Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 juillet 1998), que la société Suez-Lyonnaise des eaux, qui détenait 98,8 % du capital et 99,1 % des droits de vote de la société Elyo a déposé un projet d'offre publique de retrait, suivie d'un retrait obligatoire dès la clôture de l'offre publique quel qu'en soit le résultat, au prix de 360 francs par action, concernant les actions existantes de cette société ainsi que celles à provenir de l'exercice éventuel des options de souscription ; que le Conseil des marchés financiers (le CMF) a donné son accord, sans opposition de la Commission des opérations de bourse (la COB), pour que la société Oddo et compagnie soit retenue en tant qu'expert indépendant chargé de porter une appréciation sur l'évaluation des actions de la société Elyo ; que l'expert a estimé que le prix proposé de 360 francs apparaissait équitable ; que M. X..., actionnaire minoritaire, a fait part au CMF de diverses réserves, qu'après avoir été entendu par ses services il lui a adressé une note complémentaire faisant notamment valoir que ne pouvait être écarté, comme base d'évaluation de l'action, le prix de 375 francs retenu pour une précédente transaction ; que le CMF ayant admis cette observation a demandé à la société initiatrice du projet de procéder au réexamen de celui-ci ; que la société Suez-Lyonnaise des eaux s'est alors engagée à acheter au prix de 375 francs toutes les actions Elyo présentées durant la période de l'offre ; que, par une décision du 14 mai 1998, le CMF a déclaré recevable le projet d'offre publique de retrait suivie d'un retrait obligatoire des actions de la société Elyo par la société Suez-Lyonnaise des eaux, au prix unitaire de 375 francs ; que M. X..., invoquant l'irrégularité de la procédure suivie et le caractère arbitraire, selon lui, des méthodes d'évaluation retenues, ainsi que l'absence d'indépendance de l'expert, a saisi la cour d'appel de Paris d'un recours en annulation de cette décision ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur l'issue des procédures pénales en cours et d'avoir rejeté sa demande tendant à voir déclarer irrecevable le projet d'offre publique de retrait suivie d'un retrait obligatoire alors, selon le moyen, que si, conformément à l'article 5-2-6 du règlement du Conseil des bourses de valeurs (CBV), le CMF dispose d'un délai de cinq jours de bourse suivant le jour du dépôt du dossier pour se prononcer sur la recevabilité de l'offre, il doit la rejeter ou surseoir à statuer s'il n'a pas à sa disposition l'ensemble des éléments qui lui sont nécessaires ou si, en présence de procédures pénales instruites en parallèle contre les dirigeants de la société, les conséquences civiles (dommages-intérêts, d'une part, rectifications comptables, d'autre part) d'une condamnation pénale seraient de nature à influer sur la situation de la société ; qu'en l'espèce, il est constant que diverses instances pénales étaient alors instruites des chefs d'abus de biens sociaux, de diffusion d'informations trompeuses et présentation de comptes ne donnant pas une image fidèle des résultats de l'exercice et de la situation financière de l'entreprise ; que les conséquences civiles des condamnations pénales à venir étaient de nature à influer sur l'évaluation de la société, en particulier sur la valeur des actifs et le montant des bénéfices réalisés, critères expressément visés par l'article 33-4 de la loi du 2 juillet 1996 ; qu'en se bornant à relever " que non seulement la réalisation des infractions alléguées est dénuée de certitude, mais encore, l'existence d'un préjudice subi par la société est incertaine et la solvabilité des dirigeants de la société Elyo hypothétique, de sorte que la valorisation de l'action affirmée par M. X... est purement éventuelle " et " qu'en outre, la réalisation du retrait obligatoire ne prive pas M. X... d'exercer une action en responsabilité à l'encontre des dirigeants sociaux, ni ne l'empêche de se constituer partie civile ", la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, qui a décidé exactement que les dispositions de l'article 4 du Code de procédure pénale ne sont pas applicables devant le CMF habilité à prendre des décisions constituant des actes administratifs, ni devant la cour d'appel statuant sur les recours formés contre ces décisions, a retenu, à bon droit, qu'aucune possibilité de surseoir à statuer n'était prévue par l'article 5-2-6 du règlement général applicable au CMF, ni par les dispositions du décret du 3 octobre 1996 ;
