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30/07/2015 | CEDH | N°001-156501

CEDH | CEDH, AFFAIRE E.A. c. GRÈCE, 2015, 001-156501


PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE E.A. c. GRÈCE

(Requête no 74308/10)

ARRÊT

STRASBOURG

30 juillet 2015

DÉFINITIF

30/10/2015

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire E.A. c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Isabelle Berro, présidente,
Elisabeth Steiner,
Khanlar Hajiyev,
Mirjana Lazarova Trajkovska,
Julia Laffranque,


Paulo Pinto de Albuquerque,
Linos-Alexandre Sicilianos, juges,
et de Søren Nielsen, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du cons...

PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE E.A. c. GRÈCE

(Requête no 74308/10)

ARRÊT

STRASBOURG

30 juillet 2015

DÉFINITIF

30/10/2015

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire E.A. c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Isabelle Berro, présidente,
Elisabeth Steiner,
Khanlar Hajiyev,
Mirjana Lazarova Trajkovska,
Julia Laffranque,
Paulo Pinto de Albuquerque,
Linos-Alexandre Sicilianos, juges,
et de Søren Nielsen, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 7 juillet 2015,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 74308/10) dirigée contre la République hellénique et dont un ressortissant iranien, M. E.A. (« le requérant »), a saisi la Cour le 9 décembre 2010 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »). La présidente de la section a accédé à la demande de non-divulgation de son identité formulée par le requérant (article 47 § 4 du règlement).

2. Le requérant a été représenté par Mes I.-M. Tzeferakou et N. Strahini, avocates au barreau d’Athènes et de Chios respectivement. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par les délégués de son agent, M. D. Kalogiros, assesseur auprès du Conseil juridique de l’État, et Mme K. Karavasili, auditrice auprès du Conseil juridique de l’État.

3. Le 6 mars 2013, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

4. Le requérant est né en 1977.

A. La procédure relative à l’expulsion et la détention du requérant

5. Le requérant était agent de l’État en Iran. Opposant au régime, il publiait de manière régulière des articles dans la presse critiquant le régime iranien. Il allègue avoir présenté sa démission à ses supérieurs mais que celle-ci n’a pas été accueillie.

6. Le requérant aurait été arrêté et détenu pendant cinquante jours. Il aurait subi des tortures et ensuite accusé de s’être livré à travers son activité politique et ses publications dans la presse à des activités antigouvernementales. Il fut condamné à une peine d’emprisonnement et, après avoir purgé sa peine, il décida de quitter son pays d’origine. Il arriva en Grèce le 2 août 2010. Il soutient avoir demandé l’asile politique, mais les autorités n’enregistrèrent pas sa demande. Il ajoute que les autorités jetèrent à la poubelle les documents qu’il aurait soumis pour prouver qu’il était un dissident politique en Iran. Récupérés dans la poubelle, puis confisqués par les autorités nationales, ils lui ont été restitués le 26 août 2010.

7. Le requérant fut présenté devant le procureur près le tribunal correctionnel d’Alexandroupoli. Le 4 août 2010, ce dernier décida de ne pas exercer de poursuites pénales afin de renvoyer le requérant vers son pays d’origine. Toutefois, ce renvoi ne fut pas effectué.

8. Le 5 août 2010, le chef de la police d’Alexandroupoli décida de placer le requérant en détention provisoire jusqu’à ce qu’une décision concernant son expulsion soit prise dans un délai de trois jours.

9. Par une décision du 8 août 2010, le chef de la police d’Alexandroupoli ordonna l’expulsion du requérant pour infraction à l’article 83 de la loi no 3386/2005. Il ordonna aussi son maintien en détention pour une période ne pouvant pas dépasser six mois au motif qu’il risquait de fuir. La décision précisait que le requérant avait été informé dans une langue qu’il comprenait bien (l’anglais) de ses droits et des raisons de sa détention. Elle précisait aussi qu’en cas de recours de sa part, son application serait suspendue seulement en ce qui concernait l’expulsion.

10. Le 12 août 2010, le requérant fut transféré dans les locaux de la police des frontières de Venna. Le même jour, le requérant réitéra par fax, par l’intermédiaire du Conseil grec pour les réfugiés, son souhait que sa demande d’asile soit enregistrée.

11. À une date non précisée, le requérant fut transféré au poste-frontière de Kipoi afin d’être expulsé vers la Turquie mais son expulsion fut finalement reportée.

12. Le requérant allègue que le 21 août 2010, des policiers lui rendirent visite dans les locaux de la police des frontières de Venna où il était détenu et lui auraient expliqué que s’il déposait lui-même et non pas à travers la police sa demande d’asile à Athènes, il serait remis en liberté au bout de quelques jours. Ensuite, ils lui auraient présenté un document à signer dont le contenu lui était incompréhensible.

13. Le 23 août 2010, le Conseil grec pour les réfugiés demanda de nouveau par fax à la direction de police de Rodopi d’enregistrer la demande d’asile du requérant.

14. Le 25 août 2010, le requérant fut transféré dans les locaux de la police des frontières de Soufli. Ses représentantes lui rendirent visite et l’informèrent que le document qu’il avait signé attestait qu’il ne souhaitait pas soumettre une demande d’asile, du fait qu’il n’était pas poursuivi en Iran et qu’il avait quitté son pays pour des raisons non pas politiques mais économiques. Le jour même, le Conseil grec pour les réfugiés envoya un fax à la direction de police d’Alexandroupoli, réitérant que le requérant leur avait exprimé à nombreuses reprises le souhait de déposer une demande d’asile et soulignant que cette demande n’avait pas à ce jour été enregistrée.

15. Le 26 août 2010, le requérant déposa par écrit une nouvelle demande d’asile. Les autorités enregistrèrent cette demande. Le même jour, le requérant demanda au ministère de la Solidarité sociale de lui trouver une structure d’accueil conformément au décret no 220/2007.

16. Le 30 août 2010, le requérant formula devant le tribunal administratif d’Alexandroupoli des objections contre sa détention. Il demandait l’examen de la légalité de celle-ci, eu égard à la demande d’asile et aux conditions de détention insupportables.

17. Le 3 septembre 2010, la présidente du tribunal administratif d’Alexandroupoli considéra que la détention était légale et rejeta les objections. Elle admit notamment que l’introduction d’une demande d’asile de la part du requérant ne rendait pas automatiquement illégale la continuation de sa détention en vue d’expulsion. Elle releva que la détention était imposée pour des raisons d’intérêt public, notamment la lutte contre l’immigration illégale. Elle affirma qu’il ne ressortait pas du dossier de l’affaire que le requérant avait été empêché de soumettre sa demande d’asile. Enfin, elle considéra que le requérant n’avait pas démontré, avec des allégations « suffisamment sérieuses », que les autorités avaient refusé de traiter le problème des conditions de détention et souligna que la pratique administrative révélait une « volonté d’améliorer les conditions de détention dans les lieux de détention » (décision no P80/2010).

