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03/10/2013 | FRANCE | N°10/07378

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 03 octobre 2013, 10/07378


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 70E



1ère chambre 1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 03 OCTOBRE 2013



R.G. N° 10/07378



AFFAIRE :



S.C.I. LMG





C/

[I] [H]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Septembre 2010 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 06/10380






r>Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



- Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, avocat au barreau de VERSAILLES





Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES,

JRF AVOCATS, ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 70E

1ère chambre 1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 03 OCTOBRE 2013

R.G. N° 10/07378

AFFAIRE :

S.C.I. LMG

C/

[I] [H]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Septembre 2010 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 06/10380

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

- Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES,

JRF AVOCATS,

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE TROIS OCTOBRE DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.C.I. LMG

inscrite au RCS de Versailles sous le numéro 481 099 505

[Adresse 1]

[Adresse 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

- Représentant : Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 00038958

Représentant : Me Elisabeth FERNANDES de la SCPA BILLON - BUSSY-RENAULD & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 70

APPELANT

****************

Monsieur [I] [H]

né le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20101240

- Représentant : Me Nathalie GILLET-BARTHELEMY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 410

Madame [C] [H] née [N]

née le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20101240

- Représentant : Me Nathalie GILLET-BARTHELEMY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 410

Monsieur [B] [V]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20101240

- Représentant : Me Nathalie GILLET-BARTHELEMY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 410

Madame [R] [V]

née le [Date naissance 5] 1974 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20101240 - Représentant : Me Nathalie GILLET-BARTHELEMY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 410

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Juin 2013 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie Gabrielle MAGUEUR Président et Madame Dominique LONNE, conseiller, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président,

Madame Dominique LONNE, Conseiller,

Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,

Par acte authentique du 10 juin 2005, la SCI LMG a acquis du Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine (CIAL) une propriété sise [Adresse 1] (cadastrée section B n° [Cadastre 2]-[Cadastre 3]-[Cadastre 1]).

M. et Mme [J] [Y] en étaient antérieurement propriétaires depuis un acte d'acquisition du 24 mars 1981 mais après une saisie immobilière leur propriété avait été vendue par adjudication au CIAL par jugement d'adjudication du 13 mars 1996.

Après ce jugement d'adjudication, les époux [Y] sont restés occupants de la propriété, et ils ont ensuite constitué la SCI LMG, laquelle a racheté le bien au CIAL le 10 juin 2005.

Par acte du 15 septembre1998, les époux [G] s'étaient rendus acquéreurs de la propriété contiguë à celle des époux [Y] (aujourd'hui de la Sté LMG) sis [Adresse 1].

Les époux [H] et les époux [V], ayant pour auteurs les consorts [G], sont devenus propriétaires des fonds contigus, situés respectivement aux [Adresse 1], pour les avoir acquis :

*en ce qui concerne les époux [V], s'agissant du fonds situé [Adresse 1], des époux [Q] et [E] [G], par acte authentique du 28 août 2002 ;

*en ce qui concerne les époux [H], s'agissant du fonds situé [Adresse 1], par acte du 08 juin 2006, des époux [S] qui l'avaient eux-mêmes acquis de M.[D] [Q] [G] en l'état futur d'achèvement par acte du 05 décembre 2002.

La SCI LMG soutient :

-qu'après que les époux [G] aient obtenu un permis de démolir en 1998, suivi d'un permis de construire en 1999, ils ont commis une voie de fait en démolissant sans aucune autorisation pour partie le mur séparant leurs propriétés respectives, le ramenant de 8 m à environ 3 m,

-que les époux [G] et leur fils n'ont pas détruit partiellement le mur parce qu'il était dégradé, mais pour donner une plus-value à leur propriété (en voie d'être vendue en deux lots), afin de dégager la vue et d'y apporter de la clarté,

-qu'ils ont fait construire sur leur terrain deux bâtiments d'habitation contigus sur deux lots distincts et ont fait procéder à la réduction à la hauteur autorisée de l'ancien mur de soutènement de la grange située à l'arrière du terrain afin d'apporter de la clarté à leur propriété.

Par exploit du 02 octobre 2006, la SCI LMG a donc saisi le tribunal de grande instance de Versailles et demandé la condamnation de M. et Mme [V] et de M. et Mme [H] à lui payer la somme de 76.447,14 euros « représentant le coût de la reconstruction du mur à l'identique  », soit jusqu'à 8 mètres de hauteur, ainsi que la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts pour voie de fait et trouble anormal de jouissance depuis le mois de février 2005 (en raison de la vue plongeante sur sa propriété depuis les fenêtres et constructions voisines des époux [V] et [H], constructions d'habitation implantées à environ 5 mètres en retrait du mur et possédant un balcon-terrasse surplombant le mur).

