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23/03/2010 | FRANCE | N°09/00218

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6ème chambre, 23 mars 2010, 09/00218


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES







Code nac : 80C



6ème chambre







ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 23 MARS 2010



R.G. N° 09/00218



AFFAIRE :



[S] [W]



C/

S.A.S. DEXXON DATA MEDIA









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 05 Décembre 2008 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 06/02022





Copies exécutoir

es délivrées à :



Me Isabelle ALGARRON

Me Nicolas MANCRET



Copies certifiées conformes délivrées à :



[S] [W]



S.A.S. DEXXON DATA MEDIA



le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de V...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6ème chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 MARS 2010

R.G. N° 09/00218

AFFAIRE :

[S] [W]

C/

S.A.S. DEXXON DATA MEDIA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 05 Décembre 2008 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 06/02022

Copies exécutoires délivrées à :

Me Isabelle ALGARRON

Me Nicolas MANCRET

Copies certifiées conformes délivrées à :

[S] [W]

S.A.S. DEXXON DATA MEDIA

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [S] [W]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Comparant -

Assisté de Me Isabelle ALGARRON

(avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C300)

APPELANT

****************

S.A.S. DEXXON DATA MEDIA

[Adresse 3]

[Localité 4]

Non comparante -

Représentée par Me Nicolas MANCRET

(avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0061)

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Février 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nicole BURKEL, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président,

Madame Nicole BURKEL, Conseiller,

Madame Claude FOURNIER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

FAITS ET PROCÉDURE,

Attendu que par jugement contradictoire rendu en départage du 5 décembre 2008, le conseil de prud'hommes de Nanterre, section encadrement, a :

mis hors de cause la société Dexxon Groupe Holding

débouté monsieur [W] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

débouté monsieur [W] de ses demandes au titre des heures supplémentaires exceptionnelles et de repos compensateur, de rappel de salaire (augmentation contractuelle) et de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

dit que le licenciement dont monsieur [W] a fait l'objet de la part de la société Dexxon Data Media est sans cause réelle et sérieuse

en conséquence, condamné la société Dexxon Data Media à payer à monsieur [W] les sommes suivantes :

15255 euros au titre du préavis et 1.525 euros au titre des congés payés afférents avec intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2008

30.510 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

1567,88 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement

ordonné le remboursement par la société Dexxon Data Media aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à monsieur [W] du jour du licenciement à ce jour à concurrence de 1 mois dans les conditions de l'article L1235-2/3/11 du code du travail

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires

ordonné l'exécution provisoire

condamné la société Dexxon Data Media à payer à monsieur [W] la somme de 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Attendu que la cour est régulièrement saisie par un appel formé par monsieur [W] [S] intimant la seule société Dexxon Data Media ;

Attendu que l'affaire a été appelée à l'audience du 1er septembre 2009 et a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 1er février 2010, dans un strict respect du principe du contradictoire;

Attendu que monsieur [W] a été engagé par la société Dexxon Data Media par contrat écrit à durée indéterminée selon lettre d'embauche du 19 septembre 2003 en qualité de 'Directeur de système d'informatique France', à compter du 1er octobre 2003 ;

Qu'en annexe de cette lettre d'embauche, il a été prévu des objectifs à 3 et 6 mois donnant accès à une augmentation de salaire (porté de 61000 euros bruts par an à 63400 euros après six mois et à 65000 euros après douze mois à objectifs atteints) ;

Que son revenu moyen mensuel brut s'est élevé à 5085 euros ;

Attendu que la société Dexxon Data Media appartient au groupe Dexxon employant environ 500 salariés et ayant pour activité la vente de matériel informatique et de consommables à des grossistes ;

Attendu que monsieur [W] soutient avoir été recruté afin de remédier aux dysfonctionnements affectant le logiciel central du groupe, « progiciel SAP » géré par la société Dexxon Data Media ;