Attendu, en second lieu, qu'après avoir énoncé que l'existence d'une procédure pénale en cours n'est susceptible d'affecter la recevabilité d'une offre publique de retrait suivie d'un retrait obligatoire qu'à la condition que cette circonstance soit de nature à affecter un élément de valorisation de la société qui aurait dû être pris en compte pour l'établissement du prix de l'offre, la cour d'appel a souverainement apprécié, par une décision motivée, qu'il n'était pas établi que tel était le cas en l'espèce ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches et sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir dit n'y avoir lieu d'ordonner la production de la décision délibérée par le CMF, du procès-verbal intégral de la séance du 14 mai 1998 et de toutes les données prises en compte dans les diverses évaluations mentionnées dans les documents soumis au CMF pour justifier le prix de l'action Elyo de 360 francs, puis de 375 francs alors, selon les moyens :
1° que la partie qui entend faire état d'une pièce détenue par l'autre partie est fondée à en obtenir la production ; qu'en l'espèce, il avait demandé à la cour d'appel la production de certains documents détenus par le CMF, notamment du procès-verbal intégral de la séance du 14 mai 1998 et de la décision délibérée par celui-ci le 14 mai 1998, c'est-à-dire la production intégrale du texte de la décision et non pas simplement du résumé publié par le CMF ; qu'en refusant de faire droit à cette demande, la cour d'appel l'a privé d'un élément d'information important, au mépris du principe de la contradiction et du droit à la preuve, et a, par là-même, violé les articles 10 du Code civil, 11 et 132 et suivants du nouveau Code de procédure civile ;
2° que toute décision doit être motivée, dès lors que, consacrant au profit d'une personne ou lui refusant l'exercice d'un droit, d'un avantage ou d'une prérogative, elle est soumise à un contrôle organisé de sa légalité ou de son opportunité ; que ce principe général du " droit à la motivation " doit être respecté par le CMF qui doit prendre une décision profitant à une partie privée (actionnaires majoritaires) aux dépens d'une autre partie privée (actionnaires minoritaires) ; qu'en l'espèce, il a demandé à la cour d'appel la production de certains documents détenus par le CMF, notamment du procès-verbal intégral de la séance du 14 mai 1998 et de la décision délibérée par celui-ci le 14 mai 1998, c'est-à-dire la production du texte intégral de la décision, tel qu'il résultait du procès-verbal, et non pas simplement du résumé publié par le CMF ; qu'en refusant de faire droit à cette demande, la cour d'appel l'a privé d'un élément d'information important, au mépris du principe de la contradiction ;
3° que le principe de la contradiction est un principe général du droit qui doit être respecté par le CMF lorsqu'il est saisi d'une demande d'offre publique de retrait suivie d'un retrait obligatoire et à qui il est donc demandé de prendre une décision devant profiter à une partie privée (actionnaires majoritaires) aux dépens d'une autre partie privée (actionnaires minoritaires) ; qu'il s'ensuit que les documents soumis au CMF doivent être mis à la disposition de l'actionnaire minoritaire qui en fait la demande ; que, dans ses écritures, il faisait valoir qu'en l'espèce, le principe de la contradiction et de la loyauté n'avait pas été respecté parce qu'il n'avait pas pu avoir connaissance des documents soumis au CMF et du rapport de l'expert indépendant ; qu'en ne recherchant pas si ces documents avaient été mis à sa disposition, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé que la production des dossiers complets des séances des 6 et 14 mai 1998 a permis à M. X... de connaître les éléments qui ont été examinés par le CMF et qui l'ont amené à prendre la décision déférée, l'arrêt retient que l'extrait du procès-verbal du 14 mai 1998 paraphé du président, indiquant le nom des membres présents à la séance et de ceux n'ayant pas pris part aux délibérations en application des dispositions de l'article 30 de la loi du 2 juillet 1996, permet de vérifier le respect des règles prescrites pour les délibérations du Conseil, et que la décision publiée comporte l'exposé des éléments de fait relatifs à l'opération examinée, le visa des textes qui en constituent le fondement ainsi que l'énoncé des raisons ayant conduit à recevoir l'offre publique en cause, mettant ainsi M. X... en mesure d'en connaître l'entière motivation ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, l'arrêt n'encourt pas les griefs des moyens ; d'où il suit que le deuxième moyen n'est pas fondé en ses deux branches, non plus que le troisième moyen en sa troisième branche ;
Sur le troisième moyen, pris en ses deux premières branches :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir rejeté le recours en annulation qu'il a formé contre la décision du CMF alors, selon le moyen :
