Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour le DEPARTEMENT DES COTES D'ARMOR, représenté par le président du conseil général, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; le DEPARTEMENT DES COTES D'ARMOR demande au Conseil d'Etat, à l'appui de sa requête tendant à l'annulation du décret n° 2010-497 du 17 mai 2010 relatif au fonds national de financement de la protection de l'enfance, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007, notamment son article 27 ;
Vu le code de l'action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean Lessi, Auditeur,
- les observations de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat du DEPARTEMENT DES COTES D'ARMOR,
- les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat du DEPARTEMENT DES COTES D'ARMOR ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
Considérant que la loi du 5 mars 2007 procède à une réforme d'ensemble de la protection de l'enfance ; qu'en particulier, s'agissant des compétences dévolues aux départements, elle redéfinit les missions des services départementaux de protection maternelle et infantile et d'aide sociale à l'enfance, notamment en créant des obligations nouvelles à la charge des départements et en élargissant l'intervention de ces services à l'ensemble des mineurs en situation de danger ; que l'article 27 de cette loi crée un fonds national de financement de la protection de l'enfance au sein de la caisse nationale des allocations familiales, dont l'objet est de compenser les charges résultant pour les départements de la mise en oeuvre de la présente loi selon des critères nationaux et des modalités fixés par décret (...) et dont les ressources doivent être arrêtées en loi de financement de la sécurité sociale et en loi de finances ;
Considérant, d'une part, que l'article 27 de la loi du 5 mars 2007 est applicable au présent litige ;
Considérant, d'autre part, que les dispositions de cet article n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Considérant, enfin, que le moyen tiré de ce que ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au quatrième alinéa de son article 72-2 selon lequel toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi , faute d'avoir suffisamment précisé les conditions et garanties d'une telle compensation, présente un caractère sérieux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;
D E C I D E :
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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution des dispositions de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête du DEPARTEMENT DES COTES D'ARMOR jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DES COTES D'ARMOR, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale et au Premier ministre.