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27/02/2004 | FRANCE | N°2002-02076

France | France, Cour d'appel de Versailles, 27 février 2004, 2002-02076


COUR D'APPEL DE VERSAILLES 3ème chambre ARRET Nä NAC 590 CONTRADICTOIRE DU 27 FEVRIER 2004 R.G. Nä 02/02076 AFFAIRE : S.A. S.C.H.E. C/ S.A.R.L. CORREZE LEVAGE MONTAGE et autre Décision déférée à la cour : jugement rendu le 29 Janvier 2002 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE Nä de chambre : 1ère chambre RG nä :

00/7586 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à :

Me RICARD SCP FIEVET-ROCHETTE LAFON REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT SEPT FEVRIER DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suiv

ant dans l'affaire entre :

APPELANTE S.A. S.C.H.E. (SOCIETE COMMERCIALE DES ...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES 3ème chambre ARRET Nä NAC 590 CONTRADICTOIRE DU 27 FEVRIER 2004 R.G. Nä 02/02076 AFFAIRE : S.A. S.C.H.E. C/ S.A.R.L. CORREZE LEVAGE MONTAGE et autre Décision déférée à la cour : jugement rendu le 29 Janvier 2002 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE Nä de chambre : 1ère chambre RG nä :

00/7586 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à :

Me RICARD SCP FIEVET-ROCHETTE LAFON REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT SEPT FEVRIER DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

APPELANTE S.A. S.C.H.E. (SOCIETE COMMERCIALE DES HOTELS ECONOMIQUES) exerçant sous l'enseigne HOTEL FORMULE 1 Z.A.C. Charles de Gaulle Rue le Corbusier 95190 GOUSSAINVILLE agissant poursuites et diligences de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège représentée par Me RICARD, avoué plaidant par Me VIRAT du cabinet HPMBC, avocat au barreau de PARIS (P.429) INTIMEES 1/ S.A.R.L. CORREZE LEVAGE MONTAGE Zone Artisanale de la Gare 19700 SEILHAC prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège 2/ Société M.A.A.F. (MUTUELLE ASSURANCE ARTISANALE DE FRANCE) Chaban de Chauray 79081 NIORT CEDEX prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentées par la SCP FIEVET-ROCHETTE-LAFON, avoués plaidant par Me PINEL, avocat au barreau de VERSAILLES Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Décembre 2003 devant la cour composée de :

Madame Dominique GUIRIMAND, Président, Monsieur Jean-Michel SOMMER, Conseiller, Monsieur Jean-Marc X..., Vice-Président placé auprès de Monsieur le Premier Président, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claire THEODOSE FAITS ET Y... 5 Dans la nuit du 20 au 21 août 1998, le camion IVECO de la S.A.R.L. CORREZE LEVAGE MONTAGE, dite "C.L.M.", a été dérobé sur le

parking de l'hôtel FORMULE 1 de GOUSSAINVILLE, exploité à l'époque par la SOCIÉTÉ COMMERCIALE DES HÈTELS ECONOMIQUES (S.C.H.E.). Le véhicule volé, qui contenait les outils de travail des six ouvriers de la société, a fait l'objet d'une déclaration de vol auprès du commissariat de police de GOUSSAINVILLE le 21 août 1998 et a été retrouvé calciné le même jour à SAINT-MESMES, dans le département de la SEINE ET MARNE. Le rapport d'expertise a évalué la valeur du camion détruit à 17.638,35 euros. La société S.C.H.E. a fait une proposition d'indemnisation calculée sur la base du prix d'une chambre de FORMULE 1 (15,24 euros), soit une somme d'un montant total de 2.119,00 euros qui a été refusée. Par acte du 10 octobre 2000, la société CORREZE LEVAGE MONTAGE et la MUTUELLE ASSURANCE ARTISANALE DE FRANCE (M.A.A.F.) ont fait assigner la société S.C.H.E. devant le tribunal de grande instance de PONTOISE aux fins de la voir condamner notamment à leur payer respectivement les sommes de 2.271,49 euros et de 15.305,88 euros. Par jugement en date du 29 janvier 2002, le tribunal a fait droit à leurs demandes en fixant le point de départ des intérêts, sur les sommes allouées, au jour de l'assignation, et a condamné la société défenderesse à leur payer la somme de 950,00 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société S.C.H.E., appelante, poursuit l'infirmation de cette décision. Elle demande à la cour de dire et juger que la société CORREZE LEVAGE MONTAGE, propriétaire du véhicule dérobé, n'était pas le voyageur logé à l'hôtel et en conséquence, d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la société au regard des dispositions des articles 1953 et suivants du code civil, cette société étant dépourvue de qualité pour agir. Elle indique par ailleurs que sa responsabilité ne saurait être retenue sur le fondement de l'article 1382 du même code, en l'absence de faute lui étant imputable. A titre subsidiaire, et si la cour devait recevoir