18. Le 6 octobre 2010, le requérant présenta de nouvelles objections contre sa détention devant le président du tribunal administratif. Il releva notamment que sa détention n’était pas nécessaire, du fait qu’il pouvait être hébergé à Athènes par son compatriote M.H., que son expulsion ne pouvait pas être effectuée en raison du fait que sa demande d’asile était toujours pendante et que ses conditions de détention se dégradaient. Il décrivit à cet effet le surpeuplement, le manque d’hygiène et d’accès à la lumière naturelle et produisit, entre autres, la lettre du représentant en Grèce du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés qui faisait état des constats d’une visite au poste frontière de Soufli, effectuée du 29 septembre au 1er octobre 2010.

19. Le 8 octobre 2010, le président du tribunal administratif d’Alexandroupoli examina les nouvelles objections et y fit droit. Il fit notamment référence à la demande d’asile soumise par le requérant, qui était pendante, et au fait que celui-ci n’était pas détenu dans des « locaux appropriés » (σε χώρο κατάλληλο) pour une détention s’étalant sur une période de six mois (décision no P106/2010).

20. En vertu de la décision 9760/20-3224/1-ε du chef de la police d’Alexandroupoli, la détention du requérant fut levée. Selon la même décision, le requérant devait quitter le territoire grec au bout d’une période de trente jours.

21. Le 19 octobre 2010, le requérant eut un entretien en vue de l’obtention de l’asile devant la Commission consultative pour les réfugiés siégeant à Alexandroupoli. Il prétend que pendant cet entretien, les interprètes (un afghan et un policier) n’avaient pas de compétences linguistiques suffisantes de sorte que ses allégations ne furent pas transcrites avec précision. En outre, il affirme que les autorités firent des commentaires négatifs à son égard et contestèrent sans raison la validité des documents qu’il avait apportés pour prouver la véracité de ses allégations. Après son entretien, le requérant se vit accorder un certificat de demandeur d’asile.

22. Le 2 novembre 2010, le directeur de la direction de la police d’Alexandroupoli rejeta la demande d’asile du requérant et ordonna l’exécution de la décision d’expulsion dans un délai de soixante jours à compter de la notification de cette décision de rejet. La décision du directeur de la police était motivée comme suit :

« Eu égard (...) aux éléments du dossier et à l’entretien, la Commission a estimé, à l’unanimité, que le requérant ne réunit pas les conditions légales pour être reconnu comme réfugié et se voir accorder l’asile. Dans sa demande initiale, il a déclaré qu’il avait fui son pays car sa vie était en danger, qu’il craignait d’être poursuivi et privé de sa liberté (...) du fait qu’il était journaliste et ancien officier de l’armée et a été emprisonné (...) à cause de ces convictions politiques pour cinquante jours, où il a subi des tortures. Il a été libéré après avoir versé à titre de caution 100 000 000 RIAL (...). Par la suite il a été condamné à deux ans d’emprisonnement et détenu (...) pendant un an. Toutefois, devant la Commission, il a déclaré qu’il a été arrêté et emprisonné car il écrivait des articles critiquant le régime politique de son pays, sans avoir subi de tortures. Il a affirmé qu’il a racheté sa peine et qu’il a été libéré avec l’obligation de résider dans une autre ville d’Iran, obligation qu’il n’a pas voulu remplir et il a décidé alors de quitter l’Iran pour un autre pays. En Iran il servait l’armée comme officier et en même temps il rédigeait des articles contre le gouvernement. Ces allégations ne peuvent pas fonder une crainte de persécution par les autorités de son pays pour des motifs raciaux, religieux, ou liés à la nationalité, à une classe sociale ou à des convictions politiques, qui permettrait de lui reconnaître la qualité de réfugié. (...) Par conséquent sa demande est manifestement mal fondée et abusive, car il ressort de ce qui précède qu’il utilise la demande et la procédure d’asile pour faciliter son séjour ici et pour trouver du travail et améliorer ses conditions de vie. »

23. Il ressort du dossier que le requérant quitta la Grèce à une date non précisée et se trouve actuellement en Suède, où il s’est vu accordé le statut de réfugié.

24. Le 22 novembre 2010 fut publié le décret 114/2010 relatif au statut du réfugié. Ce décret réintroduisit le droit des demandeurs d’asile de solliciter le réexamen de leur demande par l’administration (une commission composée d’un représentant du ministère de l’Intérieur ou du ministère de la Justice, d’un représentant du HCR et d’un juriste expert en droits de l’homme ou en droit des réfugiés).

25. En vertu de l’article 32 du décret, le requérant disposait d’un délai de trois mois pour solliciter ce réexamen. Le requérant soutient qu’il avait quitté la Grèce avant la notification de la décision rejetant sa demande d’asile. Dès lors, il n’a pas fait usage de cette possibilité.

B. Les conditions de détention du requérant

1. La version du requérant

26. Le requérant fut détenu aux postes frontières de Soufli et de Venna. En particulier, lors de son arrestation, il fut détenu au poste frontière de Soufli et, ensuite, transféré au poste frontière de Venna ; une semaine après, il fut renvoyé à Soufli. Il souligne que les conditions de détention dans ces endroits rendent impossible même une détention de courte durée. Il prétend que pendant sa détention, il ne sortit jamais des bâtiments et ne vit jamais le ciel, ce qui eut une influence néfaste sur sa santé physique et psychologique.

27. La plupart du temps, le poste frontière de Soufli accueillait entre 100-150 hommes, femmes et enfants dans un espace d’une capacité de 35-39 personnes. Certains détenus, dont lui-même, étaient obligés de dormir à même le sol, à proximité des eaux sales des toilettes ou même assis. L’accès au téléphone était très limité et il fallait se procurer une télécarte, ce qui dépendait de la volonté des gardiens. Dans les espaces de détention, il n’y avait ni chaises, ni tables, ni endroit pour ranger. Le requérant n’eut aucun produit de toilette ou d’hygiène. Les quelques couvertures étaient sales, l’eau n’était pas potable (les détenus devaient acheter des bouteilles d’eau minérale) et la nourriture était de mauvaise qualité.

28. Enfin, aucun interprète n’était présent et les détenus, comme le requérant, n’étaient pas informés des raisons et de la durée de leur détention. Aucune information n’était donnée concernant les droits des détenus et la procédure d’asile. Le requérant essaya de protester contre ses conditions de détention sans succès, faute de mécanisme effectif au sein des locaux de la police des frontières de Soufli et de Venna.

