La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/07/2013 | CEDH | N°001-123236

CEDH | CEDH, AFFAIRE SUSO MUSA c. MALTE [Extraits], 2013, 001-123236


QUATRIÈME SECTION

affaire SUSO MUSA c. MALTE

(Requête no 42337/12)

ARRÊT

[Extraits]

STRASBOURG

23 juillet 2013

DÉFINITIF

09/12/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme




En l'affaire Suso Musa c. Malte,

La Cour européenne des droits de l'homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :

Ineta Ziemele, présidente,
David Thór Björgvinsson,
George Nicolaou,
Ledi Bianku,
Zdravk

a Kalaydjieva,
Vincent A. De Gaetano,
Paul Mahoney, juges,
et de Fatoş Aracı, greffière adjointe de section,

Après en avoir délibéré en chambre du ...

QUATRIÈME SECTION

affaire SUSO MUSA c. MALTE

(Requête no 42337/12)

ARRÊT

[Extraits]

STRASBOURG

23 juillet 2013

DÉFINITIF

09/12/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme

En l'affaire Suso Musa c. Malte,

La Cour européenne des droits de l'homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :

Ineta Ziemele, présidente,
David Thór Björgvinsson,
George Nicolaou,
Ledi Bianku,
Zdravka Kalaydjieva,
Vincent A. De Gaetano,
Paul Mahoney, juges,
et de Fatoş Aracı, greffière adjointe de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 2 juillet 2013,

Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 42337/12) dirigée contre la République de Malte et dont la Cour a été saisie par M. Ibrahim Suso Musa (« le requérant ») le 4 juillet 2012 en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Devant la Cour, le requérant a été représenté par Me N. Falzon, avocat à La Valette. Le gouvernement maltais (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, le Dr P. Grech, Attorney-General.

3. Dans sa requête, le requérant alléguait que la détention dont il avait fait l'objet n'était pas conforme à l'article 5 § 1 de la Convention et qu'il n'avait pas disposé d'un recours effectif pour en contester la légalité, au mépris de l'article 5 § 4 de la Convention.

4. Le 22 octobre 2012, la requête a été communiquée au Gouvernement. Comme le permet l'article 29 § 1 de la Convention, il a été décidé que la Cour se prononcerait en même temps sur la recevabilité et sur le fond de la requête.

5. Des observations ont été reçues de la Commission internationale de juristes, que le président de la chambre avait autorisée à intervenir dans la procédure (article 36 § 2 de la Convention).

EN FAIT

I. Les circonstances de l'espÈce

6. Le requérant, qui se dit ressortissant sierra-léonais, est né en 1983. À l'époque où il a introduit sa requête devant la Cour, il était incarcéré dans au centre de rétention de Safi Barracks.

A. Les circonstances de l'espèce

7. Le 8 avril 2011, le requérant entra illégalement à Malte par bateau. À son arrivée, il fut arrêté par la police. Considéré comme étant un immigrant clandestin au sens de l'article 5 de la loi sur l'immigration (chapitre 217 de la législation maltaise) au motif qu'il était entré irrégulièrement sur le territoire maltais et qu'il ne disposait pas de moyens suffisants pour subvenir à ses besoins, il se vit remettre un document contenant à la fois une décision de retour et une décision d'éloignement. La décision de retour l'informait qu'il pouvait demander à bénéficier d'un délai de départ volontaire. La moitié inférieure du document en question contenait une décision d'éloignement fondée sur le rejet d'une demande d'octroi d'un délai de départ volontaire. Elle précisait que ce rejet était motivé par le fait que l'intéressé risquait de prendre la fuite, que sa demande d'autorisation de séjour était manifestement infondée ou frauduleuse, et qu'il représentait une menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale (...)

8. En réalité, le requérant n'a jamais pu demander l'octroi d'un délai de départ volontaire puisque, comme indiqué ci-dessus, le bénéfice de cette procédure lui avait été refusé à l'instant même où on l'avait informé de la possibilité de s'en prévaloir. Les autorités ne lui ont jamais fait connaître les motifs de cette décision et l'intéressé n'a jamais eu l'occasion de fournir des informations, des documents et/ou d'autres éléments de preuve à l'appui d'une éventuelle demande d'octroi d'un délai de départ volontaire.

9. La décision de retour et d'éloignement informait également le requérant qu'il pouvait la contester devant la Commission de recours en matière d'immigration (Immigration Appeals Board – « la CRI ») dans un délai de trois jours ouvrables. Elle ne renfermait aucune autre information sur la procédure de recours, notamment sur la disponibilité d'une assistance juridique. Ce dernier point est contesté par le Gouvernement.

10. L'intéressé fut placé en rétention à Safi Barracks sur le fondement de la décision de retour et d'éloignement, conformément à la loi sur l'immigration.

B. La procédure d'asile

11. Le 14 avril 2011, alors qu'il était détenu à Safi Barracks, le requérant accomplit la première étape de sa demande d'asile à Malte en adressant aux autorités un questionnaire préalable.

12. Le 31 décembre 2011, le Commissariat aux réfugiés (Office of the Refugee Commissioner) rejeta la demande d'asile présentée par l'intéressé au motif qu'elle ne satisfaisait pas aux critères d'attribution du statut de réfugié.

13. Le 24 janvier 2012, le requérant contesta cette décision devant la Commission de recours des réfugiés (Refugee Appeals Board). Les parties présentèrent leurs observations respectives le 29 mars 2012.

14. Le 2 avril 2012, la Commission de recours des réfugiés rejeta le recours formé par l'intéressé, mettant ainsi un terme définitif à la procédure d'asile, près de douze mois après l'arrivée du requérant à Malte.

C. La procédure visant à contester la légalité de la détention

15. Entre-temps, le 28 juin 2011, alors que la procédure d'asile décrite ci-dessus était encore pendante, le requérant avait introduit auprès de la CRI un recours contestant la légalité de sa détention au regard de la loi sur l'immigration. Le recours en question était fondé sur l'article 5 § 1 de la Convention et l'article 11 § 10 des normes et procédures communes applicables au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier contenues dans l'avis juridique no 81 de 2011 (« l'AJ no 81 » – voir « Le droit et la pratique internes pertinents » ci-dessous). Dans son recours, le requérant soutenait que son placement et son maintien en détention étaient illégaux. En ce qui concerne son placement en détention, il avançait qu'on lui avait notifié une décision de retour et d'éloignement sans avoir recherché, comme l'exigeait selon lui l'article 11 § 8 de l'AJ no 81, si « d'autres mesures suffisantes et moins coercitives » auraient pu lui être appliquées, et que les autorités compétentes avaient décidé de sa détention en jugeant a priori – et sans avoir examiné sa situation individuelle – qu'il risquait de s'enfuir et qu'il tentait de se soustraire ou de faire obstacle à la procédure de retour ou d'éloignement, ajoutant que la décision litigieuse avait été prise sans qu'on lui eût laissé la possibilité de demander un départ volontaire. Par ailleurs, il avançait que son maintien en détention était lui aussi illégal, arguant que l'article 12 des règles de procédure applicables à l'examen des demandes du statut de réfugié (avis juridique no 243 de 2008 – « l'AJ no 243 » – voir « Le droit et la pratique internes pertinents » ci‑dessous) interdisait aux autorités d'ouvrir ou de poursuivre une procédure de retour dès lors qu'une personne avait présenté une demande d'asile, ce qu'il avait fait en avril 2011.

16. Le 27 septembre 2011, les services de l'immigration répondirent au recours que le requérant avait introduit auprès de la CRI. Celui-ci répliqua par écrit à leurs observations. Le 22 novembre 2011, la CRI délivra aux parties une ordonnance posant aux parties des questions précises et leur enjoignant d'y répondre. L'intéressé déposa de nouvelles observations dans lesquelles il signalait le retard que prenait la procédure, et les services de l'immigration soumirent eux aussi des observations finales.

17. Le 5 juillet 2012, plus d'un an après l'introduction du recours formé par le requérant, la CRI débouta l'intéressé. Pour se prononcer ainsi, elle releva que si l'article 11 § 1 de l'AJ no 81 (disposition figurant dans la partie IV de ce texte) ne s'appliquait pas aux personnes qui avaient été appréhendées ou interceptées par les autorités compétentes lors d'un franchissement irrégulier de la frontière extérieure de Malte par bateau ou par avion et qui n'avaient pas obtenu par la suite une autorisation de séjour à Malte, le requérant avait acquis un droit de séjour (« joqgħod ») à Malte en introduisant sa demande d'asile. Elle admit que l'intéressé s'était à juste titre prévalu de l'article 12 § 1 de l'AJ no 243, lequel reconnaissait aux demandeurs d'asile le droit d'entrer et de séjourner à Malte dans l'attente d'une décision sur leur demande, et que le requérant relevait de ce régime lorsqu'il avait introduit son recours auprès d'elle. Elle précisa que, si la demande d'asile avait encore été pendante, la partie IV de l'AJ no 81 aurait effectivement été applicable à l'intéressé, notamment parce qu'un individu ne pouvait être maintenu en rétention que si une procédure d'éloignement était en cours ou s'il risquait de s'enfuir. Toutefois, elle releva que la situation de l'intéressé avait changé lorsque, le 2 avril 2012, sa demande d'asile avait été rejetée par une décision définitive qui avait rendu la partie IV de l'AJ no 81 inapplicable à son égard. En conséquence, elle jugea qu'elle ne pouvait plus statuer sur la demande d'asile sous l'angle de l'article 11 § 8 de l'AJ no 81. Elle observa également que le requérant ne contestait pas la légalité de sa détention sur le terrain de la durée de celle-ci. Elle se déclara en tout état de cause incompétente pour statuer sur le point de savoir s'il y avait eu violation de l'article 5 de la Convention.

