COUR SUPRÊME DU CANADA
Référence : London (Cité) c. RSJ Holdings Inc., [2007] 2 R.C.S. 588, 2007 CSC 29
Date : 20070621
Dossier : 31300
Entre :
Cité de London
Appelante
et
RSJ Holdings Inc.
Intimée
Traduction française officielle
Coram : Les juges Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron et Rothstein
Motifs de jugement :
(par. 1 à 43)
La juge Charron (avec l’accord des juges Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella et Rothstein)
______________________________
london (cité) c. rsj holdings
Cité de London Appelante
c.
RSJ Holdings Inc. Intimée
Répertorié : London (Cité) c. RSJ Holdings Inc.
Référence neutre : 2007 CSC 29.
No du greffe : 31300.
2006 : 15 novembre; 2007 : 21 juin.
Présents : Les juges Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron et Rothstein.
en appel de la cour d’appel de l’ontario
POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario (les juges Labrosse, Rosenberg et Gillese) (2005), 205 O.A.C. 150, 16 M.P.L.R. (4th) 1, [2005] O.J. No. 5037 (QL), qui a infirmé une décision de la juge Rady (2005), 10 M.P.L.R. (4th) 88, [2005] O.J. no 252 (QL), rejetant une requête en annulation d’un règlement. Pourvoi rejeté.
George H. Rust‑D’Eye, Barnet H. Kussner et Kim Mullin, pour l’appelante.
Alan R. Patton et Analee J. M. Fernandez, pour l’intimée.
Version française du jugement de la Cour rendu par
La juge Charron —
1. Aperçu des faits
1 Le 19 janvier 2004, la cité de London (« la Cité ») a adopté un règlement municipal d’interdiction provisoire suspendant tout aménagement foncier pour une période d’un an dans le corridor de la rue Richmond, entre les rues Huron et Grosvenor. RSJ Holdings Inc (« RSJ »), l’un des propriétaires fonciers visés, a demandé l’annulation du règlement pour cause d’illégalité parce que la Cité avait examiné, puis décidé d’adopter le règlement lors de deux réunions tenues à huis clos en contravention de l’obligation que le par. 239(1) de la Loi de 2001 sur les municipalités, L.O. 2001, ch. 25 lui impose d’ouvrir les réunions du conseil et de ses comités au public.
2 La requête de RSJ a été rejetée en première instance au motif que ces réunions étaient visées par l’exception prévue à l’al. 239(2)e), qui autorise une réunion à huis clos lorsqu’un litige éventuel doit y être étudié. Vu cette conclusion, la juge des requêtes a jugé inutile d’examiner l’autre prétention de la Cité selon laquelle l’al. 239(2)f) permettait également la tenue de réunions à huis clos parce que la question à l’étude était protégée par le secret professionnel de l’avocat. En réponse à l’appel interjeté par RSJ devant la Cour d’appel de l’Ontario, la Cité a revendiqué à nouveau le privilège relatif au litige et le secret professionnel de l’avocat. La Cité a en outre soutenu qu’une autre loi autorisait la tenue des réunions à huis clos, de sorte que l’exception prévue à l’al. 239(2)g) s’appliquait. La Cour d’appel de l’Ontario a rejeté les arguments de la Cité, infirmé la décision de la juge des requêtes et annulé le règlement.
3 La Cité se pourvoit contre cette décision en faisant valoir qu’une autre loi autorisait la tenue des réunions à huis clos. Étant donné que Loi sur l’aménagement du territoire, L.R.O. 1990, ch. P. 13, permet à une municipalité de prendre un règlement d’interdiction provisoire sans donner d’avis, ni tenir d’audience publique, la Cité prétend que l’al. 239(2)g) l’autorise à tenir une réunion à huis clos pour étudier un règlement municipal d’interdiction provisoire. Subsidiairement, la Cité soutient que la Cour d’appel a commis une erreur en annulant le règlement en l’absence de préjudice causé à RSJ.
4 Je suis d’avis de rejeter le pourvoi. Selon moi, la Cour d’appel a eu raison de conclure que les dispositions de la Loi sur l’aménagement du territoire permettant l’adoption d’un règlement municipal d’interdiction provisoire n’écartent aucunement l’obligation légale de tenir des réunions ouvertes au public établie par l’art. 239 de la Loi de 2001 sur les municipalités. Je conclus également que la Cour d’appel a bien exercé son pouvoir discrétionnaire en annulant le règlement. L’obligation de tenir une réunion ouverte au public exprime le choix clair du législateur d’accroître la responsabilisation des gouvernements locaux et la transparence de leur processus décisionnel. Je rejette l’argument selon lequel RSJ n’a subi aucun préjudice. Au contraire, la rigueur d’un règlement municipal d’interdiction provisoire et les effets draconiens qu’il peut avoir sur les propriétaires fonciers visés commandent encore plus la transparence et la responsabilisation lors de son adoption. De plus, le manquement par la Cité à son obligation légale de tenir des réunions ouvertes au public n’a pas été commis par inadvertance et n’est pas anodin. L’annulation du règlement constituait une réparation tout indiquée dans les circonstances.