1° que le principe de la contradiction est un principe général du droit qui doit être respecté par le CMF lorsqu'il est saisi d'une demande d'offre publique de retrait suivie d'un retrait obligatoire et à qui il est donc demandé de prendre une décision devant profiter à une partie privée (actionnaires majoritaires) aux dépens d'une autre partie privée (actionnaires minoritaires) ; qu'en l'espèce il a demandé par lettre des 17 avril et 4 mai 1998, à être entendu par le CMF, seul organe décisionnel, et à avoir communication des documents soumis au CMF et du rapport de l'expert indépendant ; qu'il n'a pas été entendu par le CMF et n'a pu obtenir communication de ces documents ; qu'en considérant cependant que " si aux termes de l'alinéa 9 de l'article 27 de la loi du 2 juillet 1996, préalablement à ses délibérations, le Conseil peut entendre des personnalités qualifiées, les dispositions de ce texte, qui lui offrent une faculté d'audition pour l'instruction des affaires, ne lui imposent ni d'entendre en séance tous les actionnaires minoritaires qui en feraient la demande ou de répondre à leurs observations éventuelles, ni de leur communiquer les documents relatifs au projet d'offre publique ", la cour d'appel a violé le principe de la contradiction ;
2° que le principe de la contradiction est un principe général du droit qui doit être respecté par le CMF lorsqu'il est saisi d'une demande d'offre publique de retrait suivie d'un retrait obligatoire et à qui il est donc demandé de prendre une décision devant profiter à une partie privée (actionnaires majoritaires) aux dépens d'une autre partie privée (actionnaires minoritaires) ; que s'il a été reçu, le 28 avril 1998, par les services du CMF, qui sont dépourvus de tous pouvoirs décisionnels, il n'a pas été entendu par le CMF lui-même, seul organe décisionnel ; qu'en considérant néanmoins que le principe de la contradiction avait ainsi été respecté, la cour d'appel a violé le principe de la contradiction ;
Mais attendu que l'arrêt constate, d'un côté, que M. X... a bien été entendu par les services du CMF le 28 avril 1998 et a adressé à celui-ci, le 4 mai suivant, une note complémentaire ; qu'il énonce exactement, d'un autre côté, que, si aux termes de l'alinéa 9 de l'article 27 de la loi du 2 juillet 1996, le Conseil peut entendre des personnalités qualifiées préalablement à ses délibérations, les dispositions de ce texte, qui lui offrent une faculté d'audition pour l'instruction des affaires, ne lui imposent pas d'entendre en séance tous les actionnaires minoritaires qui en feraient la demande, ni de leur communiquer les documents relatifs au projet d'offre publique, le respect de leurs droits étant assuré par le recours qui leur est ouvert devant la cour d'appel ; qu'ainsi l'arrêt n'encourt aucun des griefs du moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que M. X... fait le même reproche à l'arrêt alors, selon le moyen, que si le CMF demande le réexamen du projet de l'offre publique lorsqu'il n'estime pas acceptables le prix ou les parités d'échange proposés, il doit être procédé à une nouvelle publication de l'avis de dépôt du projet d'offre faisant connaître les principales dispositions de celle-ci, notamment le prix ou les termes de l'échange proposés ; qu'en l'espèce, lors de sa séance du 6 mai 1998, le CMF a demandé à la société Suez-Lyonnaise des eaux de modifier son projet dont le prix était jugé insuffisant ; que cette société ayant déposé le 13 mai 1998 une offre modifiée, le CMF l'a avalisée lors de sa réunion du 14 mai 1998 ; qu'en considérant cependant " que l'offre ainsi modifiée n'avait pas à faire l'objet de l'avis exigé par l'article 5-2-1 du règlement, ou d'une autre mesure de publicité non prévue par les textes, ne s'agissant pas d'un nouveau projet, mais de simples ajustements apportés à l'offre initiale dans le cadre de son instruction par le Conseil ", la cour d'appel a violé les articles 5-2-7, alinéa 2, et 5-2-1 du règlement ;
Mais attendu qu'aucune disposition des textes visés au moyen n'impose une nouvelle publication de l'avis de dépôt du projet d'offre, lorsque ce projet fait l'objet d'un réexamen à la demande du CMF, dans les conditions prévues par l'article 5-2-7 du règlement général ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... fait encore le même reproche à l'arrêt alors, selon le moyen :
1° que nul ne peut être exproprié, si ce n'est pour cause d'utilité publique ; que le retrait obligatoire réalise une expropriation de l'actionnaire minoritaire, qui ne peut profiter qu'à l'actionnaire majoritaire ; qu'en considérant que " le transfert de propriété, opéré moyennant une indemnisation juste et équitable du retrayant par l'initiateur de l'offre sous le contrôle de l'autorité de marché, soumis à l'appréciation de la cour d'appel dans le cadre du recours ouvert à l'actionnaire minoritaire, satisfait à l'intérêt général du bon fonctionnement de ce marché ", sans préciser en quoi " l'intérêt général du bon fonctionnement du marché " commanderait une expropriation d'utilité privée, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2° qu'à supposer que le retrait obligatoire puisse apparaître comme étant " d'utilité publique ", le CMF doit constater, par une motivation propre à chaque cas d'espèce, que ce retrait obligatoire est conforme à l'intérêt général et que sa mise en oeuvre par les actionnaires majoritaires n'est pas uniquement dictée par leur propre intérêt ; qu'en considérant cependant que " l'obligation faite aux actionnaires minoritaires de céder leurs actions à l'initiateur de l'offre publique de retrait découle de la législation régissant les marchés financiers et qu'ainsi le transfert de propriété (...). Satisfait à l'intérêt général du bon fonctionnement du marché, sans qu'il y ait, au cas par cas, à justifier in concreto de l'utilité publique de l'opération ", la cour d'appel a méconnu la portée de l'article 33 de la loi du 2 juillet 1996 et du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu que l'arrêt relève que l'obligation faite aux actionnaires minoritaires de céder leurs actions à l'initiateur de l'offre publique de retrait découle de la législation régissant les marchés financiers et qu'ainsi le transfert de propriété, opéré moyennant une indemnisation juste et équitable du retrayant par l'initiateur de l'offre sous le contrôle de l'autorité de marché, un recours étant par ailleurs ouvert à l'actionnaire minoritaire, satisfait à l'intérêt général du bon fonctionnement de ce marché, sans qu'il y ait au cas par cas à justifier in concreto de l'utilité publique de l'opération ; que la cour d'appel, ayant ainsi constaté que le transfert de propriété avait lieu dans les conditions ayant été définies par la loi pour satisfaire à des fins d'intérêt général et qui assurent l'indemnisation effective des actionnaires minoritaires, c'est à bon droit et sans méconnaître les textes visés au moyen, qu'elle a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le sixième moyen :
Attendu que M. X... fait encore le même reproche à l'arrêt alors, selon le moyen, qu'afin d'assurer une stricte égalité entre eux, tous les porteurs de titres minoritaires doivent être soumis à la procédure d'offre publique de retrait avec retrait obligatoire ; qu'en l'espèce, l'offre publiée par le retrayant mentionnait que celui-ci s'engageait à l'égard des dirigeants et cadres de la société Elyo, titulaires d'options de souscription d'actions, à racheter, en cas de levée de l'option, leurs titres à un prix indexé sur le cours de bourse des actions de la société Suez-Lyonnaise des eaux ; qu'ainsi, une double rupture d'égalité était créée entre minoritaires, puisque, d'une part, seuls certains porteurs étaient soumis au retrait obligatoire et que, d'autre part, ces mêmes porteurs devaient recevoir un prix calculé sur la valeur intrinsèque de la société Elyo, tandis que les autres porteurs recevraient un prix pouvant être très supérieur, déterminé à partir du cours de bourse des titres d'une autre société ; qu'en considérant, cependant, que " le traitement dont bénéficient les cadres et dirigeants qui n'auraient pas exercé leurs options de souscription à la date de la clôture de l'offre publique de retrait ne peut instaurer une rupture d'égalité entre les actionnaires, puisque ces personnes n'auront pas la qualité d'actionnaires lors du retrait obligatoire ", la cour d'appel a violé l'article 33 de la loi du 2 juillet 1996 ;
Mais attendu qu'ayant justement relevé que les dirigeants et cadres de la société Elyo bénéficiaires d'options de souscription qui ne les auraient pas exercées à la date de la clôture de l'offre publique de retrait, n'auraient pas la qualité d'actionnaires à la date du retrait obligatoire, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le septième moyen :
Attendu que M. X... fait le même reproche à l'arrêt alors, selon le moyen, que l'expert chargé de donner son appréciation sur l'évaluation proposée par un établissement de crédit (qui est choisi librement par l'initiateur de l'offre) doit être indépendant ; que tel n'est pas le cas lorsque cet expert est choisi et rémunéré par l'initiateur de l'offre et qu'il existe par ailleurs une communauté d'intérêts avec l'établissement de crédit évaluateur, résultant de leur appartenance aux mêmes conseils d'administration ; qu'en l'espèce il est constant que la société Oddo et compagnie a été choisie et rémunérée par la société initiatrice de l'offre ; qu'il existait par ailleurs d'étroites relations d'affaires entre l'établissement de crédit évaluateur, choisi par la même société initiatrice et l'expert dit indépendant ; qu'en considérant cependant que cet expert ne pouvait être qu'indépendant puisqu'il avait reçu l'agrément préalable du CMF et n'avait provoqué aucune opposition de la COB, la cour d'appel qui a ainsi abdiqué son pouvoir de contrôle de l'indépendance de l'expert, a violé l'article 5-6-1 du règlement ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas seulement relevé que l'expert avait reçu l'agrément préalable du CMF, sans opposition de COB, mais a également constaté l'absence de tout grief fondé sur des manquements précis, et estimé que la seule allégation de l'appartenance de la banque évaluatrice et de l'expert indépendant à un même conseil d'administration n'était pas de nature à mettre en cause l'indépendance de l'expert, a ainsi exercé son contrôle ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le huitième moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que M. X... fait encore le même reproche à l'arrêt alors, selon le moyen :