D. La procédure pénale

18. Le 16 août 2011, alors que les procédures décrites ci-dessus étaient encore pendantes, une révolte éclata à Safi Barracks, qui fit plusieurs blessés chez les migrants placés en rétention, la police et l'armée maltaise. Le même jour, vingt-trois migrants furent arrêtés et déférés à la justice en raison de ces événements. L'intéressé figurait au nombre des personnes arrêtées et poursuivies, entre autres, pour dégradation de biens privés, actes de violence contre des agents de police, refus d'obtempérer à des ordres légaux et atteinte à la paix et à l'ordre public. L'intéressé et les autres personnes arrêtées furent incarcérés à la maison d'arrêt de Corradino dans l'attente de l'issue des poursuites dont ils faisaient l'objet.

19. Le 17 août 2011, la Magistrates' Court jugea que l'arrestation du requérant et des autres migrants était justifiée et conforme à la loi. Les intéressés furent placés en détention provisoire.

20. Le 30 janvier 2012, la Magistrates' Court accorda au requérant une mesure de libération conditionnelle qui lui permit de quitter la maison d'arrêt de Corradino et de retourner au centre de rétention de Safi Barracks.

E. Les dernières informations reçues par la Cour

21. Le requérant fut libéré de Safi Barracks le 21 mars 2013, après 546 jours de rétention administrative. À cette date, la procédure pénale relative à la révolte qui avait éclaté à Safi Barracks était toujours pendante.

22. À une date non précisée de janvier 2013, les autorités interrogèrent le requérant en présence d'un représentant du consulat de la République de Sierra Leone en vue de préparer l'expulsion de l'intéressé. Par un communiqué du 11 février 2012, le consulat informa les autorités maltaises que le requérant n'était pas originaire de la Sierra Leone et qu'il ne pouvait aucunement les aider puisque le requérant n'était pas originaire de la Sierra Leone.

II. Le droit et la pratique internes pertinents

A. La loi sur l'immigration

23. Les procédures applicables à l'immigration et à l'asile sont principalement régies par la loi sur l'immigration (« la loi »), qui figure dans le chapitre 217 de la législation maltaise (...).

24. Les articles 6 et 9 de ce texte, relatifs aux pouvoirs du directeur des services de l'immigration (Principal Immigration Officer) en matière d'octroi du droit d'entrée et à la procédure y afférente, sont ainsi libellés :

Article 6

« 1) Sans préjudice des droits découlant des parties précédentes, le directeur des services de l'immigration peut, pour l'application de la présente loi,

(...)

b) octroyer à une personne arrivant à Malte une autorisation d'entrée ou une autorisation d'entrée et de séjour sur le territoire maltais, dans les conditions et pour la durée qu'il jugera approprié de fixer ;

(...) »

Article 9

« 1) Sans préjudice des articles figurant dans la partie III de la présente loi, l'autorisation d'entrée ou l'autorisation d'entrée et de séjour sur le territoire maltais est attestée par la délivrance à la personne concernée d'un permis écrit ou par une inscription ad hoc sur le passeport de celle-ci, étant entendu que les conditions mises à l'octroi de l'autorisation pourront figurer dans un document distinct qui sera remis à cette personne. »

(...)

29. L'article 25A de la loi régit les recours et les demandes – introduits en vertu des dispositions de la loi ou des règlements pris pour son application ou en vertu d'autres dispositions légales – dont la CRI peut être saisie et sur lesquels elle doit se prononcer. Dans ses passages pertinents en l'espèce, l'article 25A se lit ainsi :

« (...)

9) La [CRI] est également compétente pour statuer, selon les modalités fixées aux paragraphes suivants du présent article, sur les demandes introduites par des personnes ayant été placées en détention sur le seul fondement d'une décision d'expulsion ou d'éloignement et qui tendent à leur élargissement dans l'attente d'une décision à intervenir sur une requête introduite en vertu de la loi sur les réfugiés ou d'un autre texte pendant que la procédure d'expulsion est en cours d'instruction.

10) La [CRI] ne peut prononcer une remise en liberté en application du paragraphe 9 du présent article que si elle estime, au regard de l'ensemble des circonstances de la cause, que la durée du maintien en détention de la personne concernée est déraisonnable ou qu'il n'existe pas de possibilité réelle d'expulsion dans un délai acceptable.

Dès lors qu'une personne dont la demande de protection au titre de la loi sur les réfugiés a été rejetée par une décision définitive refuse de coopérer avec le directeur des services de l'immigration en vue de son retour vers le pays dont elle est originaire ou tout autre pays ayant accepté de l'accueillir, la [CRI] peut refuser de la remettre en liberté.

11) La [CRI] rejette la demande de remise en liberté :

a) lorsque l'identité de l'auteur de la demande – notamment la nationalité de celui-ci – reste à vérifier, en particulier s'il a détruit ses documents de voyage ou d'identité ou utilisé de faux documents dans le but de tromper les autorités ;

b) lorsqu'une demande introduite en vertu de la loi sur les réfugiés est fondée sur des éléments qui restent à établir et que cette opération requiert le maintien en détention de l'auteur de la demande ;

c) lorsque la remise en liberté de l'auteur de la demande pourrait menacer la sécurité publique ou l'ordre public.

12) Une personne remise en liberté en application des dispositions des paragraphes 9 à 11 du présent article peut être derechef placée en détention dans l'attente de son éloignement du territoire maltais dès lors que le directeur des services de l'immigration estime qu'il existe une possibilité réelle d'expulsion ou que cette personne refuse de coopérer à son renvoi vers son pays d'origine ou tout autre pays ayant accepté de l'accueillir et qu'aucune procédure au titre de la loi sur les réfugiés n'est pendante.

13) Les remises en liberté accordées en vertu des paragraphes 9 à 12 du présent article sont subordonnées à la condition que les personnes concernées se présentent aux services de l'immigration au moins une fois par semaine ou aussi souvent que la [CRI] en décidera. »

B. La réglementation pertinente

30. Les dispositions pertinentes en l'espèce de la partie IV du règlement no 217.12 relatif aux normes et procédures communes applicables au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (AJ no 81 de 2011) transposant la Directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier se lisent ainsi :

Article 11

« 1) Les dispositions de la partie IV ne s'appliquent pas aux ressortissants de pays tiers faisant l'objet d'une décision de refus d'entrée conformément à l'article 13 du code frontières Schengen, ou arrêtés ou interceptés par les autorités compétentes à l'occasion du franchissement irrégulier par voie terrestre, maritime ou aérienne de la frontière extérieure de Malte et qui n'ont pas obtenu par la suite l'autorisation ou le droit de séjourner à Malte ;

2) Les décisions de retour, d'interdiction d'entrée et d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles.

Les informations relatives aux motifs de fait peuvent être limitées lorsque la loi autorise la rétention de certaines informations, notamment lorsque leur divulgation menacerait la sécurité nationale, la sécurité publique ou la prévention, la détection des infractions pénales ainsi que les enquêtes et les poursuites en la matière.

3) Les décisions de retour sont rendues au moyen d'un formulaire type dont les principaux éléments sont expliqués dans au moins cinq des langues que les ressortissants de pays tiers comprennent ou dont il est raisonnable de supposer qu'ils les comprennent.

4) La [CRI] peut être saisie par des ressortissants de pays tiers d'une demande de contrôle des décisions de retour mentionnées au paragraphe 2 ci-dessus et peut surseoir à l'exécution de celles-ci.

5) Aux fins de l'application du paragraphe 4 ci-dessus, les ressortissants de pays tiers peuvent se faire assister d'un conseil juridique et obtenir, s'ils y sont éligibles, une assistance juridique gratuite.

6) Le directeur des services de l'immigration fournit sur demande une traduction écrite ou orale des principaux éléments des décisions de retour et des informations concernant les voies de recours disponibles, dans une langue dont il est raisonnable de supposer que les ressortissants de pays tiers la comprennent.

(...)

8) S'il n'existe pas d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, le directeur des services de l'immigration peut placer en rétention un ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet d'une procédure de retour à condition toutefois que la rétention vise à préparer le retour ou à procéder à l'éloignement de la personne concernée, en particulier :

a) s'il existe un risque de fuite, ou

b) si le ressortissant du pays tiers se soustrait à la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement ou y fait obstacle.

La rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que la procédure d'éloignement est en cours d'instruction et menée avec toute la diligence requise.

9) La décision de rétention découle d'une décision d'éloignement prise par le directeur des services de l'immigration et expose les motifs de fait et de droit sur lesquels elle est fondée.

10) Les ressortissants de pays tiers relevant des dispositions du paragraphe 8 ci-dessus peuvent former devant la [CRI] un recours contestant la légalité de leur rétention, laquelle fera l'objet d'un contrôle juridictionnel accéléré.

