COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 54F
4e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 24 NOVEMBRE 2014
R.G. N° 12/08334
AFFAIRE :
Société EIFFAGE
...
C/
SOCIETE MEDITERRANEENNE DE PARKINGS
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Novembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° chambre : 7ème
N° RG : 11/08366
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Mélina PEDROLETTI
Me Pierre GUTTIN
Me Christophe DEBRAY
Me Anne-Laure DUMEAU
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Société EIFFAGE 'S.A.' anciennement dénommée FOUGEROLLE S.A.
N° de Siret : 709 802 094 R.C.S. NANTERRE
Ayant son siège [Adresse 2]
[Adresse 2]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Maître Mélina PEDROLETTI, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 00022108 vestiaire : 626
plaidant par Maître Stéphane LAMBERT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C 0010
Société FOUGEROLLE 'S.A.S.'
N° de Siret : 562 129 833 R.C.S. VERSAILLES
Ayant son siège [Adresse 1]
[Adresse 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Maître Pierre GUTTIN, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 12000755 vestiaire : 623
plaidant par Maître Jean PATRIMONIO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B 0344
Société SOCOTEC FRANCE 'S.A.'
N° de Siret : 542 016 654 R.C.S. VERSAILLES
Ayant son siège [Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Maître Christophe DEBRAY, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627
plaidant par Maître Jean-Pierre KARILA de la SCP KARILA SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 0264
APPELANTES ET INTIMEES
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SOCIETE MEDITERRANEENNE DE PARKINGS 'S.A.R.L.'
N° Siret : 729 802 488 R.C.S.NANTERRE
Ayant son siège [Adresse 4]
[Adresse 4]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Maître Anne-Laure DUMEAU, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 40503 vestiaire : 628
plaidant par Maître Philippe PERICAUD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 0219
INTIMEE
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Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Octobre 2014, Madame Michèle TIMBERT, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Michèle TIMBERT, Président,
Madame Anna MANES, Conseiller,
Madame Sylvie DAUNIS, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvia RIDOUX
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FAITS ET PROCEDURE,
La ville de [Localité 1] a concédé en 1980 à la société FOUGEROLLE S.A, aujourd'hui dénommée EIFFAGE, la construction et l'exploitation d'un parc de stationnement sur la [Adresse 5]. La société FOUGEROLLE SA, aujourd'hui dénommée EIFFAGE, a présenté comme société concessionnaire exploitante la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS.
Les travaux ont été achevés en 1982.
Sont notamment intervenus à l'opération de construction :
- l'architecte [F] pour la maîtrise d'oeuvre complète de l'opération,
- la société SOCOTEC pour le contrôle technique,
- la société VENDASI dont la nature de l'intervention est à déterminer,
- la société TRAVAUX HYDRAULIQUES ET ENTREPRISES GÉNÉRALES (T.H.E.G) aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société FOUGEROLLE S.A.S. à la suite d'une transmission universelle de patrimoine.
- la société BIEP pour les études béton .
Se plaignant de désordres sur la dalle supérieure du parking, la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS a saisi, par requête du 9 août 2000, le tribunal administratif de Bastia en sa formation de référé, afin d'obtenir la désignation d'un expert, sa demande ayant été accueillie suivant ordonnance de référé en date du 30 août 2000.
L'expert a clos son rapport le 17 avril 2001. Par ordonnance de référé du 19 février 2003, un complément d'expertise a été ordonné et l'expert a déposé son deuxième rapport le 24 janvier 2004.
A l'initiative de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS, les opérations d'expertise ont été rendues communes à SOCOTEC puis à T.H.E.G.
Par requête du 7 janvier 2005, la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS a saisi le tribunal administratif de Bastia en réparation des désordres.
Par jugement du 7 juin 2007, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS.
Par arrêt du 13 décembre 2010, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement et s'est déclarée incompétente au profit des juridictions de l'ordre judiciaire.
Par acte des 9, 23 et 24 juin 2011, la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS a fait assigner en réparation la société EIFFAGE (anciennement dénommée FOUGEROLLE S.A), le bureau de contrôle SOCOTEC et la société FOUGEROLLE S.A.S. venant aux droits et obligations de la société T.H.E.G.
Par jugement du 13 novembre 2012, le tribunal de grande instance de Nanterre a :
- Déclaré la société EIFFAGE (anciennement FOUGEROLLE S.A), la SAS FOUGEROLLE (anciennement T.H.E.G) et le bureau de contrôle SOCOTEC responsables à l'égard de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS des désordres liés à l'étanchéité affectant le parc de stationnement de la [Adresse 5] à [Localité 1] ;
- Condamné in solidum la société EIFFAGE (anciennement FOUGEROLLE S.A), la SAS FOUGEROLLE (anciennement T.H.E.G) et le bureau de contrôle SOCOTEC à payer à la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS les sommes suivantes :
* 115.000 euros HT au titre des travaux nécessaires à la réfection des poutrelles du plancher haut du niveau - 1 du parking,
* 13.800 euros HT au titre des honoraires de maîtrise d''uvre sur les travaux sur poutrelles,
* 786.529 euros HT au titre des travaux de réfection intégrale de l'étanchéité du parking,
* 37.485 euros HT au titre des honoraires de maîtrise d''uvre sur les travaux d'étanchéité,
* 10.706,51 euros HT au titre des honoraires de maîtrise d'ouvrage déléguée sur les travaux,
* 6.870 euros HT au titre des honoraires coordination de sécurité SPS,
* 3.000 euros HT au titre des honoraires de contrôle technique pour les travaux sur poutrelles,
* 475.099,19 euros HT au titre des travaux effectués dans le cadre de la première procédure d'expertise,
* 12.404,36 euros HT au titre des frais d'études et de conseils techniques ;
- Dit n'y avoir lieu à application de la TVA sur ces sommes ;
- Dit que ces sommes seront indexées sur les variations de l'indice BT01 du coût de la construction à compter du 31 mai 2007, date d'expiration de la concession, et jusqu'au présent jugement, et productives d'intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
- Débouté la société EIFFAGE (anciennement FOUGEROLLE S.A), la SAS FOUGEROLLE (anciennement T.H.E.G) et le bureau de contrôle SOCOTEC de toutes leurs demandes ;
- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
- Condamné in solidum EIFFAGE (anciennement FOUGEROLLE S.A), la SAS FOUGEROLLE (anciennement T.H.E.G) et le bureau de contrôle SOCOTEC à payer à la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société EIFFAGE (anciennement FOUGEROLLE S.A), la SAS FOUGEROLLE (anciennement T.H.E.G) et le bureau de contrôle SOCOTEC aux dépens.