Qu'il précise le 10 octobre 2005, s'être vu confier une nouvelle mission temporaire en tant que 'Directeur Informatique du Groupe', mission qu'il a acceptée, consistant à réaliser la migration du logiciel SAP (changer la version de l'ensemble du progiciel de gestion de l'entreprise) et n'avoir pu reprendre ses fonctions initiales à l'achèvement de cette mission avec succès en mai 2006 ;

Attendu que par saisine de la juridiction prud'homale du 26 juin 2006, monsieur [W] a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail fondée sur les reproches suivants :

- avoir fait l'objet d'un retrait de fonctions et d'une 'mise au placard' (isolement de son bureau, retrait des codes accès administrateurs au système général de la société)

- non-respect de l'augmentation de salaire prévue au contrat de travail ;

Attendu que monsieur [W] a été convoqué par lettre du 3 juillet 2006 à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé au 13 juillet 2006 et licencié par courrier recommandé du 20 juillet 2006, pour faute grave en raison de l'attitude systématique d'opposition adoptée depuis deux mois à l'égard de son supérieur hiérarchique et de la direction ;

Attendu que l'entreprise emploie plus de 11 salariés (300 environ) et est dotée d'institutions représentatives du personnel ;

Que la convention collective applicable est celle du commerce de gros ;

Attendu que monsieur [W] a déclaré à l'audience être âgé de 36 ans au moment de la rupture des relations contractuelles, avoir perçu des allocations chômage pendant un mois et avoir retrouvé un emploi en décembre 2006 au sein de la société Steria, dans une branche d'activité différente, lui procurant un revenu équivalent ;

Attendu que monsieur [W] demande à la cour par conclusions écrites, déposées, visées par le greffier et soutenues oralement, de:

le dire recevable et bien fondé en son appel

infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes

A titre principal,

prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société Dexxon et condamner la société Dexxon à lui payer :

114426 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

1960,10 euros à titre d'indemnité de licenciement (base incluant heures supplémentaires et prime) ou 1857,31 euros à titre subsidiaire (base incluant heures supplémentaires) ou 1567,88 euros à titre infiniment subsidiaire (salaire de base)

20.978 euros à titre d'indemnité de préavis, indemnité de congés payés compris, (base incluant heures supplémentaires et prime) ou 19.875,31 euros à titre subsidiaire (base incluant heures supplémentaires) ou 16.780,50 euros à titre infiniment subsidiaire ( salaire de base)

A titre subsidiaire,

confirmer le jugement en ce qu'il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la société Dexxon à lui payer :

114426 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

1960,10 euros à titre d'indemnité de licenciement (base incluant heures supplémentaires et prime) ou 1857,31 euros à titre subsidiaire (base incluant heures supplémentaires) ou 1567,88 euros à titre infiniment subsidiaire (salaire de base)

20978 euros à titre d'indemnité de préavis, indemnité de congés payés compris, (base incluant heures supplémentaires et prime) ou 19875,31 euros à titre subsidiaire (base incluant heures supplémentaires) ou 16780,50 euros à titre infiniment subsidiaire (salaire de base)

En tout état de cause,

condamner la société Dexxon à lui payer, avec intérêts de droit à compter de la saisine et capitalisation des intérêts :

10000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

10120 euros à titre de rappel de salaire (augmentation contractuelle jusqu'au 30 septembre 2006, congés payés inclus)

150787,87 euros à titre de rappel de salaire (heures supplémentaires régulièrement effectuées)

6102,80 euros à titre de rappel de salaire (heures supplémentaires exceptionnellement effectuées)

100745 euros à titre d'indemnité de repos compensateur (base : salaire payé +prime contractuelle) ou 94585 euros à titre subsidiaire (base : salaire payé)

confirmer les sommes allouées en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile et y ajouter 2500 euros au titre de la procédure d'appel

condamner la société Dexxon aux entiers dépens ;