11) Les ressortissants de pays tiers habilités à engager la procédure prévue au paragraphe 10 ci-dessus sont immédiatement informés de l'existence de celle-ci.

12) Les ressortissants de pays tiers sont immédiatement remis en liberté si la [CRI] juge que leur rétention n'est pas légale. »

31. Les passages pertinents en l'espèce de l'article 12 des règles de procédure applicables à l'examen des demandes du statut de réfugié (AJ no 243 de 2008) contenues dans le règlement no 420.07 sont ainsi libellés :

« 1) Nonobstant toute disposition contraire d'une autre loi, et sauf dans le cas où l'examen d'une demande ultérieure n'est pas poursuivi, ou lorsque l'auteur de la demande est, le cas échéant, livré à ou extradé vers, soit un autre État membre en vertu des obligations découlant d'un mandat d'arrêt européen ou pour d'autres raisons, soit un pays tiers, soit une cour ou un tribunal pénal(e) international(e), l'auteur de la demande ne peut être renvoyé de Malte avant que sa demande n'ait fait l'objet d'une décision définitive et celui-ci est autorisé à rentrer et à séjourner à Malte dans l'attente d'une décision définitive sur sa demande.

2) Les demandeurs d'asile

a) ne pourront chercher un emploi ou exercer une activité professionnelle sans y avoir été autorisés par le ministre ;

b) devront résider et demeurer dans les lieux que le ministre leur indiquera, sauf s'ils ont été placés en rétention ;

c) devront se présenter aux services de l'immigration aussi souvent que le ministre en décidera ;

d) devront remettre aux autorités tous les documents en leur possession ;

e) devront se soumettre à des fouilles et accepter que leurs propos soient enregistrés pourvu qu'ils en aient été préalablement informés ;

f) pourront être photographiés et faire l'objet d'un relevé d'empreintes digitales. »

(...)

C. Textes internationaux pertinents

33. On trouvera ci-après les extraits pertinents des rapports, directives et recommandations émanant d'organisations internationales et invoqués par les parties.

1. Observations finales du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, Malte, 14 septembre 2011 (paragraphes 13‑14)

« 13. Tout en prenant note du grand nombre de migrants qu'accueille l'État partie et des efforts qu'il fait pour y faire face, le Comité se dit préoccupé par les informations selon lesquelles leurs garanties judiciaires ne sont pas toujours respectées dans la pratique. Le Comité se dit en outre préoccupé par les conditions de vie et de détention des migrants en situation irrégulière dans les centres de rétention, en particulier s'agissant des femmes avec des enfants (art. 5).

14. Le Comité se dit préoccupé par la récurrence des émeutes de migrants (survenues en 2005, 2008 et 2011) qui se révoltent contre leurs conditions de détention, par exemple au centre de rétention de Safi Barracks, et par l'usage excessif qui aurait été fait de la force pour venir à bout des émeutes. »

2. Amnesty International – Rapport 2012 : La situation des droits humains dans le monde, page 213

« Au cours de l'année 2011, plus de 1 500 personnes sont arrivées par la mer du Moyen-Orient ou d'Afrique du Nord, ce qui représentait un retour aux niveaux constatés en 2009. Toutes les personnes considérées par les autorités comme des « immigrants clandestins » continuaient d'être obligatoirement placées en détention, et ce pour une période souvent prolongée jusqu'à 18 mois.

Selon certaines informations, les conditions de vie dans les centres de détention et les centres d'accueil ouverts se sont dégradées en raison du nombre élevé de nouveaux arrivants, ce qui a accentué les problèmes de santé physique et mentale des détenus.

En mars, la directive « retour » adoptée en 2008 par l'UE a été transposée dans la législation nationale. Ce texte établissait des normes et des procédures communes aux États membres de l'UE pour la détention et le renvoi des personnes séjournant illégalement dans un pays. Cependant, la législation nationale excluait celles s'étant vu refuser l'entrée sur le territoire – ou étant entrées à Malte de manière irrégulière – du bénéfice de ces garanties minimales. À Malte, la directive ne s'appliquait donc pas à l'immense majorité des personnes qu'elle visait à protéger. »

3. Rapport établi par Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, à la suite de sa visite à Malte du 23 au 25 mars 2011 (9 juin 2011, paragraphes 19 et 20)

[Traduction du greffe]

« 19. Après leur rétention, les migrants, de même que les réfugiés, les bénéficiaires de la protection subsidiaire, les demandeurs d'asile et les déboutés du droit d'asile sont hébergés dans des centres d'accueil ouverts situés aux environs de Malte. Les conditions d'hébergement offertes par les centres en question sont très disparates. Il semble qu'elles soient bonnes dans les petits centres regroupant des personnes vulnérables – familles avec enfants et mineurs non accompagnés – mais beaucoup plus difficiles dans les centres plus importants. Comme indiqué ci-dessus, les entrées irrégulières avaient été très peu nombreuses au cours des quelque dix-huit mois ayant précédé la visite du Commissaire, et l'afflux de migrants en provenance de Libye enregistré en 2011 n'avait pas encore commencé. C'est pourquoi la plupart des migrants avaient quitté les centres de rétention et étaient hébergés dans des centres ouverts, les premiers en accueillant 49, les seconds 2 231. Le Commissaire a visité le centre de rétention de Safi et trois centres ouverts (le village de tentes de Hal-Far, le centre ouvert de Hal-Far et les centres ouverts de Hal-Far et de Marsa).

20. À l'époque de la visite, les conditions matérielles d'hébergement dans le centre de rétention de Safi, où 49 migrants placés en rétention étaient incarcérés, étaient bien meilleures que celles offertes par les centres ouverts. S'il restait encore un certain nombre de points à régler, notamment la question de l'accès des détenus à une alimentation diversifiée et à l'eau – autre que celle du robinet, les locaux visités, y compris les dortoirs, les toilettes et les douches avaient été récemment remis à neuf. La seule femme détenue dans ce centre disposait d'une pièce qui lui était réservée. Toutefois, le Commissaire tient à signaler que, en application de la politique de rétention automatique des migrants dont il a été question ci-dessus, la plupart des quelque 1 100 personnes arrivées de Libye après sa visite ont été placées dans des centres de rétention. Cette situation aura inévitablement d'importantes conséquences sur la qualité des conditions de rétention offertes par les centres en question. »

4. Rapport au gouvernement maltais sur la visite effectuée par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du 19 au 26 mai 2008 (17 février 2011)

« 52. Conformément à la politique maltaise relative à la rétention administrative des étrangers en vertu de la législation relative aux étrangers, tous les étrangers qui arrivent illégalement à Malte continuent d'être retenus pendant de longues périodes, dans le cas des demandeurs d'asile jusqu'à ce qu'il soit statué sur leur demande relative à leur statut de réfugié (douze mois) et dans celui des immigrés clandestins pendant une durée maximale de dix‑huit mois. Cependant, en pratique, il arrive que certains d'entre eux fassent des séjours encore plus longs en rétention. La seule exception déclarée à cette règle générale concerne les personnes considérées comme vulnérables en raison de leur âge et/ou de leur condition physique, les mineurs non accompagnés et les femmes enceintes (...)

53. La situation constatée dans les centres de rétention visités par la délégation ne s'est pas améliorée de façon notable depuis la visite précédente du CPT dans ces centres en 2005. En effet, la plupart des problèmes mis en évidence dans le rapport relatif à cette visite n'ont toujours pas été résolus. Dans plusieurs parties des centres de rétention visités, les effets combinés de séjours prolongés en détention dans de mauvaises, voire très mauvaises, conditions matérielles, avec une absence totale de régime et d'activités intéressantes, sans mentionner d'autres facteurs, peuvent bien être considérées comme étant un traitement inhumain et dégradant.

a. Conditions matérielles

(...)

60. Au centre de rétention de la caserne de Safi, qui hébergeait au moment de la visite un total de 507 immigrés retenus en raison de leur situation irrégulière, les conditions de vie des intéressés s'étaient légèrement améliorées par rapport à la situation observée par le CPT en 2005.

A l'entrepôt no 1, les conditions de vie étaient moins exiguës que lors de la dernière visite du CPT, et les installations sanitaires étaient neuves et propres. Cela dit, le Comité a de vives réserves à formuler en ce qui concerne l'utilisation d'entrepôts aménagés pour héberger des détenus. Cela ne devrait être acceptable qu'à titre de solution provisoire – et de courte durée.

Le bloc B a été rénové de fond en comble. Les sanitaires ont été remis à neuf, et une grande cour de promenade était à la disposition des immigrés en rétention. Toutefois, les conditions de vie restent difficiles dans certains locaux, où les détenus dorment sur des matelas posés à même le sol.

Contrairement à ce que l'on aurait pu attendre, dans le nouveau bloc C, les conditions de détention étaient mauvaises. Les personnes en rétention étaient logées à l'étroit, l'accès à la lumière du jour était insuffisant et l'aération était très mauvaise. En outre, l'accès à de l'eau courante était limité, ainsi que l'accès à de l'eau chaude, cette dernière étant inaccessible pendant de longues périodes.