Par ordonnance du 12 juin 2008, le juge de la mise en état a désigné M. [K] [X] en qualité d'expert avec la mission de fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre de déterminer le caractère mitoyen ou non du mur et d'indiquer et évaluer les travaux nécessaires à la reconstruction du mur.

M. [X] a déposé son rapport le 8 avril 2009 et conclut à la mitoyenneté du mur. Son sapiteur, M. [T], a par ailleurs évalué à 52.753 € le coût des travaux nécessaires à la reconstruction du mur avec surélévation du mur jusqu'à une hauteur totale de 6 mètres.

La procédure était alors reprise, la SCI LMG a demandé l'homologation du rapport et l'allocation de dommages-intérêts, les consorts [V] et [H] formant des demandes reconventionnelles relatives à l'abattage ou à la réduction des arbres à la hauteur légale de 2 mètres ainsi qu'à des dommages-intérêts.

Par jugement du 10 septembre 2010, le tribunal de grande instance de Versailles a :

- dit que le mur séparant la propriété de la SCI LMG située [Adresse 1] des propriétés de M et Mme [H] et de M et Mme [V] respectivement situées [Adresse 1] est mitoyen,

- rejeté les fins de non recevoir,

- rejeté la demande de rehaussement du mur séparatif formée par la SCI LMG et sa demande en dommages-intérêts pour trouble de voisinage depuis 2005,

sur la demande reconventionnelle,

- condamné la SCI LMG à élaguer à la hauteur légale de 2 mètres, à défaut d'abattre, les arbres plantés à une distance inférieure à deux mètres du mur séparatif et à supprimer le lierre et les plantes grimpantes envahissant le mur litigieux, et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la signification du jugement et durant un délai de deux ans à l'expiration duquel il pourra être à nouveau statué,

- condamné la SCI LMG à payer à M. et Mme [H] et à M. et Mme [V] la somme totale de 5.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble de jouissance subi par eux,

- rejeté toute autre demande plus ample ou contraire,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la SCI LMG à payer à M. et Mme [H] et à M. et Mme [V] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La SCI LMG, qui a interjeté appel de ce jugement, indique que par ordonnance rendue le 10 décembre 2010, le Premier Président de la cour d'appel de Versailles a arrêté l'exécution provisoire du jugement entrepris  en ce qu'il a condamné sous astreinte la SCI LMG à élaguer à la hauteur légale de 2 m, à défaut à abattre les arbres plantés à une distance inférieure à 2 m du mur séparatif.

Par arrêt du 10 mai 2012, la cour d'appel de Versailles a :

*ordonné la production aux débats par la SCI LMG d'une copie intégrale de l'acte authentique de vente du 10 juin 2005 conclu entre elle et le Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine,

*renvoyé l'affaire à la mise en état et sursis à statuer sur l'ensemble des demandes,

*réservé les dépens.

Cette pièce a été versée aux débats selon bordereau du 21 juin 2012.

Vu les dernières conclusions en date du 04 mars 2013 de la SCI LMG , auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et par lesquelles elle demande à la cour de :

*déclarer son appel recevable et bien fondé,

*confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le mur séparant la propriété de la SCI LMG des propriétés de M. et Mme [V] et de M. et Mme [H] est mitoyen,

*infirmer le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau,

*déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles des époux [H] et des époux [V] tendant à la confirmation du jugement ayant ordonné l'élagage à la hauteur de 2 m et à défaut l'abattage des arbres plantés à une distance inférieure à 2 m du mur séparatif et la suppression du lierre et des plantes grimpantes envahissant le mur litigieux, et subsidiairement les débouter,

*infirmer le jugement sur les dommages-intérêts et l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile mis à la charge de la SCI LMG et débouter sur ce point les intimés,

* infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de rehaussement du mur séparatif, cette demande n'ayant pas été formée par la SCI LMG en première instance,

*condamner in solidum M. [B] [V], Mme [R] [V], M. [I] [H] et Mme [C] [H] à payer à la SCI LMG :

' la somme de 52.753 € TTC à titre de dommages-intérêts,

'la somme de 39.000 € à titre de dommages- intérêts pour trouble de jouissance du 10/06/2005 (date à laquelle la SCI LMG est devenue propriétaire) jusqu'au 10/12/2011 (soit sur 78 mois : 500 x 78 = 39.000 €),