Attendu que la SAS Dexxon Data Media demande à la cour par conclusions écrites, déposées, visées par le greffier et soutenues oralement, de:

confirmer le jugement en ce qu'il a jugé la demande de résiliation judiciaire présentée par monsieur [W] infondée,

débouter monsieur [W] de sa demande d'augmentation contractuelle, de ses demandes de rappel de salaires au titre des prétendues heures supplémentaires et repos compensateur

infirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de monsieur [W] ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse

en conséquence, débouter monsieur [W] de ses demandes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

en toutes hypothèses, condamner monsieur [W] aux entiers dépens ;

Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l'article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement ;

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que monsieur [W] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire puis a été licencié ;

Attendu que lorsqu'un salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire en raison de faits qu'il reproche à son employeur tout en continuant à travailler à son service et que ce dernier le licencie ultérieurement, il appartient au juge de rechercher s'il existe à la charge de l'employeur des manquements d'une gravité suffisante pour prononcer cette résiliation qui emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Qu'à défaut le juge doit examiner le licenciement prononcé ultérieurement , le juge devant toutefois, pour l'appréciation du bien fondé  du licenciement, prendre en considération les griefs invoqués par le salarié au soutien de sa demande de résiliation ou en contestation de son licenciement dès lors qu'ils sont de nature à avoir une influence sur cette appréciation ;

Qu'en tous les cas la rupture prend date, lorsque le jugement intervient après le licenciement à la date d'envoi de la lettre de licenciement ;

Que pour ne pas prendre en compte la demande de résiliation judiciaire, il faut que le salarié y renonce expressément ;

Attendu que les différentes demandes de monsieur [W] seront analysées selon le plan adopté par lui dans ses écritures d'appel ;

Sur la rupture du contrat de travail

Sur la demande principale de résiliation judiciaire du contrat de travail

Attendu que monsieur [W] a été engagé par lettre du 19 septembre 2003, signée le 30 septembre 2003, en qualité de directeur du système d'information France, statut cadre, rattaché à la direction des opérations et finances et devant rendre compte à monsieur [E] ;

Qu'à cette lettre, a été annexé un document définissant le poste et les missions à exercer (assurer la cohérence et l'évolution du système d'information'.élaborer le plan informatique de l'entreprise, '.diriger le service informatique de l'entreprise, assurer l'encadrement du personnel informatique '.gérer les budgets de fonctionnement et d'investissement'), les objectifs à 3 mois (stabilisation du système d'information), à 6 mois (nouvelle architecture des systèmes)  ;

Attendu que monsieur [W] a été nommé en octobre 2005 «  directeur informatique Groupe » comme l'établit le courriel de monsieur [E] du 6 octobre 2005 aux fins de «  se consacrer exclusivement à ce nouveau projet de montée de version» suite à la signature d'un nouveau contrat Sap ;

Que monsieur [E], dans une attestation, régulière en la forme au sens de l'article 202 du code de procédure civile, explicite les raisons ayant présidé à ce changement de fonction, de titre, qui a été réalisé en accord avec monsieur [W], par la non atteinte des objectifs déterminés, le manque de communication avec les utilisateurs, l'incapacité à mettre en place une permanence avec ses équipes, le manque de performances dans sa fonction de management et définit comme objectif «  hébergement externe de notre système Sap' et montée de version du logiciel » ;

Attendu que cette mission s'est achevée courant mai 2006, soit avec retard selon l'employeur, mais avec succès ;

Attendu que monsieur [W] dénonce, à compter de la fin de cette mission, la suppression de toutes fonctions, attributions et responsabilités, l'ayant conduit à saisir la juridiction prud'homale ;

Qu'il ne conteste aucunement avoir accepté la modification de sa fonction au sein de la société à compter d'octobre 2005, même si aucun avenant n'a été signé ;

Qu'il a été désormais chargé d'exercer la fonction de directeur informatique groupe, dont les prérogatives sont différentes de celles précédemment exercées et notamment concernant ses prérogatives sur l'équipe informatique ;

