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27/05/2024 | FRANCE | N°23/10214

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Jcp, 27 mai 2024, 23/10214


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 3]


☎ :[XXXXXXXX01]




N° RG 23/10214
N° Portalis DBZS-W-B7H-XWEK

N° de Minute : L 24/00345

JUGEMENT

DU : 27 Mai 2024





S.A. COFIDIS


C/

[R] [V]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 27 Mai 2024






DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)


S.A. COFIDIS, dont le siège social est sis [Adresse 4]


représentée par Me Francis DEFFRENNES, avocat au barreau de LILLE


ET :


DÉFENDEUR(S)

M. [R] [V] demeurant [Adresse 2]


non comparant




COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU 18 Mars 2024

Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, ...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 3]

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 23/10214
N° Portalis DBZS-W-B7H-XWEK

N° de Minute : L 24/00345

JUGEMENT

DU : 27 Mai 2024

S.A. COFIDIS

C/

[R] [V]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 27 Mai 2024

DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)

S.A. COFIDIS, dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée par Me Francis DEFFRENNES, avocat au barreau de LILLE

ET :

DÉFENDEUR(S)

M. [R] [V] demeurant [Adresse 2]

non comparant

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU 18 Mars 2024

Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ

Par mise à disposition au Greffe le 27 Mai 2024, date indiquée à l'issue des débats par Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

RG 10214/2023 – Page - MA
EXPOSE DU LITIGE
Suivant offre préalable de crédit acceptée le 21 février 2019, la société anonyme (ci-après SA) Cofidis a consenti à M. [R] [V] un prêt personnel portant regroupement de crédits d’un montant de 19 600 euros au taux débiteur fixe de 5,78% et remboursable en 95 échéances de 255,48 euros et une dernière de 254,55 euros, hors assurance facultative.

Suivant offre préalable de crédit acceptée le 23 juin 2020, la SA Cofidis a consenti à M. [V] un prêt personnel d’un montant de 8 000 euros au taux débiteur fixe de 5,52% et remboursable en 59 échéances de 152,88 euros et une dernière de 152,77 euros, hors assurance facultative.

Par lettre recommandée du 24 juin 2023 revenue avisée et non réclamée, la SA Cofidis a mis en demeure M. [V] de régler les mensualités impayées pour un montant total de 922,16 euros sous 8 jours au titre du prêt personnel souscrit le 23 juin 2020, sous peine de déchéance du terme du prêt.

Par lettre recommandée du même jour réceptionnée le 22 juillet 2023, elle a mis en demeure M. [V] de régler les mensualités impayées pour un montant total de 1 598,96 euros sous 8 jours au titre du prêt personnel pourtant regroupement de crédits souscrit le 21 février 2019.

Par lettres recommandée du 17 juillet 2023 réceptionnée le 19 juillet 2023, la SA Cofidis a notifié à M. [V] la déchéance du terme du prêt et exigé le remboursement immédiat d’une somme de 5 012,34 euros au titre du solde du prêt personnel souscrit le 23 juin 2020 et de 13 310,19 euros au titre du prêt personnel portant regroupement de crédits souscrit le 21 février 2019.

Par acte d’huissier de justice du 31 octobre 2023, la SA Cofidis a fait assigner M. [V] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille aux fins de voir, au visa des articles L 312-39 du code de la consommation, 1103 et suivants, 1217, 1224 et suivants du code civil, 1231-1 du code civil, 1352 et suivants du code civil, 514 du code de procédure civile et sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
être déclarée recevable en ses demandes ;A titre principal,
condamner M. [V] à lui payer la somme de 5 023,78 euros, augmentée des intérêts au taux de 5,52 % l’an courus et à courir à compter du 17 juillet 2023 et jusqu’au jour du plus complet paiement ;condamner M. [V] à lui payer la somme de 13 342,07 euros, augmentée des intérêts au taux de 5,78% l’an courus et à courir à compter du 17 juillet 2023 et jusqu’au jour du plus complet paiement,A titre subsidiaire,
prononcer la résolution judiciaire du contrat signé le 23 juin 2020condamner M. [V] à lui payer la somme de 8 000 euros au titre des restitutions qu’implique la résolution judiciaire du contrat, déduction faite des règlements intervenus ;condamner M. [V] à lui payer la somme de 19 600 euros au titre des restitutions qu’implique la résolution judiciaire du contrat, déduction faite des règlements intervenus ;condamner M. [V] lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 1231-1 du code civil ;A titre plus subsidiaire encore,
condamner M. [V] à lui payer les échéances impayées jusqu’à la date du jugement ;dire que M. [V] devra reprendre le règlement des échéances à bonne date sous peine de déchéance du terme sans formalité de sa part;En tout état de cause,
condamner M. [V] à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;condamner M. [V] aux entiers frais et dépens.
L’affaire a été appelée à l’audience du 18 mars 2024 à laquelle elle a été retenue.