2. La version du Gouvernement

29. Le Gouvernement décrit les centres de rétention dans lesquelles le requérant a séjourné comme suit.

30. Dans le centre de rétention de Soufli, malgré le fait que le nombre des détenus était disproportionné par rapport à la capacité, la nourriture des détenus était excellente et était fournie trois fois par jour par la préfecture d’Evros. Des soins médicaux et des médicaments étaient dispensés par des médecins de l’administration sanitaire de la région. Pour les cas qui ne pouvaient être traités sur place, les détenus étaient transférés dans les centres de santé régionaux ou à l’hôpital universitaire d’Alexandroupoli. Un téléphone public à cartes fonctionnait au sein du poste-frontière de Soufli et la communication des détenus avec les avocats était effectuée sans entraves. Des organisations non gouvernementales se rendaient régulièrement au poste-frontière de Soufli pour informer les détenus de leurs droits.

31. Le centre de rétention de Venna, d’une capacité de 220 personnes, en accueillait 150 à l’époque du séjour du requérant dans ce centre (du 12 au 25 août 2010). Les dortoirs étaient chauffés pendant l’hiver et suffisamment aérés et éclairés. Dans chaque dortoir, il y avait une toilette séparée et une douche avec de l’eau chaude. La préfecture fournit des produits d’hygiène aux détenus. Les locaux sont régulièrement désinfectés, désinsectisés et repeints. Chaque détenu dispose d’un lit, un matelas, un oreiller, deux draps et deux ou trois couvertures. Des vêtements étaient donnés aux détenus qui n’en avaient pas suffisamment.

32. Le centre employait un médecin et une infirmière. Des mesures étaient prises pour faire face aux urgences médicales.

33. L’alimentation des détenus est assurée par divers restaurants avec lesquels les autorités ont conclu des contrats. Les restaurants fournissent des repas pour un montant de 5,87 euros par jour et pour chaque détenu. Les repas ne contiennent pas d’aliments interdits par la religion des détenus.

34. Une promenade a lieu quotidiennement en fonction du nombre des détenus et de la saison. Il est possible de faire sortir en une journée les détenus des deux ou trois dortoirs.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES

35. Le droit et la pratique internes pertinents en l’espèce sont décrits dans les arrêts Bygylashvili c. Grèce (no 58164/10, 25 septembre 2012), Barjamaj c. Grèce (no 36657/11, 2 mai 2013), Horshill c. Grèce (no 70427/11, 1er août 2013), Khuroshvili c. Grèce (no 58165/10, 12 décembre 2013) et B.M. c. Grèce (no 53608/11, 19 décembre 2013).

III. LES RAPPORTS DES INSTANCES INTERNATIONALES

A. Les constats du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT)

1. Dans le rapport du 17 novembre 2010, établi suite à la visite du 17 au 29 septembre 2009

36. Les locaux de la police des frontières de Venna avaient une capacité officielle de 222 personnes et, au moment de la visite, accueillaient 201 détenus de sexe masculin dans cinq grands dortoirs. Le centre était dans le même état que celui observé en 2007 : mal éclairé, sale et mal entretenu, avec des vitres cassées. Le 8 août 2009, le syndicat de la police locale a envoyé une lettre aux autorités régionales de Rodopi sollicitant des mesures urgentes afin d’améliorer les conditions matérielles et d’hygiène, y compris le nettoyage régulier des dortoirs et l’installation d’une aire pour personnes malades. Les autorités n’ont cependant procédé à aucune démarche en raison du manque de moyens financiers.

37. Malgré l’existence de deux grandes cours, les détenus n’étaient autorisés à sortir que tous les deux jours pendant deux heures.

2. Dans le rapport du 10 janvier 2012, établi suite à la visite du 19 au 27 janvier 2011

38. Le commissariat de police et le poste frontière de Soufli consistaient en un bâtiment d’un étage destiné à la détention. Le bâtiment incluait deux dortoirs étroits séparés par un paravent ; chacun d’eux avait une plateforme surélevée sur laquelle les détenus dormaient. Il y avait aussi un espace commun donnant accès à une salle de douche et une toilette. La superficie totale de l’espace de détention était 110 m². Le jour de la visite de la délégation du CPT, 146 hommes y étaient détenus. Pour accéder aux dortoirs, il fallait enjamber des corps car chaque centimètre carré du sol était occupé. Certains détenus dormaient même dans l’espace entre le plafond de la douche et le toit. L’odeur des corps était accablante. Une seule toilette fonctionnait ainsi qu’une douche à l’eau froide. Plusieurs personnes ont rapporté à la délégation qu’elles urinaient le matin dans des bouteilles ou des sacs en plastique. L’éclairage et la ventilation étaient insuffisants. Il n’y avait pas de possibilité d’exercice physique à l’extérieur. La nourriture était aussi insuffisante et il y avait des plaintes que les plus forts parmi les détenus empêchaient d’autres de manger leur ration. Environ 65 personnes avaient été détenues dans le centre pour plus de quatre semaines et 13 pour plus de trois mois et demi.

B. Le représentant en Grèce du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés

39. Par une lettre adressée au Conseil grec pour les réfugiés, le représentant en Grèce du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés faisait état des constats d’une visite au poste frontière de Soufli, effectuée du 29 septembre au 1er octobre 2010.

40. Le représentant constatait que l’espace de détention était composé de deux dortoirs, sans séparation, avec des lits en ciment et des matelas en série. À côté de ceux-ci, dans des couloirs étroits, il y avait des sommiers en bois, couverts de cartons et des couvertures qui servaient de lits pour les détenus en surnombre. L’espace était bondé en raison du grand nombre de détenus et le passage d’un dortoir à l’autre était impossible. L’atmosphère du dortoir était étouffante car insuffisamment ventilé. Les fenêtres étaient en hauteur et n’assuraient ni aération ni éclairage suffisants. Les matelas et les couvertures étaient sales. Les deux toilettes et les deux douches se trouvaient dans l’espace de détention et étaient sales et pleines de détritus. La plupart des détenus étaient couchés car il n’y avait pas d’espace pour circuler. Aucune brochure d’information concernant le statut légal des détenus et leurs droits n’était disponible.

41. Les femmes détenues avait exprimé leur désarroi et leur désespoir pour leurs conditions de détention lesquelles, d’après leurs allégations, étaient insupportables : matelas et couvertures sales, espace commun de détention avec les hommes, toilettes communes sales, impossibilité d’être propre, manque de produits de toilette (savon, shampooing, papier toilette, serviettes hygiéniques, brosse à dents et dentifrice), impossibilité de laver les vêtements et les sous-vêtements et impossibilité de faire de l’exercice physique.