De plus, le règlement intérieur en vigueur à la caserne de Safi prévoyait la fermeture obligatoire des portes dans les blocs B et C tous les après-midi à 17 heures. Cette situation aggravait encore les conditions de vie déjà difficiles dans ces blocs. »

5. Principes directeurs du Haut Commissariat des Nations unies aux Réfugiés et Apatrides (« le HCR ») relatifs aux critères et aux normes applicables à la détention des demandeurs d'asile et alternatives à la détention (2012) – Principe directeur 9.1 (paragraphe 49)

« Les demandeurs d'asile, en raison des évènements souvent traumatisants ayant précipité leur fuite et des circonstances liées à leur demande d'asile, peuvent présenter des maladies mentales, des traumatismes, des dépressions, des angoisses, des manifestations d'agressivité et autres conséquences physiques, psychologiques et affectives. Il convient de tenir compte de ces facteurs dans l'évaluation de la nécessité de les placer en détention (voir Principe directeur 4). Les victimes de tortures et autres violences physiques, psychologiques ou sexuelles graves doivent également bénéficier d'une attention particulière et, d'une façon générale, ne devraient pas être détenues. »

6. Recommandation Rec(2003)5 du Comité des Ministres aux États membres sur les mesures de détention des demandeurs d'asile (adoptée par le Comité des Ministres le 16 avril 2003, lors de la 837e réunion des Délégués des Ministres) – Point 3 des dispositions générales

« L'objectif de la détention n'est pas de sanctionner les demandeurs d'asile. Les mesures de détention concernant les demandeurs d'asile ne peuvent être utilisées que pour l'une ou l'autre des raisons suivantes :

– lorsque leur identité, y compris leur nationalité, demande, en cas de doute, à être vérifiée, notamment quand l'intéressé a détruit son titre de voyage ou ses papiers d'identité, ou a utilisé de faux papiers pour tromper les autorités du pays d'accueil ;

– lorsque les éléments sur lesquels se fonde la demande d'asile et qui, en l'absence de détention, ne pouvaient pas être fournis, demandent à être établis ;

– lorsqu'une décision doit être prise en ce qui concerne leur droit d'entrée dans le territoire de l'État concerné ; ou

– lorsque la protection de la sécurité nationale et l'ordre public l'exigent. »

7. Les vingt principes directeurs du Conseil de l'Europe sur le retour forcé – CM(2005)40 - Principe 6

« Une personne faisant l'objet d'une décision d'éloignement ne peut être privée de sa liberté, en vue de l'exécution de cette décision, qu'en conformité avec une procédure prévue par la loi, et seulement si, après un examen rigoureux et individuel de la nécessité de privation de liberté, les autorités de l'État d'accueil ont conclu que l'exécution de la décision ne serait pas assurée de manière aussi efficace en recourant à des mesures non privatives de liberté telles que la surveillance, l'obligation de se signaler régulièrement auprès des autorités, la liberté sous caution ou d'autres moyens de contrôle. »

EN DROIT

(...)

II. sur la violation allÉguÉé de l'ARTICLE 5 § 1 de la CONVENTION

62. Le requérant allègue que la détention dont il a fait l'objet du 8 avril 2011 (sic) au 16 août 2011 et du 30 janvier 2012 jusqu'à la date de son élargissement ne relevait d'aucune des situations prévues à l'article 5 de la Convention. À cet égard, il avance que cette détention ne visait pas à l'empêcher de pénétrer irrégulièrement à Malte ni à préparer son expulsion puisqu'il attendait une décision sur sa demande d'asile et l'autorisation de séjour qui en découlait en application de l'article 12 de l'AJ no 243. Sans préjudice de ce qui précède, l'intéressé soutient que, malgré la longueur de sa détention, les autorités maltaises n'ont pas recherché si d'autres mesures auraient pu lui être appliquées, et que les conditions de son incarcération étaient inadéquates. En outre, renvoyant à l'affaire Louled Massoud[1], il argue qu'il n'existe pas à ce jour de garanties procédurales contre les détentions arbitraires. Il invoque l'article 5 § 1 de la Convention, dont les passages pertinents en l'espèce se lisent ainsi :

« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :

(...)

f) s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours.

(...) »

63. Le Gouvernement combat cette thèse.

(...)

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

a) Thèse du requérant

68. Le requérant allègue que la détention dont il a fait l'objet du 8 avril 2011 (sic) au 16 août 2011 et du 30 janvier 2012 au 21 mars 2013 ne relevait d'aucune des situations prévues par l'article 5 de la Convention.

69. Il soutient que, eu égard à sa demande d'asile et à l'autorisation d'entrée et de séjour dont il bénéficiait en application de l'article 12 de l'AJ no 243 depuis le 14 avril 2011, date de la remise du questionnaire préalable aux autorités, sa détention ne pouvait viser à l'empêcher de pénétrer irrégulièrement à Malte ou à préparer son expulsion puisque sa demande d'asile était en cours d'instruction. L'intéressé rappelle que l'article 31 de la Convention relative au statut des réfugiés impose à Malte un certain nombre d'obligations, notamment l'interdiction du refoulement. Il avance que la conclusion à laquelle la Cour est parvenue dans l'arrêt Saadi c. Royaume-Uni ([GC], no 13229/03, CEDH 2008) – selon laquelle l'octroi d'une admission provisoire dans un pays après le dépôt d'une demande d'asile n'équivaut pas à une entrée régulière dans ce pays – ne vaut que lorsque celui-ci n'a pas accordé de droit d'entrée au demandeur. Il plaide que, sauf à bafouer le droit souverain des États de réglementer l'entrée sur leur territoire, on ne saurait prétendre qu'il existe un principe universellement applicable interdisant de considérer que les demandeurs d'asile pourraient obtenir une autorisation d'entrée régulière. Il estime avoir obtenu une autorisation d'entrée explicite au sens de l'article 12 de l'AJ no 243. En outre, il renvoie à la directive « retour » de l'Union européenne, et plus précisément au neuvième considérant du préambule de ce texte qui, sans être juridiquement contraignant, dispose que le ressortissant d'un pays tiers qui a demandé l'asile dans un État membre ne devrait pas être considéré comme étant en séjour irrégulier sur le territoire de cet État membre avant qu'une décision négative sur sa demande ou une décision mettant fin à son droit de séjour en tant que demandeur d'asile ne soit entrée en vigueur.

70. Pour autant que la détention subie du 2 avril 2012 au 21 mars 2013 consécutivement au rejet de sa demande d'asile ait visé à son expulsion, le requérant expose que le Gouvernement a reconnu que cette procédure avait été suspendue en raison des poursuites pénales dirigées contre lui. Toutefois, le 7 janvier 2013, alors que le requérant n'était plus demandeur d'asile depuis neuf mois, le Gouvernement a ouvert une procédure d'expulsion bien que les poursuites en question fussent toujours pendantes. L'intéressé fait observer que le Gouvernement n'a pas expliqué en quoi la procédure suivie dans son cas aurait satisfait à l'exigence de diligence. Il affirme n'avoir jamais fait obstacle à son expulsion, directement ou indirectement. Il expose qu'il a toujours déclaré être un ressortissant de la Sierra Leone, et que le refus du consulat de le reconnaître comme tel – après un entretien extrêmement bref au cours duquel aucune demande de document officiel n'a été faite – ne peut être considéré comme concluant.

71. Sans préjudice de ce qui précède, le requérant avance que les autorités ont décidé de le placer et de le maintenir en détention de manière automatique, sans tenir compte le moins du monde de sa situation individuelle. À cet égard, il indique qu'un parallèle peut être établi entre des conclusions récentes de la Cour – contenues dans l'arrêt Yoh‑Ekale Mwane c. Belgique (no 10486/10, § 124, 20 décembre 2011) – et l'obligation faite à tous les États membres de l'Union européenne de ne pas placer les ressortissants de pays tiers en rétention s'il existe « d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, [pouvant] être appliquées efficacement dans un cas particulier » (article 15 de la directive « retour »). Il plaide que, de même que les autorités belges connaissaient l'identité de la requérante dans l'affaire Yoh‑Ekale Mwane (précitée), les autorités maltaises connaissaient la sienne depuis son arrivée à Malte puisqu'il leur avait fourni tous les renseignements demandés, et qu'il avait complété ces informations en remplissant le questionnaire préalable et lors de son entretien avec le Commissariat aux réfugiés. Il ajoute que les autorités maltaises n'avaient jamais indiqué qu'il risquait réellement de s'enfuir et assure avoir demandé l'asile à Malte en manifestant clairement son souhait de se voir accorder la protection internationale par ce pays. Renvoyant aux énonciations de la Cour dans l'arrêt Louled Massoud (précité, § 68), il affirme que les autorités maltaises auraient pu rechercher des mesures effectives autres que la détention pour le contraindre de rester à Malte.

72. Le requérant soutient également que son maintien en détention était contraire à l'article 5 § 1 f) en raison de son illégalité et de son caractère arbitraire (à cet égard, il s'appuie sur l'arrêt Louled Massoud, précité, § 71). Il avance que, malgré les constats opérés par la Cour dans cette affaire, aucune modification visant à résoudre ce problème n'a été introduite dans la législation ou la pratique administrative maltaise. Il expose que la base légale de sa détention n'était pas suffisamment claire et précise, et que la durée de celle-ci résultait d'une politique gouvernementale n'ayant pas force de loi. Il avance que la politique en question aggrave ce manque de précision et de base légale en énonçant que, quelle que soit la durée de la détention des migrants dans la maison d'arrêt de Corradino – 167 jours dans le cas du requérant, cette période ne s'impute pas sur la durée de leur rétention obligatoire, alors même que l'examen de leur demande d'asile se poursuit pendant ce temps.