2. Les faits et l’historique procédural
5 En septembre 2003, un groupe de résidents de London, en Ontario, qui habitaient dans le secteur de la rue Richmond, se sont plaints à la Cité de l’augmentation du nombre de logements d’étudiants dans leur quartier résidentiel. En réponse à cette plainte, le comité municipal d’aménagement du territoire a adopté une résolution, le 29 septembre 2003, pour demander à l’avocat de la Cité d’étudier la question.
6 En novembre 2003, RSJ a acheté une propriété résidentielle située sur la rue Richmond, dans l’intention de démolir le bâtiment existant et de construire quatre
unités d’habitation distinctes pour le remplacer. À cette fin, RSJ a présenté à la Cité, entre novembre 2003 et janvier 2004, un plan d’implantation pour approbation, une demande de permis de démolir et une demande de permis de construire. La Cité n’a pas répondu aux demandes de RSJ.
7 Pour faire suite à la demande que lui avait faite le comité d’aménagement du territoire le 29 septembre, l’avocat de la Cité lui a présenté un rapport lors de sa réunion du 8 décembre 2003. L’avocat de la Cité a soulevé dans son rapport la possibilité de réglementer le nombre de chambres à coucher dans un logement et d’avoir recours à l’art. 150 de la Loi de 2001 sur les municipalités pour assujettir les logements d’étudiants à un régime de permis d’entreprise, mais il n’a pas mentionné la possibilité d’adopter un règlement municipal d’interdiction provisoire.
8 En janvier 2004, la Cité a examiné la question de la rue Richmond lors de deux réunions tenues à huis clos. Ce sont ces deux réunions qui sont au coeur du pourvoi.
9 Le comité municipal d’aménagement du territoire, composé de sept conseillers municipaux, a tenu la première réunion à huis clos le 12 janvier 2004. L’ordre du jour officiel de la réunion révélait que le comité prévoyait examiner une question confidentielle, sans toutefois en préciser la teneur. Au cours de la réunion, le comité a examiné le rapport du directeur municipal par intérim de l’urbanisme et de l’aménagement. Le rapport recommandait que soit entrepris un examen de l’utilisation du sol relativement aux propriétés situées dans le corridor de la rue Richmond, entre les rues Huron et Grosvenor, compte tenu des préoccupations exprimées quant aux [traduction] « répercussions possibles de la densification [résidentielle] sur le voisinage », (« Planning Report of R. Panzer », Onglet 11B du Dossier de l’appelante, p. 71). Le comité a également examiné un projet de règlement municipal d’interdiction provisoire qui, une fois adopté, suspendrait tout aménagement dans une zone comprenant le tronçon de la rue Richmond sur lequel était située la propriété de RSJ.
10 La deuxième réunion à huis clos a eu lieu le soir du 19 janvier 2004. La soirée a commencé par une séance publique des 19 conseillers formant le conseil municipal. Un point intitulé [traduction] « Comité plénier, à huis clos » était inscrit à l’ordre du jour officiel. Le comité plénier est un comité permanent du conseil municipal qui regroupe les 19 conseillers municipaux. Son rôle consiste à faire des recommandations au conseil municipal. L’ordre du jour ne mentionnait pas quelle question allait être abordée à huis clos. Il comportait par ailleurs une liste de 14 règlements qui devaient être examinés en première, deuxième et troisième lecture. Or, aucun règlement municipal d’interdiction provisoire ne figurait sur cette liste.
11 La séance du conseil municipal a été suspendue à 19 h 57 et les conseillers se sont réunis en comité plénier à huis clos. La Cité reconnaît que, pendant cette séance à huis clos, le comité plénier a discuté non seulement du rapport de l’avocat, mais aussi du rapport sur l’aménagement du territoire et du projet de règlement municipal d’interdiction provisoire qui suspendrait l’aménagement du secteur de la rue Richmond. Le comité plénier a fait deux recommandations : premièrement, qu’un examen de l’utilisation du sol soit entrepris relativement à la zone visée par le projet de règlement municipal d’interdiction provisoire; deuxièmement, que le conseil municipal approuve le projet de règlement municipal d’interdiction provisoire.
12 Le conseil municipal a repris sa séance régulière devant public à 22 h 22, jusqu’à 22 h 30. Pendant cette séance de huit minutes, le conseil municipal a présenté, examiné en première, deuxième et troisième lecture, puis adopté 32 règlements, dont le règlement provisoire contesté, sans examen ni débat public.