La société SOCOTEC a relevé appel de cette décision le 5 décembre 2012, à l'encontre de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS, de la société EIFFAGE et de la SAS FOUGEROLLE, appel enregistré sous le numéro 12/08334.
La société EIFFAGE a également interjeté appel de cette décision le 21 décembre 2012, à l'encontre de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS, de la société SOCOTEC et de la SAS FOUGEROLLE, appel enregistré sous le numéro 12/08847.
La SAS FOUGEROLLE a enfin relevé appel de cette même décision le 24 décembre 2012, à l'encontre de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS, de la société EIFFAGE et de la société SOCOTEC, appel enregistré sous le numéro 12/08884.
Par ordonnance de jonction du 17 septembre 2013, le conseiller de la mise en état de cette cour a joint les procédures numéros 12/08334, 12/08884 et 12/08847 et a dit qu'elles seront suivies sous le numéro 12/08334.
Dans ses dernières conclusions du 26 avril 2013, la société SOCOTEC FRANCE dite la SOCOTEC demande à cette cour de :
Sur sa procédure d'appel (RG N°12/08334)
- Infirmer en toutes ses dispositions le jugement.
Et statuant à nouveau,
- Dire et juger que la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS est irrecevable à agir à son encontre sur le fondement de la responsabilité contractuelle pour faute dolosive, dès lors qu'elle n'a jamais été liée par contrat avec elle, qu'elle ne prouve pas sa qualité de propriétaire du parc de stationnement ou encore avoir été subrogée dans les droits du propriétaire dudit parc de stationnement, ni sa qualité de maître d'ouvrage, ni enfin sa qualité de concessionnaire au titre des travaux de réalisation du parc de stationnement d'une part, et au jour de l'introduction de son action, d'autre part.
Subsidiairement sur le fond
- Dire et juger que l'absence totale de mise en 'uvre de toute étanchéité alléguée par la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS n'est pas établie.
- Dire et juger que les travaux de réfection n'ont pas consisté dans la création d'une étanchéité qui aurait été inexistante ab initio mais seulement d'une réfection même totale de l'étanchéité déjà existante.
- Dire et juger qu'elle a parfaitement rempli ses obligations contractuelles tant au titre de la phase de conception du projet de construction qu'au titre de sa mission pendant l'exécution des travaux.
- Dire et juger qu'elle n'avait pas à fournir à l'issue des travaux d'exécution un rapport final concernant la qualité des travaux exécutés.
- Dire et juger qu'elle était seulement tenu de fournir sur demande du maître de l'ouvrage, après achèvement, de l'exécution des travaux et avant signature des procès- verbaux de réception son avis.
- Dire et juger qu'il n'est pas établi que la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS, la Ville de Bastia ou encore la société FOUGEROLLE aient sollicité son avis .
- Dire et juger en conséquence que c'est à tort que le premier juge a estimé qu'elle avait engagé sa responsabilité contractuelle en établissant un rapport final entérinant la non-conformité alléguée.
- Dire et juger en conséquence la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS n'a pas démontré l'existence d'une faute quelconque de la société SOCOTEC qui a parfaitement respecté ses obligations contractuelles.
- Dire et juger qu'en admettant qu'elle ait commis une faute, celle-ci n'aurait pas été dolosive quelle qu'ait été sa prétendue gravité.
- Dire et juger que la faute dolosive implique la violation délibérée, même sans intention de nuire, par dissimulation ou par fraude des obligations contractuelles du constructeur ou du locateur d'ouvrage.
- Dire et juger que la gravité de la faute n'induit pas pour autant la fraude ou la dissimulation.
- Dire et juger en conséquence que la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS ne rapporte pas la preuve des conditions de la mise en oeuvre de sa responsabilité contractuelle pour dol et l'en débouter purement et simplement
- Dire et juger recevables et fondées ses demandes reconventionnelles
- Dire et juger que l'action de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS constitue un abus manifeste qu'il convient de sanctionner par l'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive.
- Condamner en conséquence et à ce titre la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS à lui régler la somme de 15.000 €.
Sur la procédure d'appel de la SAS FOUGEROLLE (RG N°12/0884)
- Prendre acte de ce que la SAS FOUGEROLLE (anciennement THEG) ne conclut pas contre elle.
- Prendre acte de ce qu'elle adopte les motifs et moyens soutenus par la SAS FOUGEROLLE en sa qualité d'appelante principale aux fins d'infirmation pure et simple du jugement précité soumis à la censure de la cour.
- Prendre acte de ce qu'elle réitère dans le cadre de cette procédure en sa qualité d'appelante incidente les motifs qui l'ont conduit à demander en qualité d'appelante principale (procédure 12/08334) l'infirmation du jugement
- Infirmer en conséquence le jugement et statuer comme il a été conclu sur son appel principal en faisant droit à son appel incident puisqu'elle est intimée sur la procédure d'appel de la société FOUGEROLLE.
Sur la procédure d'appel de la société EIFFAGE (RG N°12/08347)
- Prendre acte de ce que la société EIFFAGE ne conclut pas contre elle.