Le juge a soulevé d’office les moyens d’ordre public notamment tirés de la forclusion et de la déchéance du droit du prêteur aux intérêts contractuels.

La SA Cofidis, représentée par son conseil, s’en est rapportée aux demandes contenues dans son acte introductif d’instance.

Régulièrement assigné selon les modalités prévues par l’article 659 du code de procédure civile, M.[V] n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter.

A l’issue de l’audience, la décision a été mise en délibéré au 27 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

En application de l’article 472 du code de procédure civile, l’absence de M. [V] à l’audience ne fait pas obstacle à ce qu’une décision soit rendue sur le fond du litige.

Sur la demande en paiement

Sur la recevabilité de la demande en paiement

Aux termes de l’article R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut soulever d’office toutes les dispositions du code de la consommation dans les litiges nés de son application.

Aux termes de l'article R.312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées à la suite de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance, à peine de forclusion.

Cet événement est notamment caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé.

En l'espèce, en ce qui concerne le prêt personnel d’un montant de 8 000 euros souscrit le 23 juin 2020, il ressort de l’historique de compte produit par le prêteur que la forclusion biennale n’était pas acquise à la date à laquelle la SA Cofidis a fait délivrer son assignation à M. [V].

Il en va de même s’agissant du prêt personnel portant regroupement de crédits souscrit le 21 février 2019.

La SA Cofidis est donc recevable à agir en paiement s’agissant des deux prêts.

Sur la déchéance du terme

Aux termes de l'article L.312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés.

Aux termes de l'article L.312-36 alinéa 1er du même code, dès le premier manquement de l'emprunteur à son obligation de rembourser, le prêteur informe celui-ci, sur support papier ou tout autre support durable des risques qu'il encourt au titre des articles L312-39 et L312-40 ainsi que, le cas échéant, au titre de l'article L.141-3 du code des assurances.

En l’espèce, la SA Cofidis justifie avoir, par lettre recommandée du 24 juin 2023 revenue avisée et non réclamée, mis en demeure M. [V] de régler les mensualités impayées pour un montant total de 922,16 euros sous 8 jours au titre du prêt personnel souscrit le 23 juin 2020, sous peine de déchéance du terme du prêt.

Elle justifie également avoir, par lettre recommandée du même jour réceptionnée le 22 juillet 2023, mis en demeure M. [V] de régler les mensualités impayées pour un montant total de 1 598,96 euros sous 8 jours au titre du prêt personnel pourtant regroupement de crédits souscrit le 21 février 2019.

Il ressort des historiques de compte produits que la situation des prêts n’a pas été régularisée dans le délai imparti.

Il s’en déduit que la déchéance du terme est valablement intervenue s’agissant des deux prêts personnels souscrits par M. [V].

En conséquence, la SA Cofidis est recevable à agir en paiement du solde de ces prêts.

Sur la déchéance du droit aux intérêts du prêteur

Aux termes de l'article R.632-1 du code de la consommation, le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application.

Aux termes de l'article L 312-16 du même code, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur.

Suivant l'article L.341-2 du même code, le prêteur qui n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L.312-14 et L.312-16 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

En l'espèce, en ce qui concerne le prêt personnel de 8 000 euros souscrit le 23 juin 2020, la SA Cofidis ne démontre avoir exigé aucun justificatif des ressources et charges de M. [V].

Elle a donc insuffisamment vérifié sa solvabilité.

