retenir sa présence sur les lieux et de déterminer son rôle dans la perpétration des faits.

En matière répressive, lorsque la loi n’établit pas un mode spécial de preuve, le juge du fond apprécie souverainement en fait la valeur probante des éléments sur lesquels il fonde sa conviction et que les parties ont pu librement contredire. Il lui est loisible notamment de refuser crédit à certaines déclarations et d’accorder crédit à d’autres, dès lors qu’il n’en méconnaît pas les termes, et de prendre en considération tous les éléments qui lui sont régulièrement soumis et qui lui paraissent constituer des présomptions suffisantes de culpabilité, alors même qu’il existerait dans la cause des éléments en sens contraire.
Dans la mesure où il critique l’appréciation en fait des juges d’appel, le moyen est irrecevable.
Par ailleurs, le juge satisfait à l’obligation de motivation lorsque sa décision comporte l’énonciation des éléments de fait ou de droit à l’appui desquels une demande, une défense ou une exception sont accueillies ou rejetées. Le juge n’est pas tenu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de donner les motifs de ses motifs.
L’arrêt considère que, si le demandeur conteste les faits qui lui sont reprochés et fait valoir qu’il n’était pas présent au moment des faits, qu’il ne connaît le défendeur que de vue, qu’il ignore le numéro du portable de celui-ci, qu’il n’a pas envoyé de message menaçant et que ni lui ni son frère ne sont montés dans le véhicule du défendeur pour le frapper, ces dénégations ne résistent pas aux éléments recueillis au dossier répressif qui accréditent le récit du défendeur, tels le message adressé à celui-ci juste avant la rencontre, le faux alibi que le frère du demandeur a sollicité de son employeur le jour des faits, les constatations des verbalisateurs et les photographies montrant des blessures à sang coulant.
Ces considérations, qui gisent en fait, permettent au demandeur de comprendre que la cour d’appel a jugé les déclarations du défendeur crédibles dès lors qu’elles sont corroborées par les éléments du dossier répressif, et qu’elle a considéré que le demandeur a agi en qualité de co-auteur pour avoir fixé rendez-vous au défendeur et être monté dans sa voiture pour le frapper.
Ainsi, en l’absence de conclusions du demandeur, l’arrêt motive régulièrement et justifie légalement sa décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le troisième moyen :
Le demandeur reproche aux juges d’appel d’avoir écarté les pièces déposées par lui à l’audience de plaidoirie. Selon le moyen, en assimilant la communication des pièces à la communication des conclusions, seules visées à l’article 152 du Code d’instruction criminelle, la décision d’écartement est sans fondement légal, et elle méconnait le principe général du droit relatif au respect des droits de la défense.
L’arrêt énonce que des pièces peuvent être écartées des débats lorsque leur dépôt constitue un abus de procédure qui lèse fautivement les droits de l’autre partie et portent atteinte au droit à un procès équitable, telles des pièces produites « in extremis », comme en l’espèce.
Ainsi, l’arrêt fonde la décision sur l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui consacre le droit à un procès équitable.
En ce qu’il soutient que la décision n’a pas de fondement juridique, le moyen manque en fait.
Le dépôt d’une pièce destinée à emporter la conviction du juge peut constituer une violation des droits de la défense de la partie adverse à laquelle cette pièce n’a pas été communiquée. L’écartement de la pièce prévient alors la violation et, restituant au procès son caractère équitable un instant menacé, ne constitue pas une méconnaissance des droits de la défense de la partie qui a tenté d’introduire dans le débat des éléments non soumis à la contradiction.
Si le moyen relève que le défaut de communication préalable des pièces aux parties publique et civile ne ressort pas de la procédure, il ne conteste toutefois pas que cette communication n’a pas eu lieu.
L’arrêt constate que lesdites parties se sont opposées au dépôt et considère que celui-ci, effectué à l’audience retenue pour l’examen de la cause au fond, ne respecte pas le calendrier préétabli de commun accord, qu’il prive le conseil de la partie civile de la possibilité de s’en entretenir utilement avec son mandant, et qu’il n’a pas permis au ministère public d’en prendre préalablement connaissance.
Les juges d’appel ont, ainsi, légalement justifié leur décision.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
B. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l’action civile exercée par le défendeur contre le demandeur :
Le demandeur ne fait valoir aucun moyen spécifique.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de deux cent cinquante-huit euros septante et un centimes dont quatre-vingt-sept euros cinquante et un centimes dus et cent septante et un euros vingt centimes payés par ce demandeur.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du six octobre deux mille vingt et un par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.21.0382.F
Date de la décision : 06/10/2021
Type d'affaire : Autres - Droit pénal - Droit international public

Analyses

Le dépôt d’une pièce destinée à emporter la conviction du juge peut constituer une violation des droits de la défense de la partie adverse à laquelle cette pièce n’a pas été communiquée; l’écartement de la pièce prévient alors la violation et, restituant au procès son caractère équitable un instant menacé, ne constitue pas une méconnaissance des droits de la défense de la partie qui a tenté d’introduire dans le débat des éléments non soumis à la contradiction (1). (1) Voir les concl. du MP.

DROITS DE LA DEFENSE - GENERALITES - JUGEMENTS ET ARRETS - MATIERE REPRESSIVE - Action publique - DROITS DE L'HOMME - CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 6 - Article 6, § 1er [notice1]


Références :

[notice1]

Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 - 04-11-1950 - Art. 6, § 1er - 30 / Lien DB Justel 19501104-30


Composition du Tribunal
Président : DE CODT JEAN
Greffier : GOBERT FABIENNE
Ministère public : VANDERMEERSCH DAMIEN
Assesseurs : ROGGEN FRANCOISE, DE FORMANOIR DE LA CAZERIE ERIC, KONSEK TAMARA, STEVENART MEEUS FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-10-06;p.21.0382.f ?

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