- Prendre acte de ce qu'elle adopte les motifs et moyens soutenus par la société EIFFAGE en sa qualité d'appelante principale, aux fins d'infirmation pure et simple du jugement précité soumis à la censure de la cour.
- Prendre acte de ce qu'elle réitère dans le cadre de la présente procédure en sa qualité d'appelante incidente les motifs qui l'ont conduit à demander en qualité d'appelante principale (procédure 12.08334) l'infirmation du jugement,
- Infirmer en conséquence le jugement et statuer comme il a été conclu sur son appel principal en faisant droit à son appel incident puisqu'elle est intimée sur l'appel de la société EIFFAGE.
En tout état de cause, pour les trois procédures d'appel,
- Dire et juger en outre que les conditions de l'application de l'article 700 du code de procédure civile sont en la circonstance de l'espèce réunies.
- Condamner en conséquence la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS à lui payer la somme de 25.000 € au titre des frais et honoraires tant de première instance que d'appel non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS aux entiers dépens de première instance et d'appel et dire qu'en ce qui concerne ceux d'appel, et ils pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile par la SCP DEBRAY CHEMIN.
Dans ses dernières conclusions du 26 mai 2014, la SAS FOUGEROLLE demande à cette cour, au visa des articles 1315 du code civil et 31 du code de procédure civile, de :
- Réformer le jugement
Statuant à nouveau :
- Juger la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS irrecevable en ses demandes comme ne justifiant pas de sa qualité et de son intérêt pour agir dans le cadre de la présente instance.
- Juger que la demanderesse ne rapporte pas la preuve de la qualité de co-contractante de THEG, pas plus que du principe et du montant des travaux qui lui auraient été commandés en 1980.
- Juger que la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS ne rapporte pas la preuve de man'uvres frauduleuses de la concluante.
- Juger que la cause des désordres affectant le parking litigieux trouve sa source à titre principal dans une erreur de conception et à titre subsidiaire dans les défauts d'exécution et, à l'évidence, ne saurait être qualifiée d'inexécutions volontaires ayant entraîné comme conséquence prévisible les dommages actuellement constatés.
- Débouter la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS de ses prétentions.
- Juger qu'il y a lieu à prise en compte de l'extrême vétusté des installations d'origine, qui ont plus de 25 ans d'âge, sont largement amorties, ce qui justifie d'un abattement pour vétusté qui ne saurait être inférieur à 95 %,
- Condamner la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS à lui payer la somme de 15.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions du 2 juin 2014, la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS demande à cette cour de :
- Dire et juger mal fondées les sociétés FOUGEROLLE, SOCOTEC et EIFFAGE en leurs appels ; les en débouter
- En conséquence, confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions, et notamment, en ce qu'il l'a déclarée recevable en son action, et a déclaré solidairement responsables les sociétés EIFFAGE, SOCOTEC et FOUGEROLLE SAS des conséquences dommageables des désordres affectant le parking de la [Adresse 5] à [Localité 1] et les a condamnés in solidum à lui payer les sommes indexées de :
* 115.000,00 euros H.T, au titre des travaux nécessaires à la réfection des poutrelles du plancher haut du niveau -1 du parking,
*13.800,00€ HT, au titre des honoraires de maîtrise d'oeuvre sur les travaux sur poutrelles
* 786.529,00 euros H.T, au titre des travaux de réfection intégrale de l'étanchéité du parking, selon facture établie par Corse Travaux à sa demande.
* 37.485,00 euros HT, au titre des honoraires de maîtrise d''uvre sur les travaux d'étanchéité.
* 10.706,51 euros HT, au titre des honoraires de maîtrise d'ouvrage déléguée sur les travaux.
* 6.870,00 euros HT, au titre des honoraires coordination de sécurité SPS.
* 3.000,00 euros HT, au titre des honoraires de contrôle technique pour les travaux sur poutrelles
* 475.099,19 euros H.T., au titre des travaux palliatifs et confortatifs (pour les premières et deuxièmes tranches) qu'elle a été contrainte d'effectuer jusqu'à ce jour afin de permettre la mise en sécurité des installations et l'exploitation normale du parking.
* 12.404,36 euros H.T., au titre des frais d'études et de conseils techniques qu'elle a dû engager.
* 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui comprendront l'ensemble des frais d'expertise.
- Condamner les sociétés EIFFAGE, SOCOTEC et FOUGEROLLE SAS, chacune, à lui payer la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens qui seront recouvrés, conformément à l'article 699 du code de procédure civile, par Me DUMEAU avocat aux offres de droit.
Dans ses dernières conclusions du 3 juin 2014, la société EIFFAGE venant aux droits de FOUGEROLLE S.A. demande à cette cour, au visa des articles 1134 et 1147 du code civil, de :
- Réformer intégralement le jugement
I/ Sur la recevabilité de l'action de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS
- Constater que la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS a toujours dénié avoir endossé la qualité de maître de l'ouvrage de la construction du parking en 1981-1982.
- Dire que c'est bien la qualité de maître d'ouvrage à l'époque des travaux qui doit être examinée pour apprécier la recevabilité de l'action de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS à l'encontre des constructeurs de l'époque,
- Constater que la preuve de ce que la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS avait une telle qualité à cette époque n'est aucunement rapportée.
- Dire que faute de disposer d'un intérêt et d'une qualité pour agir dans le cadre de la présente instance, les prétentions formées par la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS ne peuvent qu'être rejetées au visa de l'article 31 du code de procédure civile.
II/ Sur sa responsabilité
II.1/ Sur les principes applicables
- Prendre acte de l'accord de la concluante sur le principe juridique applicable au présent litige mais de sa contestation la plus formelle quant au bien-fondé de son application au cas d'espèce.