'la somme de 500 €/mois à titre de dommages-intérêts pour trouble de jouissance du 11/12/2011 jusqu'à la date à laquelle les intimés régleront à la SCI LMG la somme de 52.753 €,

*condamner in solidum les époux [V] et les époux [H] à lui payer la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et d'appel,

*condamner les intimés en tous les dépens de première instance et d'appel, avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions en date du 14 décembre 2012 des consorts [I] [H], [C] [N] épouse [H], [B] [V] et [R] [V], auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de leurs moyens et par lesquelles ils demandent à la cour de :

-déclarer la SCI LMG mal fondée en son appel, l'en débouter,

-confirmer le jugement entrepris,

y ajoutant,

-condamner la SCI LMG à leur verser :

'La somme supplémentaire de 10.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble de jouissance qu'ils subissent, compte tenu de sa résistance abusive,

'La somme supplémentaire de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-la condamner également aux dépens de première instance et d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 04 avril 2013.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de la demande principale de la SCI LMG

Les époux [H] et les époux [V] soulèvent l'irrecevabilité de la demande principale de la SCI LMG, en faisant valoir que le mur n'a subi aucune modification depuis son acquisition en 2005 par la SCI LMG, laquelle a pris le bien dans l'état où il se trouvait au moment de la vente et ils invoquent une clause du compromis de vente du 09 février 2005 et de l'acte authentique de vente du 10 juin 2005 passé par devant Me [F] [L], notaire associé, entre elle et le Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine portant sur la propriété sise [Adresse 1], aux termes duquel l'acquéreur prendra le bien vendu dans l'état où il se trouvera le jour de l'entrée en jouissance.

Ils soutiennent que la SCI LMG a acquis en pleine connaissance de cause, et sans faire de réserves, une propriété avec un mur de 3 mètres et qu'elle n'est donc pas fondée à solliciter la restauration d'un mur qui n'existe plus depuis 1998 ; que la démolition est intervenue en vertu d'un permis de démolir du 11 août 1998 dont la légalité n'a jamais été contestée.

La SCI LMG réplique à juste titre qu'il s'agit d'une clause de la vente relative à une exclusion de garantie de vices cachés au profit du vendeur.

Il est inopérant de la part des époux [H] et des époux [V], tiers à cet acte de vente, d'invoquer cette clause pour s'opposer à une action en dommages-intérêts engagée à leur encontre par la SCI LMG et qui est fondée sur un trouble anormal de voisinage ainsi qu'il résulte de l'assignation introductive d'instance, contrairement à ce que concluent les intimés.

Les époux [H] et [V] soulèvent également la prescription de l'article L 480-13 du code de l'urbanisme, qui prévoit que lorsqu'une construction a été édifiée conformément à un permis de construire, le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir ou son illégalité a été constatée par la juridiction administrative ; que l'action en responsabilité civile se prescrit, en pareil cas, par cinq ans après l'achèvement des travaux.

Mais la SCI LMG réplique justement que ce texte ne s'applique pas en l'espèce dans la mesure où son action n'est pas fondée sur la méconnaissance des règles d'urbanisme mais sur un trouble anormal de voisinage.

L'action principale de la SCI LMG est donc recevable.

Sur le fond

L'expert [X] a conclu que le mur séparant les propriétés de la SCI LMG d'une part, des époux [H] et [V] d'autre part est mitoyen, conclusion qui n'est pas remise en cause par les parties quant à la nature de ce mur.

La SCI LMG conclut que M.[G], auteur des époux [H] et [V], a fait araser une partie d'un mur mitoyen sans aucune autorisation des voisins, pour son seul confort personnel, pour dégager la vue et apporter de la clarté à sa propriété et donner une plus-value aux nouvelles constructions ; que le permis de démolir n'a concerné que la grange et pas le mur et qu'il n'a jamais été autorisé de réduire le mur de 8 m à 3m ; qu'un permis de démolir un mur mitoyen ne peut être déposé et obtenu sans la signature de l'ensemble des propriétaires.

