N° C.19.0144.N
RÉGION FLAMANDE, représentée par le gouvernement flamand,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation,
contre
VDC AANNEMINGEN, s.p.r.l.,
Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 27 novembre 2018 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le conseiller Bart Wylleman a fait rapport.
Le premier avocat général Ria Mortier a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
[...]
Quant à la seconde branche :
7. Suivant l'article 15 de la loi du 24 décembre 1993 relative aux marchés publics et à certains marchés de travaux, de fourniture et de services, tel qu'il a été modifié par la loi-programme du 22 décembre 2003, lorsque l'autorité compétente décide d'attribuer le marché, celui-ci doit être attribué, en adjudication publique ou restreinte, au soumissionnaire qui a remis l'offre régulière la plus basse, sous peine d'une indemnité forfaitaire fixée à dix pour cent du montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, de cette offre. Cette indemnité forfaitaire est complétée d'une indemnité en vue de la réparation intégrale du dommage, lorsque celui-ci résulte d'un acte de corruption au sens de l'article 2 de la Convention civile sur la corruption, faite à Strasbourg le 4 novembre 1999.
L'indemnité de dix pour cent à laquelle le soumissionnaire régulier le plus bas évincé à tort peut prétendre revêt un caractère forfaitaire.
Il ressort des travaux préparatoires que le législateur entendait ainsi éviter notamment des procédures judiciaires longues, coûteuses et complexes sur l'étendue du dommage.
Par conséquent, le caractère forfaitaire de l'indemnité fait obstacle à ce que le soumissionnaire évincé à tort puisse, sur la base des articles 1382 et 1383 du Code civil, prétendre à une indemnité plus élevée.
8. Les juges d'appel ont considéré que :
- la défenderesse calcule une indemnité de dix pour cent sur le prix du marché pour quatre années consécutives d'exécution ;
- il ne ressort pas des pièces produites que l'attribution du marché confère réellement un droit d'exécution pendant quatre années, de sorte que le pouvoir adjudicateur avait la possibilité de lancer un nouveau marché chaque année ;
- le cahier des charges stipule que le contrat porte sur une année, mais que le pouvoir adjudicateur se réserve le droit de le prolonger d'un an ;
- le demandeur ne nie pas qu'il a été prolongé dans le passé ;
- dans ces circonstances, il paraît établi que, si le marché lui avait été attribué, la défenderesse disposait d'une réelle chance de cinquante pour cent que le contrat soit prolongé pour une durée totale de quatre ans ;
- cela signifie que la défenderesse n'a pas seulement droit à l'indemnité de dix pour cent pour une année, mais également à cinquante pour cent de cette indemnité pour les trois années de prolongation.
9. En accordant à la défenderesse, en tant que soumissionnaire régulier le plus bas évincé à tort, une indemnité supérieure à l'indemnité forfaitaire de dix pour cent, les juges d'appel n'ont pas légalement justifié leur décision.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il se prononce sur l'étendue de l'indemnité et statue sur les dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel d'Anvers.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, et les conseillers Geert Jocqué, Bart Wylleman, Koenraad Moens et Ilse Couwenberg, et prononcé en audience publique du douze mars deux mille vingt par le président de section Eric Dirix, en présence du premier avocat général Ria Mortier, avec l'assistance du greffier Vanity Vanden Hende.