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01/02/2002 | FRANCE | N°2001-3315

France | France, Cour d'appel de Versailles, 01 février 2002, 2001-3315


Par déclaration au greffe en date du 3 août 1999, Monsieur X... Y... a fait convoquer Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... devant le Tribunal d'Instance de MONTMORENCY afin de la voir condamner à lui rembourser deux prêts personnels, de 1524,49 EUROS ayant été utilisé au rachat d'un terrain dans le cadre successoral, et 2058,06 EUROS ayant été utilisé au paiement de travaux sur son véhicule personnel. Mademoiselle Z... a souligné qu'aucune preuve écrite n'avait été produite par le défendeur contrairement aux exigences posées par les articles 1341 et 1326 du Code Civil. A titre sub

sidiaire, elle a ajouté que le paiement des travaux du véhicule ...

Par déclaration au greffe en date du 3 août 1999, Monsieur X... Y... a fait convoquer Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... devant le Tribunal d'Instance de MONTMORENCY afin de la voir condamner à lui rembourser deux prêts personnels, de 1524,49 EUROS ayant été utilisé au rachat d'un terrain dans le cadre successoral, et 2058,06 EUROS ayant été utilisé au paiement de travaux sur son véhicule personnel. Mademoiselle Z... a souligné qu'aucune preuve écrite n'avait été produite par le défendeur contrairement aux exigences posées par les articles 1341 et 1326 du Code Civil. A titre subsidiaire, elle a ajouté que le paiement des travaux du véhicule n'était qu'une contribution à l'entretien du ménage. Reconventionnellement, elle a sollicité le prononcé de l'exécution provisoire ainsi que l'allocation d'une somme de 457,35 EUROS au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Monsieur Y... a répliqué que le fait d'avoir vécu en concubinage l'avait empêché de se procurer une preuve littérale des prêts. A titre additionnel, il a demandé l'octroi de 762,25 EUROS de dommages et intérêts, de 533,57 EUROS au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, du montant des intérêts et a sollicité le bénéfice de l'exécution provisoire. Par un jugement avant dire droit, le Tribunal a demandé à Monsieur Y... de justifier que les deux chèques avaient été tirés sur un compte personnel. Par un jugement contradictoire en date du 21 décembre 2000, le Tribunal d'Instance de MONTMORENCY a rendu la décision suivante : - condamne Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... à payer à Monsieur X... Y... la somme de 1524,49 EUROS avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 1999 ; - déboute Monsieur X... Y... du surplus de ses demandes ; - condamne Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... à payer à Monsieur X... Y... la somme de 304,90 EUROS au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; - dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ; - condamne

Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... aux dépens. Par une déclaration en date du 18 avril 2001, Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... a relevé appel de cette décision. Elle estime en effet que sa condamnation au remboursement de la somme de 1524,49 EUROS doit être infirmée au motif que Monsieur X... Y... devait en vertu des articles 1315 et 1341 du Code Civil rapporter la preuve écrite de l'existence de la dette, que l'article 1348 était inapplicable au cas d'espèce, et enfin que cette somme correspondait à sa participation à l'entretien de la famille. Monsieur X... Y... réplique en dernier que les sommes litigieuses ne peuvent constituer des dons manuels au motif que l'appelante ne rapporte pas la preuve de l'intention libérale. En outre, il souligne que l'entretien du véhicule ne pouvait constituer une charge commune puisque chacun contribuait à l'entretien de son véhicule. L'intimé demande donc à la Cour de : vu les articles 1347, 1874 et suivants du Code Civil, - déclarer recevable mais mal fondé l'appel principal interjeté par Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... ; - la débouter, en conséquence de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; - confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... à payer à Monsieur X... Y... la somme de 1524,49 EUROS avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 1999 ; - ordonner la capitalisation des intérêts année par année ; - déclarer recevable et bien fondé l'appel incident formé par Monsieur X... Y... ; y faisant droit, réformant partiellement la décision entreprise ; vu les dispositions des articles 1347 et 1348 du Code Civil, - condamner Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... à payer à Monsieur X... Y... la somme de 2058,06 EUROS avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 1999 ; - ordonner la capitalisation des intérêts année par année ; - condamner Mademoiselle Jeanne-Chantal Z... à payer à Monsieur X... Y... la somme de 762,25 EUROS à titre de dommages et intérêts ; -

