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03/06/2021 | BELGIQUE | N°C.20.0582.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 juin 2021, C.20.0582.F


N° C.20.0582.F
MELCHIOR, société à responsabilité limitée, dont le siège est établi à Sambreville (Auvelais), avenue de la Libération, 35, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0478.652.240,
demanderesse en cassation,
admise au bénéfice de l'assistance judiciaire par ordonnance du premier président du 1er décembre 2020 (n° G.19.0189.F - G.20.0090.F),
représentée par Maître Daniel Garabedian, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Bonté, 5, où il est fait élection de domicile,
contre
1.

M. F.,
défenderesse en cassation,
2. ARGENTA BANK- EN VERZEKERINGSGROEP, société anonym...

N° C.20.0582.F
MELCHIOR, société à responsabilité limitée, dont le siège est établi à Sambreville (Auvelais), avenue de la Libération, 35, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0478.652.240,
demanderesse en cassation,
admise au bénéfice de l'assistance judiciaire par ordonnance du premier président du 1er décembre 2020 (n° G.19.0189.F - G.20.0090.F),
représentée par Maître Daniel Garabedian, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Bonté, 5, où il est fait élection de domicile,
contre
1. M. F.,
défenderesse en cassation,
2. ARGENTA BANK- EN VERZEKERINGSGROEP, société anonyme, dont le siège est établi à Anvers, Belgiëlei, 49-53, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0475.525.276,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 12 juillet 2019 par la cour d'appel de Liège.
Le conseiller Michel Lemal a fait rapport.
L'avocat général Philippe de Koster a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
En vertu de l'article 4, alinéa 1er, de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale, l'exercice de l'action civile qui n'est pas poursuivie devant le même juge simultanément à l'action publique est suspendu tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique, pour autant qu'il existe un risque de contradiction entre les décisions du juge pénal et du juge civil.
Il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que :
- en 2009, la demanderesse, gérante d'une agence de la seconde défenderesse, a engagé en qualité d'employé la personne qui gérait les avoirs financiers de la première défenderesse lorsqu'elle travaillait pour une autre banque et qu'à la suite de cet engagement, la première défenderesse a ouvert auprès de la demanderesse un compte lui permettant de gérer ses actions et d'en percevoir le revenu ;
- le 14 août 2014, la première défenderesse a reçu la visite d'inspecteurs de la seconde défenderesse, qui l'ont informée que certains mouvements sur son compte étaient considérés comme suspects, en raison de retraits pour lesquels il n'y avait aucun formulaire signé par elle ou pour lesquels la signature n'était pas la sienne ;
- le 15 août 2014, la première défenderesse a reçu la visite de l'employé précité et du gérant de la demanderesse, qui lui ont fait signer une déclaration attestant qu'elle a reçu toutes les sommes concernant les opérations en cause ;
- le 18 août 2014, la seconde défenderesse a résilié le contrat la liant à la demanderesse pour manquement grave, ce dont elle a informé la première défenderesse le 20 août 2014 ;
- le 26 septembre 2014, la première défenderesse a écrit à la seconde défenderesse pour dénoncer les circonstances dans lesquelles elle a signé le document du 15 août, pour contester sa signature sur trois documents de retrait et signaler que des retraits ne sont justifiés par aucun document, et, après avoir reçu divers documents de la seconde défenderesse, elle a fait valoir que des retraits d'un montant de 115.445 euros ont été effectués de son compte en fraude de ses droits ;
- par citation signifiée le 28 avril 2015, la première défenderesse a assigné la seconde défenderesse en paiement de la somme de 115.445 euros, que la seconde défenderesse a cité la demanderesse en intervention et garantie et que la première défenderesse a étendu sa demande à la demanderesse ;
- le 21 décembre 2018, la première défenderesse a déposé plainte avec constitution de partie civile contre l'employé de la demanderesse du chef d'abus de confiance, faux et usage de faux.
Après avoir énoncé qu'« il appartient à [la première défenderesse] de démontrer, par application des articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire, le caractère faux des mouvements sur ses comptes », que, si la première défenderesse, qui invoque « la responsabilité contractuelle » de la seconde défenderesse, « démontre la disparition de fonds de ses comptes, il incombe à [celle-ci], sur laquelle pèse une obligation de résultat de restitution des fonds, d'en assumer les conséquences en remboursant sa cliente », que, « si les manquements sont imputables à la [demanderesse] ou à l'un de ses préposés, cette problématique sera examinée dans le cadre de l'action en garantie [de la seconde défenderesse] dirigée contre [la demanderesse], car [la seconde défenderesse] doit répondre des actes de [la demanderesse], son cocontractant », et que « la gestion par [la demanderesse] des comptes de [la première défenderesse] n'a pas été exemplaire », l'arrêt attaqué considère que « les actes [du] préposé de la [demanderesse], consistant à avoir effectué des prélèvements non autorisés sur les comptes de [la première défenderesse], engagent son employeur, le mandataire de [la seconde défenderesse] », que la demanderesse « ne peut [...] échapper à sa responsabilité de commettant de [son préposé], qui a commis les actes préjudiciables à [la première défenderesse] », et que « le retrait du 10 juillet 2013 [...] n'a pu être fait par [la première défenderesse] puisque celle-ci dépose des preuves de son absence de Belgique ce jour-là ».
Il suit de ces motifs que, pour déterminer si la responsabilité de la demanderesse et de la seconde défenderesse est engagée, l'arrêt attaqué porte une appréciation sur les faits dont une juridiction pénale est saisie à la suite de la plainte avec constitution de partie civile de la première défenderesse.
L'arrêt attaqué n'a donc pu légalement décider de ne pas surseoir à statuer sur les actions opposant les parties aux motifs qu'« aucun risque de contradiction n'existe entre un jugement civil, qui dirait la demande de [la première défenderesse] fondée, et le fait que [le préposé de la demanderesse] serait renvoyé de toute poursuite ou au contraire condamné par une juridiction pénale de fond, car la cause de la demande de [la première défenderesse] se fonde sur des relations contractuelles avec la banque et son agent indépendant sur lesquels reposent certaines obligations de restitution de sommes confiées tandis que les préventions qui seraient mises à la charge [du préposé de la demanderesse] visent un comportement particulier de l'intéressé susceptible de qualification pénale », que « les procédures pénale et civile ne sont pas dirigées contre les mêmes parties », qu'« un même dommage peut être réclamé à plusieurs personnes en fonction des liens de droit qui les unissent à la partie préjudiciée » et que « la qualité de préposé [mis en cause] autorise la [première défenderesse] à agir contre son employeur tant par application de l'article 1384 du Code civil que de l'article 18 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail ».
Le moyen est fondé.