En ce qui concerne le prêt personnel portant regroupement de crédits souscrit le 21 février 2019, aux termes de l’article L 312-12 du code de la consommation, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit fournit à l'emprunteur, sous forme d'une fiche d'informations, sur support papier ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

Il est constant qu’en application de cet article, la signature par l'emprunteur de l'offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur, qui doit rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations, lui a remis la fiche précontractuelle d’information normalisée européenne, constitue seulement un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

Un document émanant de la seule banque ne peut utilement corroborer la clause type de l'offre de prêt.

En l’espèce, la fiche produite par la SA Cofidis ne comporte ni paraphe ni signature de M. [V].

La SA Cofidis échoue donc à rapporter la preuve de l’avoir remise à M. [V].

La SA Cofidis sera donc totalement déchue de son droit aux intérêts contractuels en ce qui concerne les deux prêts personnels.

Sur les sommes dues

En application des dispositions de l'article L.341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du prêteur de son droit aux intérêts contractuels, le débiteur n'est tenu qu'au remboursement du seul capital restant dû, après déduction de toutes les sommes réglées à quelque titre que ce soit.

Cette limitation légale de la créance du prêteur exclut, par ailleurs, qu'il puisse prétendre au paiement de l'indemnité prévue par l'article L.312-39 du code de la consommation.

Par ailleurs, ces dispositions doivent être interprétées conformément à la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs, dont les dispositions nationales ne sont que la transposition, et qui prévoit en son article 23 que les sanctions définies par les États membres en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la présente directive doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

Au regard de cette dernière exigence, la déchéance du droit aux intérêts prononcée à l'encontre du prêteur doit donc également comprendre les intérêts au taux légal.

Il convient, en conséquence, d'écarter toute application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L 313-3 du code monétaire et financier et de dire que les sommes dues au prêteur ne produiront aucun intérêt, même au taux légal.

Concernant le prêt personnel souscrit le 23 juin 2020, la créance de la SA Cofidis s'établit donc comme suit au 3 août 2023, date du décompte de créance :

capital emprunté : 8 000 euros

sous déduction des versements depuis l'origine : -5 096,48 euros

soit un restant dû de : = 2 903,52 euros.

M. [V] sera donc condamné à payer à la SA Cofidis la somme de 2 903,52 euros arrêtée au 3 août 2023 au titre du solde du prêt personnel souscrit le 23 juin 2020, sans intérêt.

Concernant le prêt personnel portant regroupement de crédits souscrit le 21 février 2019, la créance de la SA Cofidis s’établit comme suit au 3 août 2023, date du décompte de créance :

capital emprunté : 19 600 euros

sous déduction des versements depuis l'origine : -6 254,75 euros

soit un restant dû de : = 13 345,25 euros.

M. [V] sera donc condamné à payer à la SA Cofidis la somme de 13 345,25 euros arrêtée au 3 août 2023 au titre du solde du prêt personnel souscrit le 21 février 2019, sans intérêt.

Sur les demandes accessoires

En application de l'article 696 du code de procédure civile, M. [V] qui succombe à l'instance sera condamné aux dépens.

L'équité comme la situation économique respective des parties commande de rejeter la demande présentée par la SA Cofidis au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Enfin, en application de l'article 514 du code de procédure civile, la présente décision est assortie de l'exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant à l'issue de débats tenus en audience publique, par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort :

DECLARE la société anonyme Cofidis recevable à agir en paiement ;

CONDAMNE M. [R] [V] à payer à la société anonyme Cofidis la somme de 2 903,52 euros arrêtée au 3 août 2023 au titre du solde du prêt personnel souscrit le 23 juin 2020 ;

CONDAMNE M. [R] [V] à payer à la société anonyme Cofidis la somme de 13 345,25 euros arrêtée au 3 août 2023 au titre du solde du prêt personnel portant regroupement de crédits souscrit le 21 février 2019 ;

DIT que ces sommes ne produiront aucun intérêt ;

REJETTE la demande présentée par la société anonyme Cofidis au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [R] [V] aux dépens de l'instance ;

RAPPELLE que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire de droit.

Ainsi jugé et prononcé à Lille, le 27 mai 2024, par mise à disposition au greffe.

LA GREFFIERELA JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Jcp
Numéro d'arrêt : 23/10214
Date de la décision : 27/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-27;23.10214 ?
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