l'action de la société CORREZE LEVAGE MONTAGE et de sa compagnie d'assurances, elle lui demande de constater que le prix de la chambre louée était de 21,19 euros et qu'elle a proposé à la société, à titre commercial, une indemnisation calculée sur la base de ce montant. Elle sollicite de la cour qu'elle dise et juge que son offre -à hauteur de 100 fois le prix de la chambre-, est satisfactoire, ajoutant qu'en ce cas, il n'y a pas lieu de faire courir les intérêts du jour de l'assignation. L'appelante sollicite enfin la condamnation de la société C.L.M. et de son assureur à lui verser une indemnité de 1.524,00 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La S.A.R.L. CORREZE LEVAGE MONTAGE et la compagnie M.A.A.F. concluent à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de la société appelante au paiement de la somme de 3.000,00 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elles soutiennent qu'en application des articles 1952 et suivants du code civil, la responsabilité des aubergistes et hôteliers est engagée dans le cadre du contrat de dépôt. Elles précisent que les hôteliers sont tenus à réparation envers le déposant, en soulignant qu'en l'espèce, les chambres retenues ont été louées au nom de la société CORREZE LEVAGE MONTAGE qui était, de surcroît, propriétaire des objets dérobés. Elles ajoutent que chacun des ouvriers était gardien du véhicule et avait la qualité de déposant. Elles indiquent que l'article 1953 du code civil prévoit une indemnisation par référence au prix de location de la ou des chambres effectivement occupée, et qu'il convient de prendre en compte le nombre de chambres louées. Elles exposent que l'indemnisation doit s'effectuer sur la base de 100 fois le prix de location du logement par journée, en application de l'article 1953 du code civil, soit 12.714,25 euros, et que la société S.C.H.E. doit également sur le fondement de l'article 1954 du même code, indemniser

le vol des objets dérobés, à hauteur de 6.357,12 euros. Elles ajoutent que la compagnie M.A.A.F. justifie avoir réglé à la plaignante la somme de 17.333,45 euros et qu'elle est subrogée dans les droits de la société pour la totalité de l'indemnité due, soit la somme de 12.714,25 euros moins la franchise supportée par l'assuré, d'un montant de 304,90 euros. Elles réclament en conséquence la condamnation de la société S.C.H.E. à payer à la compagnie M.A.A.F., la somme de 2.896,53 euros et à la société C.L.M., la somme de 1.966,59 euros, concluant de surcroît à la fixation du point de départ des intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2000, outre à la capitalisation desdits intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 09 octobre 2003. SUR CE, LA COUR - SUR LA RECEVABILITÉ DES DEMANDES Considérant que l'article 1952 du code civil dispose que "les aubergistes ou hôteliers répondent, comme dépositaires, des vêtements, bagages et objets divers apportés dans leur établissement par le voyageur qui loge chez eux ; le dépôt de ces sortes d'effets doit être regardé comme un dépôt nécessaire" ; Considérant, par ailleurs, qu'il ressort de l'article 1165 du même code que "les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes; elles ne nuisent point aux tiers, et elles ne leur profitent que dans le cas prévu par l'article 1121" ; Considérant que l'obligation du dépositaire prend sa source dans le contrat d'hôtellerie ; Qu'en vertu de l'effet relatif des contrats, seul le cocontractant de l'hôtelier qui est victime de la disparition de son bien peut mettre en cause la responsabilité du professionnel sur le fondement des articles 1952 et suivants du code civil ; Que le cocontractant de l'hôtelier peut être une personne physique ou une personne morale ; Considérant qu'en la circonstance, il ressort des pièces produites que les chambres ont été louées au nom de la société CORREZE LEVAGE

