N° C.20.0552.F
1. A. T.,
2. J. T.,
demandeurs en cassation,
représentés par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,
contre
AXA BELGIUM, société anonyme, dont le siège est établi à Bruxelles, place du Trône, 1, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0404.483.367,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 5 décembre 2019 par le tribunal de première instance de Liège, statuant en degré d’appel.
Par ordonnance du 16 juin 2021, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le 30 juin 2021, l’avocat général Bénédicte Inghels a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Maxime Marchandise a fait rapport et l’avocat général Bénédicte Inghels a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, les demandeurs présentent un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen, en cette branche, par la défenderesse et déduite de ce qu’il critique une appréciation en fait :
En vertu de l’article 89, § 5, de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances, la prescription de l'action résultant du droit propre que la personne lésée possède contre l'assureur est interrompue dès que l'assureur est informé de la volonté de la personne lésée d'obtenir l'indemnisation de son préjudice et cette interruption cesse au moment où l'assureur fait connaître par écrit, à la personne lésée, sa décision d'indemnisation ou son refus.
Il suit de cette disposition que l’interruption de la prescription suppose que la personne lésée puisse déterminer avec certitude, à la réception de la communication écrite de l’assureur, si ce dernier indemnisera son préjudice.
Le juge du fond apprécie en fait si la communication de l’assureur remplit cette condition.
Il appartient cependant à la Cour de vérifier si, de ses constatations, le juge a légalement déduit que tel est le cas.
La fin de non-recevoir ne peut être accueillie.
Sur le fondement du moyen, en cette branche :
Le jugement attaqué constate que, « par une lettre du 15 juin 2012, la [défenderesse] a adressé au conseil de [la personne lésée, auteur des demandeurs,] une offre de règlement [de 960 euros] qui a été refusée en l’état », le paiement de cette somme ayant été effectué le 11 décembre 2012 au profit de cette personne et que cette offre « mentionnait [que] ‘la présente proposition est faite sans reconnaissance de responsabilité et sans préjudice aux droits et actions de l’assuré. D’autre part, en cas de discussion sur le montant offert, nous retrouvons notre entière liberté d’appréciation’ ».
Il considère que « l’offre de règlement [du 15 juin 2012 constitue] une décision d’indemnisation qui a été concrétisée par le paiement intervenu le 11 décembre 2012 » et que, « même si la [défenderesse] a émis des réserves qu’elle explique être justifiées pour ne pas préjudicier à son assuré, à tout le moins le 11 décembre 2012, [l’auteur des demandeurs] ne pouvait plus ignorer que la [défenderesse] avait décidé de l’indemniser puisque le paiement est intervenu ».
Le jugement attaqué n’a pu légalement déduire de ces énonciations que, à la réception de la lettre du 15 juin 2012, l’auteur des demandeurs a pu déterminer si la défenderesse indemniserait son préjudice, partant, qu’elle a fait cesser l’interruption de la prescription.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse le jugement attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant le tribunal de première instance du Luxembourg, siégeant en degré d’appel.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Mireille Delange, les conseillers Michel Lemal, Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du vingt septembre deux mille vingt et un par le président de section Mireille Delange, en présence de l’avocat général Bénédicte Inghels, avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.