13 RSJ a présenté, en vertu du par. 273(1) de la Loi de 2001 sur les municipalités, une requête en annulation du règlement municipal d’interdiction provisoire pour cause d’illégalité, parce que la Cité avait contrevenu à l’obligation générale d’ouvrir ses réunions au public que lui impose le par. 239(1) de la Loi de 2001 sur les municipalités. La Cour supérieure de justice de l’Ontario a rejeté la requête de RSJ ((2005), 10 M.P.L.R. (4th) 88). La juge des requêtes a retenu l’argument de la Cité selon lequel les réunions des 12 et 19 janvier étaient visées par l’exception prévue à l’al. 239(2)e) de la Loi de 2001 sur les municipalités, qui autorise les conseils municipaux à tenir des réunions à huis clos pour étudier des « litiges actuels ou éventuels ». Selon elle, il était indubitable que RSJ contesterait le règlement municipal d’interdiction provisoire vu son investissement dans la propriété de la rue Richmond et, par conséquent, l’éventualité d’un litige était bien réelle au moment de la réunion à huis clos. Vu cette conclusion, la juge des requêtes a cru inutile d’examiner l’autre prétention de la Cité selon laquelle le huis clos était permis par l’al. 239(2)f), qui autorise la tenue d’une réunion à huis clos pour l’étude de conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat.
14 La juge des requêtes a également conclu que tout vote survenu au cours des deux réunions à huis clos portait sur une question de procédure et était de ce fait autorisé par l’al. 239(6)b) de la Loi de 2001 sur les municipalités. Enfin, elle a affirmé que le défaut de la Cité d’indiquer par voie de résolution la nature générale de la question devant être étudiée lors de la réunion à huis clos, comme l’y obligeait le par. 239(4), n’a causé aucun préjudice et n’a eu aucune incidence sur la validité du règlement quant au fond.
15 RSJ a interjeté appel de cette décision devant la Cour d’appel de l’Ontario ((2005), 16 M.P.L.R. (4th) 1). La Cité a de nouveau fait valoir que le huis clos était justifié parce que les réunions devaient porter sur des litiges éventuels au sens de l’al. 239(2)e) et sur des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat au sens de l’al. 239(2)f). La Cité a par ailleurs invoqué l’exception prévue à l’al. 239(2)g), autorisant le huis clos lorsque la question qui doit être étudiée en est une à l’égard de laquelle un comité ou un conseil peut tenir une réunion à huis clos en vertu d’une autre loi. Selon la Cité, puisque la Loi sur l’aménagement du territoire permet l’adoption d’un règlement municipal d’interdiction provisoire sans l’envoi d’un avis et sans la tenue d’une audience publique, il s’agit d’une « question à l’égard de laquelle un conseil [. . .] peut tenir une réunion à huis clos en vertu d’une autre loi » au sens de l’al. 239(2)g). La Cour d’appel a rejeté ces trois arguments et annulé le règlement municipal d’interdiction provisoire pour cause d’illégalité.
16 La Cité se pourvoit contre cette décision en invoquant l’al. 239(2)g) de la Loi de 2001 sur les municipalités qui, selon elle, autorisait la tenue des réunions à huis clos. Subsidiairement, elle prétend que le règlement ne devrait pas être annulé.
3. Analyse
3.1 L’obligation de tenir une réunion ouverte au public
17 Comme nous le verrons, l’art. 239 de la Loi de 2001 sur les municipalités exige que les réunions d’une municipalité soient ouvertes au public, sauf lorsque la question étudiée entre dans l’une des sept catégories expressément énumérées dans la loi. Avant d’examiner les dispositions législatives, il peut toutefois être utile de se rappeler la situation qui existait en Ontario avant l’adoption de l’art. 239.
18 Avant 1995, le caractère public d’une réunion dépendait généralement non pas de la question étudiée, mais du genre de réunion qui devait avoir lieu. En Ontario, et sous le régime de différentes lois provinciales, les réunions ordinaires du conseil étaient généralement ouvertes au public, alors que les réunions des comités et les autres réunions étaient tenues à huis clos et ne pouvaient être ouvertes qu’à la discrétion du conseil (M. R. O’Connor, Open Local Government 2 : How crucial legislative changes impact the way municipalities do business in Canada (2004), à la p. 25). Il importe toutefois de souligner que l’un des problèmes constants mentionné en 1984 dans l’Ontario Report of the Provincial/Municipal Working Committee on Open Meetings and Access to Information était que [traduction] « certains conseils municipaux ont recours à de longues réunions extraordinaires ou de comités, tenues à huis clos, pour débattre de questions controversées et faire ensuite approuver leur décision par le conseil en comité plénier en l’espace de quelques minutes après un débat minimal » (p. 2). Voir également, le rapport de l’Ontario Commission on Freedom of Information and Individual Privacy (la « Commission Williams »), Public Government for Private People (1980). Dans l’espoir de promouvoir les valeurs démocratiques et de répondre à la volonté du public de responsabiliser les gouvernements municipaux, ces rapports ont recommandé que les réunions des conseils et comités municipaux soient impérativement ouvertes au public, sous réserve d’exceptions limitées.