condamner Mademoiselle Jeanne Chantal Z... à payer à Monsieur X... Y... la somme de 1524,49 EUROS au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; - condamner Mademoiselle Jeanne Chantal Z... aux entiers dépens et accorder à la S.C.P. DELCAIRE et BOITEAU, titulaire d'un Office d'Avoués, l'autorisation de recouvrer ceux d'appel en application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. L'ordonnance de clôture a été signée le 13 décembre 2001 et l'affaire appelée à l'audience du 20 décembre 2001, où elle a été plaidée pour l'intimé. SUR CE, LA COUR : Considérant, en droit, que Monsieur X... Y... qui se prévaut de l'existence de deux prêts, de 1524,49 EUROS et de 2058,06 EUROS au profit de sa concubine Mademoiselle Z..., pendant la durée de leur concubinage qui a duré de 1983 à 1998, doit rapporter la preuve écrite de ces deux conventions, et ce conformément aux dispositions des articles 1315 alinéa 1 et 1341 et suivants du Code Civil ; que de plus, en droit, la preuve de la remise de fonds à une personne ne suffit pas à justifier l'obligation pour celle-ci de restituer les sommes qu'elle avait reçues et que l'auteur de ces remises de fonds doit démontrer que celles-ci se sont faites à titre de prêts ; Considérant qu'il est constant que les deux chèques émis par Monsieur X... Y... au nom de Mademoiselle Z..., sa concubine de l'époque ont été encaissés par celle-ci ; que de plus, l'intéressée a reconnu qu'elle avait utilisé ces deux sommes à des fins personnelles (acquisition d'un terrain dans une succession lui ayant été dévolue et réparations de son véhicule automobile personnel) ; qu'il est certain qu'en raison de la durée de ce concubinage (de 1983 à 1998), il y avait impossibilité morale pour Monsieur X... Y... à se procurer une preuve littérale des deux prêts qu'il invoque, au sens de l'article 1348 du Code Civil ; que par ailleurs, le fait pour Mademoiselle Z... d'avoir encaissé le montant de ces deux chèques émis à son profit

représente un commencement de preuve par écrit, au sens de l'article 1347 alinéa 1 dudit Code et que Monsieur X... Y... peut donc parfaire la preuve par écrit qui lui incombe par d'autres éléments, tels que les témoignages ou indices extérieurs à l'acte lui-même ; Considérant que l'intéressé a fourni les attestations précises et concordantes établies par Madame Karine A..., Madame Ginette B... et de Madame Lucette Y... (épouse C...) qui sont certes des membres de sa famille, mais qui ne sont pas sérieusement discutées ou critiquées par l'appelante ; qu'il résulte de ces témoignages à valeur probante certaine que la Cour retient en son entier, que ces deux remises de fonds se sont faites à titre de prêts ; que de son côté, les attestations de Madame LE D..., de Madame E..., de Madame F... et de Madame G..., produites par l'appelante, ne démontrent rien sur les causes de ces deux remises de fonds au profit de Mademoiselle Z... et ne relatent que les relations entre les deux concubins s'étaient dégradées depuis 1992, ce qui vient donc conforter l'invraisemblance de la thèse d'une intention libérale et de l'existence d'un don au profit de cette concubine ; que l'appelante est donc déboutée de son moyen tendant à faire juger que, par ces deux chèques, Monsieur X... Y... avait eu une intention libérale à son égard ; Considérant par ailleurs que dans le concubinage qui a existé entre les deux parties, de 1983 à 1998, ne peut être invoquée aucune obligation d'aide mutuelle et matérielle à la charge de Monsieur X... Y..., telle que celle-ci a été édictée par le législateur dans le cadre de l'institution du PACS (article 514-4 du Code Civil) ; qu'à défaut, ici, de toute volonté exprimée par ces deux concubins au sujet de leur contribution aux charges de la vie commune, chacun doit supporter les dépenses de la vie courante qu'il a exposées, et que la thèse de l'appelante prétendant qu'il s'agirait de "participation de Monsieur X...

