AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Charpente du Berry du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Beeuwsaert ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Amiens, 7 juin 2002) qu'un groupement d'entreprises s'est constitué entre les sociétés Beeuwsaert, Rehab, SFP Systèmes, Crète et Bati Sols et Charpentes du Berry en vue d'exécuter un marché de travaux publics passé le 9 avril 1993 avec Oise Habitat Office public d'aménagement et de construction des communes de l'Oise, par la société Beeuwsaert, laquelle se présentait comme mandataire du groupement précité ; que la société Charpente du Berry s'étant retirée du marché le 28 avril 1994, les autres membres du groupement ont saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Senlis, au motif que le coût des travaux relevant du lot attribué à la société retrayante était sensiblement supérieur au chiffrage effectué par celle-ci, leur responsabilité solidaire étant engagée à cet égard vis-à-vis du maître de l'ouvrage ; qu'après dépôt du rapport de l'expert commis par le tribunal, ces sociétés ont assigné au fond la société Charpente du Berry en dommages-intérêts ;
Attendu que la demanderesse au pourvoi fait grief à l'arrêt, qui l'a condamnée à payer des dommages-intérêts aux autres sociétés, d'avoir rejeté l'exception d'incompétence de la juridiction judiciaire soulevée par elle alors, selon le moyen, que la juridiction administrative est compétente pour statuer sur les recours formés par un constructeur contre un autre dans le cadre de l'exécution d'un marché de travaux publics ayant le caractère d'un contrat administratif ; qu'il est constant en l'espèce que les parties s'opposent sur le point de savoir si la société Charpente du Berry était ou non contractuellement liée par l'acte d'engagement signé le 9 avril 1993 par la société Beeuwsaert, "mandataire des entrepreneurs groupés solidaires", représentée par M. X..., avec l'Office public d'aménagement et de construction Oise Habitat, maître de l'ouvrage, pour la réhabilitation, de 78 logements sociaux de la ZAC du Moulin, à Creil ; que ce marché, conclu sur appel d'offres et soumis aux dispositions du code des marchés public, constitue, conformément à son intitulé, un "marché public de travaux" présentant, de par ses clauses exorbitantes, le caractère d'un contrat administratif ; qu'en déclarant cependant non fondée l'exception d'incompétence soulevée in limine litis par la société au profit de la juridiction administrative, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs et les dispositions de la loi des 16 et 24 août 1790 et du décret du 16 Fructidor An III, ensemble les dispositions de l'article 4 de la loi du 28 Pluviôse An VIII ;
Mais attendu que la cour d'appel a souverainement constaté qu'il résultait, tant du rapport de l'expert, qu'elle a entériné, que des pièces examinées par celui-ci que la société Charpente du Berry s'était engagée avec le groupement d'entreprises ; que l'existence d'un tel accord de droit privé entre les participants à l'exécution du marché de travaux publics en cause faisant obstacle à la compétence de la juridiction administrative, elle a rejeté à bon droit l'exception soulevée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Charpente du Berry aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille quatre.