73. S'appuyant sur l'arrêt A. et autres c. Royaume-Uni ([GC], no 3455/05, § 164, CEDH 2009), l'intéressé plaide qu'il a été incarcéré arbitrairement. Il indique que les autorités maltaises l'ont placé en détention de manière automatique, sans avoir procédé à un examen de sa situation individuelle pour rechercher s'il présentait ou non une réelle menace pour la sécurité nationale ou un danger d'une autre nature, et qu'elles ont déclaré à plusieurs reprises que son incarcération était nécessaire à la sauvegarde de la sécurité nationale, à la bonne marche des services et à l'efficacité de la procédure d'asile. Il estime qu'elles auraient pu ménager facilement des modalités d'accueil n'impliquant pas de privation de liberté et lui fournir une assistance médicale, un hébergement, de la nourriture et les autres facilités couvrant les besoins de base dans un cadre plus propice au bien-être physique et psychologique de l'individu que celui offert par les centres de rétention de Malte. Par ailleurs, il avance que la nature des centres en question et les conditions matérielles qu'ils offrent ne se concilient guère avec l'intention déclarée du gouvernement maltais de mettre en œuvre des procédures organisées et efficaces. S'appuyant sur plusieurs rapports établis par des experts qui soulignent le caractère militaire de ces centres et expriment des préoccupations sur les mauvaises conditions matérielles qui y règnent (voir ci-dessus les extraits des « rapports internationaux pertinents » ainsi que le rapport invoqué par le tiers intervenant), il soutient que le lieu et les conditions de sa détention n'étaient pas adaptés au but qu'elle poursuivait, quel qu'il fût. Il fait observer que le bloc B de Safi est un immeuble d'habitation entièrement clos par du grillage et constamment gardé par des soldats ou des agents de sécurité, où les demandeurs d'asile ne bénéficient d'aucune disposition spéciale adaptée à la situation particulière qui est la leur et qui a été reconnue comme telle par la Cour, notamment dans les arrêts M.S.S. c. Belgique et Grèce ([GC], no 30696/09, CEDH 2011) et Louled Massoud (précité), ainsi que par le HCR (paragraphe 33 ci‑dessus). Il souligne que ce bâtiment, qui faisait partie d'un ensemble plus vaste de baraquements militaires, n'avait pas pour vocation initiale d'accueillir des demandeurs d'asile, et qu'il n'a été converti à son usage actuel qu'en 2002.

74. Il assure qu'il était incarcéré depuis à peine plus d'un mois lorsque la CIJ a effectué la visite ayant donné lieu au rapport sur lequel elle s'est appuyée pour établir ses observations dans la présente affaire et que, au cours de cette période, aucune modification n'a été apportée à la structure, à la gestion ou à la politique de cet établissement. Il estime en conséquence que les observations en question sont parfaitement pertinentes.

b) Thèse du Gouvernement

75. Le Gouvernement soutient qu'il ressort de l'arrêt Saadi c. Royaume-Uni (précité) que l'admission provisoire dans un pays accordée à un individu après le dépôt par celui-ci d'une demande d'asile ne confère pas à son entrée dans ce pays un caractère « régulier » au sens de l'article 5 § 1 f). Il avance que les demandeurs d'asile restent des clandestins que les autorités d'un pays, sans violer cette disposition, peuvent placer en détention pour les empêcher d'y entrer de manière irrégulière. En outre, il avance que cet article n'exige pas que la détention revête un caractère nécessaire dans chaque cas. Selon lui, le simple dépôt par le requérant d'une demande d'asile n'est pas susceptible de régulariser sa situation ou d'invalider sa rétention. L'arrêt Saadi énoncerait clairement que les États peuvent placer des migrants en rétention pendant l'instruction de leur demande d'asile, raison pour laquelle une appréciation au cas par cas ne serait pas requise. De la même manière, l'AJ no 243 n'obligerait pas les autorités à accorder un droit d'entrée aux demandeurs d'asile.

76. Par ailleurs, l'incarcération du requérant aurait visé à l'empêcher de pénétrer irrégulièrement sur le territoire maltais, et aurait été mise en œuvre de bonne foi dans un centre de rétention spécialement aménagé à cet effet. En outre, les lieu et conditions de la détention de l'intéressé auraient été appropriés. Utilisé comme centre de rétention depuis 2002, Safi serait un immeuble de deux étages entièrement rénové en 2007, puis à nouveau en 2009 et 2010. Il ne s'agirait pas d'une prison, bien que des grilles de sécurité aient été installées aux fenêtres pour empêcher les évasions, et Safi offrirait des installations et des prestations – certes sommaires – de couchage, de restauration et de détente. Les migrants y disposeraient de toilettes, de douches, de télévisions, de téléphones – utilisables au moyen de cartes téléphoniques distribuées à chacun d'entre eux tous les deux mois –, d'une véranda et de deux vastes cours d'exercice accessibles du lever au coucher du soleil. En outre, l'État aurait essayé de proposer d'autres activités de détente, notamment en installant des équipements sportifs qui auraient été vandalisés et utilisés comme armes quelques jours plus tard. Les détenus seraient autorisés à circuler librement à l'étage qui leur est assigné et à rencontrer les ONG tous les jours (politique de la porte ouverte). Les migrants détenus pourraient prendre part à deux projets financés par l'Union européenne et disposeraient d'une clinique dans le centre. La durée de la détention de l'intéressé, un débouté du droit d'asile (sic), aurait été nécessaire en vue de son expulsion.

77. Par ailleurs, la détention de l'intéressé consécutive au rejet de sa demande d'asile aurait été conforme au second volet de l'article 5 § 1 f). Il ressortirait de l'arrêt Chahal c. Royaume-Uni (15 novembre 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996‑V) que, dès lors que des mesures ont été prises en vue de l'expulsion d'une personne, il n'y a pas lieu de rechercher si la détention de celle-ci est ou non raisonnablement nécessaire. En outre, la présente espèce se distinguerait de l'affaire Louled Massoud (précitée) en ce que l'expulsion de M. Musa avait été suspendue au seul motif que celui-ci aurait fait l'objet de poursuites pénales pour sa participation aux émeutes et que les autorités n'auraient pu l'expulser sans enfreindre son droit fondamental à un procès équitable. Toutefois, des mesures préparatoires à l'expulsion de l'intéressé auraient été prises à l'issue de la procédure pénale en question. L'impossibilité de rapatrier le requérant n'aurait été établie qu'après la réponse du consulat de la Sierra Leone, laquelle aurait débouché sur la remise en liberté de l'intéressé.

78. En outre, l'intéressé n'aurait pas été détenu pour une durée indéterminée, la politique applicable en la matière limitant à dix-huit mois l'incarcération des déboutés du droit d'asile. Les migrants clandestins arrivant à Malte seraient toujours des sans-papiers dont l'identité ne pourrait être vérifiée dès leur entrée sur le territoire, et cette vérification nécessiterait un long processus impliquant leur coopération. En l'espèce, le requérant aurait fait obstacle à la procédure d'expulsion en fournissant délibérément aux autorités de fausses informations sur son pays d'origine. La politique de rétention appliquée à Malte aurait été élaborée au vu de la situation migratoire de ce pays. Elle serait fondée sur le droit interne et ne revêtirait pas un caractère discriminatoire. Les mesures de rétention viseraient les clandestins et les autres personnes en situation irrégulière, mais pas les individus vulnérables.

79. Par ailleurs, en ce qui concerne les observations de la Commission internationale de juristes (« la CIJ »), le gouvernement défendeur aurait fait publier un communiqué de presse critiquant le caractère fantaisiste du document en question. La CIJ y aurait brossé un portrait très négatif d'un petit État qui tenterait de faire face, au mieux de ses possibilités, à un afflux de clandestins totalement disproportionné par rapport à sa taille, ce dont la Cour devrait tenir compte. Les limitations énumérées à l'article 25A § 11 de la loi sur l'immigration seraient conformes à la Recommandation du Comité des Ministres aux États membres sur les mesures de détention des demandeurs d'asile (Rec(2003)5, paragraphe 33 ci-dessus). La rétention serait une mesure sanctionnant des infractions au droit interne et elle protègerait les migrants en leur offrant l'hébergement, l'assistance médicale et la nourriture sans lesquels ils vivraient dans la rue et sans moyens de subsistance. En tant que telle, cette mesure n'appellerait pas de la part des autorités un examen au cas par cas. En outre, la directive « retour » ne s'appliquerait pas au requérant en l'espèce puisque celui-ci serait arrivé illégalement à Malte par voie maritime et n'aurait pas obtenu par la suite une autorisation ou un droit de séjour. Les durées maximales de rétention, de douze et dix-huit mois respectivement, seraient justifiées par la nécessité d'empêcher les personnes concernées de prendre la fuite et de se soustraire à leur expulsion, les évasions n'étant pas rares chez les migrants, ce dont témoigneraient les nombreux renvois vers Malte résultant de l'application du règlement de Dublin II. En réalité, les autorités maltaises ne ménageraient pas leurs efforts pour rapatrier les migrants aussi vite que possible malgré les multiples stratagèmes et subterfuges utilisés par les intéressés. Toutefois, les opérations de renvoi seraient longues et tributaires de la coopération de ces derniers.