19 Le gouvernement de l’Ontario a donné suite à ces recommandations au début des années 1990 (Ontario, Ministère des Affaires municipales, Open Local Government (1992), p. 2‑3 et 31), et le projet de loi 163 (la Loi de 1994 modifiant les lois en ce qui concerne l’aménagement du territoire et des municipalités, L.O. 1994, ch. 23) a établi l’obligation d’ouvrir les réunions au public qui figure désormais à l’art. 239 de la Loi de 2001 sur les municipalités. On voulait ainsi rehausser la confiance du public dans l’intégrité du gouvernement local en veillant à ce que le pouvoir municipal soit exercé de façon ouverte et transparente (Ontario, Assemblée législative, Official Report of Debates (Hansard), no 162 (28 novembre 1994), p. 7978 (Pat Hayes)).
20 Sur cette toile de fond historique, j’examinerai maintenant les dispositions législatives pertinentes.
21 Le paragraphe 239(1) de la Loi de 2001 sur les municipalités établit la règle générale voulant que les réunions municipales soient ouvertes au public, alors que le par. 239(2) énumère les exceptions à cette règle :
239. (1) Sauf disposition contraire du présent article, les réunions sont ouvertes au public.
(2) Une réunion ou une partie de celle‑ci peut se tenir à huis clos si l’une des questions suivantes doit y être étudiée :
a) la sécurité des biens de la municipalité ou du conseil local;
b) des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, y compris des employés de la municipalité ou du conseil local;
c) l’acquisition ou la disposition projetée ou en cours d’un bien‑fonds par la municipalité ou le conseil local;
d) les relations de travail ou les négociations avec les employés;
e) les litiges actuels ou éventuels, y compris les questions dont les tribunaux administratifs sont saisis, ayant une incidence sur la municipalité ou le conseil local;
f) les conseils qui sont protégés par le secret professionnel de l’avocat, y compris les communications nécessaires à cette fin;
g) une question à l’égard de laquelle un conseil municipal, un conseil, un comité ou une autre entité peut tenir une réunion à huis clos en vertu d’une autre loi.
22 Le libellé impératif du par. 239(1) démontre que le gouvernement municipal doit, dans le cadre de ses activités normales, tenir des réunions transparentes et accessibles au public. L’importance de tenir des réunions publiques est renforcée par l’utilisation du mot « peut » au par. 239(2) qui autorise, mais n’oblige pas, les gouvernements municipaux à tenir une réunion à huis clos lorsque la question qui doit y être étudiée correspond à l’une des sept exceptions prévues. En comparaison, le par. 239(3), dont nous n’avons pas à nous préoccuper dans le présent pourvoi, exige qu’une réunion soit tenue à huis clos lorsque la question se rapporte à l’étude d’une demande présentée en vertu de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée, L.R.O. 1990, ch. M.56.
23 Le paragraphe 238(1) de la Loi de 2001 sur les municipalités définit les mots « réunion » et « comité » en termes larges :
« comité » Comité ou sous‑comité consultatif ou autre, ou une entité similaire, dont au moins 50 pour cent des membres sont également membres d’un ou de plusieurs conseils municipaux ou conseils locaux.
« réunion » Réunion ordinaire, extraordinaire ou autre d’un conseil municipal, d’un conseil local ou d’un comité de l’un ou de l’autre.
Personne ne conteste que les réunions tenues à huis clos les 12 et 19 janvier 2004 constituaient des réunions au sens du par. 238(1), puisque tous les membres du comité municipal d’aménagement du territoire et du comité plénier sont également membres du conseil municipal.
24 Suivant la loi, même les réunions tenues à huis clos ne sont pas entièrement soustraites au regard du public puisque le par. 239(4) exige qu’il soit avisé de la tenue d’une réunion à huis clos et de la nature générale de la question devant y être étudiée. Voici cette disposition :
239. . . .
[. . .]
(4) Avant de tenir une réunion ou une partie de réunion à huis clos, une municipalité ou un conseil local ou un comité de l’un ou de l’autre indique ce qui suit par voie de résolution :
a) le fait que la réunion doit se tenir à huis clos;
b) la nature générale de la question devant être étudiée à la réunion à huis clos.
La Cité reconnaît avoir enfreint le par. 239(4).
25 L’obligation de tenir une réunion publique est aussi renforcée par les par. 239(5) et 239(6) applicables au moment du vote. Une réunion ne peut être tenue à huis clos au moment du vote que lorsque les paragraphes (2) et (3) autorisent ou imposent le huis clos et que le vote porte sur une question de procédure ou vise à donner des directives ou des instructions à des personnes précises. Voici le texte de ces dispositions :
239. . . .
[. . .]
(5) Sous réserve du paragraphe (6), une réunion ne doit pas se tenir à huis clos au moment du vote.
(6) Malgré l’article 244, une réunion peut se tenir à huis clos au moment du vote si :
a) d’une part, le paragraphe (2) ou (3) autorise ou exige la tenue à huis clos de la réunion;
b) d’autre part, le vote porte sur une question de procédure ou vise à donner des directives ou des instructions aux fonctionnaires, agents, employés ou mandataires de la municipalité, du conseil local ou d’un comité de l’un ou de l’autre, ou aux personnes dont la municipalité ou le conseil local a retenu les services, à contrat ou non.
