AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que le Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises (CEPME) a consenti à la SCI La Garbine, d'abord, par acte authentique du 31 août 1988, un prêt de la somme de 4 700 000 francs destiné à financer la construction d'un hôtel, ensuite, par acte authentique du 29 mai 1989, un prêt de la somme de 200 000 francs ayant pour objet le financement de travaux complémentaires ; que, prétendant que le taux effectif global figurant dans chacun de ces deux actes de prêt était erroné, la SCI La Garbine a, le 30 décembre 1996, assigné le CEPME en annulation des stipulations d'intérêts, substitution aux taux stipulés du taux de l'intérêt légal et restitution des intérêts indûment perçus ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que le CEPME, qui avait soulevé la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en nullité des stipulations d'intérêts litigieuses, reproche à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 octobre 2003) d'avoir rejeté cette fin de non-recevoir alors, selon le moyen :
1 / que l'irrégularité ou l'absence de la mention du taux effectif global dans un contrat de prêt ouvre au profit de l'emprunteur une action tendant à voir annuler la stipulation relative aux intérêts conventionnels, dont le point de départ du délai de prescription est fixé au jour de la signature du contrat de prêt, qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1907 du Code civil et L. 313-2 du Code de la consommation ;
2 / que, sauf vice du consentement, expressément retenu par les juges, le point de départ de l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels résultant de l'irrégularité de la mention du taux effectif global doit être fixé à la date de formation du contrat ; que la cour d'appel, qui n'a pas retenu que l'erreur contenue dans le taux effectif global aurait constitué un vice déterminant du consentement, ne pouvait retarder le point de départ de l'action en nullité au jour où l'emprunteur alléguait avoir eu connaissance de l'irrégularité, sans violer les articles 1304 du Code civil et L. 313-2 du Code de la consommation" ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que la mention du taux effectif global figurant dans chacun des actes de prêt, était erronée, la cour d'appel en a exactement déduit que le délai de la prescription quinquennale de l'action en annulation des stipulations d'intérêts litigieuses commençait de courir à compter de la révélation à la SCI La Garbine d'une telle erreur, de sorte que ladite action, engagée dans l'année de cette révélation, était recevable ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen :
Attendu que le CEPME fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer une somme d'argent à la SCI La Garbine alors, selon le moyen, "que les juges ne peuvent condamner une partie à payer le montant sollicité par son adversaire au seul motif qu'il n'est pas contesté ;
que la cour d'appel ne pouvait condamner le CEPME à payer à la SCI La Garbine la somme de 567 928,90 euros sans s'assurer qu'elle correspondait exactement à la différence entre les intérêts conventionnels réellement pratiqués et les intérêts légaux sans violer l'article 455 du nouveau Code de procédure civile" ;
Mais attendu qu'ayant à bon droit énoncé que l'annulation de chacune des stipulations d'intérêts litigieuses emportait substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnellement prévu, la cour d'appel a estimé que le montant de la créance de restitution née de cette substitution était conforme à l'évaluation proposée par la SCI La Garbine ; que le moyen manque en fait ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises et le condamne à payer à la SCI La Garbine la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille six.