1° qu'à l'appui du projet d'offre publique de retrait suivie d'un retrait obligatoire, l'initiateur fournit au CMF une évaluation des titres de la société visée, effectuée selon les méthodes objectives pratiquées en cas de cession d'actif, tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de la valeur boursière, de l'existence de filiales et des perspectives d'activité ; que cette évaluation est assortie de l'appréciation d'un expert indépendant ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a reconnu, à la suite de la démonstration qu'il avait faite, qu'une erreur dans la mise en oeuvre d'une méthode d'évaluation avait été commise par l'établissement chargé de l'estimation et n'avait pas été décelée par l'expert ; que, cependant, la cour d'appel a refusé de tirer les conséquences de ses propres constatations au prétexte que les incidences de l'erreur ainsi constatée sur la valeur des actions n'était pas déterminée ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard des articles 33 de la loi du 1er juillet 1996 et 5-6-1 du règlement ;
2° que la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; que, d'une part, pour rejeter sa demande tendant à la production aux débats de toutes les données prises en compte dans les diverses évaluations mentionnées dans les documents soumis au CMF pour justifier les prix unitaires de l'action Elyo de 350 francs puis 375 francs, la cour d'appel a estimé que " la régularité d'une décision du CMF ne s'apprécie qu'au vu des documents examinés par le Conseil, lors de la séance et de la décision publiée " ; que d'autre part, après avoir constaté qu'il est exact, comme il le soutenait, qu'une erreur de calcul dans l'évaluation de la société, a bien été commise par l'établissement de crédit évaluateur et par l'expert, la cour d'appel a refusé d'en tirer les conséquences au motif qu'il " reconnaît lui-même ne pas pouvoir mesurer l'incidence de cette erreur " ; qu'il apparaît totalement contradictoire de lui reprocher de ne pas indiquer précisément les conséquences de l'erreur, que la cour d'appel reconnaît elle-même, tout en affirmant que la régularité d'une décision du CMF s'apprécie au vu des documents examinés par ce Conseil ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
3° qu'il faisait valoir avec précision dans son mémoire en réplique du 15 juin 1998 que " La banque ne fournit pas les données relatives d'endettement et de fonds propres permettant de calculer l'incidence précise de la baisse du taux risqué sur le coût moyen pondéré du capital, mais la baisse de 1,54 point du taux risqué devrait entraîner une baisse d'au moins un point du coût moyen pondéré du capital retenu par la banque comme taux d'actualisation. La rectification de l'erreur de calcul commise entraîne une augmentation de l'ordre de 100 francs de la valeur théorique de l'action Elyo (qui se rapproche ainsi de celle de 725 francs environ retenue pour les dirigeants et cadres à travers l'indexation sur le coût de Suez-Lyonnaise des eaux) " ; qu'en affirmant néanmoins qu'il reconnaissait " ne pas pouvoir mesurer l'incidence de la baisse du taux risqué sur le coût moyen pondéré du capital retenu comme taux d'actualisation ", la cour d'appel a dénaturé ses écritures et a, par là-même, violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant procédé à l'examen des méthodes d'évaluation mises en oeuvre, dans le cadre d'une approche " multicritères " ayant conduit l'évaluateur à retenir une valeur intrinsèque du groupe comprise entre 330 francs et 341 francs par action Elyo, c'est sans contradiction ni dénaturation et par une appréciation souveraine de la cohérence et de la pertinence des différentes méthodes et des critères employés, qu'elle a contrôlés, que la cour d'appel a décidé, qu'abstraction faite d'une erreur dont l'incidence n'est pas établie, dans le calcul d'un paramètre concernant l'une de ces méthodes qui n'aboutit pas à une valorisation défavorable aux actionnaires minoritaires, les moyens, critiquant l'application de l'ensemble des méthodes d'évaluation employées et revendiquant le droit à l'application exclusive du critère que M. X... estime le seul objectif, et visant à contester le bien-fondé de la décision du CMF, n'étaient pas fondés ; d'où il suit que le moyen, en ses diverses branches, est sans fondement ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.