26 La Cité a abandonné, à juste titre à mon avis, la prétention que les réunions contestées portaient sur des questions protégées par le privilège relatif au litige ou par le secret professionnel de l’avocat. Le seul argument qu’elle invoque maintenant veut que ses réunions soient visées par l’exception prévue à l’al. 239(2)g) de la Loi de 2001 sur les municipalités parce que, suivant les dispositions de la Loi sur l’aménagement du territoire, une municipalité peut adopter un règlement d’interdiction provisoire sans donner d’avis ni tenir d’audience publique. J’examinerai maintenant les dispositions pertinentes de la Loi sur l’aménagement du territoire.
3.2 Les règlements municipaux d’interdiction provisoire pris sous le régime de la Loi sur l’aménagement du territoire
27 Les règlements municipaux d’interdiction provisoire sont de puissants outils de zonage qui permettent aux municipalités de suspendre de façon générale l’exploitation du sol, de bâtiments et de constructions sur leur territoire. Le pouvoir d’adopter un règlement municipal d’interdiction provisoire a été décrit avec justesse comme [traduction] « un pouvoir extraordinaire, généralement exercé lorsqu’une question imprévue se pose relativement à un usage permis par les règlements de zonage, qui a pour but d’accorder un peu de temps à la municipalité pour qu’elle examine le problème et détermine quelle politique et quelles mesures de contrôle en matière d’aménagement représentent la meilleure solution » (R. G. Doumani et P. A. Foran, Ontario Planning Act and Commentary (2004, éd. 2004/2005), à la p. 46). Le texte de la Loi sur l’aménagement du territoire fait toutefois clairement ressortir que ce pouvoir « extraordinaire » est assujetti à très peu de contraintes.
28 La Cité souligne avec justesse que la loi impose comme seule condition préalable — à laquelle il a été satisfait en l’espèce — que le conseil municipal ordonne un examen de l’utilisation du sol dans la zone visée par le règlement municipal d’interdiction provisoire. La disposition applicable est l’article 38 de la Loi sur l’aménagement du territoire, dont voici les passages pertinents :
38. (1) Si le conseil de la municipalité locale ordonne, par voie de règlement municipal ou de résolution, d’entreprendre la révision ou l’examen des principes d’aménagement relatifs à l’utilisation du sol sur le territoire de la municipalité ou dans une ou plusieurs zones définies de celle‑ci, le conseil de la municipalité peut adopter un règlement municipal (ci‑après appelé règlement municipal d’interdiction provisoire) interdisant d’utiliser le sol, des bâtiments ou constructions situés sur le territoire de la municipalité ou dans une ou plusieurs zones définies de celle‑ci aux fins, ou sauf aux fins, établies dans le règlement municipal. Celui‑ci s’applique pendant la durée qu’il précise, sous réserve qu’une telle durée ne dépasse pas un an, à partir de la date où il a été adopté.
(2) Le conseil de la municipalité peut modifier le règlement municipal d’interdiction provisoire en vue d’en proroger l’application, sous réserve que la durée totale du délai ne dépasse pas deux ans à partir de la date où il a été adopté.
(3) Le règlement municipal adopté en application du paragraphe (1) ou (2) ne nécessite pas d’envoi ou d’avis ou la tenue d’audience préalable. Toutefois, le secrétaire de la municipalité donne avis, dans les trente jours, de l’adoption d’un tel règlement municipal, aux personnes et organismes publics prescrits, de la façon et avec les renseignements prescrits.
(4) La personne ou l’organisme public qui reçoit l’avis de règlement municipal visé au paragraphe (3) peut, dans les soixante jours de la date où le règlement municipal a été adopté, interjeter appel auprès de la Commission des affaires municipales en déposant, auprès du secrétaire de la municipalité, l’avis d’appel qui expose l’opposition à ce règlement municipal et les motifs à l’appui. [Je souligne.]
29 Selon la Cité, étant donné que le public n’a ni le droit de recevoir un avis préalable du projet de règlement municipal d’interdiction provisoire ni celui de participer à son processus d’adoption, il s’ensuit — implicitement du moins — que l’adoption d’un règlement municipal d’interdiction provisoire est une « question à l’égard de laquelle un conseil [. . .] peut tenir une réunion à huis clos en vertu d’une autre loi » au sens de l’al. 239(2)g) de la Loi de 2001 sur les municipalités. Je ne partage pas cet avis.
30 La responsabilité de la Cité de donner un avis et de tenir une réunion publique préalable au cours de laquelle les citoyens concernés ont le droit de présenter des observations est totalement distincte de son obligation d’ouvrir ses réunions au public. Pour comprendre en quoi consistent l’avis et l’audience dont la municipalité est exemptée par le par. 38(3), il est utile de se reporter aux par. 34(12) et 34(13) de la Loi sur l’aménagement du territoire, qui déterminent quel type de préavis elle doit donner et quel type d’audience elle doit tenir habituellement avant d’adopter un règlement de zonage en application de cet article. Voici le libellé actuel de ces dispositions :
34. . . .