II.2/ Sur le rôle de FOUGEROLLE S.A sur cette opération et la qualification de son intervention
' II.2.1/ Dans la motivation de sa décision, le tribunal a retenu qu'elle avait eu « un rôle actif dans le chantier ainsi qu'en attestent les échanges de courriers en 1980-1981 avec la Ville de Bastia et le Bureau SOCOTEC » (paragraphe 11 - page 6 du jugement).
- Dire que la société FOUGEROLLE S.A ait été qualifiée dans ses rapports avec le propriétaire, la Ville de [Localité 1], de constructeur maître de l'ouvrage ne signifie pas qu'elle ait elle-même réalisé la construction, alors que les éléments versés aux débats tendent à démonter le contraire.
- Constater que FOUGEROLLE S.A ne s'est aucunement immiscée dans l'opération de construction et n'a pas construit elle-même, mais fait construire.
' II.2.2/ Examen des courriers sur lesquels se sont fondés la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS et le tribunal pour retenir que FOUGEROLLE S.A. serait intervenue comme locateur d'ouvrage dans cette opération :
- Constater que l'interprétation de phrases sorties de leur contexte ne saurait pallier l'absence de preuve de l'immixtion de la société FOUGEROLLE S.A. dans la réalisation des travaux en dehors de son rôle de pur maître de l'ouvrage.
' II.2.3/ Pour la condamner, le tribunal a retenu « Qu'elle ne pouvait ignorer l'absence de mise en 'uvre d'un complexe d'étanchéité » (paragraphe 12 -page 6 du jugement).
- Constater que les désordres structurels relevés par l'Expert dans le cadre des deux rapports successivement déposés en avril 2001 et en janvier 2004 démontrent qu'ils résultent de multiples causes,
- Dire que l'ouvrage ait été mal conçu par le maître d'oeuvre et que l'étanchéité ait été incomplètement mise en oeuvre par endroits et ponctuellement réalisée en contradiction avec les prescriptions du fabricant, autrement dit mal réalisée, ce qui n'est pas contesté, ne saurait entraîner en l'espèce application de la jurisprudence découlant de l'arrêt du 27 juin 2001.
- Dire qu'il est inconcevable que le maître de l'ouvrage qui prévoyait de réaliser l'exploitation d'un parking par l'entremise de l'une de ses filiales ait pu délibérément accepter que les constructeurs réalisent un ouvrage conceptuellement erroné et factuellement mal réalisé, compromettant gravement la pérennité de l'ouvrage et consécutivement son exploitation.
' II.2.4/ Sans doute consciente de la faiblesse de cette argumentation, la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS, suivie en cela par le tribunal, ont cru pouvoir prétendre qu'elle « ne pouvait ignorer l'absence de mise en 'uvre d'un complexe d'étanchéité et n'en a d'ailleurs pas fait état lors de la cession des parts en 1993 de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS à la société VINCI PARK venant aux droits de la société SOGEPAG » (paragraphe 12 - page 6 du jugement).
- Dire que l'étanchéité a été certes défaillante du fait d'une erreur de conception de la protection des joints de dilatation, conjuguée avec la réalisation d'une étanchéité en partie courante en contradiction avec les prescriptions du fabricant et à l'absence en certains endroits de réalisation d'une telle étanchéité, mais que pour autant, il n'est pas sérieusement contestable qu'un système d'étanchéité de la dalle ait été bien prévu et ait été insuffisamment ou mal réalisé.
- Constater que FOUGEROLLE S.A. se devait d'assurer la protection des parkings en sous- sol contre les venues d'eaux susceptibles d'affecter la pérennité de la structure sauf à risquer d'en compromettre l'exploitation future, en totale contradiction avec ses propres intérêts.
- Constater que éventuelles cessions intervenues entre celle de 1993 et le 24 février 2000, qui est la date figurant dans les statuts mis à jour faisant apparaître pour la première fois SOGEPAG, ne sont pas connues, et qu'il n'est pas démontré dans quelles conditions SOGEPAG est venue aux droits de la société ELEPARC.
- Constater que le parking a été tout à fait normalement exploité par la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS détenue par FOUGEROLLE S.A. pendant de nombreuses années ; qu'il est inconcevable que les acquéreurs des parts n'aient pas fait procéder à un audit complet du parc avant d'acquérir les actions, alors de plus qu'aucune garantie de passif n'a été souscrite à cette époque.
- Dire que s'il devait être retenu un vice de consentement lors de la cession des parts de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS en 1993, il appartiendrait le cas échéant aux acquéreurs de l'époque ou à ses ayants droit d'agir sur ce fondement, mais que tel n'est absolument pas l'objet de la présente instance et que la confusion opérée à ce titre pour tenter de se raccrocher artificiellement à la jurisprudence citée pour engager la responsabilité des constructeurs ne saurait prospérer.
En conclusion
- Dire que la société FOUGEROLLE S.A. devenue EIFFAGE n'aurait pu en tout état de cause être que la victime d'éventuels agissements d'entrepreneurs en application de la jurisprudence visée par la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS, et aurait alors seule qualité pour en exciper,
- Constater que la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS ne rapporte pas la preuve de manoeuvres frauduleuses de la concluante avec les différents intervenants à l'acte de construire.
- Constater que la cause des désordres affectant le parking litigieux trouve sa source à titre principal dans une erreur de conception et à titre subsidiaire dans les défauts d'exécution et, à l'évidence, ne saurait être qualifiée d'inexécutions volontaires ayant entraîné comme conséquence prévisible les dommages actuellement constatés.
- Pour l'ensemble de ces raisons, le raisonnement tronqué du tribunal, fondé sur des éléments parcellaires diversement et faussement interprétés, devra être censuré par la cour, qui réformera le jugement en ce qu'il a retenu l'engagement de sa responsabilité contractuelle à l'égard de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS et la déboutera intégralement de ses prétentions.