La SCI LMG fait grief au tribunal d'avoir dans ces conditions considéré que la reconstruction du mur incombait à l'ensemble des trois parties. Elle conclut en substance  :

-que l'article 663 du code civil ne s'applique pas en l'espèce, car il a trait à l'obligation de se clore et à la participation financière de deux propriétaires mitoyens pour la construction ou la réparation d'un mur de clôture,

-que le PLU de la commune d'[Localité 2] limitant la hauteur des murs de clôture ne n'applique qu'aux nouvelles constructions et non pas aux murs existants : qu' il s'agit en l'espèce d'un mur très ancien,

-que l'article 658 du code civil, qui prévoit que tout propriétaire peut faire exhausser un mur mitoyen mais doit payer seul la dépense de l'exhaussement, ne s'applique pas car il concerne le rehaussement d'un mur mitoyen par la volonté d'un propriétaire qui doit alors en supporter seul le coût ; qu'en l'espèce elle ne demande pas le rehaussement d'un mur qui ne fait que 3 mètres mais des dommages-intérêts pour destruction partielle d'un mur mitoyen,

-que le préjudice lié au trouble anormal de jouissance provient des vues directes sur sa propriété à partir des balcons terrasses des nouvelles constructions, qui surplombent le mur.

La SCI LMG prétend donc en premier lieu que le jugement a statué ultra petita dans la mesure où elle n'a pas demandé le rehaussement du mur séparatif mais où elle a formulé une demande en dommages-intérêts en réparation du trouble de jouissance subi du fait de la destruction partielle du mur.

Mais la SCI LMG a demandé non seulement une somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts pour trouble de jouissance mais également une somme de 52.753 euros TTC, avec indexation sur l'indice BT 01, somme correspondant au coût du rehaussement et de la reconstruction du mur à une hauteur de 6 mètres conformément aux travaux préconisés par M.[Z] [T], sapiteur.

Elle conclut d'ailleurs devant la cour qu'il s'agira pour elle « de reconstruire le mur pour le remettre en son état d'origine ».

M.[X] précise en page 13 concernant la grange démolie que la toiture était appuyée sur le mur séparatif lequel mur permettait de clore cette grange ; qu'en réponse à un courrier du 28 octobre 2008 du conseil de la SCI (page 6), il indique : »

« Maître [M] fait remarquer que le mur de la grange démolie aurait été en retrait du fait de la poutre existant sur les photos, de sorte que Maître [M] conclut que la grange n'était pas appuyée sur le mur. Sur ce point, les différents éléments subsistants montrent le contraire. »

Il ne s'agissait donc pas en l'espèce d'un simple mur de clôture habituel mais d'un mur constituant aussi le mur de la grange des époux [G] en façade arrière.

L'article 655 du code civil édicte que « la réparation et la reconstruction du mur mitoyen sont à la charge de ceux qui y ont droit, et proportionnellement au droit de chacun ».

Il résulte des pièces régulièrement versées aux débats  :

- qu'après le jugement d'adjudication du 13 mars 1996 conférant la propriété de leur fonds au CIAL, les époux [J] et [A] [Y] sont néanmoins restés occupants de la propriété dans des conditions qui ne sont toutefois pas déterminées ;

- que le 15 septembre 1998, les époux [Q] [G] ont acquis la propriété sise [Adresse 1], contiguë à celle des époux [Y] ;

- qu'en août, septembre et novembre 1998, M.[J] [Y] a écrit à M. [G] pour attirer son attention sur le fait que le mur haut de plusieurs mètres séparant leurs propriétés respectives s'effondrait régulièrement ;

- que le 09 décembre 1998, M.[G] a obtenu un permis de démolir sa grange ;

- que si la SCI appelante fait état de ce qu'un jugement du tribunal administratif du 23 novembre 1999 a annulé un permis de construire délivré à M.[G] le 12 avril 1999, en revanche deux arrêtés du 14 février 2001 du maire d'Evecquemont ont accordé à M. [G] un permis de construire pour la construction de deux maisons sises [Adresse 1] (permis n°78.22700N1006 transféré aux époux [V] et n° 78.22700N1007) ;

-que les époux [J] et [A] [Y] ont engagé le 28 juin 1999 une instance en référé à l'encontre de M.[G] afin de voir ordonner l'interruption des travaux de démolition entrepris sur le mur séparatif, avant que, par une ordonnance du 10 octobre 2000, le juge d'instance de Poissy ne rappelle que les époux [Y] n'étaient plus propriétaires du fonds situé [Adresse 1] depuis le jugement d'adjudication du 13 mars 1996 et ne juge qu'ils étaient irrecevables à agir.