[. . .]
(12) Avant d’adopter, en application du présent article, un règlement municipal autre que celui adopté conformément à une ordonnance rendue par la Commission des affaires municipales en vertu du paragraphe (11) ou (26) :
a) d’une part, le conseil fait en sorte que :
(i) des renseignements et des documents suffisants soient mis à la disposition du public pour lui permettre de comprendre les grandes lignes de la proposition de zonage que le conseil est en train d’examiner;
(ii) au moins une réunion publique soit tenue pour donner au public l’occasion de présenter des observations à l’égard du règlement municipal proposé;
b) d’autre part, dans le cas d’un règlement municipal qui est exigé par le paragraphe 26(9) ou qui se rapporte à un système de délivrance de permis d’exploitation, le conseil fait en sorte qu’au moins une journée d’accueil soit tenue pour donner au public l’occasion d’examiner les renseignements et documents mis à sa disposition aux termes du sous‑alinéa a)(i) et de poser des questions à leur sujet.
(13) Un avis de la réunion publique exigée aux termes du sous‑alinéa (12)a)(ii) et de la journée d’accueil exigée, le cas échéant, par l’alinéa (12)b) :
a) d’une part, est donné aux personnes et organismes publics prescrits de la manière prescrite;
b) d’autre part, est accompagné des renseignements prescrits.
31 Si le paragraphe 38(3) de la Loi sur l’aménagement du territoire exempte le conseil municipal de donner un préavis et de tenir une audience préalable, c’est pour lui permettre de prendre promptement un règlement municipal d’interdiction provisoire chaque fois que les circonstances le justifient. La nature de cette exemption est donc compatible avec celle de cet outil de zonage extraordinaire. À titre d’exemple, RSJ a produit l’affidavit d’un conseiller municipal de la Cité, qui décrit la manière dont le conseil municipal a appris, en juillet 1992, qu’un propriétaire foncier avait commencé à abattre des arbres sur son terrain, risquant ainsi de causer des dommages à son bien‑fonds et aux biens‑fonds adjacents. Cette propriété était située dans une zone « espace ouvert ». Le conseil municipal de London a convoqué de toute urgence une réunion extraordinaire, dès 10 h le 3 juillet 1992, afin d’étudier un règlement municipal d’interdiction provisoire visant ce terrain précis , d’en débattre, puis de l’adopter. L’envoi d’un avis et la tenue d’une audience préalable n’étaient pas nécessaires. Toute la réunion s’est toutefois déroulée publiquement.
32 Cet exemple illustre clairement la distinction entre le droit du citoyen de recevoir un préavis et de participer au processus et son droit d’observer le déroulement des travaux du gouvernement municipal. L’obligation d’ouvrir les réunions au public établie par l’art. 239 de la Loi de 2001 sur les municipalités se rattache au second. À mon avis, aucun élément de l’art. 38 de la Loi sur l’aménagement du territoire n’autorise le huis clos au sens de l’exception prévue à l’al. 239(2)g) de la Loi de 2001 sur les municipalités. À titre d’exemple d’une autre loi qui donne clairement lieu à l’application de cette exception, citons le paragraphe 2.1(7) de la Loi sur la protection civile et la gestion des situations d’urgence, L.R.O. 1990, ch. E‑9 (« Loi sur la gestion des situations d’urgence ») :
2.1 . . .
[. . .]
(7) Le conseil municipal tient à huis clos tout ou partie d’une réunion portant sur son approbation pour l’application du paragraphe (5).
La Loi sur la gestion des situations d’urgence oblige les municipalités à élaborer et mettre en œuvre un programme de gestion des situations d’urgence pour « détermine[r] et évalue[r] les divers dangers et risques pour la sécurité publique qui pourraient donner lieu à des situations d’urgence et détermine[r] les installations et autres éléments de l’infrastructure qui sont susceptibles d’être touchés par elles » (par. 2.1(1), 2.1(3)). Pour des raisons de sécurité évidentes se rattachant à la nature confidentielle de certains éléments du programme de gestion des situations d’urgence, la Loi sur la gestion des situations d’urgence autorise donc expressément les municipalités à tenir des réunions à huis clos (par. 2.1(7)). À l’opposé, rien dans la nature d’un règlement provisoire ni dans le libellé de l’art. 38 de la Loi sur l’aménagement du territoire n’étaye la prétention de la Cité.
33 Je conclus donc que la Cité a enfreint l’art. 239 de la Loi de 2001 sur les municipalités en examinant à huis clos le règlement municipal d’interdiction provisoire no C.P. 1438‑33 lors des réunions du comité et du conseil du 12 et du 19 janvier 2004. Il reste à déterminer si la Cour d’appel a bien exercé son pouvoir discrétionnaire en annulant pour cause d’illégalité le règlement municipal d’interdiction provisoire adopté par la Cité. J’examinerai donc maintenant la question de la réparation.