42. Plusieurs détenus se plaignaient de maladies dermatologiques et gastriques ainsi que du fait que le médecin ne rendait pas de visite dans le dortoir pour examiner les détenus, mais distribuait des analgésiques à travers les barreaux de la porte. Si des détenus avaient besoin d’un autre type de soins médicaux, ils devaient en assumer les frais. Les détenus devaient aussi payer pour les photos d’identité prises par les autorités pour les apposer sur les différents documents.

43. La lettre concluait que la situation qui régnait au poste frontière portait atteinte à la dignité humaine et mettait en péril non seulement les droits fondamentaux de l’homme mais leur vie même.

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 3 DE LA CONVENTION DU FAIT DES CONDITIONS DE dÉtention DU REQUÉRANT

44. Le requérant se plaint des conditions de détention dans les locaux de la police des frontières de Soufli et de Venna. Il invoque l’article 3 de la Convention, disposition ainsi libellée :

Article 3

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

A. Sur la recevabilité

45. La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

46. Le Gouvernement renvoie à sa version concernant les conditions de détention dans les différents centres en cause. Il soutient que le requérant soulève des griefs et des allégations de caractère général, et ce sans apporter de précisions quant à l’existence de faits concrets qui permettraient d’établir qu’il a subi une pression physique ou psychologique d’une ampleur telle que l’on pourrait la qualifier de traitement dégradant (voir paragraphes 29-34 ci-dessus).

47. Le requérant se réfère à sa version concernant les conditions de détention (voir paragraphes 26-28 ci-dessus).

48. En ce qui concerne les principes généraux concernant l’application de l’article 3 de la Convention dans des affaires soulevant des questions similaires à celles posées par la présente, la Cour renvoie à sa jurisprudence pertinente en la matière (voir notamment, Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, §§ 90-94, CEDH 2000-XI ; Peers c. Grèce, no 28524/95, §§ 67-68, CEDH 2001‑III ; Kalachnikov c. Russie, no 47095/99, § 95, CEDH 2002‑VI ; Riad et Idiab c. Belgique, nos 29787/03 et 29810/03, § 97, 24 janvier 2008 ; Tabesh, no 8256/07, §§ 34-37, 26 novembre 2009 ; Rahimi c. Grèce, no 8687/08, §§ 59-62, 5 avril 2011 ; R.U. c. Grèce, no 2237/08, §§ 54-56, 7 juin 2011 ; A.F. c. Grèce, no 53709/11, §§ 68-70, 13 juin 2013 ; de los Santos et de la Cruz c. Grèce, nos 2134/12 et 2161/12, § 43, 26 juin 2014).

49. La Cour rappelle de même qu’elle a déjà conclu à la violation de l’article 3 de la Convention, à plusieurs reprises, dans des affaires contre la Grèce relatives aux conditions de détention d’étrangers dans les centres de rétention de Soufli et Venna (S.D. c. Grèce, no 53541/07, 11 juin 2009, R.U. c. Grèce, précité, B.M. c. Grèce, précité, C.D. et autres c. Grèce, nos 33441/10, 33468/10 et 33476/10, 19 décembre 2013 et F.H. c. Grèce, no 78456/11, 31 juillet 2014).

50. En l’espèce, la Cour note que le requérant a été détenu du 2 août au 8 octobre 2010 dans les centres de rétention de Soufli et Venna, soit pendant une période de deux mois.

51. Compte tenu des constats auxquels elle est parvenue dans les arrêts précités, et notamment dans les affaires B.M. c. Grèce et F.H. c. Grèce qui concernent la même période qu’en l’espèce, et de ceux contenus dans les rapports des différentes institutions nationales et internationales qui se sont rendues dans ces centres (paragraphes 35-43 ci-dessus), la Cour considère que le requérant a été détenu dans des conditions de surpopulation et d’hygiène déplorables, incompatibles avec l’article 3 de la Convention et qui ont constitué à son endroit un traitement dégradant.

52. Il y a donc eu violation de l’article 3 de la Convention à cet égard.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DES ARTICLES 3 ET 13 DE LA CONVENTION COMBINÉS EN RAISON DE L’ABSENCE D’UN RECOURS EFFECTIF POUR SE PLAINDRE DES CONDITIONS DE DÉTENTION

53. Invoquant l’article 3 de la Convention combiné avec l’article 13 de la Convention, le requérant dénonce l’absence d’un recours effectif pour se plaindre de ses conditions de détention.

A. Sur la recevabilité

54. Constatant que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

55. Le Gouvernement soutient que la formulation d’objections contre une détention prévue par l’article 76 de la loi no 3386/2005 est un recours effectif et que le juge avait le pouvoir d’examiner les conditions de détention. Il produit certaines décisions du tribunal administratif d’Alexandroupoli pour démontrer que celui-ci se penche habituellement sur cette question lors de l’examen de la légalité d’une détention.

56. Le requérant rétorque que la législation grecque, et notamment l’article 76 de la loi no 3386/2005 même tel que modifié par la loi no 3900/2010, ne prévoit pas de voie de recours permettant à un étranger détenu de se plaindre de ses conditions de détention. Il soutient que le juge administratif n’est pas en mesure d’ordonner l’amélioration des conditions de détention et que les jugements mentionnés par le Gouvernement ont tous été pris par le même juge. À cet égard, il cite d’autres décisions de la même juridiction qui établiraient que le recours par voie d’objections est dépourvu d’effectivité, car il existe – à ses dires – une pratique claire consistant à ne pas examiner les conditions de détention. Le requérant affirme en outre que lors de l’examen du recours en cause, le juge administratif n’est pas en mesure d’octroyer un redressement approprié pour le dommage subi à cause des conditions de détention.

57. La Cour rappelle sa jurisprudence constante selon laquelle l’article 13 de la Convention garantit l’existence de recours internes permettant l’examen de tout « grief défendable » fondé sur la Convention et l’octroi d’un redressement approprié. À ce titre, les États contractants jouissent d’une certaine marge d’appréciation quant à la manière de se conformer aux obligations que leur impose cette disposition, et la portée de cette obligation varie en fonction de la nature du grief que le requérant tire de la Convention. Toutefois, le recours exigé par l’article 13 de la Convention doit être « effectif » en pratique comme en droit (McGlinchey et autres c. Royaume‑Uni, no 50390/99, § 62, CEDH 2003‑V).

58. En premier lieu, la Cour note qu’à la date à laquelle le tribunal administratif a rejeté les premières objections du requérant, à savoir le 3 septembre 2010, la version révisée de l’article 76 de la loi no 3386/2005 qui a étendu l’ampleur du contrôle opéré par le juge administratif pour y inclure, comme le prétend le Gouvernement, les conditions de détention, n’était pas encore entrée en vigueur. La Cour constate, qu’à l’époque des faits, l’article précité permettait aux tribunaux d’examiner la décision de détenir un migrant clandestin sur le seul fondement du risque de fuite ou de danger à l’ordre public. Les tribunaux n’étaient pas habilités par ladite loi à examiner les conditions de vie dans les centres de détention pour étrangers clandestins et à ordonner la libération d’un détenu sous cet angle (voir R.U. c. Grèce, précité, et A.A. c. Grèce, no 12186/08, § 47, 22 juillet 2010).

