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13/07/2016 | FRANCE | N°388803

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 13 juillet 2016, 388803


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part d'annuler les décisions du ministre de l'intérieur portant retrait de deux et de quatre points du capital de son permis de conduire à la suite d'infractions commises les 23 novembre 2009 et 11 janvier 2011, ainsi que la décision constatant la perte de validité du permis pour solde de points nul, et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de rétablir les points retirés et de lui accorder le bénéfice de quatre points au titre d'un stage de sensibilisation à la sécurité routiè

re accompli les 3 et 4 mars 2014. Par un jugement n° 1401300 du 19 j...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part d'annuler les décisions du ministre de l'intérieur portant retrait de deux et de quatre points du capital de son permis de conduire à la suite d'infractions commises les 23 novembre 2009 et 11 janvier 2011, ainsi que la décision constatant la perte de validité du permis pour solde de points nul, et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de rétablir les points retirés et de lui accorder le bénéfice de quatre points au titre d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière accompli les 3 et 4 mars 2014. Par un jugement n° 1401300 du 19 janvier 2015, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 mars et 18 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Collet, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Occhipinti, avocat de M.A... ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 611-7 de ce code : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué " ;

2. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'une requête est irrecevable et doit être rejetée comme telle lorsque son auteur n'a pas, en dépit d'une invitation à régulariser, produit la décision attaquée ou, en cas d'impossibilité, tout document apportant la preuve des diligences qu'il a accomplies pour en obtenir la communication ; que l'invitation à régulariser doit impartir au requérant un délai pour verser ces éléments au dossier, en précisant qu'à défaut sa requête pourra être rejetée comme irrecevable dès l'expiration de ce délai ; qu'une lettre informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du même code, que la décision est susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office et tiré de l'absence de production de la décision attaquée, sans mentionner la possibilité de régulariser la requête ni fixer un délai à cette fin, ne saurait tenir lieu d'une telle invitation ;

3. Considérant que, pour rejeter la demande dont il était saisi, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a relevé que " la requête de M. A..., à l'appui de laquelle il ne produit ni les décisions qu'il attaque, ni la preuve des diligences accomplies pour en obtenir communication, n'est pas présentée conformément aux prescriptions de l'article R. 412-1 du code de justice administrative et est, dès lors, irrecevable " ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que si, par courrier du 22 décembre 2014, les parties avaient été informées que le tribunal administratif était susceptible de fonder sa décision sur le moyen relevé d'office tiré de l'absence de production par le requérant de la décision attaquée ou de la preuve des diligences accomplies pour en obtenir communication, l'intéressé n'avait pas été invité à régulariser sa demande dans un certain délai ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, M. A...est fondé à soutenir que le jugement attaqué a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A...d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de MA..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 19 janvier 2015 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Montpellier.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par le ministre de l'intérieur au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 388803
Date de la décision : 13/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-04-03-02 PROCÉDURE. INSTRUCTION. CARACTÈRE CONTRADICTOIRE DE LA PROCÉDURE. COMMUNICATION DES MOYENS D'ORDRE PUBLIC. - COMMUNICATION D'UN MOP (ART. R. 611-7 DU CJA) - EFFET - INVITATION À RÉGULARISER AU SENS DE L'ART. R. 612-1 - ABSENCE.

54-04-03-02 Une lettre informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative (CJA), que la décision est susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office et tiré de l'absence de production de la décision attaquée, sans mentionner la possibilité de régulariser la requête ni fixer un délai à cette fin, ne saurait tenir lieu de l'invitation à régulariser prévue par l'article R. 612-1 du même code.


Publications
Proposition de citation : CE, 13 jui. 2016, n° 388803
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lionel Collet
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : OCCHIPINTI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:388803.20160713
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