3.3 L’annulation d’un règlement pour cause d’illégalité
34 RSJ a présenté sa requête en vertu de l’art. 273 de la Loi de 2001 sur les municipalités. Voici les dispositions pertinentes de cet article :
273. (1) Sur présentation d’une requête par quiconque, la Cour supérieure de justice peut annuler tout ou partie d’un règlement municipal pour cause d’illégalité.
(2) La définition qui suit s’applique au présent article.
« Règlement municipal » S’entend en outre d’un ordre ou d’une résolution.
[. . .]
(4) Le tribunal peut ordonner qu’aucune mesure ne soit prise en application du règlement municipal tant qu’une décision au sujet de la requête n’a pas été rendue.
(5) . . . la requête en annulation de tout ou partie d’un règlement municipal doit être présentée au cours de l’année qui suit l’adoption du règlement.
35 L’« illégalité » n’est pas définie dans la loi. Suivant son sens ordinaire, il s’agit d’un terme générique général qui englobe toutes les inobservations de la loi. L’article 273 doit toutefois être lu en corrélation avec d’autres dispositions. Suivant le par. 38(4) de la Loi sur l’aménagement du territoire, un règlement municipal d’interdiction provisoire peut faire l’objet d’un appel auprès de la Commission des affaires municipales de l’Ontario (CAMO). De son côté, l’art. 36 de la Loi sur la Commission des affaires municipales de l’Ontario, L.R.O. 1990, ch. O.28, accorde à la CAMO une compétence exclusive « à l’égard des instances et des questions qui relèvent de sa compétence en vertu de la présente loi ou d’une autre loi générale ou spéciale ».
36 La Cité a soulevé en première instance la question préliminaire de savoir si le tribunal devait statuer sur la requête ou renvoyer l’affaire devant la CAMO. Se fondant sur les principes établis dans Country Pork Ltd. c. Ashfield (Township) (2002), 60 O.R. (3d) 529 (C.A.), la juge des requêtes s’est déclarée compétente en affirmant, aux par. 26‑27 :
[traduction]
Pour trancher la question de savoir s’il doit se déclarer compétent en l’espèce, le tribunal doit examiner la nature de la contestation : Country Pork Ltd. c. Ashfield (Township) (2002), 60 O.R. (3d) 529 (C.A. Ont.). Le paragraphe 273(1) de la Loi n’est « pas un moyen permettant d’examiner le bien‑fondé de la décision d’une municipalité de prendre un règlement, ni de savoir si celui‑ci est conforme aux principes d’aménagement applicables sur son territoire » (p. 542). Ces questions relèvent de la CAMO et de son expertise.
D’après les documents qui m’ont été présentés et les observations des demanderesses lors des plaidoiries, je suis convaincue que la présente requête vise « à contester directement la validité et la légalité mêmes du règlement municipal », pour reprendre les termes utilisés dans Country Pork (précité), faisant ainsi intervenir la compétence de la Cour supérieure. Je ne suis pas invitée à statuer sur le bien‑fondé de la décision de la Cité ni sur la question de savoir si elle a tenu compte des principes d’aménagement applicables.
37 J’estime que ce raisonnement est valable. Bien que le par. 273(1) de la Loi de 2001 sur les municipalités soit formulé en termes généraux, le pouvoir de surveillance de la Cour supérieure est plus restreint lorsqu’on l’envisage dans ce contexte, et elle ne devrait pas l’interpréter de façon à usurper le rôle de la CAMO et son expertise. La question de la compétence ne se pose plus devant nous. La Cité prétend néanmoins que le principe fondamental qui devrait guider le tribunal appelé à examiner un règlement municipal en vertu de l’art. 273 est celui de la retenue judiciaire. Si cette approche peut certes convenir à l’examen du bien‑fondé d’une décision municipale, j’estime que l’argument de la Cité n’est pas judicieux en l’espèce. Les municipalités doivent leur existence à une loi et, de ce fait, ne peuvent agir que dans les limites des pouvoirs que leur confère la législature provinciale : Produits Shell Canada Ltée c. Vancouver (Ville), [1994] 1 R.C.S. 231, à la p. 273). En ce qui concerne l’« illégalité », qui constitue l’élément essentiel d’un examen fondé sur l’art. 273, les municipalités ne sont pas dotées d’une plus grande expertise institutionnelle que les tribunaux — « le critère à appliquer quand il s’agit de questions de compétence et de questions de droit est celui de la décision correcte » : Nanaimo (Ville) c. Rascal Trucking Ltd., [2000] 1 R.C.S. 342, 2000 CSC 13, au par. 29.
