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14/01/2021 | BELGIQUE | N°F.19.0144.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 14 janvier 2021, F.19.0144.F


N° F.19.0144.F
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12, poursuites et diligences du conseiller général de l'inspection spéciale des impôts à Bruxelles, dont les bureaux sont établis à Schaerbeek, boulevard du Roi Albert II, 33 (bte 49),
demandeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile,
contre
1. A. E. G., et
2. J. N.,
défendeurs e

n cassation,
ayant pour conseils Maîtres Frederiek Baudoncq et Alexis Lefebvre, avocats au ...

N° F.19.0144.F
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12, poursuites et diligences du conseiller général de l'inspection spéciale des impôts à Bruxelles, dont les bureaux sont établis à Schaerbeek, boulevard du Roi Albert II, 33 (bte 49),
demandeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile,
contre
1. A. E. G., et
2. J. N.,
défendeurs en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Frederiek Baudoncq et Alexis Lefebvre, avocats au barreau de Louvain, dont le cabinet est établi à Louvain (Heverlee), Philipssite, 5/2, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 21 mai 2019 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le 28 décembre 2020, le procureur général André Henkes a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Sabine Geubel a fait rapport et le procureur général André Henkes a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
En vertu de l'article 63, alinéa 1er, 1°, du Code de la taxe sur la valeur ajoutée, toute personne qui exerce une activité économique est tenue d'accorder, à tout moment et sans avertissement préalable, le libre accès des locaux où elle exerce son activité, aux fins de permettre aux agents habilités à contrôler l'application de la taxe sur la valeur ajoutée et munis de leur commission d'examiner tous les livres et documents qui s'y trouvent.
Aux termes de l'alinéa 2 de cette disposition, sont notamment des locaux où une activité est exercée, les bureaux, fabriques, usines, ateliers, magasins, remises, garages et les terrains servant d'usines, d'ateliers ou de dépôts.
Suivant l'article 8, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice du droit de toute personne au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.
Si le libre accès des locaux où l'assujetti exerce son activité économique constitue une ingérence de l'autorité publique au sens de l'article 8, § 2, précité, cette ingérence est prévue par la loi dans des termes suffisamment clairs et précis quant à son objet, son but et les conditions de son exercice pour rendre prévisible tout contrôle en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur les lieux de l'activité économique d'un assujetti.
L'arrêt constate que le défendeur « était un employé de la s.p.r.l. Le Loup voyant qui exploitait un restaurant » et que, suivant le « procès-verbal [...] établi lors de la visite sur place du 17 septembre 2008, [des] agents de l'inspection spéciale des impôts se sont rendus au siège de la s.p.r.l. Le Loup voyant où ils ont rencontré [une autre personne] leur ayant déclaré agir en qualité d'employé ».
Il relève que ces agents « agissaient dans le cadre du contrôle de la situation fiscale [d'une autre société] » et qu'en allant consulter les documents comptables de cette autre société à l'endroit où un membre de son personnel les avait envoyés, ils se sont trouvés dans les locaux de la s.p.r.l. Le Loup voyant.
En considérant qu'à défaut d'avoir prévu le contrôle de la s.p.r.l. Le Loup voyant à son siège social, les agents concernés « ne pouvaient [...] pas, lors de la visite de ce bureau, consulter les livres et documents comptables de la s.p.r.l. Le Loup voyant sur la base de l'article 63 du Code de la taxe sur la valeur ajoutée », l'arrêt, qui confond prévisibilité de la loi et prévisibilité d'une investigation en particulier, viole les dispositions légales visées au moyen, en cette branche.
Celui-ci est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Françoise Roggen, Michel Lemal, Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, et prononcé en audience publique du quatorze janvier deux mille vingt et un par le président de section Christian Storck, en présence du procureur général André Henkes, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : F.19.0144.F
Date de la décision : 14/01/2021
Type d'affaire : Droit international public

Analyses

Si le libre accès des locaux où l'assujetti exerce son activité économique constitue une ingérence de l'autorité publique au sens de l'article 8, § 2, précité, cette ingérence est prévue par la loi dans des termes suffisamment clairs et précis quant à son objet, son but et les conditions de son exercice pour rendre prévisible tout contrôle en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur les lieux de l'activité économique d'un assujetti.

DROITS DE L'HOMME - CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 8 - Vie privée - Ingérence - Taxe sur la valeur ajoutée - Libre accès aux locaux professionnels - Ingérence prévue par la loi [notice1]

La prévisibilité de l'ingérence prévue par la loi ne se confond pas avec la prévisibilité d'une investigation particulière.

DROITS DE L'HOMME - CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 8 - Vie privée - Ingérence - Taxe sur la valeur ajoutée - Libre accès aux locaux professionnels - Prévisibilité d'une investigation particulière - Prévisibilité de l'ingérence - Notions distinctes


Références :

[notice1]

Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 - 04-11-1950 - Art. 8 - 30 / Lien DB Justel 19501104-30 ;

L. du 3 juillet 1969 créant le Code de la taxe sur la valeur ajoutée - 03-07-1969 - Art. 63, al. 1er, 1° - 32


Composition du Tribunal
Président : STORCK CHRISTIAN
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : HENKES ANDRE
Assesseurs : ROGGEN FRANCOISE, ERNOTTE MARIE-CLAIRE, GEUBEL SABINE, LEMAL MICHEL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-01-14;f.19.0144.f ?

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