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26/03/2021 | BELGIQUE | N°D.18.0015.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 26 mars 2021, D.18.0015.N


N° D.18.0015.N
N. D.,
Me Beatrix Vanlerberghe, avocat à la Cour de cassation,
contre
COMMISSION DES PSYCHOLOGUES,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre la décision rendue le 20 septembre 2018 par la chambre néerlandophone du conseil d’appel de la Commission des psychologues.
Le 30 novembre 2020, le premier avocat général Ria Mortier a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport et le premier avocat général Ria Mortier a été ente

ndu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au...

N° D.18.0015.N
N. D.,
Me Beatrix Vanlerberghe, avocat à la Cour de cassation,
contre
COMMISSION DES PSYCHOLOGUES,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre la décision rendue le 20 septembre 2018 par la chambre néerlandophone du conseil d’appel de la Commission des psychologues.
Le 30 novembre 2020, le premier avocat général Ria Mortier a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport et le premier avocat général Ria Mortier a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
1. L’article 5 de l’arrêté royal du 2 avril 2014 fixant les règles de déontologie du psychologue, dans la version applicable avant sa modification par l’article 3 de l’arrêté royal du 4 juin 2018, dispose que, soucieux de l’intimité des personnes et conscient de la nécessité de l’accessibilité de la profession pour tous, le psychologue s’impose une discrétion sur tout ce qu’il apprend dans et par l’exercice de la profession. Ceci comporte au minimum le respect du secret professionnel tel que prévu par la législation pénale. Le secret professionnel est d’ordre public : le psychologue qui a sous sa responsabilité un client ou sujet est, en toutes circonstances, lié par le secret professionnel.
2. En vertu de l’article 458 du Code pénal, les médecins, chirurgiens, officiers de santé, pharmaciens, sages-femmes et toutes autres personnes dépositaires, par état ou par profession, des secrets qu’on leur confie, qui, hors le cas où ils sont appelés à rendre témoignage en justice ou devant une commission d’enquête parlementaire et celui où la loi, le décret ou l’ordonnance les oblige ou les autorise à faire connaître ces secrets, les auront révélés, seront punis d’un emprisonnement d’un an à trois ans et d’une amende de cent euros à mille euros ou d’une de ces peines seulement.
Si l’article 458 du Code pénal interdit au prestataire de soins, sauf cause de justification, de divulguer des faits couverts par le secret professionnel qui sont susceptibles de donner lieu à des poursuites pénales à charge du patient, cette interdiction ne saurait être étendue à des faits dont le patient ou client a été la victime, lorsque le prestataire de soins n’a eu des contacts qu’avec cette victime.
3. Conformément à l’article 458bis de ce code, toute personne qui, par état ou par profession, est dépositaire de secrets et a de ce fait connaissance d’une infraction prévue aux articles 371/1 à 377, 377quater, 379, 380, 383bis, § 1 et 2, 392 à 394, 396 à 405ter, 409, 423, 425, 426 et 433quinquies, qui a été commise sur un mineur ou sur une personne qui est vulnérable en raison de son âge, d’un état de grossesse, de la violence entre partenaires, d’actes de violence perpétrés au nom de la culture, de la coutume, de la religion, de la tradition ou du prétendu « honneur », d’une maladie, d’une infirmité ou d’une déficience physique ou mentale peut, sans préjudice des obligations que lui impose l’article 422bis, en informer le procureur du Roi, soit lorsqu’il existe un danger grave et imminent pour l’intégrité physique ou mentale du mineur ou de la personne vulnérable visée, et qu’elle n’est pas en mesure, seule ou avec l’aide de tiers, de protéger cette intégrité, soit lorsqu’il y a des indices d’un danger sérieux et réel que d’autres mineurs ou personnes vulnérables visées soient victimes des infractions prévues aux articles précités et qu’elle n’est pas en mesure, seule ou avec l’aide de tiers, de protéger cette intégrité.
Il ressort des travaux parlementaires que cet article s’applique exclusivement au cas dans lequel un prestataire de soins a eu des contacts tant avec l’auteur qu’avec la victime d’une infraction au sens de cet article.
En conséquence, l'article 458bis du Code pénal ne s'applique pas au cas dans lequel un prestataire de soins a eu des contacts uniquement avec la victime d’une infraction au sens de cet article.
4. Le conseil d’appel a constaté que la demanderesse, qui traitait tant le patient mineur que la mère de celui-ci, a adressé au procureur du Roi une lettre dans laquelle elle signalait que son patient se serait exprimé à propos d’un viol ou d’un comportement sexuel déviant de la part de son père, et sollicitait une instruction judiciaire pour ce motif.
Cependant, le conseil d’appel a ensuite considéré que la demanderesse est liée par le secret professionnel et que celui-ci s’étend à tout ce qu’elle apprend dans le cadre de cette mission et, dans la même mesure, aux faits qui concernent son patient, que la demanderesse ne pouvait déroger à ce secret professionnel en invoquant la cause de justification prévue à l’article 458bis du Code pénal, dès lors qu’il n’est pas satisfait aux conditions d’application de celui-ci, et a décidé que la demanderesse avait violé son secret professionnel.
Ce faisant, le conseil d’appel n’a pas légalement justifié sa décision.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse la décision attaquée ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de la décision cassée ;
Condamne la défenderesse aux dépens ;
Renvoie la cause devant la chambre néerlandophone du conseil d’appel de la Commission des psychologues, autrement composée.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, le président de section Geert Jocqué, et les conseillers Bart Wylleman, Koenraad Moens et Sven Mosselmans, et prononcé en audience publique du vingt-six mars deux mille vingt et un par le président de section Eric Dirix, en présence du premier avocat général Ria Mortier, avec l’assistance du greffier Vanity Vanden Hende.
Traduction établie sous le contrôle du président de section Michel Lemal et transcrite avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1n - eerste kamer
Numéro d'arrêt : D.18.0015.N
Date de la décision : 26/03/2021
Type d'affaire : Droit pénal

Analyses

L'article 458bis du Code pénal ne s'applique pas au cas dans lequel un prestataire de soins a eu des contacts uniquement avec la victime d'une infraction au sens de cet article (1). (1) Voir les concl. du MP publiées à leur date dans AC.

SECRET PROFESSIONNEL - Prestataire de soins - Patient - Victime d'un infraction visée à l'article 458bis du Code pénal - Signalement au Procureur du Roi - Portée [notice1]


Références :

[notice1]

Code pénal - 08-06-1867 - Art. 458 et 458bis - 01 / No pub 1867060850


Composition du Tribunal
Président : DIRIX ERIC
Greffier : VANDEN HENDE VANITY
Ministère public : MORTIER RIA
Assesseurs : JOCQUE GEERT, WYLLEMAN BART, MOENS KOENRAAD, MOSSELMANS SVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-03-26;d.18.0015.n ?

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