38 Vu la disposition législative particulière en cause — imposant la tenue de réunions publiques — , j’ajouterais ce qui suit à propos du principe de la retenue judiciaire. Les motifs dissidents de la juge McLachlin (maintenant juge en chef) dans Shell Canada sont souvent cités comme énoncé général de la retenue dont les tribunaux doivent faire preuve envers les gouvernements municipaux. Cette retenue est en grande partie fondée sur le caractère démocratique des décisions municipales. La juge McLachlin a effectivement reconnu que la retenue envers les décisions municipales « est conforme à l’axiome fondamental selon lequel les tribunaux doivent accorder aux responsabilités démocratiques des élus municipaux et aux droits de leurs électeurs le respect qui leur revient » (p. 245). Le droit municipal a été modifié de manière à obliger les gouvernements municipaux à ouvrir leurs réunions au public afin de leur conférer une légitimité démocratique inébranlable. La légitimité démocratique des décisions municipales ne tient pas uniquement à la tenue d’élections périodiques, mais aussi à un processus décisionnel transparent, accessible au public et prescrit par la loi. Lorsqu’un gouvernement municipal agit secrètement sans justification, la légitimité démocratique de sa décision s’en trouve amoindrie et pareille décision ne commande pas une aussi grande retenue — même si elle n’excède pas les limites de sa compétence.
39 Le pouvoir d’annuler un règlement municipal pour cause d’illégalité conféré par le par. 273(1) de la Loi de 2001 sur les municipalités est de nature discrétionnaire. Le tribunal ne peut certes pas exercer ce pouvoir discrétionnaire de façon arbitraire. Il doit l’exercer judiciairement et en conformité avec les principes de droit reconnus. Ainsi, le tribunal agissant judiciairement annulera un règlement municipal s’il a été adopté en l’absence totale de compétence. Dans les autres cas, plusieurs facteurs peuvent guider le tribunal dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, notamment la nature du règlement municipal, la gravité de l’illégalité, ses conséquences, le temps écoulé et le caractère théorique de la question. On trouve une analyse très utile du pouvoir discrétionnaire d’annuler un règlement municipal dans Immeubles Port Louis Ltée c. Lafontaine (Village), [1991] 1 R.C.S. 376.
40 En l’espèce, personne ne conteste que la Cité a agi dans les limites de sa compétence en adoptant le règlement municipal d’interdiction provisoire. La loi ne prévoit qu’une condition préalable à pareille mesure, soit l’obligation imposée à la municipalité par le par. 38(1) de la Loi sur l’aménagement du territoire d’ordonner que soit entrepris un examen des principes d’aménagement relatifs à l’utilisation du sol, et la Cité s’est conformée à cette exigence. En outre, le règlement municipal d’interdiction provisoire a été mis aux voix et adopté au cours d’une réunion du conseil municipal ouverte au public, conformément aux exigences relatives au vote imposées pour l’adoption d’un règlement municipal. Cependant, l’illégalité visée à l’art. 273 ne se limite pas strictement à des questions de compétence. L’inobservation des exigences procédurales prescrites par la loi qui ne touchent pas la compétence peut néanmoins suffire pour justifier l’annulation.
41 En l’occurrence, je n’interviendrais pas dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la Cour d’appel. La tenue à huis clos des deux réunions de la Cité n’est pas due à une inadvertance et n’est pas anodine. De fait, la réunion du conseil municipal du 19 janvier 2004 s’est déroulée d’une manière qui n’est pas sans rappeler les problèmes, dénoncés il y a plus de 20 ans, qui ont conduit à l’imposition de l’obligation légale d’ouvrir les réunions au public. Il est utile de répéter les propos du comité de travail cités précédemment : [traduction] « certains conseils municipaux ont recours à de longues réunions extraordinaires ou de comités, tenues à huis clos, pour débattre de questions controversées et faire ensuite approuver leur décision par le conseil en comité plénier en l’espace de quelques minutes après un débat minimal ». À mon avis, la séance publique de huit minutes au cours de laquelle le règlement municipal provisoire a été adopté sans débat, en même temps que 31 autres règlements municipaux, n’a en rien suppléé au manquement.
42 Par ailleurs, si RSJ ne bénéficiait pas du droit d’être avisée de l’intention de la Cité d’adopter le règlement ni de celui de présenter des observations dans le cadre d’une audience publique, elle avait droit, au même titre que les autres citoyens, à un processus transparent et ouvert. La Cour d’appel a eu raison de conclure que, compte tenu des effets draconiens que peut avoir un règlement municipal d’interdiction provisoire, il est d’autant plus nécessaire que les tribunaux veillent scrupuleusement à ce que [traduction] « la réunion au cours de laquelle un règlement municipal d’interdiction provisoire est examiné soit ouverte au public comme l’exige le par. 239(1) de la Loi » (par. 27). Dans ces circonstances, je rejette la prétention selon laquelle RSJ n’a subi aucun préjudice.
4. Dispositif
43 Pour ces motifs, je suis d’avis de rejeter l’appel avec dépens.
Pourvoi rejeté avec dépens.
Procureurs de l’appelante : WeirFoulds, Toronto.
Procureurs de l’intimée : Patton Cormier & Associates, London.