Y... à l'entretien de la famille" est inopérante, alors surtout que rien ne démontre que ces deux sommes litigieuses ont été utilisées par Mademoiselle Z... pour les besoins communs de ce couple, ou pour ceux de leur enfant commun ; que Mademoiselle Z... doit donc supporter seule, en tant que concubine, toutes les dépenses de la vie commune qu'elle a personnellement engagées -même s'il s'agit de dépenses qui auraient eu pour objet la satisfaction de besoins communs du couple et de leur enfant- et qu'elle n'est pas en droit de réclamer à son ex-concubin le remboursement partiel ou total des dépenses qu'elle aurait elle-même faites durant leur cohabitation ; qu'en droit, aucune contribution aux charges de la vie commune n'a pu exister entre des deux concubins, par analogie avec le système édicté entre époux, par l'article 214 du Code Civil, et que par conséquent l'appelante est déboutée de sa demande tendant subsidiairement à faire admettre que ces deux sommes, ou plus particulièrement celle de 1524,49 EUROS du 30 juillet 1994, correspondaient, selon elle, à une participation de Monsieur X... Y... à l'entretien de la famille ; Considérant que le jugement déféré est donc réformé au ujet du second prêt du 25 novembre 1995, et que Mademoiselle Z... est condamnée à rembourser ces deux prêts à Monsieur X... Y..., de 1524,49 EUROS avec intérêts au taux légal à compter de la sommation de payer du 28 août 1999 et de 2058,06 EUROS avec intérêts au taux légal à compter de la sommation de payer du 28 août 1999 ; Considérant, de plus, que la Cour ordonne que les intérêts échus, dus sur ces deux sommes pour plus d'une année, seront capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil ; Considérant que l'appelante qui succombe en ses moyens et ses demandes relatifs à ces deux prêts n'est plus fondée à invoquer un préjudice à imputer à l'intimé et qu'elle est donc déboutée de sa demande en paiement de 1524,49 EUROS de dommages-intérêts, en vertu

de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, alors qu'elle ne démontre pas qu'une faute devait être retenue contre Monsieur X... Y... ni quel préjudice certainement direct elle avait ainsi subi ; Considérant enfin que, compte-tenu de l'équité, les deux parties sont déboutées de leurs demandes respectives en paiement de sommes, en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que le jugement déféré est cependant confirmé en ses justes dispositions, eu égard à l'équité, par lesquelles il a accordé 304,90 EUROS à Monsieur X... Y... en application de ce texte. PAR CES MOTIFS : La Cour statuant publiquement et contradictoirement : Vu les articles 1315 alinéa 1, et 1341, 1347 et 1348 du Code Civil : - Déboute Mademoiselle Jeanne Chantal Z... des fins de son appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte. - La condamne à payer à Monsieur X... Y... : * 1524,49 EUROS et 2058,06 EUROS avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 1999. - De plus, ordonne la capitalisation de ces intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil. - Déboute les deux parties des fins de leurs autres demandes (dommages-intérêts, et sommes réclamées en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile). - Confirme le jugement en ses autres dispositions non contraires aux présentes. - Condamne Mademoiselle Z... à tous les dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés directement contre elle par la S.C.P. d'Avoués DELCAIRE et BOITEAU, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Et ont signé le présent arrêt : Monsieur Alban CHAIX, Président, Madame H... de GUINAUMONT, qui a assisté à son prononcé. Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2001-3315
Date de la décision : 01/02/2002

Analyses

PREUVE TESTIMONIALE - Commencement de preuve par écrit - Preuve complémentaire - Effets - Prêt

S'agissant d'un prêt consenti entre concubins, dès lors que la poursuite de la relation pendant quinze ans, établit l'impossibilité morale du prêteur à se procurer une preuve littérale du contrat de prêt, au sens de l'article 1348 du Code civil, et que l'encaissement par le concubin bénéficiaire du chèque émis à son profit constitue, au sens de l'article 1347, alinéa 1er, du même Code, un commencement de preuve par écrit, le prêteur peut donc parfaire la preuve qui lui incombe par d'autres éléments extérieurs à l'acte lui-même. Tel est le cas du concubin qui établit par des attestations écrites concordantes, que la remise des fonds a été faite à titre de prêt dès lors qu'aucune obligation d'entraide mutuelle et matérielle ne peut être utilement invoquée par le concubin bénéficiaire du prêt, l'obligation d'entraide prévue par l'article 515-4 du Code civil n'étant applicable qu'au pacte civil de solidarité, et l'obligation de contribuer aux charges de la vie commune prévue par l'article 214 du Code civil ne concernant que le mariage. Il s'ensuit qu'en l'absence de convention contraire, chacun doit supporter les dépenses de la vie courante qu'il a exposées, et que le concubin bénéficiaire du prêt est mal fondé à prétendre que la somme prêtée correspondrait à une participation du prêteur à l'entretien de la famille


Références :

Code civil, articles 214, 515-4, 1347 et 1348

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2002-02-01;2001.3315 ?
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