Un procès-verbal de constat du 20 janvier 1999 de la SCP d'huissiers Porte-Mercadal-Le Peillet, établi à la demande des époux [J] et [A] [Y], démontre que le mur litigieux s'était partiellement effondré et menaçait de causer des dégâts en raison de sa vétusté, que sur la partie qualifiée de « hangar » d'une longueur de 9 mètres et d'une hauteur de 6 mètres, une première partie s'était effondrée sur 1,50 mètre en hauteur et que par ailleurs de nombreuses pierres étaient disjointes.

L'état de dégradation du mur a conduit M. [G], auteur des époux [V] et [H], à en assumer seul un arasement partiel à trois mètres environ (hauteur du mur constatée dans un constat du 21 mars 2000 établi par la SCP d'huissiers Porte-Mercadal-Le Peillet) et la réparation, sans aucune participation de la société CIAL alors unique propriétaire du fonds situé [Adresse 1].

Il convient de relever qu' entre l'adjudication de 1996 et la revente de ce fonds par le CIAL en 2005 à la SCI LMG, le CREDIT INDUSTRIEL D'ALSACE ET DE LORRAINE (CIAL) n'a jamais jugé bon d'engager une quelconque action à l'encontre de M.[G], notamment à l'encontre du permis de démolir délivré à ce dernier le 09 décembre 1998, ni même de faire une quelconque intervention auprès de M.[G] pendant toute cette période sur un éventuel trouble anormal de voisinage ; qu'en outre la SCI LMG, en réalité constituée par les époux [Y] par acte du 03 janvier 2005, ne pouvait, quant à elle, ignorer la situation antérieure à son acquisition en date du 10 juin 2005 et elle a donc acquis en toute connaissance de cause la propriété située [Adresse 1].

Il résulte par ailleurs des constatations de M. [Z] [T], sapiteur, et d'un devis de l'entreprise de Barros du 24 décembre 2007, ainsi que des photographies versées aux débats, que le restant de mur actuel est en mauvais état.

Il convient de préciser que compte tenu de la configuration particulière du mur séparatif, qui servait également d'appui et de mur porteur pour une grange lui appartenant, la présomption de mitoyenneté était alors contestée par M. [G] qui a laissé subsister un mur de trois mètres de hauteur environ, au regard de la hauteur légale de clôture de 2,60 mètres imposée par l'article 663 du code civil.

Toutefois, ainsi que l'a retenu le tribunal, le titre II du règlement de la commune d'Evecquemont déroge à la hauteur légale de 2,60 mètres en imposant une hauteur maximale des clôtures implantées en limites séparatives de 2 mètres sauf clôtures existantes présentant un intérêt architectural ou esthétique ou participant à la cohésion du secteur.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, les premiers juges ont exactement considéré qu'il incombe à l'ensemble des trois parties, propriétaires mitoyens, de supporter les travaux de remise en état du mur dont la dégradation avait naguère commandé l'arasement et la réparation aux frais d'un seul, et ce suivant les règles d'urbanisme applicables à la commune d'Evecquemont, et rejeté les demandes en dommages-intérêts formées par la SCI LMG, tant celle correspondant au coût des travaux de reconstruction du mur, que celle pour trouble anormal de voisinage depuis le 10 juin 2005.

Sur la demande reconventionnelle des époux [H]-[V] relative à la réduction des arbres à une hauteur légale de 2 mètres ou leur abattage

La SCI LMG n'est pas fondée à soutenir que cette demande est irrecevable comme ne se rattachant pas par un lien suffisant aux demandes principales.

Elle oppose également la prescription trentenaire.

Elle verse aux débats les attestations suivantes :

- M.[U] [LJ], né le [Date naissance 4] 1945, domicilié [Adresse 1], atteste qu'au moment où les époux [Y] ont acquis en 1981 (soit le 24 mars) la propriété sise [Adresse 1], une rangée d'arbres de taille élancée (peupliers de 3 à 4 mètres) dissimulait les murs des bâtiments limitrophes, annexe d'ancienne ferme et habitations donnant sur la [Adresse 1] entre les numéros 4 et 12 ; que ces mêmes arbres sont devant les murs abattus en partie depuis à hauteur des propriétés qu'il situe au [Adresse 1].

- M.[B] [O], né le [Date naissance 6] 1952 , atteste que lors de deux visites de la propriété sise [Adresse 1] durant le printemps 1980, il a constaté l'existence d'une allée d'une dizaine de jeunes peupliers d'Italie de 2 à 3 mètres de hauteur le long du mur ouest de la propriété derrière les habitations ou bâtiments existants donnant sur la [Adresse 1] et que ces mêmes arbres se trouvent aujourd'hui derrière la partie du mur abattue.