Que monsieur [W] déduit du titre qui lui a été conféré, de façon erronée, une mission plus étendue que celle qui était devenue la sienne ;  

Qu'il ne justifie d'aucun droit à obtenir « restitution » de son précédent emploi de directeur informatique France, pour lequel il a d'ailleurs été remplacé ;

Que messieurs [U] et [Z] confirment l'affectation définitive de monsieur [W] à cette nouvelle fonction ;

Attendu que monsieur [E] précise avoir, «  avec monsieur [W], défini des objectifs ponctuels » lequel s'est «  occupé des problèmes que nous avions avec notre logiciel «  Evatic » de gestion des techniciens terrains » ;

Que monsieur [W] lui-même, dans son courriel du 5 juin 2007, dénonçant l'absence de bureau et de moyens informatiques, précise travailler à son domicile, admettant ainsi recevoir des missions et reconnaît dans ses écritures avoir participé au salon annuel Saphire ;

Que la directrice des ressources humaines, madame [J], dans un courriel du 22 juin 2006, confirme avoir constaté que monsieur [W] était «  en train de travailler » dans son bureau ;

Attendu que si à son retour de vacances, le 6 juin 2006, monsieur [W] a pu constater que son bureau était occupé par une personne inconnue, l'employeur précise, sans être démenti, que cette personne était un « contrôleur fiscal » qui ignorant le retour de congés de monsieur [W] s'était installé dans son bureau comme la semaine précédente ;

Que cette difficulté réelle doit s'analyser comme une simple erreur de gestion des disponibilités des bureaux mais ne peut constituer un manquement contractuel de l'employeur pouvant justifier une mesure de résiliation judiciaire à ses torts ;

Attendu qu'en juin 2006, il résulte du compte rendu de la réunion du Comité d'Hygiène et de Sécurité du 7 juin 2005, «  qu'une réfection quasi intégrale de l'aménagement' (changement.. portes, réfection des plafonds, agrandissement 'de la salle de réunion'changement d'escalier'réalisation d'un accueil) » est entreprise au rez de chaussée du premier bâtiment dans lequel monsieur [W] a son bureau à coté de celui de monsieur [E] ;

Que monsieur [W] ne peut sérieusement contester l'ampleur des travaux générant des nuisances ayant dû être acceptées par tous les salariés ;

Attendu que monsieur [D], secrétaire général, par attestation confirme que les travaux ont entraîné une «  modification importante des implantations (qui) a duré plusieurs mois selon un planning » régulièrement communiqué au personnel ;

Que l'employeur a proposé à monsieur [W] de s'installer dans un autre bureau, au premier étage, proposition qu'il n'a pas acceptée ;

Attendu qu'aux travaux en cours, s'est ajoutée l'arrivée du personnel EMTEC, société ayant été rachetée, entraînant une nouvelle redistribution des locaux, le service informatique prenant la place de la comptabilité au bâtiment A 1er étage gauche, aux fins « de regrouper dans le même espace, toutes les compétences informatiques précédemment dispersées » ;

Que la directrice des ressources humaines précise que « tous les services travaillent en open space », l'établissement ne comptant que 8 bureaux individuels (y compris ceux de la direction) pour 174 personnes inscrites ;

Que monsieur [W] ne conteste pas avoir fait choix de rester seul à son bureau d'origine, au rez de chaussée, créant par lui-même l'isolement dénoncé ;

Attendu que monsieur [W] affirme ne plus figurer dans la liste de diffusion concernant l'informatique du groupe ; Que cette affirmation, non objectivement démontrée, est démentie par l'employeur qui justifie de la réalité de la communication maintenue, comme en atteste les différents courriels échangés  avec le salarié, toujours doté d'un matériel en état de fonctionnement ;