80. Enfin, force serait de constater que le rapport de la CIJ sur la visite qu'elle avait effectuée du 26 au 30 septembre 2011 portait sur une période au cours de laquelle le requérant n'était pas incarcéré et que, malgré l'afflux exceptionnel de détenus dû à la crise libyenne enregistré à ce moment-là, les autorités ont pu subvenir à leurs besoins.

c) Observations du tiers intervenant

81. La CIJ a adressé à la Cour un rapport intitulé « Not here to stay », publié en mai 2012, portant sur la visite sa visite à Malte du 26 au 30 septembre 2011 et évaluant la pratique suivie par les autorités maltaises en matière d'immigration et d'asile à l'époque de la crise libyenne. Elle en extrait certaines conclusions pertinentes en l'espèce.

82. Elle rappelle en premier lieu que la détention visant à empêcher les entrées non autorisées n'est justifiée que si elle est étroitement liée à cet objectif et si ce lien subsiste pendant toute la durée de cette mesure. Elle avance que le droit international des réfugiés et les normes européennes pertinentes imposent une définition restrictive des circonstances autorisant la détention de demandeurs d'asile motivée par leur entrée irrégulière sur le territoire d'un État. Elle estime que les principes directeurs du HCR qui viennent d'être révisés (paragraphe 33 ci-dessus) et les conclusions adoptées par le Comité exécutif sur la protection internationale des réfugiés établissent une présomption défavorable à la rétention. Il en ressort selon elle que la rétention ne peut intervenir qu'en cas de nécessité, pour des motifs précis définis par la loi (principes directeurs 4.1 et 4.2). Il serait contraire au droit des réfugiés de placer en rétention des demandeurs d'asile pour d'autres fins, par exemple pour dissuader des candidats à l'asile d'introduire ou de maintenir une demande, ou pour des motifs punitifs ou disciplinaires. Des divergences entre des normes ou des pratiques nationales et les dispositions en question révèleraient un risque d'arbitraire au sens de l'article 5 § 1 f). En outre, le droit de l'Union européenne établirait clairement que les demandeurs d'asile doivent être considérés comme « séjournant régulièrement » dans les États membres concernés pendant l'instruction de leur demande. En conséquence, ils ne pourraient être placés en rétention en raison de leur entrée irrégulière sur le territoire des États en question, sauf pour des durées très limitées et dans des circonstances exceptionnelles. Le régime d'asile européen commun étant directement applicable à titre de norme minimale dans les pays membres de l'Union, il devrait être considéré comme formant le « droit interne » des États défendeurs aux fins de l'article 5 de la Convention en l'absence de règle nationale plus protectrice.

83. Par ailleurs, la rétention dans l'attente de l'issue d'une procédure d'expulsion ou d'extradition mentionnée dans le second volet de l'article 5 § 1 f) ne serait justifiable que pendant le déroulement de la procédure en question. Il conviendrait de faire de ce principe une application stricte pour veiller à ce que les autorités s'emploient avec diligence à rechercher une possibilité réelle d'expulsion à tous les stades de la détention de la personne concernée. Les demandeurs d'asile protégés par des normes de droit interne ou de droit international interdisant leur expulsion dans l'attente de l'instruction de leur demande ne pourraient faire l'objet d'une détention prolongée pendant le déroulement de cette procédure.

84. Pour ce qui est des autres critères établis par la jurisprudence de la Cour, l'exigence de bonne foi impliquerait qu'un placement en rétention ne puisse être décidé sans la transparence et la diligence requises pour que les dispositifs de droit interne prévoyant des mesures alternatives à la détention ou la remise en liberté ne soient pas contournés ou manipulés au point de s'en trouver vides de sens. À cet égard, il conviendrait de se reporter aux affaires Čonka c. Belgique (no 51564/99, CEDH 2002‑I) et R.U. c. Grèce (no 2237/08, 7 juin 2011), dans lesquelles les règles juridiques matérielles et procédurales avaient été appliquées de telle manière qu'elles en avaient été privées d'effet. Le rapport de la CIJ s'inquièterait du fait que, dès leur arrivée à Malte, les migrants sans papiers se voient automatiquement notifier une décision d'expulsion fondée sur le rejet d'une demande de retour volontaire qu'ils n'ont jamais eu l'occasion de présenter. Cette pratique irait à l'encontre de la directive « retour » 2008/115/CE adoptée par l'Union européenne.

85. S'agissant des garanties procédurales contre l'arbitraire, il y aurait lieu de renvoyer aux principes directeurs précités du HCR, qui disposeraient eux aussi que les demandeurs d'asile « ont droit aux garanties procédurales minimales » (principe directeur 7).

86. En outre, les vingt principes directeurs du Conseil de l'Europe sur le retour forcé établiraient une règle générale imposant aux autorités d'envisager en premier lieu des mesures alternatives à la détention des migrants, qu'ils soient ou non vulnérables. La Cour de justice de l'Union européenne aurait élevé le principe directeur no 6 (paragraphe 33 ci-dessus) au rang d'instrument d'interprétation authentique du droit européen de l'asile, au même titre que la Convention européenne et la jurisprudence de la Cour. De la même manière, les principes directeurs du HCR reconnaîtraient clairement la primauté des mesures alternatives à la détention sur les mesures privatives de liberté (principe 4.3). Pour sa part, la Cour aurait jugé à plusieurs reprises que les autorités n'avaient pas agi de bonne foi en plaçant des personnes vulnérables en détention sans envisager des mesures moins sévères (voir, par exemple, Yoh-Ekale Mwanje, précité). Dans l'affaire C c. Australie (Communication no 900/1999, 28 octobre 2002), le Comité des droits de l'homme des Nations unies lui-même aurait conclu à la violation du droit à la liberté faute pour l'État défendeur d'avoir établi qu'il ne disposait pas de moyens moins contraignants que la détention pour parvenir aux mêmes fins. Or à Malte, tout migrant en situation irrégulière sous le coup d'une décision d'éloignement devrait « être maintenu en détention jusqu'à son renvoi ». Autrement dit, la détention des migrants sans papiers serait la règle, non l'exception, et ne s'appliquerait pas en dernier ressort et si nécessaire ou après examen des situations individuelles des migrants concernés. Par ailleurs, la directive « retour » de l'UE énoncerait que les migrants arrivés par voie maritime peuvent être exclus des garanties qu'elle prévoit, mais rien ne prouverait que les personnes autorisées à séjourner à Malte en vertu du droit interne pendant l'instruction de leur demande – conformément à l'article 12 de l'AJ no 243 de 2008 – soient concernées par cette exception.

87. En fixant la durée maximale de la rétention dans des textes à caractère politique, non dans la loi elle-même, Malte violerait le principe de légalité en droit international – notamment l'article 5 § 1 de la Convention – tel que défini dans l'arrêt Abdolkhani et Karimnia c. Turquie[2](...). En outre, une rétention administrative d'une durée de dix-huit mois serait en soi contraire aux exigences de l'article 5 § 1 f), aucune procédure d'expulsion d'une telle durée ne pouvant passer pour avoir été menée avec diligence.

88. Enfin, l'implantation du centre de rétention de Safi Barracks dans deux bases militaires serait préoccupante et contraire aux normes et aux principes du droit international. Les recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture énonceraient que les migrants en rétention doivent être hébergés dans des centres spécifiquement conçus à leur intention et offrant des conditions adaptées à leur statut juridique ainsi qu'aux besoins qui leur sont propres. Les effets cumulatifs des conditions de détention déplorables constatées dans le centre de rétention de Safi Barracks atteindraient le seuil des traitements dégradants. De ce fait, Malte violerait les obligations internationales contractées par elle au titre de l'article 3 de la Convention en matière de protection des droits de l'homme.

2. Appréciation de la Cour

a) Principes généraux

89. L'article 5 consacre un droit fondamental de l'être humain, à savoir la protection de l'individu contre les atteintes arbitraires de l'État à son droit à la liberté. Le libellé de cette disposition précise bien que la garantie qu'elle renferme s'applique à « toute personne » (Nada c. Suisse [GC], no 10593/08, § 224, CEDH 2012). Les alinéas a) à f) de l'article 5 § 1 contiennent une liste exhaustive des motifs autorisant la privation de liberté ; pareille mesure n'est pas régulière si elle ne relève pas de l'un de ces motifs (Saadi c. Royaume-Uni [GC], no 13229/03, § 43, CEDH 2008). Énoncée à l'alinéa f) de l'article 5 § 1, l'une des exceptions au droit à la liberté permet aux États de restreindre celle des étrangers dans le cadre du contrôle de l'immigration.