III / Sur les dommages et intérêts :
- Constater que le procédé employé par la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS pour tenter de faire avaliser l'intégralité de ses postes de demande heurte les prescriptions du code de procédure applicable et le simple bon sens.
- Constater qu'il est en effet pour le moins singulier que la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS n'ait pas soumis à l'expert [D] dans le cadre de sa seconde désignation le principe et le montant des travaux qu'elle envisageait de réaliser, ou ne fasse avaliser ceux déjà réalisés alors même que l'objet de la deuxième désignation visait justement à définir le principe et le montant des travaux à engager.
- Dire qu'en s'étant abstenue de soumettre à l'Expert les marchés correspondants et de solliciter son appréciation quant à l'utilité et la pertinence des travaux ainsi engagés, afin de lui permettre de répondre à sa mission et de disposer de l'analyse d'un technicien de nature à éclairer les parties et le tribunal sur le bien-fondé des, les prétentions présentées par la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS apparaissent douteuses par principe et la preuve n'est pas rapportée de ce qu'elles correspondent à l'engagement de travaux strictement nécessaires à la reprise des désordres objet de la présente procédure.
- Rejeter les prétentions indemnitaires de la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS et à tout le moins les travaux de renforcement structurels et les honoraires de maîtrise d'ouvrage déléguée.
- Condamner la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS à lui payer la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner la société MÉDITERRANÉENNE DE PARKINGS aux entiers dépens en application titre de l'article 699 du code de procédure civile dont le montant sera recouvré par Maître Mélina PEDROLETTI, Avocat.
La clôture a été prononcée le 2 septembre 2014.
*****
Motifs de la décision
Recevabilité de l'action
Le 29 août 1980, la ville de [Localité 1] a concédé à la société Fougerolle devenue Eiffage, la construction du parc de stationnement en sous sol, situé, [Adresse 5]. La réception est intervenue le 1er juin 1982 et le premier référé expertise par requête du 9 août 2000.
La société Socotec soutient que la SMP qui n'est pas propriétaire actuel, n'a pas de lien contractuel avec elle, n'a jamais eu la qualité de maître d'ouvrage pour les travaux, n'a jamais été ni concessionnaire de la ville de [Localité 1], ni de la société Fougerolle au titre de la réalisation des travaux, n'a été concessionnaire exploitant qu'à la réalisation des travaux et était tenue à ce titre des grosses réparations et n'a jamais été subrogée dans les droits ni de la ville, ni de la société Eiffage.
La société Fougerolle soutient également que la SMP n'a pas qualité à agir, étant initialement simple concessionnaire et n'étant pas propriétaire à ce jour, le contrat n'ayant pas été renouvelé et que sa qualité de maître d'ouvrage n'est pas établie pour la période de réalisation des travaux.
La société Eiffage mentionne que la société Fougerolle a bien présenté la SMP à la ville de [Localité 1] en qualité de concessionnaire et qu'en conséquence, la maîtrise d'ouvrage a été réalisée par la société Fougerolle et /ou la SMP mais qu'elle n'est plus concessionnaire depuis mai 2007 et n'avait pas la qualité de maître d'ouvrage lors de la réalisation des travaux.
La SMP soutient que la société Fougerolle a été le maître d'ouvrage mais qu'elle n'a plus qualité à agir ayant cédé ses parts à la fin de la construction et qu'en réalité ayant assumé l'amortissement de la totalité du coût du parking et donc de son financement, ayant conservé l'exploitation et supporté le financement, elle est en réalité le vrai maître d'ouvrage devant le restituer à la fin de ma concession exempt de vice, enfin, qu'elle a un intérêt à agir, le maître d'ouvrage n'étant pas obligatoirement le propriétaire.
La SMP n'a pas eu la qualité de maître d'ouvrage mais celle de concessionnaire devenue exploitant à la fin des travaux, date de son intervention, soit postérieurement à la réception.
Le contrat de concession de travaux publics consiste à faire réaliser des travaux de bâtiment par un concessionnaire dont la rémunération peut consister à exploiter l'ouvrage. Il est établi que la SMP est concessionnaire exploitant.
Le contrat de concession du 29 août1980 précise dans son objet, que Fougerolle : 's'engage à constituer ...la société ad hoc, provisoirement désignée société concessionnaire.......cette société sera la société concessionnaire chargée de l'exécution des opérations prévues par la présente convention ainsi que toutes opérations financières s'y rapportant'.
Il est également précisé que : 'les travaux seront exécutés par la société Fougerolle...cette société intervenant après avoir crée la société concessionnaire prévue par la convention pour la construction et l'exploitation du parc de stationnement en qualité de simple entreprise de construction de l'ouvrage'.
La société ainsi crée, objet du contrat est la société SMP. Selon l'article 10, elle s'est engagée à faire construire et à exploiter le parc, objet du litige. Elle devait selon l'article 3 'assurer le financement complet de l'ensemble des travaux' et à l'article 10, 'régler directement les mémoires et factures, aux entreprises et services ayant exécuté les travaux ...la société concessionnaire conservera l'entière responsabilité du bon achèvement et de la solidité des constructions. Il est dit également que la ville de [Localité 1] sera propriétaire des constructions au fur et à mesure de leur exécution.
Enfin, l'article 23 précise que la ville à l'expiration des concessions entrera en jouissance de la totalité des installations et aménagements intérieurs. Selon l'article 5, cette concession a été fixée à vingt cinq années.
Il est avéré qu'en réalité c'est la société Fougerolle qui a fait construire le parking et qu'ensuite, elle a cédé ses parts. Selon le protocole d'accord signé avec la ville de [Localité 1] le 25 juin 2008, la SMP est bien désigné comme concessionnaire exploitant du parc. Elle a donc bien financé le parking en rachetant les parts de la société Fougerolle et en contre partie, la ville lui a concédé l'exploitation du parc.