59. En deuxième lieu, la Cour note que, dans sa décision du 3 septembre 2010, le tribunal administratif ne s’est livré à aucune analyse spécifique des conditions de détention du requérant. Elle relève que cette juridiction s’est contentée de déclarer que la détention était imposée pour des raisons d’intérêt public, notamment la lutte contre l’immigration illégale, l’introduction d’une demande d’asile de la part du requérant ne rendant pas automatiquement illégale la continuation de sa détention en vue d’expulsion. Quant aux conditions de détention, elle estima uniquement que le requérant n’avait pas démontré les velléités des autorités pour améliorer les conditions de détention dans l’avenir. Or, le tribunal administratif ne s’est pas prononcé sur les conditions de détention spécifiques du requérant dans le centre de rétention où il avait été placé.

60. La Cour considère que lorsqu’un individu formule une allégation défendable de violation de l’article 3 de la Convention, la notion de recours effectif implique, de la part de l’État, des investigations approfondies et effectives pour mettre un terme à la situation supposément à l’origine de la violation (voir, mutatis mutandis, Egmez c. Chypre, no 30873/96, § 65, 21 décembre 2000).

61. Or, si le 8 octobre 2010 le tribunal administratif a finalement décidé, après les secondes objections déposées par le requérant, sa mise en liberté, en relevant, par une formulation vague, que son lieu de détention n’était pas un lieu approprié pour le séjour de six mois maximum prévu par la loi, il n’a pas pour autant répondu à ses arguments concernant ses conditions de détention. Il n’en reste qu’à ce point le requérant aurait déjà séjourné dans les centres de rétention de Soufli et Venna pendant une période de deux mois. Toutefois, il ne ressort pas de l’arrêt en cause si les considérations du juge administratif valaient uniquement pour l’avenir ou également pour la période antérieure. Cependant, l’intéressé dénonçait dans ses objections le surpeuplement, le manque d’hygiène et d’accès à la lumière naturelle, et invoquait aussi la lettre du représentant en Grèce du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés qui faisait état des constats d’une visite au poste frontière de Soufli, effectuée du 29 septembre au 1er octobre 2010.

62. Dès lors, la Cour considère que le recours exercé par le requérant sur le fondement de l’article 76 § 3 de la loi no 3386/2005 ne lui a pas assuré, en l’espèce, un redressement approprié pour le traitement subi par lui à cause des conditions de détention.

63. Il y a donc eu violation de l’article 13 de la Convention, combiné avec l’article 3.

III. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 3 COMBINÉ AVEC L’ARTICLE 13 DE LA CONVENTION DU FAIT DES DÉFAILLANCES DE LA PROCÉDURE D’ASILE ET DU RISQUE DE RENVOI VERS LA TURQUIE ET L’IRAN

64. Invoquant les articles 3 et 13 de la Convention, le requérant se plaint des défaillances du système d’examen par les autorités de sa demande d’asile et du risque qu’il encourt d’être expulsé en Turquie puis en Iran.

A. Sur la recevabilité

1. Arguments des parties

65. Le Gouvernement soutient que le Conseil grec pour les réfugiés aurait assisté le requérant lors de la procédure d’asile, dans le cadre d’un programme du Fonds Européen pour les réfugiés. Il ajoute que les autorités ont observé strictement les dispositions du décret présidentiel no 90/2008 concernant l’octroi de l’asile politique et que la demande d’asile du requérant fut enregistré immédiatement en dépôt, le 26 août 2010. Le Gouvernement note à cet égard que les représentantes du requérant auraient dû assister le requérant afin qu’il dépose sa demande écrite plus rapidement. Il invoque notamment la déclaration signée par le requérant le 21 août 2010, affirmant qu’il ne souhaitait pas déposer une demande d’asile, qu’il n’était pas poursuivi dans son pays et qu’il avait quitté son pays pour des raisons économiques. Le Gouvernement note également que le requérant ne risquait pas d’être expulsé. Il affirme enfin que le requérant n’a pas exercé de recours en annulation devant le Conseil d’État, prévu par le décret présidentiel no 81/2009, ou fait usage de la possibilité que lui offrait le décret présidentiel no 114/2011 de déposer un recours devant les commissions de recours. Dès lors, le Gouvernement estime que ces griefs doivent être rejetés pour non-épuisement des voies de recours internes ou comme abusifs.

66. Le requérant rétorque qu’en cas de renvoi en Iran, il encourait un risque de traitement contraire à l’article 3 de la Convention, ce qui a d’ailleurs été confirmé par la reconnaissance du statut de réfugié des autorités suédoises. Il souligne le refus initial des autorités d’enregistrer sa demande d’asile, le manque d’information sur ses droits et l’absence des traductions des documents y afférents. Il soutient, en particulier, que peu après son arrestation, les autorités ont ordonné de manière automatique son expulsion sans examiner son cas et qu’elles ont demandé aux autorités turques de l’appréhender et de le renvoyer en Iran. En ce qui concerne les recours mentionnés par le Gouvernement, le requérant soutient qu’ils n’étaient pas effectifs contre un renvoi éventuel en Iran en raison des défauts allégués du système d’examen des demandes d’asile en Grèce. Il affirme qu’il ne saurait d’aucune manière lui être reproché d’avoir quitté la Grèce avant la notification de la décision rejetant sa demande d’asile, car, conscient de ces défaillances, il tentait justement d’éviter son renvoi éventuel en Iran.

2. Appréciation de la Cour

67. En l’occurrence, la Cour estime que les exceptions soulevées par le Gouvernement par rapport à la première partie du grief, à savoir les défaillances du système d’examen de sa demande d’asile, sont étroitement liées à la substance du grief relatif à l’article 13 de la Convention et décide de les joindre au fond.

68. En revanche, en ce qui concerne la seconde partie du grief, soit le risque que le requérant encourt d’être expulsé en Turquie, puis en Iran, la Cour constate que l’intéressé avait quitté la Grèce et s’est rendu en Suède avant que la décision concernant sa demande d’asile lui soit notifiée. Il s’ensuit que le requérant ne peut pas se prétendre victime à cet égard et que cette partie du grief doit être rejetée comme incompatible ratione personae avec la Convention, en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de celle-ci.

69. La Cour constate par ailleurs que la première partie du grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Elle relève en outre qu’elle ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de la déclarer recevable.