Que monsieur [W] a été, en outre, contrairement à ses affirmations, dûment notamment informé du rachat de la société EMTEC dès le 5 mai 2005 ;

Attendu que monsieur [W] dénonce également ne plus avoir d'«  accès administrateur », aux salles informatiques et à l'armoire forte contenant les sauvegardes ;

Que l'employeur a expliqué à monsieur [W] que le dispositif des codes d'accès administrateurs, dans un souci de sécurité, est géré par le responsable «administration réseaux » qui en limite l'accès aux seuls opérateurs, lui-même s'étant vu communiquer le code d'accès de l'application SAP dont il a été en charge ;

Que monsieur [W] ne peut, en tant que directeur informatique du groupe, chargé de missions ponctuelles, disposer que des codes nécessaires à l'exécution des missions qui lui sont confiées ;

Qu'il ne justifie pas avoir été empêché d'exercer la nouvelle fonction étant la sienne, sous quelque forme que ce soit ;

Attendu que la juridiction prud'homale faisant une exacte appréciation des faits a pu, par des motifs qui n'encourent aucune critique, considérer que les griefs formulés par monsieur [W] ne sont pas fondés et ne caractérisent pas des manquements graves justifiant la résiliation du contrat de travail ;

Sur le licenciement

Attendu que monsieur [W] a été licencié par lettre du 20 juillet 2006 pour faute disciplinaire, stigmatisant des insuffisances professionnelles, un «comportement coléreux et caractériel », une démarche déloyale dans ses rapports avec ses supérieurs hiérarchiques, «  à tenter par tous moyens de provoquer votre départ de l'entreprise » ;

Attendu que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation délibérée des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ;

Attendu que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les limites du litige ;

Attendu que le licenciement ayant été prononcé pour faute grave présente un caractère disciplinaire ; Qu'il incombe à l'employeur d'établir la preuve de la réalité des motifs énoncés dans la lettre de licenciement qui fixent les limites du litige ;

Attendu que l'employeur s'étant placé sur le terrain disciplinaire, le licenciement ne peut être jugé sans cause réelle et sérieuse que si aucun des motifs mentionnés dans la lettre de licenciement, dont certains relèvent de l'insuffisance professionnelle, ni ne présente de caractère fautif ni ne résulte d'une mauvaise volonté délibérée du salarié ;

Attendu que le contentieux s'est réellement noué entre les parties quand monsieur [W], directeur informatique groupe, se considérant comme exclu, même si ce n'est pas avéré, a commencé à dénoncer le sort qui lui était réservé par son employeur, soit en mai juin 2006, alors même que son employeur était en pleine réorganisation tant matérielle que stratégique ;

Que l'employeur, qui a choisi en octobre 2005 de réorienter, avec son accord, monsieur [W] d'une fonction de directeur informatique France vers une fonction de directeur informatique groupe, n'a pas entendu tirer des conséquences en ce qui concerne le fait que ce dernier n'avait pas satisfait les objectifs précis qui lui avaient été assignés ;

Qu'aucun avertissement, mise en garde, ou rappel à l'ordre ne lui ont été adressés ;

Que les nouvelles fonctions confiées en octobre 2005 ont été exécutées pleinement par monsieur [W] ; Que si l'employeur évoque un retard à leur exécution, il ne l'établit aucunement ;

Qu'aucun élément ne démontre que les missions ponctuelles confiées au salarié après mai 2006 n'aient pas été exécutées à la satisfaction de son employeur et que le salarié ait pu adopter un comportement coléreux et caractériel ;

Attendu que le déficit de communication entre l'employeur et son salarié, concernant la finalité de sa fonction et des missions précises devant lui être confiées, a conduit monsieur [W] à polémiquer maladroitement , sans qu'il puisse en être déduit l'existence d'une volonté permanente d'entretenir un conflit ;