Dans une concession, les ouvrages construits par le cessionnaire ne sont remis au concédant qu'à la fin du contrat. Il en résulte que le concessionnaire détient à l'égard des constructeurs la qualité de maître d'ouvrage et dispose des recours.
L'action fondée sur la faute dolosive du constructeur est de nature contractuelle, elle est donc attachée au bien transmis, en l'espèce, le parking, et donc transmissible au sous acquéreur. Il en résulte que la SMP est recevable à se prévaloir de la faute pour rechercher la responsabilité du constructeur après l'expiration des garanties légales.
De plus, le protocole mentionne que le concessionnaire (la SMP) a fait procéder à la réalisation d'un complexe d'étanchéité en surface du parking qui depuis la construction en était dépourvu et que les travaux sont achevés. Il en résulte que le droit à réparation est né de la survenance du dommage pendant le temps de la concession et reste personnel à la SMP, peu important que le bien soit repris par la ville et surtout dans la mesure ou cette dernière n'a pas remboursé les frais d'étanchéité et que seul la SMP peut exercer une action.
La SMP ayant financé les travaux d'étanchéité de la surface du parking, avant la reprise de ce dernier par la ville, elle a donc un intérêt à agir, ayant un préjudice personnel et alors même que tenue au paiement des grosses réparations, elle ne pouvait pas subroger la ville dans les recours exercés contre les constructeurs. Enfin, elle a introduit son action alors qu'elle était encore concessionnaire.
Le jugement a justement relevé que si finalement la SMP n'a pas fait construire l'ouvrage mais l'a seulement exploité, elle a été néanmoins qualifiée de 'concessionnaire' tant dans l'acte initiale du 29 août 1980 au travers da la société Fougerolle, que dans le protocole d'accord du 25 juin 2008, la SMP venant préciser que la société Fougerolle lui a transmis ces parts à la fin de la construction.
De plus, si la société SMP a eu la qualité de concessionnaire sur le parking [Adresse 5], c'est bien qu'il a existé une contrepartie vis à vis de la ville de [Localité 1]. Que la maîtrise d'ouvrage lui a été transférée et qu'enfin, ayant engagé des travaux importants de réfection, elle a d'une part, la qualité à agir et d'autre part, intérêt à agir à l'encontre des constructeurs de l'ouvrage alors qu'elle en a assuré l'entretien et l'exploitation.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré l'action de la SMP recevable.
Les intervenants
Les premiers juges ont condamné in solidum la société Eiffage (anciennement Fougerolle qui a été maître d'ouvrage ), la société Fougerolle (anciennement Theg, dont la qualité est contestée) et la société Socotec (contrôleur technique) à payer des sommes à la SMP sur le fondement du dol.
La SMP a peu de pièces, elle n'a pas les contrats de l'entreprise générale, ni des autres intervenants notamment les échanges entre le maître d'oeuvre et les sociétés, la société Socotec ayant versé sa mission en cours de procédure. Sur l'ensemble des intervenants, il a été mis en cause trois parties.
Il y a lieu de s'assurer de la présence et de la qualité de chacun sur le chantier.
Pour Socotec, elle avait une mission complète de contrôle technique portant sur la solidité des ouvrages et les éléments d'équipement indissociables et la sécurité des personnes dans les constructions. Notamment le défaut d'étanchéité des ouvrages de clos et de couvert. Sa présence sur le chantier n'est pas contestée.
La société Fougerolle venant aux droits de la société Theg ne conteste plus sa présence sur les lieux mais sa qualité. Elle soutient que chargée du lot structure, elle a été sous traitante d'une société Vendasi qui, d'ailleurs a envoyé une documentation le 12 novembre 1981 à Socotec visant de l'information sur l'étanchéité. Elle soutient que la preuve de son intervention en qualité d'entreprise générale n'est pas apportée.
Les seuls documents versés par la société Fougerolle émanant de la société Vendasi sont deux bordereaux de novembre et décembre 1981 intitulés, pour l'un, 'documentation et essais d'étanchéité ' et pour l'autre, 'cahier mise en oeuvre étanchéité' concernant de l'information sur l'étanchéité dont l'un s'intitule 'étanchéité des dalles supérieures du parking de [Localité 1]'.
La SMP établit que la société Theg avait été pressentie pour participer au chantier car le procès verbal d'administration de décembre 1980 prévoyait de confier la construction du parking à la société Theg, en sa qualité 'd'entreprise générale'. Le compte rendu de visite de la commission départementale de sécurité du 7 mai 1982 la mentionne parmi les constructeurs ainsi que des lettres de Socotec de janvier et avril 1981(pièces 2 et 3 de SMP). Les envois de Socotec adressés à la société Theg avec copie notamment à la société Vendasi posent des questions précises sur l'étanchéité et font des recommandations précises concernant ce lot.
De plus, un compte rendu de chantier n°28 (pièce 17 de Socotec) mentionne la société Theg en qualité 'd'entreprise générale', cependant, dans les corps d'état secondaires, il est mentionné la société Vendasi et il lui est demandé de fournir le planning des travaux restant à exécuter notamment 'étanchéité dalle à 80%' et les autres rapports concernant l'étanchéité mentionnent bien les deux sociétés Theg et Vendasi. La société Theg a été l'entreprise générale et la société Vendasi, plus spécialement chargé du lot étanchéité.
Il est établi et non contesté que la société Eiffage anciennement dénommée Fougerolle est intervenue en qualité de maître d'ouvrage constructeur. En effet, plusieurs pièces établissent cette qualité notamment : dire à l'expert de la ville de [Localité 1] le 21 mars 2001, rapport Socotec du 15 juillet 1981 et mission du 14 janvier 1981 et les lettres de Socotec , lettres de Fougerolle à la mairie de [Localité 1] du 15 et 17 décembre 1980 et la réponse de la mairie du 8 janvier 1981.
