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05/12/2001 | FRANCE | N°01-80315

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 décembre 2001, 01-80315


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Claude,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 7 novembre 2000, qui a rejeté sa requête en restitution d'objets saisis et en mainlevée du blocage de ses comptes bancaires.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation du principe de la contradiction, des droits de la défense, des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 427, 591 à 593 du Code de procédure pénale, contradictio

n et défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Claude,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 7 novembre 2000, qui a rejeté sa requête en restitution d'objets saisis et en mainlevée du blocage de ses comptes bancaires.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation du principe de la contradiction, des droits de la défense, des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 427, 591 à 593 du Code de procédure pénale, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a statué sur la demande en restitution sans que les mentions de l'arrêt ne permettent de s'assurer que l'intéressé était présent à l'audience ;
" alors qu'il résulte des principes généraux du droit que tout justiciable a droit à un débat oral et contradictoire devant les juridictions de jugement ; que tel n'a pas été le cas en l'espèce dès lors que l'arrêt constate de manière contradictoire que Jean-Claude X... est "comparant", qu'à l'audience du 10 octobre 2000 "le président a constaté l'absence du prévenu", puis que le prévenu a "eu la parole en dernier" ; que de telles mentions ne permettent pas de savoir si le principe du contradictoire a été respecté " ;
Attendu qu'après avoir mentionné que Jean-Claude X..., qui sollicitait la restitution d'objets saisis et la mainlevée du blocage de comptes bancaires, " est comparant ", assisté de son conseil, l'arrêt attaqué énonce que ce conseil " a été entendu en sa plaidoirie et a déposé des conclusions ", puis que " le prévenu a eu la parole en dernier ", enfin, que le conseil de Jean-Claude X... " en présence de ce dernier a oralement développé ses conclusions " ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'en matière de restitution, il n'importe que la partie intéressée comparaisse en personne ou soit représentée par son avocat, le moyen pris d'une erreur matérielle sans conséquence sur la régularité de la décision est inopérant ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1er du Protocole additionnel n° 1 à cette Convention, 41-4, 591 à 593, 710 et 711 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a statué en chambre du conseil sur la demande de restitution, après des débats non publics, sans que les mentions de l'arrêt ne permettent de s'assurer de ce que l'intéressé était présent à l'audience ;
" 1° alors qu'il résulte de l'article 6 de la Convention susvisée que le juge saisi d'une contestation sur des droits et obligations de caractère civil doit statuer publiquement après des débats également publics ; que, par suite, l'arrêt rendu en chambre du conseil après des débats à huis clos ne satisfait pas aux exigences du texte susvisé ;
" 2° alors que, pour débouter Jean-Claude X... de sa demande en restitution, l'arrêt attaqué a, notamment, relevé que les sommes en cause étaient le produit d'infractions ; qu'en statuant ainsi les juges qui se sont prononcés à huis clos sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale ont derechef méconnu les prescriptions de la convention susvisée " ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que la cour d'appel a, conformément aux dispositions de l'article 711 du Code de procédure pénale, statué en chambre du conseil, dès lors que l'intéressé, présent à l'audience, n'a émis aucune contestation à ce sujet et ne démontre pas en quoi il a été porté atteinte à ses intérêts ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 441-10 du Code pénal, 41-4, 481, 484, 591 à 593, 710 et 711 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté Jean-Claude X... de sa requête en restitution ;
" aux motifs que s'agissant en premier lieu de la restitution de la somme de 100 000 francs en espèces, celle-ci a été découverte au domicile de Jean-Claude X... cachée derrière une armoire lors d'une perquisition effectuée le 1er octobre 1997 en présence de Mme Y..., épouse X..., qui déclarait que cet argent, en majeure partie, avait été apporté par son mari en plusieurs fois ; que Jean-Claude X..., entendu le même jour par les militaires de la gendarmerie au cours de sa garde à vue, indiquait qu'il n'avait aucun revenu personnel à l'exception de l'argent qu'il prélevait dans la caisse de Leader Auto, soit 10 000 francs par mois, reconnaissant avoir des charges locatives de 3 500 francs par mois et un remboursement mensuel de crédit de 4 000 francs outre les charges de l'entretien familial avec deux enfants et sa femme n'ayant pas de revenus ; que Jean-Claude X... ne démontre pas l'origine de ces fonds, détenus de façon équivoque et à une époque où il se livrait à l'activité délictuelle pour laquelle il a été condamné, la vente d'un fonds de commerce intervenue plus d'un an auparavant pour le prix de 380 000 francs dont rien n'établit qu'il n'ait pas été nanti ou objet d'inscriptions, comme celle d'un appartement intervenue également plus d'un an auparavant pour le prix de 480 000 francs, s'agissant d'un bien grevé de trois inscriptions dont celle du privilège du prêteur de deniers, n'étant pas de nature à faire la preuve complète que le couple X... possédait des économies d'origine non frauduleuse ; que la demande de restitution à ce titre sera rejetée, Jean-Claude X... ne pouvant prétendre à la propriété de cette somme détenue de façon équivoque et d'origine incertaine ; que s'agissant de la demande de mainlevée des comptes bancaires et du produit de la vente de l'immeuble, rien ne permet de dire que les deux ventes invoquées par Jean-Claude X... intervenues en mai et juillet 1996 aient permis de créditer ses comptes bancaires et l'acquisition en octobre 1996 d'un terrain et le financement d'une construction pour un montant de 800 000 francs, prix du terrain avec un crédit de 400 000 francs et de 900 000 francs pour la construction et que dès lors il ne peut être fait droit à sa demande de main levée des comptes bancaires et du produit de la vente de l'immeuble situé à Allauch, crédités ou acquis au moyen des infractions pour lesquelles Jean-Claude X... a été condamné ;
" 1° alors que, le juge saisi d'une requête en restitution d'objets détenus par une personne au moment de son incarcération et placés sous main de justice est tenu de faire droit à cette demande dès lors que ces objets n'ont pas été revendiqués par des tiers, que leur confiscation n'a pas été ordonnée et qu'ils ne présentent pas de danger pour les personnes ou les biens ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui n'a pas constaté la revendication par des tiers des sommes d'argent litigieuses ou leur confiscation par les juges correctionnels statuant sur l'action publique ou leur caractère dangereux pour les personnes ou les biens, ne pouvait refuser d'ordonner leur restitution ;
" 2° alors que, en l'absence de confiscation ordonnée par le juge statuant sur l'action publique, la restitution ne peut être refusée que s'il est démontré que le demandeur à l'action en restitution n'a pas un titre de propriété certain sur les objets qu'il détenait au moment de son incarcération et qui ont été placés sous main de justice ; qu'il s'ensuit qu'en l'espèce, la confiscation n'ayant pas été ordonnée, Jean-Claude X... devait être, sauf preuve contraire, considéré comme le propriétaire des biens réclamés ; qu'en l'absence de preuve contraire, la cour d'appel ne pouvait refuser la restitution " ;
Vu les articles 481, 484, 41-4 et 710 du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ces textes, lorsque les objets saisis ne sont pas susceptibles de confiscation et ne sont pas revendiqués par un tiers, la juridiction correctionnelle ne peut en refuser la restitution que si celle-ci présente un danger pour les personnes ou les biens ;
Attendu que, pour rejeter la requête en restitution de sommes saisies et de mainlevée du blocage de comptes bancaires présentée par le demandeur, la cour d'appel se borne à énoncer que celui-ci n'établit pas la provenance de la somme de 110 000 francs détenue de manière équivoque à une époque où il se livrait à l'activité délictuelle pour laquelle il a été condamné et qu'il n'apporte pas la preuve de l'origine licite de ses économies, des sommes dont ses comptes bancaires ont été crédités et de l'immeuble dont le produit de la vente est réclamé ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans relever que les sommes saisies et les comptes bancaires bloqués, qui ne pouvaient plus faire l'objet d'une confiscation, étaient revendiqués par un tiers, ni que leur restitution présentait un danger pour les personnes ou les biens, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 7 novembre 2000 ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nîmes.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-80315
Date de la décision : 05/12/2001
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

