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17/05/1994 | FRANCE | N°91-20083

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 mai 1994, 91-20083


Attendu, selon l'arrêt déféré (Aix-en-Provence, 8 novembre 1990), que la société Compagnie générale méditerranéenne de combustibles (la Cogemco), assistée du syndic de son règlement judiciaire, a donné en location-gérance à M. X... trois stations-services ; que le locataire-gérant a remis au syndic de la Cogemco la somme de 60 000 francs, à titre de dépôt de garantie ; que M. X... n'ayant pas exécuté ses obligations contractuelles, la Cogemco a obtenu, le 5 octobre 1985, une ordonnance de référé constatant la résiliation du contrat de location-gérance puis, le 3 déce

mbre 1985, un jugement condamnant M. X... à lui payer une somme de 366 075...

Attendu, selon l'arrêt déféré (Aix-en-Provence, 8 novembre 1990), que la société Compagnie générale méditerranéenne de combustibles (la Cogemco), assistée du syndic de son règlement judiciaire, a donné en location-gérance à M. X... trois stations-services ; que le locataire-gérant a remis au syndic de la Cogemco la somme de 60 000 francs, à titre de dépôt de garantie ; que M. X... n'ayant pas exécuté ses obligations contractuelles, la Cogemco a obtenu, le 5 octobre 1985, une ordonnance de référé constatant la résiliation du contrat de location-gérance puis, le 3 décembre 1985, un jugement condamnant M. X... à lui payer une somme de 366 075,58 francs ; que M. X... a été mis en redressement judiciaire le 15 janvier 1986 puis en liquidation judiciaire, M. Y... étant nommé liquidateur ; que la Cogemco, qui était redevenue maître de ses biens après l'obtention d'un concordat, n'ayant pas déclaré en temps utile sa créance contre M. X..., le liquidateur de celui-ci a demandé qu'elle soit condamnée à rembourser le montant du dépôt de garantie ;

Sur le moyen unique pris en sa première branche :

Attendu que le liquidateur reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, que la somme remise à titre de cautionnement par l'une des parties à l'autre a le caractère d'un dépôt de garantie et ne devient pas la propriété du dépositaire ; que celui-ci dispose seulement sur cette sommme d'un droit de rétention tant que le déposant ne s'est pas acquitté de sa dette et que ce mécanisme juridique est exclusif, en l'absence de toute clause contractuelle l'autorisant, d'une compensation entre le montant du dépôt, resté la propriété du déposant, et la créance alléguée par le dépositaire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1291, 1930 et 1932 du Code civil ;

Mais attendu que, dès l'instant de leur remise à la COGEMCO ou à son syndic, les sommes déposées à titre de garantie de l'exécution de ses obligations par le locataire-gérant sont devenues, en raison de leur nature fongible, la propriété de la COGEMCO à l'égard de laquelle M. X... ne disposait plus que d'un droit de créance ; qu'ainsi la cour d'appel a décidé à bon droit que M. X... avait été titulaire d'une créance de 60 000 francs sur la COGEMCO ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la seconde branche :

Attendu que M. Y... reproche encore à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le pourvoi, que la compensation légale requiert des créances réciproques également certaines, liquides et exigibles ; que le seul fait qu'une ordonnance de référé au caractère provisoire ait prononcé la résiliation du contrat de location-gérance, cependant que M. X... était encore in bonis, n'avait pu générer au profit du bailleur une créance liquide et exigible ; qu'il avait fallu un jugement ultérieur de condamnation du 3 décembre 1985 pour satisfaire à la première condition, mais que la seconde n'était pas remplie tant que ce jugement n'était pas passé en force de chose jugée et que la signification en ayant été faite à M. X... le 22 janvier 1986, à une date où il était dessaisi de l'administration de ses biens par l'effet de la procédure collective ouverte à son encontre le 15 janvier 1986, la créance que ce jugement, susceptible de voies de recours, avait consacrée au profit de la Cogemco n'avait pu acquérir un caractère définitif et que ladite société n'ayant pas déclaré sa créance en temps utile, elle s'était trouvée définitivement éteinte en vertu de l'article 53, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985, ce qui rendait désormais sans cause la rétention du dépôt de garantie, si bien qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les articles 1191 et 1351 du Code civil, ensemble les articles 484 et 488 du nouveau Code de procédure civile et 53, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que la compensation de créances réciproques non sujettes à discussion quant à leur exigibilité et à leur montant, s'opère de plein droit, à concurrence de la plus faible, à l'instant où la seconde vient à échéance ; que l'arrêt a relevé que par jugement du 3 décembre 1985, la Cogemco avait obtenu la condamnation de M. X... à lui payer la somme de 366 075,58 francs ; qu'il en résulte que la compensation s'est opérée de plein droit, au plus tard à cette date, entre cette créance de la Cogemco, qui n'était affectée ni d'un terme ni d'une condition, et la créance réciproque de M. X... d'un montant de 60 000 francs, de sorte que la créance de M. X..., d'un montant inférieur à celle de la Cogemco, était éteinte, par voie de compensation, lorsque le redressement judiciaire de M. X... a été ouvert le 15 janvier 1986 ; que par ce motif de pur droit substitué à ceux de la cour d'appel, l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 91-20083
Date de la décision : 17/05/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

COMPENSATION - Compensation légale - Conditions - Caractère certain, liquide et exigible des créances - Redressement ou liquidation judiciaires - Conditions réunies avant l'ouverture de la procédure collective - Condition suffisante .

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Créanciers du débiteur - Compensation - Créance née avant l'ouverture de la procédure collective - Créance certaine, liquide et exigible avant cette ouverture - Condition suffisante

La compensation de créances réciproques non sujettes à discussion quant à leur exigibilité et à leur montant, s'opère de plein droit, à concurrence de la plus faible, à l'instant où la seconde vient à échéance.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 08 novembre 1990

A RAPPROCHER : Chambre commerciale, 1988-11-29, Bulletin 1988, IV, n° 325, p. 218 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 mai. 1994, pourvoi n°91-20083, Bull. civ. 1994 IV N° 178 p. 142
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1994 IV N° 178 p. 142

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Raynaud.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Tricot.
Avocat(s) : Avocats : M. Blondel, la SCP Le Griel.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:91.20083
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