AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 14 janvier 2002), que la société civile immobilière du cours Briand (la SCI) a fait édifier en l'état futur d'achèvement un groupe d'immeubles ; que la réception des travaux est intervenue le 9 juin 1983 ; qu'à la suite d'infiltrations d'eau en terrasse, la SCI a fait une déclaration de sinistre à l'assureur dommages ouvrage, la Société mutuelle du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), laquelle au vu du rapport de l' expert qu'elle avait désigné a versé une indemnité pour les travaux d'étanchéité ; que malgré la réalisation des travaux préconisés, un nouveau sinistre s'est produit dans l'appartement situé au-dessous de la terrasse objet des réparations, sinistre dont la SMABTP a été informée le 22 novembre 1993 ; que le syndicat des copropriétaires de la résidence cours Briand a assigné la SCI et la SMABTP en paiement sur le fondement des articles 1792 à 1792-4, 1831-1 et 2270 du Code civil du coût des travaux de remise en état de la terrasse ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable :
Vu les articles L. 242-1 et l'annexe II de l'article A. 243-1 du Code des assurances ;
Attendu que toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de bâtiment, doit souscrire avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du Code civil ; que la garantie prend fin à l'expiration d'une période de dix ans à compter de la réception ;
Attendu que pour déclarer pour partie recevable l'action du syndicat des copropriétaires, l'arrêt retient que le second sinistre découle des vices de construction dénoncés par le syndicat avant l'expiration du délai de garantie décennale, que la SMABTP ne saurait se prévaloir d'une sous-estimation des désordres par son expert, que l'indemnisation du sinistre à la date du 26 avril 1989 vaut reconnaissance sans équivoque de la responsabilité fondée sur les articles 1792 et suivants du Code civil, qu'un nouveau délai commence à courir à compter de cette reconnaissance de responsabilité et qu'il y a donc lieu de considérer que c'est à la date du 26 avril 1999 que la police a cessé ses effets ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'assurance dommages ouvrage obligatoire est une assurance de choses qui garantit le paiement des travaux en dehors de toute recherche des responsabilités, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevable pour partie l'action du syndicat des copropriétaires, l'arrêt rendu le 14 janvier 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne le syndicat des copropriétaires des immeubles 56-64, cours Briand aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires des immeubles 56-64, cours Briand ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille quatre.