Attendu que la juridiction prud'homale a fait une exacte appréciation des éléments de la cause et des règles juridiques applicables ; Qu'elle s'est livrée à une analyse pertinente des griefs et a justement considéré que le licenciement dont a été l'objet monsieur [W] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Que la cour ne peut qu'adopter expressément ces justes motifs ;

Sur les dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Attendu que monsieur [W] soutient que son contrat de travail a été exécuté de manière déloyale, son employeur ayant décidé de « supprimer le poste de directeur informatique groupe » et «  préférer ( le) pousser'au départ, quitte à lui faire supporter un climat professionnel anormal'pour l'éloigner de son équipe 'pour l'empêcher de retrouver ses fonctions » ;

Que l'employeur est au débouté de monsieur [W] de cette demande ;

Attendu que les manquements reprochés à l'employeur dans le cadre de la procédure de résiliation judiciaire du contrat de travail n'ayant pas été reconnus avérés, cette demande ne peut prospérer utilement ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur le rappel de salaire au titre de l'augmentation contractuelle

Attendu que monsieur [W] poursuit son employeur à lui payer la somme de 10120 euros, les congés payés y étant intégrés :

- du 1er avril 2004 au 30 septembre 2004 : 1200 euros

- du 1er octobre 2004 au 1er octobre 2005 : 4000 euros

- du 1er octobre 2005 au 1er octobre 2006 : 4000 euros, considérant avoir atteint les objectifs assignés, ce que conteste l'employeur ;

Attendu que l'employeur établit, par la production d'attestations de monsieur [E], directeur financier et de monsieur [O], responsable technique IT, que les objectifs assignés à monsieur [W], par lettre du 19 septembre 2003 à effet au 30 septembre 2003 à 3 et 6 mois, précisément définis dans le document annexé à la lettre d'embauche, n'ont pas été respectés ;

Qu'ainsi la gestion de l'EDI n'a été effective qu'en juin 2006 ;

Que les outils de monitoring des réseaux locaux Lan n'ont été mis en place qu'en octobre 2005 ;

Que la sécurisation Wan n'est intervenue qu'en février 2005 ;

Attendu que monsieur [W] a été légitimement privé de l'augmentation salariale contractuellement prévue parce que les missions, certes réalisées, l'ont été au-delà des délais définis de 3 ou 6 mois, sans que le salarié n'évoque ni n'établisse des difficultés pouvant justifier un tel retard ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires

Attendu que monsieur [W] a été engagé «  moyennant un horaire moyen de 35 heures hebdomadaire » ;

Qu'il soutient que « ses horaires habituels étaient de 10 h à 21 heures, sans pause déjeuner, soit 11 heures par jour ou 55 heures par semaine soit 20 heures supplémentaires par semaine » outre des heures matinales ou tardives et en week-end ;

Qu'il réclame à ce titre 150787,87 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires et 6102,80 euros pour les heures supplémentaires exceptionnelles ;

Que l'employeur conteste la réalisation de tels horaires et l'existence d'heures supplémentaires accomplies ;

Attendu qu'en application de l'article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;

Qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Attendu qu'il en résulte que le salarié doit fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande et que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ;

Qu'en conséquence, le juge ne peut, pour rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié et se doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ;

Attendu que monsieur [W] verse aux débats :

des courriels adressés par ses soins sur une période d'octobre 2003 à décembre 2005 dont quelques uns à des horaires nocturnes ou matinaux

4 courriels adressés entre 0h10 et 0h21 concernant « l'appel d'offres pour infogérance de nos systèmes » Sap R/3 le samedi 25 octobre 2003

1 courriel le samedi 1er novembre 2003 à 0h17 répondant à une demande du 30 octobre 2003 à 18h43 ;

Que si l'employeur a comptabilisé 27 courriels adressés au-delà de l'horaire collectif de travail pour 2003, 18 courriels pour 2004 et 10 pour l'année 2005, il convient de noter que certains sont envoyés à quelques minutes d'intervalle à des interlocuteurs différents le même jour et concernant le même objet ;

Attendu que dans le même temps, l'employeur verse aux débats une attestation de monsieur [E], supérieur hiérarchique de l'appelant, précisant que ce dernier, du fait de ses fonctions, «  était amené à prester des horaires non normés. Certaines tâches nécessitant parfois de rester plus tard en fin de journée ou, parfois d'intervenir certains week-ends.

