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18/06/2020 | BELGIQUE | N°C.19.0155.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 18 juin 2020, C.19.0155.N


N° C.19.0155.N
D. G.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,
contre
1. ZURICH INSURANCE PLC (UK BRANCH), société de droit étranger,
2. SWISS RE INTERNATIONAL SE, société de droit étranger,
3. R. V. H., en qualité de mandataire général pour la Belgique de l’Association d’assureurs connue sous le nom de Lloyd’s,
4. BOODLE & DUNTHORNE Ltd, société de droit étranger,
Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 7 janvier 2019

par la cour d’appel d’Anvers.
Le président de section Eric Dirix a fait rapport.
L’avocat général Els...

N° C.19.0155.N
D. G.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,
contre
1. ZURICH INSURANCE PLC (UK BRANCH), société de droit étranger,
2. SWISS RE INTERNATIONAL SE, société de droit étranger,
3. R. V. H., en qualité de mandataire général pour la Belgique de l’Association d’assureurs connue sous le nom de Lloyd’s,
4. BOODLE & DUNTHORNE Ltd, société de droit étranger,
Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 7 janvier 2019 par la cour d’appel d’Anvers.
Le président de section Eric Dirix a fait rapport.
L’avocat général Els Herregodts a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
1. En vertu de l’article 4, alinéa 1er, du titre préliminaire du Code de procédure pénale, l’action civile peut être poursuivie en même temps et devant les mêmes juges que l’action publique. Elle peut aussi l’être séparément ; dans ce cas, l’exercice en est suspendu tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique, intentée avant ou pendant la poursuite de l’action civile, pour autant qu’il existe un risque de contradiction entre les décisions du juge pénal et du juge civil et sans préjudice des exceptions expressément prévues par la loi.
L’obligation du juge civil de suspendre l’exercice de l’action ne s’applique pas aux actions fondées sur une infraction, mais concerne, en principe, toutes les actions de nature civile qui ont des points communs avec l’action publique et qui sont susceptibles de donner lieu à une contradiction entre les décisions rendues sur l’action civile, d’une part, et sur l’action publique, d’autre part.
2. L’article 2 de l’arrêté royal du 24 mars 1936 sur la détention au greffe et la procédure en restitution des choses saisies en matière répressive prévoit que la restitution se fait à la personne en mains de qui la saisie a été opérée, à moins qu’il n’en soit autrement ordonné par le juge.
Suivant l’article 3 de cet arrêté royal, tout prétendant droit sur la chose saisie peut faire opposition à cette restitution.
L’article 5 du même arrêté royal énonce que si, avant l’expiration de ce délai, il est justifié par un prétendant droit sur la chose saisie qu’il a porté sa prétention devant le juge compétent, il est sursis à la restitution jusqu’à ce qu’il soit intervenu sur cette action une décision exécutoire.
3. L’action du tiers prétendant droit sur la chose saisie en matière répressive est une action civile au sens de l’article 4 du titre préliminaire du Code de procédure pénale.
4. Il ressort des constatations du premier juge, auxquelles les juges d’appel se sont référés, que :
- un diamant en forme de cœur a fait l’objet d’une saisie en matière répressive dans le cadre d’une instruction judiciaire ;
- le demandeur a, conformément à l’arrêté royal du 24 mars 1936 sur la détention au greffe et la procédure en restitution des choses saisies en matière répressive, fait opposition à la remise du diamant aux défendeurs ;
- par citation du 24 avril 2007, le demandeur a porté sa revendication devant le juge ;
- le demandeur a sollicité que, sur la base de l’article 4 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, l’examen du dossier soit suspendu jusqu’à ce qu’une décision définitive ait été rendue sur l’action publique.
5. Les juges d’appel ont considéré que la demande formulée par le demandeur n’est pas une demande en réparation du dommage résultant d’une infraction, ni toute autre action civile fondée sur une infraction, mais qu’il s’agit d’une action en revendication autonome fondée sur le droit de propriété, qui ne relève pas du champ d’application de l’article 4, alinéa 1er, du titre préliminaire du Code de procédure pénale.
6. En statuant de la sorte, ils n’ont pas légalement justifié leur décision.
Dans cette mesure, le moyen est fondé.
7. La règle d’ordre public, consacrée à l’article 4 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, est justifiée par le fait que le jugement pénal a autorité de chose jugée à l’égard de l’action civile intentée séparément, en ce qui concerne les points communs à l’action publique et à l’action civile.
8. La Cour peut vérifier si les juges d’appel ont pu légalement déduire des faits qu’ils ont constatés qu’il n’existe pas de risque de contradiction entre la décision du juge pénal et celle du juge civil.
9. Les juges d’appel ont constaté qu’il n’appartient pas au juge pénal de se prononcer sur l’action en revendication du demandeur.
10. Les juges d’appel ne pouvaient, sur la base de cette seule constatation, décider qu’il n’existe aucun risque de contradiction entre la décision du juge pénal et celle du juge civil.
Dans cette mesure, le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant la cour d’appel de Gand.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, les présidents de section Koen Mestdagh et Geert Jocqué, et les conseillers Bart Wylleman et Sven Mosselmans, et prononcé en audience publique du dix-huit juin deux mille vingt par le président de section Eric Dirix, en présence de l’avocat général Els Herregodts, avec l’assistance du greffier Vanity Vanden Hende.


Synthèse
Formation : Chambre 1n - eerste kamer
Numéro d'arrêt : C.19.0155.N
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Autres

Analyses

L’obligation du juge civil de suspendre l’exercice de l’action ne s’applique pas aux actions fondées sur une infraction, mais concerne, en principe, toutes les actions de nature civile qui ont des points communs avec l’action publique et qui sont susceptibles de donner lieu à une contradiction entre les décisions rendues sur l’action civile, d’une part, et sur l’action publique, d’autre part.

DEMANDE EN JUSTICE - Loi du 17 avril 1878, article 4, alinéa 1er - Juge civil - Obligation de suspendre l’exercice de la demande en justice - Etendue [notice1]

L’action du tiers prétendant droit sur la chose saisie en matière répressive est une action civile au sens de l’article 4 du titre préliminaire du Code de procédure pénale (1). (1) Voir Cass. 17 octobre 1984, Pas. 1985, n° 128.

DEMANDE EN JUSTICE - Chose saisie en matière répressive - Action en revendication formée par un tiers - Nature [notice2]


Références :

[notice1]

L. du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du code de procédure pénale - 17-04-1878 - Art. 4, al. 1er - 01 / No pub 1878041750

[notice2]

A.R. n° 260 du 24 mars 1936 - 260 - 24-03-1936 - Art. 2, 3 et 5 - 30 / No pub 1936032450


Composition du Tribunal
Président : DIRIX ERIC
Greffier : VANDEN HENDE VANITY
Ministère public : HERREGODTS ELS
Assesseurs : MESTDAGH KOEN, JOCQUE GEERT, WYLLEMAN BART, MOSSELMANS SVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-06-18;c.19.0155.n ?

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