90. C'est dans son arrêt Saadi (précité, §§ 64-66) que la Cour a interprété pour la première fois le sens des termes de la première partie de l'article 5 § 1 f), visant « la détention régulièr[e] d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire ». Dans cet arrêt, la Cour a estimé que, tant qu'un État n'avait pas « autorisé » l'entrée sur son territoire, celle-ci était « irrégulière », et que la détention d'un individu souhaitant entrer dans le pays mais ayant pour cela besoin d'une autorisation dont il ne disposait pas encore pouvait viser – sans que la formule soit dénaturée – à « empêcher [l'intéressé] de pénétrer irrégulièrement ». Elle a rejeté l'idée que, si un demandeur d'asile se présentait de lui-même aux services de l'immigration, cela signifiait qu'il cherchait à pénétrer « régulièrement » dans le pays, avec cette conséquence que la détention ne pouvait se justifier sous l'angle de la première partie de l'article 5 § 1 f) (§ 65). Elle a ajouté que lire cette disposition comme autorisant uniquement la détention d'une personne dont il était établi qu'elle tentait de se soustraire aux restrictions à l'entrée reviendrait à interpréter de manière trop étroite les termes de la disposition ainsi que le pouvoir de l'État d'exercer l'indéniable droit de contrôle évoqué plus haut. Elle a précisé que pareille interprétation cadrerait mal avec la conclusion no 44 du Comité exécutif du Programme du Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, les Principes directeurs du HCR et la Recommandation du Comité des Ministres (§§ 34-35 et 37 de l'arrêt Saadi), textes qui envisagent tous la détention des demandeurs d'asile dans certaines circonstances, par exemple lors de vérifications d'identité ou quand il faut déterminer des éléments fondant la demande d'asile. Elle a cependant souligné que pareille détention devait se concilier avec la finalité générale de l'article 5, qui était de protéger le droit à la liberté et d'assurer que nul ne soit dépouillé de sa liberté de manière arbitraire (ibid., § 66).

91. S'agissant de la seconde partie de l'article 5 § 1 f), la Cour rappelle que seul le déroulement de la procédure d'expulsion justifie la privation de liberté et que, si la procédure n'est pas menée avec la diligence requise, la détention cesse d'être justifiée au regard de cette disposition (Chahal c. Royaume-Uni, 15 novembre 1996, Recueil 1996-V).

92. Par ailleurs, toute privation de liberté doit non seulement relever de l'une des exceptions prévues aux alinéas a) à f), mais aussi être « régulière ». En matière de « régularité » d'une détention, y compris d'observation des « voies légales », la Convention renvoie pour l'essentiel à la législation nationale et consacre l'obligation d'en observer les normes de fond comme de procédure. Toutefois, le respect du droit national n'est pas suffisant : l'article 5 § 1 exige de surcroît la conformité de toute privation de liberté avec le but consistant à protéger l'individu contre l'arbitraire. Il est un principe fondamental selon lequel nulle détention arbitraire ne peut être compatible avec l'article 5 § 1, et la notion d'« arbitraire » que contient cette disposition va au-delà du défaut de conformité avec le droit national, de sorte qu'une privation de liberté peut être régulière selon la législation interne tout en étant arbitraire et donc contraire à la Convention (Saadi, précité, § 67).

93. Pour ne pas être taxée d'arbitraire, la mise en œuvre de pareille mesure de détention doit donc se faire de bonne foi ; elle doit aussi être étroitement liée au but consistant à empêcher une personne de pénétrer irrégulièrement sur le territoire ; en outre, le lieu et les conditions de détention doivent être appropriés, car « une telle mesure s'applique non pas à des auteurs d'infractions pénales mais à des étrangers qui, craignant souvent pour leur vie, fuient leur propre pays » ; enfin, la durée de la détention ne doit pas excéder le délai raisonnable nécessaire pour atteindre le but poursuivi (ibid., § 74 ; voir aussi A. et autres c. Royaume-Uni, [GC], no 3455/05, § 164, CEDH 2009, et Louled Massoud, précité, § 62).

b) Application en l'espèce des principes susmentionnés

94. La Cour relève que les observations du Gouvernement sont quelque peu contradictoires et qu'il n'a pas fourni d'explications précises sur les aspects temporels de la détention du requérant, bien qu'elle lui eût posé des questions explicites à cet égard. Toutefois, le Gouvernement semble soutenir que la première période de détention du requérant, antérieure à la décision définitive sur la demande d'asile de celui-ci, était conforme à la première partie de l'article 5 § 1 f). En tout état de cause, il considère que la durée de cette détention était nécessaire au renvoi du requérant, un « débouté du droit d'asile ».

95. En outre, la Cour observe que le Gouvernement ne s'attarde guère sur les effets de l'avis juridique no 243, dont le requérant tire l'essentiel de ses arguments. Le Gouvernement se borne à exposer son interprétation du texte en question selon laquelle il n'était pas tenu de délivrer une autorisation de séjour à l'intéressé. Toutefois, la Cour relève que la CRI a interprété la disposition en question différemment lorsqu'elle s'est prononcée sur le cas du requérant, confirmant la thèse de celui-ci selon laquelle ce texte confère un droit d'entrée et concluant que l'intéressé ne pouvait en principe faire l'objet d'une rétention dans la situation qui était la sienne.

96. La jurisprudence de la Cour ne contient pas d'indications précises sur le point de savoir à quel moment une détention s'inscrivant dans le cadre du contrôle de l'immigration ne relève plus de la première partie de l'article 5 § 1 f). Dans l'arrêt Saadi, la Grande Chambre a jugé que la rétention d'un individu pendant sept jours dans l'attente d'une décision sur sa demande d'asile relevait de cette disposition. De la même manière, elle a estimé dans l'affaire Kanagaratnam c. Belgique (no 15297/09, 13 décembre 2011) que la rétention du requérant pendant l'instruction de sa demande d'asile était conforme à l'article 5 § 1 f) en ce qu'elle visait à empêcher l'entrée non autorisée de l'intéressé sur le territoire de l'État défendeur. Toutefois, dans des affaires dirigées contre la Grèce, la Cour a conclu à la violation de la seconde partie de l'article 5 § 1 après avoir relevé que la rétention des requérants pendant l'instruction de leur demande d'asile ne pouvait avoir été ordonnée en vue de leur expulsion puisque le droit interne ne prévoyait pas que des demandeurs d'asile puissent être expulsés au cours de cette procédure (Ahmade c. Grèce, no 50520/09, §§ 142-144, 25 septembre 2012, et R.U. c. Grèce, no 2237/08, §§ 88-96, 7 juin 2011).

97. En l'espèce, la Cour estime que la thèse du requérant selon laquelle l'arrêt Saadi ne doit pas être interprété comme signifiant que tous les États membres peuvent détenir régulièrement des étrangers dans l'attente d'une décision sur leur demande d'asile, nonobstant le droit national, n'est pas dépourvue de fondement. En effet, lorsqu'un État, qui est allé au-delà de ses obligations en créant d'autres droits ou un régime plus favorable – ce qu'il lui est loisible de faire en vertu de l'article 53 de la Convention, adopte de son propre chef ou en application du droit de l'Union européenne une loi autorisant expressément l'entrée et le séjour des étrangers dans l'attente de l'examen de leur demande d'asile (voir, par exemple, en ce qui concerne le droit belge, l'arrêt Kanagaratnam, précité, § 35 in fine), toute détention ultérieure visant à empêcher une personne de pénétrer irrégulièrement dans le pays peut soulever une question concernant la régularité de la détention au regard de l'article 5 § 1 f). En pareilles circonstances, il serait certes difficile de considérer que la mesure est étroitement liée au but de la détention et de juger la situation conforme au droit interne. En fait, il serait arbitraire, et donc contraire au but de l'article 5 § 1 f), d'interpréter des dispositions claires et précises du droit interne de manière contraire à leur sens (Longa Yonkeu c. Lettonie, no 57229/09, § 125, 15 novembre 2011). Dans l'affaire Saadi, le droit interne autorisait l'admission provisoire mais ne prévoyait pas l'octroi au requérant d'une autorisation officielle de séjour ou d'entrée sur le territoire, raison pour laquelle cette question ne s'était pas posée. Dès lors, le point de savoir à quel moment la première partie de l'article 5 cesse de s'appliquer, au motif que la personne concernée s'est vu accorder une autorisation officielle d'entrée ou de séjour, dépend largement du droit interne.

98. Se tournant vers les faits de l'espèce, et rappelant qu'il appartient au premier chef aux autorités nationales d'interpréter le droit interne, la Cour observe que les parties se livrent à des interprétations contradictoires de l'AJ no 243 de 2008, et plus précisément de l'article 12 § 1 de ce texte, qui autorise les demandeurs d'asile « à entrer et à séjourner à Malte dans l'attente d'une décision définitive sur [leur] demande ». Le Gouvernement soutient que cette disposition n'a pas pour effet de conférer un droit de séjour aux demandeurs d'asile. Pour sa part, la CRI a estimé que le requérant s'était à bon droit fondé sur cet article pour contester sa détention, celui-ci autorisant les demandeurs d'asile à pénétrer et à séjourner à Malte dans l'attente d'une décision sur leur demande. S'il n'appartient pas à la Cour d'interpréter l'intention du législateur dans un sens ou dans un autre, il est possible qu'il ait voulu refléter par cette disposition les normes internationales interdisant le renvoi des demandeurs d'asile pendant l'examen de leur demande (voir, par exemple, S.D. c. Grèce, no 53541/07, § 62, 11 juin 2009) sans toutefois leur accorder automatiquement une autorisation officielle de séjour ou d'entrée sur le territoire maltais. Le fait que cet article établisse les conditions auxquelles un demandeur d'asile doit satisfaire sans prévoir de procédure d'octroi d'une autorisation officielle et de délivrance des documents pertinents – mentionnés à l'article 9 de la loi sur l'immigration – milite en faveur de cette interprétation. Dans ces conditions, la Cour estime que la première question qui se pose porte sur la qualité du droit interne. Elle rappelle que les termes « selon les voies légales » ne se bornent pas à renvoyer au droit interne ; ils concernent aussi la qualité de la loi ; ils la veulent compatible avec la prééminence du droit, notion inhérente à l'ensemble des articles de la Convention. Pareille qualité implique qu'une loi nationale autorisant une privation de liberté soit suffisamment accessible et précise afin d'éviter tout danger d'arbitraire (voir Dougoz c. Grèce, no 40907/98, § 55, CEDH 2001-II, renvoyant à Amuur c. France, § 50, précité).

