LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf octobre mil neuf cent quatre vingt dix, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DUMONT, les observations de la société civile professionnelle Jean et Didier Le PRADO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ; Statuant sur le pourvoi formé par :
X... Michel,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, en date du 7 décembre 1989, qui, pour infraction aux dispositions de l'article L. 221-5 du Code du travail, l'a condamné à 11 amendes de 2 500 francs chacune ; Vu le mémoire produit ; Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 513 du Code de procédure pénale, d défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce qu'il ne résulte pas des énonciations de l'arrêt attaqué que le prévenu, ou son conseil, aient eu la parole les derniers ; "alors qu'aux termes de l'article 513 du Code de procédure pénale, le prévenu ou son conseil, doivent toujours avoir la parole les derniers, que toute formalité substantielle qui n'a pas été constatée est réputée ne pas avoir été accomplie ; et que la Cour de Cassation n'est pas à même de s'assurer de la régularité de la procédure" ; Attendu que, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, "le prévenu n'a pas comparu mais a été représenté par son conseil, M. le conseiller Braud a fait le rapport oral de l'affaire, M. le substitut du procureur général a été entendu en ses réquisitions, Me Distel, avocat, a déposé des conclusions pour le prévenu" ; Attendu qu'il se déduit de ces mentions que le conseil du prévenu a eu la parole le dernier ; D'où il suit que le moyen ne peut être admis ; Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 30, 36 et 177 du Traité de Rome, L. 221-5 du Code du travail, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir employé des salariés le dimanche, refusant de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision de la Cour de Justice des Communautés Européennes saisie sur question préjudicielle ;
"aux motifs que "il n'est pas démontré dans la présente procédure en quoi l'interdiction pour Conforama d'exercer ses activités le dimanche est susceptible de réduire son chiffre d'affaires, dont une partie très substantielle est composée par des objets mobiliers importés des Etats membres de la Communauté Européenne, et par conséquent de constituer une restriction quantitative à l'importation. Il n'est versé aux débats, en effet, aucun document financier, commercial ou autre de nature à étayer cette affirmation" ; "alors que, d'une part, constitue une mesure d d'effet équivalent à une restriction quantitative prohibée par l'article 30 du Traité, toutes mesures susceptibles d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement le commerce communautaire ; que la cour d'appel devant laquelle le prévenu avait invoqué l'incompatibilité de la règlementation française et des articles 30 et 36 du Traité, ne pouvait, sans même se référer à la jurisprudence communautaire, affirmer que l'interdiction pour la société Conforama d'exercer ses activités le dimanche ne constituait pas une restriction quantitative à l'importation et, refuser de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la Cour de Justice des Communautés Européennes, d'ores et déjà saisie d'une question préjudicielle tendant à savoir si la notion de mesure d'effet équivalent à une restriction quantitative à l'importation pouvait s'appliquer à une disposition de portée générale ayant pour effet d'interdire l'emploi de travailleurs salariés le dimanche dans une branche d'activité telle que la vente au public de mobilier ; "et alors, d'autre part que la cour d'appel, même aurait-elle pu statuer sur l'existence d'une mesure d'effet équivalent, ne pouvait, sans contradiction affirmer que le prévenu ne rapportait pas la preuve d'une restriction quantitative à l'importation ; que la cour d'appel ne contestant pas qu'une partie substantielle du chiffre d'affaires de la société Conforama était composée d'objets importés des Etats membres, l'interdiction pour cette dernière d'exercer ses activités le dimanche entraîne nécessairement une restriction quantitative à l'importation" ; Attendu que le demandeur critique vainement les motifs surabondants par lesquels la cour d'appel a rejeté son argumentation selon laquelle l'interdiction faite à l'entreprise qu'il dirigeait d'exercer des activités le dimanche était incompatible avec les dispositions du Traité de Rome, dès lors que le prévenu n'était pas poursuivi pour avoir ouvert son magasin le dimanche mais seulement pour avoir méconnu les dispositions de l'article L. 221-5 du Code du travail selon lesquelles le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche ; Que le moyen est inopérant et ne peut être accueilli ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ; d REJETTE le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Où étaient présents :
M. Le Gunehec président, M. Dumont conseiller rapporteur, MM. Berthiau, Zambeaux, Dardel, Fontaine, Milleville, Alphand, Culié, Guerder conseillers de la chambre, Mme Guirimand conseiller référendaire, M. Galand avocat général, Mme Ely greffier de chambre ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;