Les photographies versées aux débats dont certaines sont anciennes et remontent à une période antérieure à la démolition de la grange (particulièrement en pièce 68 de l'appelante-dire à l'expert judiciaire du 09 avril 2009- ou en pièce 57 de l'appelante) permettent de confirmer qu'à cette époque les arbres concernés étaient déjà très hauts.

En conséquence, il y a lieu de considérer que les arbres situés le long du mur ont plus de trente ans et qu'en vertu de la prescription ils ne sauraient être élagués ou arrachés.

Au surplus, la SCI LMG produit un constat établi le 16 octobre 2010 par Maître [W], huissier de justice, dont il résulte :

- que pour deux peupliers, la distance en milieu de tronc vis-à-vis du mur est de l'ordre de 1,80 à 2,10 mètres environ selon la hauteur à laquelle la mesure est prise,

- que le mur séparatif à ce niveau-là est manifestement de largeurs diverses de l'ordre de 40 centimètres environ,

en sorte qu'il n'est pas établi que lesdits arbres soient implantés à moins de deux mètres de la limite séparative des fonds.

S'agissant du lierre et des plantes grimpantes, le constat de Maître [W] du 16 octobre 2010 précise :

« Depuis le jardin des époux [Y], côté ouest, [Adresse 1], est constitué de divers types de murs selon les voisins concernés, l'ensemble des murs étant sans lierre, vigne vierge ou autres végétaux grimpants.

 Il en est uniquement sur les fonds des numéros 4 bis et 4 ter dans la mesure où, selon les déclarations qui me sont faites, existait depuis de nombreuses années une difficulté sur l'état de mitoyenneté ou non du mur séparatif concerné.

[P] me charge de préciser dans le présent acte qu'il va faire son affaire sous peu du nettoyage des végétaux concernés ».

La comparaison entre les photos 71 et 71-1, produites par l'appelante, montre le mur le long des fonds [V]-[H] en cours de nettoyage.

En outre, les intimés ne justifient pas du caractère anormal du trouble de voisinage lié à la seule présence du lierre et de plantes grimpantes.

En conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

-condamné la SCI LMG à élaguer à la hauteur légale de 2 mètres, à défaut d'abattre, les arbres plantés à une distance inférieure à deux mètres du mur séparatif et à supprimer le lierre et les plantes grimpantes envahissant le mur litigieux, sous peine d'astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la signification du jugement et durant un délai de deux ans à l'expiration duquel il pourra être à nouveau statué,

- condamné la SCI LMG à payer à M et Mme [H] et à M.et Mme [V] la somme totale de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble de voisinage par eux subis.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que le mur séparant la propriété de la SCI LMG située [Adresse 1] des propriétés de M et Mme [H] et de M et Mme [V] respectivement situées [Adresse 1] est mitoyen,

- jugé recevable la demande principale de la SCI LMG,

- rejeté la demande de rehaussement du mur séparatif formée par la SCI LMG et sa demande en dommages-intérêts pour trouble de voisinage depuis 2005,

- condamné la SCI LMG à payer à M et Mme [H] et à M et Mme [V] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

-condamné la SCI LMG à élaguer à la hauteur légale de 2 mètres, à défaut d'abattre, les arbres plantés à une distance inférieure à deux mètres du mur séparatif et à supprimer le lierre et les plantes grimpantes envahissant le mur litigieux, sous peine d'astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la signification du jugement et durant un délai de deux ans à l'expiration duquel il pourra être à nouveau statué,

-condamné la SCI LMG à payer à M et Mme [H] et à M.et Mme [V] la somme totale de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble de voisinage par eux subis.

-condamné la SCI LMG à la totalité des dépens de première instance.

Statuant à nouveau sur ces points réformés, et y ajoutant,

Dit les époux [H] et les époux [V] irrecevables en leur demande d'élagage ou d'abattage des arbres,

Les déboute de leur demande en suppression du lierre et des plantes grimpantes et de leurs demandes en dommages-intérêts,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Fait masse des dépens de première instance (y compris les frais d'expertise judiciaire) et d'appel et les partage à hauteur des deux tiers à la charge de la SCI LMG et d'un tiers à la charge des consorts [H]-[V], avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats de la cause.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 10/07378
Date de la décision : 03/10/2013

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°10/07378 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-10-03;10.07378 ?
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