B. Sur le fond

70. Dans les affaires mettant en cause l’expulsion d’un demandeur d’asile, la Cour a précisé qu’elle se gardait d’examiner elle-même les demandes d’asile ou de contrôler la manière dont les États remplissent leurs obligations découlant de la Convention de Genève. Sa préoccupation essentielle est de savoir s’il existe des garanties effectives qui protègent le requérant contre un refoulement arbitraire, direct ou indirect, vers le pays qu’il a fui (voir, parmi d’autres, M.S.S. c. Belgique et Grèce [GC], no 30696/09, § 286, CEDH 2011 T.I. c. Royaume-Uni (déc.), no 43844/98, CEDH 2000-III, Müslim c. Turquie, no 53566/99, §§ 72-76, 26 avril 2005).

71. Toutefois, compte tenu de l’importance que la Cour attache à l’article 3 et de la nature irréversible du dommage susceptible d’être causé en cas de réalisation du risque de torture ou de mauvais traitements, l’effectivité d’un recours au sens de l’article 13 demande impérativement un contrôle attentif par une autorité nationale (Chamaïev et autres c. Géorgie et Russie, no 36378/02, § 448, CEDH 2005‑III), un examen indépendant et rigoureux de tout grief aux termes duquel il existe des motifs de croire à un risque de traitement contraire à l’article 3 (Jabari, précité, § 50) ainsi qu’une célérité particulière (Batı et autres c. Turquie, nos 33097/96 et 57834/00, § 136, CEDH 2004‑IV) ; il requiert également que les intéressés disposent d’un recours de plein droit suspensif (Čonka c. Belgique, no 51564/99, §§ 81-83, CEDH 2002‑I, Gebremedhin [Gaberamadhien], précité, § 66, et I.M. c. France, no 9152/09, §§ 156-160, 2 février 2012).

72. Pour déterminer si l’article 13 s’applique en l’espèce, la Cour doit donc rechercher si le requérant peut, de manière défendable, faire valoir que son éloignement vers l’Iran porterait atteinte à l’article 3 de la Convention.

73. La Cour note que, lors de l’introduction de la requête, le requérant a exposé en détail les raisons pour lesquelles il a été obligé de quitter l’Iran et il a produit, à l’appui de ses craintes dans son pays d’origine, des copies des articles qu’il a écrits. La Cour a également à sa disposition une copie de son permis de séjour en Suède, où le requérant s’est vu accorder le statut de réfugié. Elle observe à cet égard que les autorités suédoises ont déjà reconnu le risque qu’il encourait et encourt toujours dans son pays d’origine.

74. Pour la Cour, ces éléments montrent qu’il existait prima facie des risques sérieux et avérés que le requérant pourrait subir des traitements contraires à l’article 3 de la Convention en cas de renvoi en Iran. Elle estime dès lors que le requérant a un grief défendable sous l’angle de l’article 3 de la Convention.

75. Cela dit, dans la présente affaire, la Cour n’a pas à se substituer aux autorités nationales et évaluer les risques que le requérant encourrait s’il était renvoyé en Iran. Il lui importe seulement de savoir s’il existait en l’espèce des garanties effectives qui protègent le requérant contre un refoulement arbitraire, direct ou indirect, vers son pays d’origine.

76. La Cour rappelle que, dans son arrêt M.S.S. précité, elle a relevé les carences du système grec d’asile, tel qu’il était en place à l’époque d’application du décret présidentiel no 81/2009 et notamment celles liées à l’accès à la procédure d’examen des demandes d’asile (paragraphes 300-302, 315, 318 et 320 de l’arrêt précité).

77. La Cour relève que le Gouvernement et le requérant consacrent de longs développements dans leurs observations aux conditions de réalisation des programmes d’assistance aux demandeurs d’asile financés par l’Union européenne et par l’État et, notamment, à la question de savoir si, à l’époque des faits, le Conseil grec pour les réfugiés avait la possibilité d’assister le requérant dans la procédure d’asile. La Cour estime qu’il ne lui appartient pas d’entrer dans de telles considérations pour se prononcer sur la présente espèce.

78. La Cour observe que certaines des considérations générales de la Cour dans l’arrêt M.S.S. c. Belgique et Grèce sur la procédure d’asile en Grèce sont confirmées par les faits de la présente cause. En effet, le Conseil grec pour les réfugiés avait informé à plusieurs reprises par écrit les autorités de la volonté du requérant de déposer une demande d’asile, ce qui n’est pas contesté par le Gouvernement. Cependant, cette demande n’a été enregistrée que le 26 août 2010. En outre, la demande d’asile du requérant a été rejetée en première instance selon une décision rédigée de manière stéréotypée (voir, paragraphe 22 ci-dessus). Qui plus est, la Cour observe qu’elle a déjà considéré que le premier recours invoqué par le Gouvernement, à savoir le recours en annulation prévu par le décret présidentiel no 81/2009, ne constituait pas un recours effectif (voir paragraphe 76 ci-dessus). Quant au recours prévu par le décret présidentiel no 114/2010, la Cour note que celui-ci n’a été introduit que le 22 novembre 2010, soit après le départ du requérant de la Grèce.

79. Dès lors, la Cour conclut qu’il y a eu violation de l’article 13 combiné avec l’article 3 en raison des défaillances du système grec d’asile, à l’époque des faits. Il s’ensuit qu’il ne saurait être reproché au requérant de ne pas avoir épuisé les voies de recours internes et que l’exception préliminaire de non-épuisement du Gouvernement (paragraphe 65 ci-dessus) ne saurait être accueillie.

IV. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 1 DE LA CONVENTION

80. Invoquant l’article 5 § 1 de la Convention, le requérant se plaint également que sa détention depuis son arrestation était arbitraire, car elle était le résultat du refus initial d’enregistrement par les autorités de sa demande d’asile, qu’elle s’était poursuivie après cet enregistrement et alors que l’expulsion n’était plus possible, qu’elle n’était pas nécessaire pour contrôler son identité et ne servait en rien au bon déroulement de la procédure d’asile.

A. Sur la recevabilité

81. Constatant que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

1. Arguments des parties

82. Le Gouvernement soutient que la détention du requérant était prévue par la loi, à savoir l’article 76 de la loi no 3386/2005 et que sa légalité a été examinée par un tribunal. Il affirme que lorsque le requérant a déposé sa demande d’asile, il se trouvait déjà en détention en vue de son expulsion. L’article 13 du décret no 90/2008 prévoyait, à l’époque des faits, que la personne qui avait introduit une demande d’asile et à l’encontre de laquelle une procédure d’expulsion était pendante restait en détention et que sa demande était examinée en priorité. Le 22 novembre 2010, cet article a été remplacé par l’article 13 du décret présidentiel no 114/2010, qui prévoyait la continuation de détention d’un étranger si les conditions mentionnées dans cet article étaient remplies. Le Gouvernement ajoute que dès son arrestation, le requérant avait la possibilité de formuler des objections contre l’émission imminente d’une décision d’expulsion, ainsi que des objections sur sa détention, sans qu’il ne soit nécessaire d’attendre la notification de la décision d’expulsion.

