AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 octobre 2002), que la société Centre expérimental de recherches et d'études du bâtiment et des travaux publics (CEBTP) a, dans le cadre de la mise en oeuvre des dispositions de la loi du 19 janvier 2000 dite Aubry II, mis en place la bonification de 10 % sur toutes les heures effectuées de la 36e à la 39e heure sous la forme d'une rémunération d'un salaire, convertie, pour répondre à l'attente du syndicat CFDT, en temps de repos ; que, pour déterminer l'assiette de calcul de la bonification, le CEBTP a pris en compte les heures effectivement travaillées au-delà de 35 heures, excluant ainsi les jours fériés chômés et les congés payés ; que, faisant valoir que dès lors que les salariés étaient rémunérés sur la base de 39 heures, la bonification de 10 % leur était acquise dès la 36e heure, peu important que des jours fériés ou de congés payés fussent inclus dans la semaine, les syndicats URCB-CFDT de construction-bois interdépartemental d'Ile-de-France ainsi que le comité d'entreprise du CEBTP ont saisi le tribunal de grande instance aux fins de voir enjoindre le CEBTP à calculer la bonification applicable aux heures supplémentaires comprises entre la 36e et la 39e heure sans qu'il puisse y avoir la moindre incidence liée aux congés payés et jours fériés ;
Attendu que lesdits syndicats et le comité d'entreprise font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande, alors, selon le moyen :
1 / qu'il résulte de l'article 2 de l'Accord national interprofessionnel du 10 décembre 1977 sur la mensualisation, annexe à l'article 1er de la loi n° 78-49 du 19 janvier 1978, que la rémunération est mensuelle et indépendante pour un horaire de travail effectif du nombre de jours travaillés dans le mois, le paiement mensuel ayant pour objet de neutraliser les conséquences de la répartition inégale des jours entre les douze mois de l'année ; qu'il s'en déduit que lorsque les salariés sont rémunérés pour une durée hebdomadaire de 39 heures de travail effectif quand la durée légale est de 35 heures, c'est sur ce fondement que le salaire doit être majoré à partir de la 36e heure, que la majoration soit en temps ou en salaire, indépendamment des jours fériés ou jours de congés éventuellement inclus dans la semaine ; qu'en décidant autrement, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
2 / qu'ainsi qu'il est relevé par l'arrêt attaqué, il y a maintien de la rémunération, quel que soit le temps du travail hebdomadaire, conformément à la loi sur la mensualisation, de sorte que, lorsque la bonification est accordée sous forme de majoration de salaire, elle est maintenue, indépendamment des jours fériés ou jours de congés payés pris dans la semaine ; qu'il ne saurait en aller différemment lorsque la bonification est accordée sous forme de repos ; qu'en décidant autrement, la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement entre salariés placés dans des situations identiques ;
3 / que, d'autre part, l'article 222-1-1 du Code du travail interdit la récupération des jours fériés, ce qui implique nécessairement la comptabilisation du temps de travail de ce jour dans le calcul du temps de travail effectif hebdomadaire des salariés ; qu'en prenant en compte les jours fériés pour le calcul de la durée hebdomadaire de travail et pour exclure par suite le droit à bonification des salariés, la cour d'appel a, en réalité, admis une récupération des heures perdues en raison du chômage par la neutralisation des repos résultant de la bonification, en violation des dispositions susvisées ;
4 / que, de même façon, les jours de congés payés constituent des avantages acquis par les salariés, qui ne sauraient davantage faire l'objet d'une récupération ; que, de ce chef, la cour d'appel a violé les articles L. 223-2 et L. 223-4 du Code du travail ;
5 / que les organisations intéressées faisant valoir que jusqu'à la loi du 19 janvier 2000, les salariés avaient bénéficié des heures supplémentaires à partir de la 39e heure rémunérée et non pas à partir de celles effectivement travaillées ; qu'en affirmant, par suite, qu'il n'était pas soutenu qu'il existerait dans l'entreprise un usage consistant à assimiler les jours fériés à du temps de travail effectif, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de ces organisations, en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
6 / que la cour d'appel n'a pas répondu, de ce chef, aux conclusions des organisations intéressées, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que selon l'article L. 212-5 du Code du travail, constituent des heures supplémentaires toutes les heures de travail effectuées au-delà de la durée hebdomadaire du travail fixée par l'article L. 212-1 ou de la durée considérée comme équivalente ; que cette durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés ;
Et attendu qu'ayant exactement retenu que les jours fériés ou de congés payés, en l'absence de dispositions légales ou conventionnelles, ne peuvent être assimilés à du temps de travail effectif, la cour d'appel a pu, sans encourir les griefs du moyen, en l'absence d'un usage contraire en vigueur dans l'entreprise, décider que les jours fériés chômés et de congés payés ne pouvaient être pris en compte dans la détermination de l'assiette de calcul des droits à majoration et bonification en repos pour heures supplémentaires ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'URCB-CFDT, le Syndicat constructions-bois interdépartemental d'Ile-de-France et le Comité d'entreprise de la société CEBTP aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille quatre.