Les désordres
Il résulte des deux rapports de M. [D] clos les 17 avril 2001 et 24 janvier 2004 que :
' à de nombreux endroits du parking :
- des poutrelles comportent des fissures en sous face au niveau des taches d'humidité provenant de pénétrations d'eau, parfois le béton commence à éclater en sous face. Les infiltrations se font au niveau des fissures crées entre la terrasse du parking et soit, les puits d'aération et le socle de la statue sur la place ou les rampe d'accès, les accès aux véhicules et aux piétons,
- les poutrelles sont fortement étayées, le plafond du parking est très humide et les infiltrations se font au niveau de fissures entre la terrasse du parking et le socle de la statue sur la place.
Ces fissures sont le résultat de mouvements dus :
a) aux tassements différentiels,
b) aux variations climatiques et aux charges d'exploitation (spectacles, foires ..) qui entraînent des variations dimensionnelles au niveau de la structure à ossature porteuse totalement différentes de celles s'appliquant à la structure à voiles porteurs des puits d'aération,
c) au choix par le concepteur d'un système d'étanchéité rigide pour traiter le joint, non adapté pour assurer une étanchéité entre deux parties sujettes à de telles différences de variations,
d) à un défaut de réalisation du joint de dilatation séparant les deux structures (présence de corps étrangers obstruant une partie de son espace et créant des points durs dont les conséquences à courts termes sont la fissuration de la dalle de compression et donc de l'étanchéité,
- pour les voiles périphériques enterrés, la fissuration résulte de la poussée des terres de remblais et pour celles non enterrés la fissuration résulte d'un contreventement insuffisant.
Par la suite dans le 2ème rapport, l'expert a constaté à quelques endroits, l'absence de couche d'étanchéité et de son film de protection (sur des joints de dilatation, cage escalier). Sur une partie de la place, il a été impossible de visualiser la couche d'étanchéité et un sondage a permis de constater qu'il existe une fine couche de résine noire et que là où elle existe, elle est sans interposition d'un film de protection d'une couche de grave.
- Selon l'expert, la couche de résine là, où elle est présente n'a pas été mise en oeuvre conformément au cahier des charges du fabriquant, l'épaisseur de la couche aurait du être de 1,5 mm et l'étanchéité aurait du être séparée de la grave par un non tissé d'épaisseur de 2 à 3 mm. Elle ne peut donc par ses manques assurer l'étanchéité de la toiture terrasse du parking.
- La réfection totale de l'étanchéité du parc s'impose afin de construire un édicule en béton armé sur la dalle de couverture au niveau de chaque ouvrage adjacent pour créer un véritable joint de dilatation.
- Il a existé une erreur de conception en raison de l'absence de relevé en béton.
- La solution d'évacuer les eaux collectées par les drains dans le caniveau bordant une allée représente un véritable danger pour le parking lors des fortes pluies provoquant l'inondation de l'allée.
- le coût des travaux de reprise du parking est de 1.056.096,36 €.
Pour conclure, ce deuxième rapport, l'expert indique que la réfection totale de l'étanchéité s'impose car elle est déficiente, soit par son absence, soit la pose est non conforme et il existe une erreur de conception (absence de relevé en béton). Il y a lieu de créer un édicule en béton armé sur la dalle de couverture au niveau de chaque ouvrage adjacent pour créer un véritable joint de dilatation.
Les responsabilités
La lecture des deux rapports d'expertise, permet d'établir l'existence de fautes de conception tels que le choix d'un système d'étanchéité rigide pour traiter le joint et donc non adapté et l'absence de relevé béton. S'agissant de l'exécution de l'étanchéité, l'expert, page 16 du rapport, mentionne :'la présence en partie courante de la dalle du parking d'une étanchéité déficiente (mise en oeuvre de résine non conforme aux prescriptions du fabriquant) et par endroit absente '. Plus loin ,il ajoute que : elle manque : 'à certains endroits'.
L'action est de nature contractuelle. Il y a une faute constitutive d'un dol si de propos délibéré même sans intention de nuire, un intervenant sur un chantier viole par dissimulation ou fraude ses obligations contractuelles. Il appartient à la SMP d'établir le dol sachant qu'elle ne détient qu'une partie des pièces et des intervenants.
La société Socotec
La société Socotec conteste l'absence de mise en oeuvre totale de l'étanchéité notamment au jour de la construction et au vu des rapports produits qui évoquent des reprises partielles d'étanchéité et elle invoque son absence de faute.
La société Socotec reproche à la SMP d'invoquer une absence totale d'étanchéité en dénaturant le rapport de l'expert comme le confirment les travaux de réparations effectués, conteste l'existence d'une faute, soutient avoir exécuté totalement sa mission tant en phase conception que d'exécution et précise qu'aucun rapport final n'était préconisé.
La SMP soutient qu'il a existé une quasi absence d'étanchéité lors de la construction, que Socotec n'a pas assuré les contrôles dés la phase de conception et que le dol résulte de ce que les entreprises n'ont pas respecté les règles de l'art et qu'elles ne pouvaient pas ignorer qu'elles prenaient un risque de nature à entraîner inéluctablement un désordre.
La société SMP soutient qu'elle devait fournir un rapport final ce qu'elle n'a pas fait alors que dans la mission, il est prévu qu'un avis soit donné avant de signer les procès verbaux de réception, qu'elle n'apporte pas la preuve de ce qu'elle a avisé le maître d'ouvrage et a commis une faute dolosive et qu'ainsi son silence et leur dissimulation alors que compte tenu de la mission, elle ne pouvait pas ne pas les avoir décelés.
La société Socotec avait pour mission le 'défaut d'étanchéité des ouvrages de clos et de couvert'.