MONTAGE, qui justifie avoir acquitté le paiement de six locations sans que le nom de ces préposés n'apparaisse sur un quelconque document ; en outre, le véhicule, comme l'outillage y étant contenu, étaient la propriété de ladite société ; Qu'en conséquence, c'est à bon droit que le tribunal, dont la cour fait siens les motifs pertinents à cet égard, a retenu que la société C.L.M. justifiait de sa qualité à agir ; - SUR L'INDEMNISATION DU PRÉJUDICE Considérant que l'article 1953 du code civil prévoit en son alinéa 3, seul applicable en la cause, que les dommages-intérêts dus au voyageur sont, à l'exclusion de toute limitation conventionnelle inférieure, limités à 100 fois le prix de location du logement par journée, sauf lorsque le voyageur démontre que le préjudice subi résulte d'une faute de celui qui l'héberge ou des personnes dont ce dernier doit répondre ; Que l'existence d'une faute de cette nature n'est en l'espèce ni démontrée, ni même alléguée ; Considérant que s'agissant des objets laissés dans le véhicule sur le parking de l'hôtel, la responsabilité est limitée à cinquante fois le prix de journée en application de l'article 1154 alinéa 2 du code civil ; Considérant que les articles 1953 et 1954 précités du code civil n'interdisent pas le cumul des indemnités prévues par ces textes, s'agissant de deux préjudices distincts qui nécessitent une réparation spécifique dans les limites instituées ; que la mention par "dérogation" employée dans l'article 1954 du code civil se rattache au seul montant du plafond de d'indemnisation, ainsi que l'a exactement relevé le tribunal ; Considérant, en l'espèce, qu'il convient de déduire de ces textes, qui imposent de prendre pour référence le prix journalier de location d'une chambre, que la base de calcul de l'indemnisation doit s'entendre du prix global payé par la société soit 127,14 euros (21,19 euros x 6) correspondant aux six chambres que la société C.L.M. a fait occuper et qui constituent le logement

loué au sens de l'article 1953 du code civil ; Considérant qu'il ressort du rapport d'expert du 30 octobre 1998 que la valeur du véhicule a été estimée à 21.271,82 euros T.T.C. ; Que s'agissant des objets volés dans le véhicule, il convient de relever que la valeur de l'outillage dérobée est attestée par une facture, régulièrement communiquée, pour un montant de 4.863,12 euros ; Que les premiers juges ont fait une exacte appréciation de l'indemnisation à laquelle pouvait prétendre la société C.L.M. en retenant, pour le vol du véhicule la somme de 12.714,00 euros (127,14 euros x 100), inférieure au prix dudit véhicule, et pour le vol de l'outillage, la somme de 4.863,12 euros H.T., inférieure au plafond d'indemnisation (6.357,12 euros) ; Considérant que la M.A.A.F. produit deux quittances subrogatives en date des 04 et 13 octobre 2000 pour des règlements à son assurée, d'un montant respectif de 1.733,45 euros (véhicule) et de 2.896,53 euros (outillage) ; Qu'il s'ensuit que la condamnation de la société S.C.H.E. doit se répartir comme suit : . Pour la M.A.A.F. : le véhicule : 12.409,35 euros + l'outillage : 2.896,53 euros =

15.305,88 euros Pour la société C.L.M. : le véhicule : 304,90 euros correspondant à la franchise laissée à sa charge ; + l'outillage :