Et la cassation de l'arrêt attaqué entraîne l'annulation de l'arrêt du 26 février 2020, qui en est la suite.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué, sauf en tant qu'il reçoit l'appel, et annule l'arrêt du 26 février 2020 ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé et de l'arrêt annulé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel de Mons.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Michel Lemal, Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du trois juin deux mille vingt et un par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Philippe de Koster, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.20.0582.F
Date de la décision : 03/06/2021
Type d'affaire : Autres

Analyses

L'exercice de l'action civile qui n'est pas poursuivie devant le même juge simultanément à l'action publique est suspendu tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique, pour autant qu'il existe un risque de contradiction entre les décisions du juge pénal et du juge civil.

ACTION CIVILE [notice1]

N’a pas pu légalement décider de ne pas surseoir à statuer sur les actions l’arrêt qui, pour déterminer si la responsabilité d’une des parties est engagée, porte une appréciation sur les faits dont une juridiction pénale est saisie à la suite de la plainte avec constitution de partie civile.

ACTION CIVILE [notice2]


Références :

[notice1]

L. du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du code de procédure pénale - 17-04-1878 - Art. 4, al. 1er - 01 / No pub 1878041750

[notice2]

L. du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du code de procédure pénale - 17-04-1878 - Art. 4, al. 1er - 01 / No pub 1878041750


Composition du Tribunal
Président : STORCK CHRISTIAN
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : DE KOSTER PHILIPPE
Assesseurs : JACQUEMIN ARIANE, MARCHANDISE MAXIME, MORIS MARIELLE, LEMAL MICHEL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-06-03;c.20.0582.f ?

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