Comme elle le soutient dés la conception du projet d'étanchéité, Socotec a été vigilante faisant des recommandations précises concernant l'étanchéité en demandant à Theg :' de changer un papier Kraft prévu au-dessus de l'étanchéité pour être remplacé par une couche de 3 cm de sable surmontée d'un film polyane....', et 'nous préciser la constitution de l'étanchéité multicouche et celle de la grave ciment ainsi que leur mode de mise en oeuvre'. Dans la deuxième lettre, il est évoqué ' la réalisation de l'étanchéité à la jonction voiles-plancher'. De plus, en phase de conception, Socotec mentionnait le 15 juillet 1981 que le complexe d'étanchéité restait à définir.
En phase d'exécution, Socotec s'est fait transmettre par la société Vendasi ,chargée du lot étanchéité, la documentation technique et les essais de laboratoire, les fiches techniques du produit utilisé, a assuré des visites des lieux. Elle a demandé de compléter les documents d'étanchéité en février 1982 et lors de la pose de l'étanchéité, elle a réalisé des sondages en janvier et février 1982 qui se sont révèlés satisfaisants ayant toutefois demandé le 2 février 1982 à la société de différer l'application, le support étant humide au nord du parking.
Enfin, ayant constaté la présence de nombreux visiteurs et des engins de chantier sur les parties déjà traitées, alors qu'il ne pouvait être certain que le délai de séchage ait été respecté, elle a recommandé de 'procéder avant mise en place du tout venant de la protection à une révision générale du revêtement d'étanchéité'.
La société Socotec a donc bien rempli sa mission lors de ces différentes phases de conception et d'exécution telles qu'elle sont mentionnées dans les conditions spéciales, étant précisé que selon le contrat, 'ces examens s'exercent par sondages et ne comportent donc pas de vérifications systématiques '.
Il est ajouté dans le contrat : 'qu' à la fin de cette deuxième phase de mission (celle d'exécution) et avant de signer les procès verbaux de réception, le maître d'ouvrage recueille l'avis de Socotec'.
Comme l'indique justement la société Socotec, selon sa mission de janvier 1981, c'est le maître d'ouvrage qui recueille son avis et il n'est pas établi qu'en l'espèce, cet avis ait été demandé alors même que la société Eiffage venant aux droits de la société Fougerolle est présente dans la présente procédure.
En conséquence, s'agissant de Socotec, il n'est pas établi une faute dans l'exercice de sa mission et encore moins une dissimulation ou une fraude. Il en résulte que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné la société Socotec pour faute constitutive d'un dol.
La société Theg
La SMP soutient qu'en sa qualité d'entreprise générale, la société Theg était chargée du lot étanchéité et qu'en conséquence, ayant reçu des recommandations de la Socotec, elle
devait superviser le lot étanchéité.
La société Theg soutient que c'est surtout un défaut de conception imputable à l'architecte comme l'a indiqué l'expert et qu'il s'agit d'erreurs pouvant être qualifiées de fautes mais pas de non réalisations de prestations définies au marché dont elle aurait eu conscience des conséquences futures à l'époque de la réalisation.
Le rapport de l'expert a relevé des fautes de conception de l'architecte et des fautes d'exécution notamment en ce que l'étanchéité de surface a été incomplètement mise en oeuvre et en ce que les prescriptions du fabricant n'ont pas été respectées pour la mise en oeuvre.
Cependant, si l'entreprise qui est tenue à une obligation de résultat a commis des manquements pouvant relever d'une incompétence professionnelle blâmable, la SMP qui ne détient aucune pièce concernant les contrats notamment celles du maître d'oeuvre ne prouve pas que ce manquement procédait d'une fraude ou d'une dissimulation et était constitutive d'une faute dolosive.
Il en résulte que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné la société Fougerolle venant aux droits de la société Theg pour faute constitutive d'un dol.
Société Eiffage, anciennement Fougerolle
La SMP soutient que la société Fougerolle était un professionnel de la construction comme promoteur et entrepreneur et qu'au surplus lors de la vente de ses parts, elle a dissimulé l'absence de mise en oeuvre de l'étanchéité.
Cette société avait la qualité de maître d'ouvrage, si elle ne conteste pas avoir eu un rôle actif sur le chantier, elle soutient à juste titre qu'elle n'a pas eu un rôle de constructeur ayant confié cette mission à plusieurs intervenants.
De plus et comme il a été souligné, il s'agit en l'espèce de faute de conception incombant à la maîtrise d'oeuvre et de défaut d'exécution, incombant à l'entreprise, ces deux manquements n'étant pas eux mêmes contestés. Aucune pièce probante ne caractérise le fait que la société Fougerolle se serait immiscée dans la construction de l'ouvrage notamment la conception et l'exécution de l'étanchéité et aurait eu connaissance de défaut d'étanchéité et se serait abstenu d'en faire état lors de la cession des parts.
Il en résulte que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné la société Eiffage venant aux droits de Fougerolle pour faute constitutive d'un dol.
Dommages et intérêts
La société Socotec demande des dommages et intérêts pour procédure abusive, soit la somme de 15.000 € .
Cependant, la SMP a pu se méprendre sur ses droits et aucun abus n'est caractérisé alors même qu'elle a obtenu gain de cause en première instance.
Article 700 du code de procédure civile
Les sociétés Socotec France, Eiffage (anciennement Fougerolle) et Fougerolle demandent des sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de condamner la SMP à leur payer à chacune la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant contradictoirement,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déboute la société Méditerranéenne de Parkings de toutes ses demandes,
Condamne la SMP à payer la somme de 8.000 € d'une part, à la société Socotec France, d'autre part, à la société Eiffage (anciennement Fougerolle) et enfin à la société Fougerolle (anciennement Theg) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les autres demandes,
Condamne la société Méditerranéenne de Parkings à la charge des dépens.
Dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Michèle TIMBERT, Président et par Madame Sylvia RIDOUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,