RESTITUTION - Objets saisis - Action en restitution - Demande formée par un prévenu non relaxé - Refus - Conditions.

Selon les dispositions des articles 481 et 484 du Code de procédure pénale, lorsque les objets saisis ne sont pas susceptibles de confiscation et ne sont pas revendiqués par un tiers, la juridiction correctionnelle ne peut en refuser la restitution que si celle-ci présente un danger pour les personnes ou les biens. Encourt, dès lors, la cassation, l'arrêt qui, pour rejeter la demande de restitution de sommes saisies et de mainlevée du blocage de comptes bancaires, présentée par une personne antérieurement déclarée coupable notamment de recel et escroqueries, ne relève ni que les sommes saisies et les comptes bancaires bloqués, qui ne pouvaient plus faire l'objet d'une confiscation, étaient revendiqués par un tiers, ni que leur restitution présentait un danger pour les personnes ou les biens. (1).


Références :

Code de procédure pénale 481, 484, 41-4, 710

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 07 novembre 2000

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1997-05-22, Bulletin criminel 1997, n° 201, p. 656 (cassation partielle). A rapprocher : Chambre criminelle, 1982-05-12, Bulletin criminel 1982, n° 123, p. 333 (cassation), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1996-10-30, Bulletin criminel 1996, n° 388, p. 1128 (cassation sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 déc. 2001, pourvoi n°01-80315, Bull. crim. criminel 2001 N° 254 p. 840
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2001 N° 254 p. 840

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Cotte
Avocat général : Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Samuel.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:01.80315
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