99. En l'espèce, s'il est clair que l'article 5 combiné avec l'article 14 de la loi sur l'immigration autorise la détention des étrangers en situation irrégulière, il est incontestable que l'avis juridique no 243 – qui « s'applique nonobstant toute disposition contraire d'une autre loi » (voir le libellé de cette disposition dans la partie « Droit et pratique internes pertinents ci‑dessus) – est source de confusion quant à la portée de la base légale, en particulier quant au point de savoir si un placement en détention en vertu de la loi sur l'immigration est légal (du point de vue du droit interne) seulement jusqu'au dépôt d'une demande d'asile ou s'il continue d'être légal dans l'attente d'une décision sur la demande. Cela dit, bien qu'estimant qu'une clarification du cadre juridique interne s'impose, la Cour est disposée à admettre que la détention du requérant avait une base légale suffisamment précise, à savoir l'article 5 combiné avec l'article 14 de la loi sur l'immigration et que, l'intéressé n'ayant pas établi qu'il avait obtenu une autorisation officielle de séjour – faute pour lui d'avoir reçu les documents énumérés à l'article 9 de la loi – , la rétention dont il a fait l'objet du 8 avril 2011 (date de son arrivée à Malte) au 2 avril 2012 (date du rejet de sa demande d'asile) – à l'exclusion de la période correspondant aux poursuites dont il a fait l'objet – relevait de la première partie de l'article 5 § 1 f) de la Convention.

100. Il n'en demeure pas moins que la Cour doit rechercher si la rétention du requérant a ou non revêtu un caractère arbitraire. Elle relève une série de pratiques singulières de la part des autorités internes, telles que l'absence de prise en compte des procédures de départ volontaire (paragraphe 8 ci-dessus) et les décisions généralisées de placement en détention qui, d'après le Gouvernement, n'exigent pas d'appréciation au cas par cas (paragraphe 79 ci-dessus). En ce qui concerne ce dernier point, elle observe que la Recommandation Rec(2003)5 du Comité des Ministres aux États membres sur les mesures de détention des demandeurs d'asile, fréquemment citée par le Gouvernement, énonce qu'« il ne faudrait appliquer des mesures de détention aux demandeurs d'asile qu'après avoir examiné avec soin, et dans chaque cas, si elles sont nécessaires ». Eu égard à ces pratiques, la Cour émet des réserves quant à la bonne foi dont le Gouvernement fait preuve en appliquant une politique généralisée de détention – à laquelle échappent les migrants réputés vulnérables – dont la durée peut atteindre dix-huit mois.

101. En tout état de cause, même à supposer que la détention du requérant ait été étroitement liée au but consistant à l'empêcher d'entrer irrégulièrement à Malte, la Cour estime que le lieu et les conditions dans lesquels l'intéressé a été incarcéré sont préoccupants. Plusieurs rapports internationaux ont exprimé des inquiétudes à ce sujet (paragraphes 33 et suivants ci-dessus). Le CPT et la CIJ ont déclaré que les conditions de détention en question pouvaient passer pour des traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la Convention, et celles-ci se sont certainement dégradées pendant la crise libyenne, époque à laquelle le requérant était détenu. Il ne paraît guère approprié de faire subir pareilles conditions de détention à des étrangers qui n'ont pas commis d'infraction pénale et qui, craignant souvent pour leur vie, fuient leur propre pays.

102. Relevant que les autorités ont mis un an à se prononcer sur la demande d'asile du requérant, la Cour estime que pareille durée ne peut passer pour une période de détention normalement nécessaire à la réalisation du but poursuivi par les autorités, à savoir statuer sur une demande d'autorisation de séjour. Cependant, la Cour observe que, au cours de cette période, le requérant a été maintenu en détention provisoire pendant plus de cinq mois (du 16 août 2011 au 29 janvier 2012) en raison des poursuites pénales dirigées contre lui. En conséquence, pour se prononcer sur le grief de l'intéressé, la Cour doit se borner à examiner la période – d'une durée totale de plus de six mois – pendant laquelle celui-ci a été détenu aux fins de la première partie de l'article 5 § 1 f). À cet égard, la Cour rappelle avoir déjà jugé qu'une détention de trois mois se déroulant dans des conditions inappropriées dans l'attente d'une décision sur une demande d'asile était excessivement longue (Kanagaratnam, précité, §§ 94-95). Il s'ensuit qu'une détention de six mois ne peut passer pour raisonnable, eu égard en particulier aux conditions dans lesquelles elle s'est déroulée, qui ont été décrites par plusieurs organismes indépendants (voir, a contrario, l'affaire Saadi, précitée, où le requérant avait été incarcéré dans des conditions convenables par les autorités britanniques, qui n'avaient mis que sept jours pour statuer sur sa demande d'asile alors pourtant que le Royaume-Uni était confronté à de sérieux problèmes administratifs en raison d'une augmentation vertigineuse du nombre de demandeurs d'asile).

103. Il s'ensuit que la détention du requérant jusqu'à la date de la décision sur sa demande d'asile n'était pas compatible avec l'article 5 § 1 f) de la Convention et qu'il y a donc eu violation de cette disposition.

104. S'agissant de la seconde période d'incarcération du requérant, qui s'est déroulée du 2 avril 2012 au 21 mars 2013, le Gouvernement soutient qu'elle poursuivait le but visé à l'article 5 § 1 f) en ce qu'elle concernait une personne contre laquelle une procédure d'expulsion était en cours. La Cour rappelle que seul le déroulement de la procédure d'expulsion justifie la privation de liberté fondée sur l'article 5 § 1 f). Si la procédure n'est pas menée avec la diligence requise, la détention cesse d'être justifiée au regard de cette disposition (Chahal, précité, § 113). Toutefois, le Gouvernement reconnaît que la détention de l'intéressé a été suspendue en raison des poursuites pénales dirigées contre celui-ci et que ces dernières ont empêché les autorités de procéder à son expulsion (paragraphe 77 ci-dessus). On ne sait pas au juste à quel moment la procédure pénale a été clôturée, mais il est en revanche certain que les démarches préparatoires à l'expulsion du requérant n'ont été entreprises qu'en janvier 2013. Dans ces conditions, on ne saurait dire que le requérant a été détenu du 2 avril 2012 jusqu'en janvier 2013 en vue de son expulsion. Par ailleurs, le Gouvernement n'a pas précisé quelles mesures avaient été prises au cours des deux mois suivants, se bornant à mentionner un entretien avec le consul de la Sierra Leone qui avait conduit les autorités à conclure que le requérant ne pouvait être renvoyé dans ce pays. Toutefois, la Cour relève que l'intéressé a été maintenu en détention jusqu'en mars 2013, alors même que les autorités savaient depuis le 11 février 2013 qu'il ne pourrait faire l'objet d'une expulsion.

105. Ces éléments sont à eux seuls suffisants pour que la Cour puisse conclure que la détention du requérant postérieurement à la décision sur sa demande d'asile n'était pas compatible avec l'article 5 § 1 f). De plus, la Cour croit utile de rappeler qu'elle a déjà jugé, dans l'affaire Louled Massoud (précitée), que l'ordre juridique maltais ne comportait pas de procédure visant à éviter tout risque de détention arbitraire dans l'attente d'une expulsion. Eu égard à la conclusion de violation de l'article 5 § 4 à laquelle elle est parvenue en l'espèce (paragraphe 60 ci-dessus), la Cour constate que cette situation n'a pas changé. En outre, après avoir examiné les conditions dans lesquelles le requérant avait été détenu au cours de la première période de son incarcération, la Cour a estimé qu'elles étaient préoccupantes.

106. Au vu de ce qui précède, la Cour dispose d'éléments suffisants pour conclure que l'ordre juridique interne dans son ensemble a failli à protéger le requérant contre le risque d'une incarcération arbitraire, et que le maintien de l'intéressé en détention après la décision intervenue sur sa demande d'asile ne se conciliait pas avec la seconde partie de l'article 5 § 1 f) de la Convention.

107. En conclusion, la Cour dit qu'il y a eu violation de l'article 5 § 1 de la Convention du fait de la détention subie par l'intéressé en raison de son statut de migrant pendant l'instruction de sa demande d'asile et après la décision à laquelle celle-ci a donné lieu.

(...)

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L'UNANIMITÉ,

(...)

3. Dit qu'il y a eu violation de l'article 5 § 1 de la Convention ;

(...)

Fait en anglais et communiqué par écrit le 23 juillet 2013, en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Fatoş AracıIneta Ziemele
Greffière adjointePrésidente

* * *

[1]. Louled Massoud c. Malte, n° 24340/08, 27 juillet 2010.

[2]. Abdolkhani et Karimnia c. Turquie, n° 30471/08, 22 septembre 2009.


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award