Monsieur [W] adaptait ses horaires en conséquence et arrivait en général tardivement entre 10h30 et 11h30 ou prenait des journées de récupération » ;

Que monsieur [O] confirme la prise de journées de récupération par monsieur [W] pour compenser ces heures et rappelle les horaires pratiqués (11h- 15h) par ce dernier ;

Que monsieur [Z] atteste des « conditions de travail très privilégiées » offertes par monsieur [E] à monsieur [W], lequel disposait d'une « grande latitude en matière d'organisation de son temps de travail » ;

Attendu que l'employeur justifie que les horaires figurant sur les courriels ne sont pas significatifs, sans être démenti, l'heure d'envoi pouvant être enregistrée et différée selon les souhaits exprimés informatiquement par le salarié ;

Attendu que selon l'accord sur l'harmonisation et l'aménagement du temps de travail applicable au sein de la société intimée, signé le 30 avril 2004, prévoit pour « les cadres intégrés à l'horaire collectif », catégorie à laquelle appartient monsieur [W], l'horaire moyen de 35 heures sera obtenu par l'attribution pour chaque semaine travaillée d'un crédit horaire à récupérer sous forme de journées de repos et rappelle que l'indemnisation des heures supplémentaires suppose qu'elles aient été accomplies à la demande de l'employeur ou validées par celui-ci ;

Que messieurs [P] et [N] confirment la réalité de l'application de cet accord dans l'entreprise ;

Attendu que l'employeur verse aux débats un courriel de monsieur [W] lui-même du 25 mai 2006 posant 4 journées de récupération, démontrant par là même que le système en vigueur était connu et appliqué par lui ;

Attendu que la juridiction prud'homale a pu justement débouter monsieur [W], lequel s'est totalement affranchi de l'horaire collectif de travail, de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires normales ou exceptionnelles, leur matérialité n'étant nullement avérée et le salarié ne justifiant par ailleurs ni d'une demande ni d'aucune validation de telles heures par son employeur ;

Que le justement sera confirmé de ce chef ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour privation de repos compensateur

Attendu que monsieur [W] poursuit la condamnation de son employeur à lui payer 100745 euros ou 94545 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au montant de l'indemnité de repos compensateur augmentée de l'indemnité de congés payés ;

Que l'employeur est au débouté de la demande présentée ;

Attendu qu'en l'absence d'heures supplémentaires reconnues, monsieur [W] ne peut ni prétendre ni à des repos compensateurs ni à une indemnisation pour privation de repos compensateur ;

Qu'il sera débouté de cette demande infondée ;

Sur les conséquences financières de la rupture

Attendu que la juridiction prud'homale a fait une exacte appréciation des éléments de la cause et des règles juridiques applicables ;

Qu'elle a pertinemment répondu aux moyens soulevés devant elle et repris à l'identique en cause d'appel ;

Que la cour ne peut qu'adopter expressément ces justes motifs ;

Attendu que le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions ;

Attendu que les dépens d'appel resteront à la charge exclusive de monsieur [W] qui succombe en toutes ses demandes et sera débouté de sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel à son profit ;

Attendu qu'aucune considération d'équité ne justifie l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société intimée ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

STATUANT en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Reçoit l'appel :

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE monsieur [W] aux dépens.

Arrêt prononcé par Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président, et signé par Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président, et par Madame Sabine MAREVILLE, Greffier présent lors du prononcé.

Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/00218
Date de la décision : 23/03/2010

Références :

Cour d'appel de Versailles 06, arrêt n°09/00218 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-03-23;09.00218 ?
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