83. Le requérant rétorque que sa détention, qui a débuté le 2 août 2010, était arbitraire. Il affirme que sa situation et son statut en tant que demandeur d’asile n’ont pas été pris en considération et que la décision de lui imposer la mesure de détention avait été prise automatiquement. La loi no 3386/2005 n’étant pas applicable aux demandeurs d’asile, sa détention n’était pas justifiée. En outre, après l’enregistrement de sa demande d’asile, le 26 août 2010, la décision de son expulsion avait été suspendue. Toutefois, les autorités n’ont pas délivré une nouvelle décision de détention, cette dernière continuant à avoir comme seul but d’assurer son expulsion. Le requérant soutient enfin que sa détention était arbitraire en raison de sa durée, combinée avec les conditions de celle-ci.

2. Appréciation de la Cour

84. En ce qui concerne les principes généraux régissant l’application de l’article 5 § 1 de la Convention dans des affaires soulevant des questions similaires à celles posées par la présente, la Cour renvoie à sa jurisprudence pertinente en la matière (voir notamment, Saadi c. Royaume-Uni [GC], no 13229/03, §§ 64 et 74, CEDH 2008, Mooren c. Allemagne [GC], no 11364/03, §§ 72-81, CEDH 2009, Chahal c. Royaume-Uni, 15 novembre 1996, § 73, Recueil 1996‑V, Baranowski c. Pologne, no 28358/95, §§ 50-52, CEDH 2000-III, Barjamaj, précité, §§ 36-38, 2 mai 2013, et Khuroshvili c. Grèce, no 58165/10, §§ 107-108, 12 décembre 2013).

85. En l’occurrence, la Cour note, en premier lieu, que la privation de liberté du requérant était fondée sur l’article 76 de la loi no 3386/2005. Partant, la Cour estime que la situation litigieuse tombe sous le coup de l’alinéa f) de l’article 5 § 1 de la Convention et trouve un fondement en droit interne. La Cour rappelle sur ce point que l’article 5 § 1 f) n’exige pas que la détention d’une personne contre laquelle une procédure d’expulsion est en cours soit considérée comme raisonnablement nécessaire, par exemple pour l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir. (Chahal, précité, § 112). Au vu de ce qui précède, la Cour considère que la détention du requérant servait à l’empêcher de rester irrégulièrement sur le territoire grec et à garantir son éventuelle expulsion. Par conséquent, elle estime que la bonne foi des autorités compétentes ne peut pas être mise en question en l’espèce.

86. En second lieu, s’agissant de la durée de la détention, la Cour rappelle que, dans le contexte de l’article 5 § 1 f), seul le déroulement de la procédure d’expulsion justifie la privation de liberté fondée sur cette disposition et que, si la procédure n’est pas menée avec la diligence requise, la détention cesse d’être justifiée (Chahal, précité, § 113 ; Gebremedhin [Gaberamadhien] c. France, no 25389/05, § 74, CEDH 2007‑II).

87. Or, la Cour relève tout d’abord que le requérant a été détenu pour une période de deux mois environ, à savoir du 2 août au 8 octobre 2010, date à laquelle il a été remis en liberté suite à la décision du tribunal administratif. La Cour estime qu’un tel délai ne doit pas être considéré en principe comme excessif pour l’accomplissement des formalités administratives en vue de la matérialisation de son expulsion.

88. Quant à la demande d’asile, la Cour relève qu’il ressort du droit interne que si une demande suspend l’exécution de la mesure d’expulsion, elle ne suspend pas celle de la détention ; le droit interne impose seulement que la demande d’asile soit examinée « en priorité absolue » (voir paragraphe 35 ci-dessus). Or, en l’espèce, le requérant a été libéré un mois et treize jours après l’enregistrement de sa demande d’asile, le 26 août 2010.

89. En dernier lieu, ayant conclu à une violation de l’article 3 en raison des conditions de détention dans les centres de rétention dans lesquels le requérant a été détenu (paragraphe 52 ci-dessus), la Cour n’estime pas nécessaire de se placer une fois de plus sur ce terrain sous l’angle de l’article 5 § 1 f) (voir Horshill, précité, § 65).

90. Au vu de ce qui précède, la Cour considère que la détention du requérant n’était pas arbitraire et que l’on ne saurait considérer qu’elle n’était pas « régulière » au sens de l’article 5 § 1 f) de la Convention.

V. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 4 DE LA CONVENTION

91. Le requérant se plaint également de l’inefficacité du contrôle juridictionnel de la détention, et notamment du fait que, pendant sa détention il lui a été impossible, faute d’information et d’assistance, de saisir une juridiction qui se serait prononcée sur la légalité de cette détention.

A. Sur la recevabilité

92. La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

93. Le Gouvernement allègue qu’en vertu de la loi no 3900/2010, l’article 76 de la loi no 3386/2005 a été modifié et le juge administratif a dorénavant expressément le pouvoir de contrôler la légalité de la détention des personnes qui se trouvent sous écrou en vue de leur expulsion. En ce sens, le Gouvernement soumet à la Cour des décisions adoptées par des présidents des tribunaux administratifs en 2011 et 2012 dans lesquelles l’état de la santé des intéressés ou le fait qu’ils étaient des mineurs a été pris en compte afin de conclure si leur détention devait être poursuivie. Le Gouvernement affirme que le moyen de droit prévu par l’article 76 de la loi no 3386/2005 est effectif au sens de l’article 5 § 4 et que des griefs tirés des conditions de détention pouvaient être soulevés au travers de ce recours. Il ajoute que l’effectivité de cette voie de recours est prouvée en soi, puisque les objections du 8 octobre 2010 ont été acceptées.

94. Le requérant rétorque qu’à l’époque des faits l’article 76 de la loi no 3386/2005 ne lui permettait pas de contester la légalité de sa détention.

2. Appréciation de la Cour

95. En ce qui concerne les principes généraux régissant l’application de l’article 5 § 4 de la Convention dans des affaires soulevant des questions similaires à celles posées par la présente, la Cour renvoie à sa jurisprudence pertinente en la matière (voir notamment, Dougoz c. Grèce, no 40907/98, § 61, CEDH 2001‑II, S.D. c. Grèce, précité, 11 juin 2009, A.A. c. Grèce, précité, et Herman et Serazadishvili c. Grèce, no 26418/11 et 45884/11, § 71, 24 avril 2014).