1.966,59 euros = 2.271,49 euros Que le jugement sera donc confirmé sur ces points ; Considérant, par application de l'article 1153-1 du code civil, qu'il est justifié, compte tenu de l'ancienneté des faits, de faire courir les intérêts à compter de la date de l'assignation, le 10 octobre 2000, sans prendre en compte la proposition d'indemnisation, au demeurant insuffisante, formulée par la société S.C.H.E. ; - SUR LA CAPITALISATION DES INTÉRÊTS Considérant que la société CORREZE LEVAGE MONTAGE a sollicité la capitalisation des intérêts dans son assignation du 10 octobre 2000 ; Qu'il convient donc de faire application des dispositions de l'article 1154 du code civil et d'ordonner qu'à compter de cette

date, les intérêts produits par les sommes dues porteront eux-mêmes intérêts, pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dus pour au moins une année entière ; - SUR L'ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE Y... CIVILE Considérant que les parties sollicitent une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Que succombant en ses prétentions et supportant les dépens, la SOCIÉTÉ COMMERCIALE DES HÈTELS ECONOMIQUES ne saurait prospérer en sa réclamation ; Qu'en revanche, elle devra être condamnée à payer à la S.A.R.L. CORREZE LEVAGE MONTAGE et la compagnie M.A.A.F. sur le même fondement, une indemnité pour les frais irrépétibles, engagés en cause d'appel qui sera fixée à la somme de 950,00 euros, l'indemnité allouée à ce titre en première instance devra être confirmée, dès lors qu'elle est justifiée ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort : Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de PONTOISE le 29 janvier 2002, sauf en ses dispositions concernant les intérêts, Statuant à nouveau sur ce points : Dit que par application de l'article 1153-1 du code civil, les sommes allouées à la S.A.R.L. CORREZE LEVAGE MONTAGE porteront intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2000, et qu'à partir de cette date, les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil, pourvu qu'ils soient dus pour une année entière, Y ajoutant :

Condamne la SOCIÉTÉ COMMERCIALE DES HOTELS ECONOMIQUES à payer à la S.A.R.L. CORREZE LEVAGE MONTAGE et la compagnie M.A.A.F. la somme de 950,00 euros par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, pour les frais non compris dans les dépens, engagés en cause d'appel, Condamne la SOCIÉTÉ COMMERCIALE DES HOTELS ECONOMIQUES aux entiers dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de

procédure civile. Arrêt prononcé par monsieur X..., vice-président placé auprès de Monsieur le Premier Président,Assisté de madame THEODOSE, greffier, Et ont signé le présent arrêt, Madame GUIRIMAND, président, Madame THEODOSE, greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2002-02076
Date de la décision : 27/02/2004

Analyses

HOTELIER - Contrat d'hôtellerie.

Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 1952 et 1165 du Code civil que les aubergistes et hôteliers sont tenus de répondre comme dépositaires des effets et objets divers apportés dans leur établissement par le voyageur qui loge chez eux et que seul le cocontractant de l'hôtelier victime de la disparition de son bien peut engager la responsabilité de l'hôtelier sur ce fondement, en vertu de l'effet relatif des conventions. Une société qui établit avoir acquitté le prix de location de chambres à son seul nom, à l'exclusion de toute indication du nom de ses préposés, a seule la qualité de voyageur au sens des articles 1952 et suivants du Code civil et elle justifie de sa qualité à agir en réparation de la perte d'un véhicule et des outillages qu'il contenait dès lors qu'elle établit en être propriétaire

HOTELIER - Responsabilité - Vol - Véhicule d'un client.

S'agissant de la responsabilité des aubergistes et des hôteliers relative au dépôt nécessaire, les articles 1953 et 1954 du Code civil n'interdisent pas le cumul des indemnités qu'ils prévoient. Une société victime du vol de son véhicule et de l'outillage qu'il contenait est fondée à demander réparation pour ces deux préjudices qui sont distincts et nécessitent une réparation spécifique dans les limites instituées par les textes précités, la mention "par dérogation" employée dans l'article 1954 ne se rattachant qu'au seul montant du plafond d'indemnisation des objets laissés dans les véhicules


Références :

Code civil, articles 1952, 1953, 1954, 1165

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-02-27;2002.02076 ?
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