96. En l’espèce, la Cour note, tout d’abord, qu’en ce qui concerne les objections qu’un étranger peut former à l’encontre de la décision ordonnant sa détention en vue de son expulsion, le quatrième paragraphe de l’article 76 de la loi no 3386/2005 prévoyait, à l’époque des faits, que ledit organe judiciaire pouvait examiner la décision de la détention uniquement sur le terrain du risque de fuite ou de danger pour l’ordre public. La Cour a, à plusieurs reprises, considéré que cette formulation était empreinte d’ambiguïté dans la mesure où, tel qu’il était rédigé, l’article 76 § 4 n’accordait pas expressément au juge le pouvoir d’examiner la légalité du renvoi qui constituait, selon le droit grec, le fondement juridique de la détention (R.U. c. Grèce, précité, § 103 ; A.A. c. Grèce, précité, § 73 ; Tabesh, précité, § 62 ; S.D. c. Grèce, précité, § 73).

97. Il est vrai qu’en vertu de la loi no 3900/2010 le paragraphe 4 de l’article 76 de la loi no 3386/2005 a été modifié et prévoit désormais que le juge compétent « se prononce aussi sur la légalité de la détention ou de sa prolongation », ce qui inclut aussi les conditions matérielles de détention. Or, la Cour note que la loi no 3900/2010 est entrée en vigueur le 1er janvier 2011, tandis qu’en l’occurrence les faits litigieux, quant au grief tiré de l’article 5 § 4, ont eu lieu entre les mois d’août et octobre 2010. Partant, les conclusions auxquelles la Cour est déjà parvenue dans la jurisprudence précitée quant à l’effectivité des objections devant le président du tribunal administratif sont aussi valables dans la présente affaire (voir Herman et Serazadishvili, précité, § 72). En se penchant sur les circonstances particulières de l’espèce, la Cour observe que la décision no P80/2010 de la présidente du tribunal administratif d’Alexandroupoli a rejeté les objections du requérant à l’égard de sa mise en détention sans tirer des conséquences du fait que celui-ci avait formellement demandé l’asile et sans examiner les conditions de détention du requérant. Elle s’est contentée de constater la volonté des autorités d’améliorer les conditions de détention dans l’avenir. Le fait que le tribunal administratif a accepté les secondes objections déposées par le requérant, en ne s’exprimant d’ailleurs pas sur la légalité de la détention, ne saurait pour autant influer sur le caractère effectif du premier recours.

98. La Cour considère que les insuffisances du droit interne à l’époque des faits quant à l’effectivité du contrôle juridictionnel de la mise en détention aux fins d’expulsion ne peuvent se concilier avec les exigences de l’article 5 § 4 de la Convention. Elle conclut donc qu’il y a eu violation de cette disposition.

VI. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 2 DE LA CONVENTION

99. Invoquant l’article 5 § 2 de la Convention, le requérant se plaint qu’il n’a pas été informé dans une langue qu’il comprenait des motifs de sa détention et des recours existants contre la décision le plaçant en détention.

100. Eu égard au constat relatif à l’article 5 § 4 (paragraphe 98 ci-dessus), la Cour estime qu’il n’y a pas lieu d’examiner s’il y a eu, en l’espèce, violation de cette disposition (voir, entre autres, Rahimi c. Grèce, précité).

VII. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

101. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

102. Le requérant réclame 15 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral qu’il aurait subi.

103. Le Gouvernement estime que la somme réclamée est excessive et arbitraire et affirme que le constat de violation constituerait une satisfaction équitable suffisante.

104. La Cour considère que le requérant a souffert un préjudice moral, du fait de la violation de ses droits garantis par les articles 3, 5 § 4 et 13 de la Convention. Ce préjudice moral ne se trouve pas suffisamment compensé par les constats de violation. Statuant en équité, la Cour considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant la somme de 6 500 EUR pour préjudice moral, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt.

B. Frais et dépens

105. Le requérant demande également, factures à l’appui, 1 230 EUR pour les frais et dépens engagés devant les juridictions internes (objections devant le tribunal administratif, demandes auprès l’administration, visite en détention) et 615 EUR pour ceux engagés devant la Cour.

106. Le Gouvernement soutient que les sommes réclamées ne sont pas raisonnables et que le requérant ne produit aucun élément établissant le paiement d’un montant quelconque.

107. Selon la jurisprudence constante de la Cour, l’allocation de frais et dépens au titre de l’article 41 présuppose que se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et, de plus, le caractère raisonnable de leur taux (Iatridis c. Grèce (satisfaction équitable) [GC], no 31107/96, § 54, CEDH 2000-XI).

108. En l’occurrence, eu égard aux justificatifs produits, notamment les factures susmentionnées, et aux critères mentionnés ci-dessus, la Cour estime raisonnable d’allouer au requérant 1 230 EUR pour les frais et dépens engagés devant les juridictions internes ainsi que 615 EUR pour ceux engagés devant elle, plus tout montant pouvant être dû par lui à titre d’impôt.

C. Intérêts moratoires

109. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Joint au fond l’exception du Gouvernement tirée du non-épuisement des voies de recours internes et la rejette ;

2. Déclare la requête recevable quant aux griefs tirés de l’article 3 de la Convention en ce qui concerne les conditions de détention du requérant, de l’article 13 combiné avec l’article 3 de la Convention en ce qui concerne l’absence d’un recours effectif offert au requérant pour se plaindre de ses conditions de détention et du fait des défaillances de la procédure d’asile, des articles 5 §§ 1, 2 et 4 de la Convention, et irrecevable pour le surplus ;

3. Dit qu’il y a eu violation des articles 3 et 13 de la Convention en ce qui concerne les conditions de détention aux postes frontières de Soufli et Venna ainsi que l’absence d’un recours effectif offert au requérant pour se plaindre de ces conditions ;

4. Dit qu’il y a eu violation de l’article 13, combiné avec l’article 3 de la Convention, en ce qui concerne les défaillances de la procédure d’asile ;

5. Dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 5 § 1 de la Convention ;

6. Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 4 de la Convention ;

7. Dit qu’il n’y a pas lieu d’examiner le grief tiré de l’article 5 § 2 de la Convention ;

8. Dit

a) que l’État défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois, les sommes suivantes :

i) 6 500 EUR (six mille cinq cents euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral ;

ii) 615 EUR (six cent quinze euros) pour les frais et dépens engagés devant la Cour ainsi que 1 230 EUR (mille deux cent trente euros) pour ceux engagés devant les juridictions internes, plus tout montant pouvant être dû par lui à titre d’impôt ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

9. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 30 juillet 2015, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

Søren NielsenIsabelle Berro
GreffierPrésidente


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