La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2019 | FRANCE | N°17/02881

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 27 juin 2019, 17/02881


27/06/2019





ARRÊT N° 558/2019



N° RG 17/02881 - N° Portalis DBVI-V-B7B-LU4W

VBJ/MR



Décision déférée du 21 Avril 2017 - Tribunal de Grande Instance de Toulouse - 13/01883

Mme GAUMET

















SCI FIM IMMO





C/





SA ALLIANZ IARD



SA GROUPAMA



[A] [D]



























































CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT SEPT JUIN DEUX MILLE DIX NEUF

***





APPELANTE



SCI FIM IMMO

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Guy DEBUISSON, avocat post...

27/06/2019

ARRÊT N° 558/2019

N° RG 17/02881 - N° Portalis DBVI-V-B7B-LU4W

VBJ/MR

Décision déférée du 21 Avril 2017 - Tribunal de Grande Instance de Toulouse - 13/01883

Mme GAUMET

SCI FIM IMMO

C/

SA ALLIANZ IARD

SA GROUPAMA

[A] [D]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT SEPT JUIN DEUX MILLE DIX NEUF

***

APPELANTE

SCI FIM IMMO

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Guy DEBUISSON, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Florent ESQUIROL, avocat plaidant au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

INTIMES

SA ALLIANZ IARD

[Adresse 9]

[Localité 6]

Représentée par Me Nadia ZANIER de la SCP INTER-BARREAUX RAFFIN & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

SA GROUPAMA : caducité DA à l'égard de SA GROUPAMA par ordonnance du juge de la mise en état du 20/12/2018 n°18/241

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Ingrid CANTALOUBE-FERRIEU, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Patrick TARDIEU, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTERVENTION VOLONTAIRE

Maître [A] [D] de la SELAS EGIDE ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SUD-OUEST CONSTRUCTION désignée par ordonnance du 27 juillet 2018 par le Tribunal de Commerce de Toulouse en remplacement de [R] [U]

[Adresse 4]

[Adresse 12]

[Localité 2]

Représenté par Me Bernard DE LAMY, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mars 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant A. MAZARIN-GEORGIN et V. BLANQUE-JEAN, Conseillers, chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BENEIX-BACHER, président

A. MAZARIN-GEORGIN, conseiller

V. BLANQUE-JEAN, conseiller

Greffier, lors des débats : M. BUTEL

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par M. BUTEL, greffier de chambre

FAITS

La Sci Fim Immo, dont les associés sont [M] [S] et [W] [E], est propriétaire de locaux à usage commercial situés sis [Adresse 11], loués depuis 2003 à la société Sud Ouest Construction dont l'objet social était la construction de maisons.

La preneuse a, en novembre 2010 par l'intermédiaire du Cabinet Conseil Courtage, contracté auprès de Gan Eurocourtage pour son compte et celui du bailleur dans le cadre d'une police multirisques commerciale 'Référence bureaux'.

Les gérants respectifs de la Sci Fim Immo et de la société Sud Ouest Construction sont Mme [S] et [G] [E], fils du 1er nommé.

Un incendie s'est déclaré dans le bâtiment dans la nuit du 7 au 8 janvier 2012. [G] [E] a porté plainte le 10 janvier et a déclaré le sinistre auprès du Groupe AMI3F courtier en assurance.

Le conseil de la Sci Fim Immo a réclamé dès le 16 janvier à Gan Eurocourtage une provision estimant son préjudice à 800.000 €.

Gan Eurocourtage a pris en charge le coût des frais de dépollution à concurrence d'une somme de 2 852,62 € réglés par délégation de paiement de la société Sud Ouest Construction à la société 3ID. Elle a versé deux acomptes le 21 février 2012 de 75 000 € et le 2 avril 2012 de 250.000 €, entre les mains de la société Sud Ouest Construction .

La Sarl Sud Ouest Construction a été placée en redressement judiciaire (jugement non produit) puis en liquidation judiciaire le 21 juin 2012, Me [U] étant désignée mandataire liquidateur.

Deux lettres d'acceptation d'indemnité ont été adressées à la Sci Fim Immo pour une somme de 662.489 € dont 229.379 € en différé et à la société Sud Ouest Construction pour 52.431 € sous déduction de la somme de 14.796,51 €, que les assurées refuseront.

La Sci Fim Immo portera également plainte le 18 décembre 2014. Une ordonnance de non-lieu sera rendue le 4 mai 2016.

PROCÉDURE

Se prévalant d'une évaluation des préjudices par M. [C] expert du Gan, suivant assignation du 17 septembre 2012 délivrée par la Sci Fim Immo, l'assureur s'est vu réclamer une provision de 714.920 €. Cette demande sera rejetée par ordonnance du juges des référés du 11 janvier 2013.

Par acte du 21 mai 2013, la Sci Fim Immo a donc fait assigner Groupama venant aux droits de la société Gan Eurocourtage en paiement de cette somme à titre d'indemnité d'assurance, outre celles de 85.000,00 € pour résistance abusive et de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 16 décembre 2013, Groupama a appelé en intervention forcée, Allianz invoquant lui avoir transféré son portefeuille clients, et les procédures ont été jointes.

Une nouvelle demande de provision a été rejetée par le juge de la mise en état le 18 septembre 2014 et la caducité de la déclaration d'appel de la Sci Fim Immo a été prononcée par arrêt du 25 juin 2015.

Par jugement du 21 avril 2017, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

- dit qu'à effet du 1er janvier 2012, la société Allianz était titulaire des droits et obligations du contrat d'assurance souscrit initialement auprès de la SA Gan Eurocourtage,

- déclaré recevable l'action de la Sci Fim Immo envers la société Allianz,

- débouté la Sci Fim Immo de ses demandes en dommages et intérêts au titre de ses préjudices, matériel et immatériel, comme au titre de la résistance abusive,

- condamné la Sci Fim Immo aux dépens en ce compris les frais de l'expertise judiciaire avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamné la Sci Fim Immo à payer à la société Allianz la somme de 5.000 € et à Groupama celle de 800 € au titre de l'article 700 1° du code de procédure civile.

Par déclaration d'appel du 22 mai 2017 (R.G 17-2881), dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, la Sci Fim Immo a formé appel total. Le dossier a été distribué à la 1ère chambre.

Par une deuxième déclaration d'appel du 10 avril 2018 à l'encontre du même jugement et des mêmes parties'(R.G 18-1669), la Sci Fim Immo a réitéré son appel qui a été distribué à la 3ème chambre de la cour et le 17 mai 2018 le premier appel a été transféré à cette chambre. Par ordonnance du 20 décembre 2018, ce second appel a été déclaré irrecevable, le conseiller de la mise en état ayant retenu que la Sci Fim Immo avait réitéré un second appel alors que le premier n'était ni déclaré nul, ni frappé de caducité, que la cour se trouvait en présence de deux appels formés contre le même jugement et les mêmes parties et que dès lors, le second appel était irrecevable, en l'absence d'intérêt pour agir de la part de la SCI Fim Immo.

Me [U] en sa qualité de mandataire liquidateur de Sud Ouest Construction est intervenue en cause d'appel selon conclusions notifiées par RPVA le 23 février 2018 et la Selas Egide, prise en la personne de Me [D], est intervenue en ses lieux et place le 6 mars 2019 après sa désignation le 22 juillet 2018.

Par ordonnance du 20 décembre 2018, la caducité de l'appel d'Allianz a été constatée à l'égard de Groupama.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 mars 2019.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions du 7 mai 2018, la Sci Fim Immo demande la Cour de :

- dire et juger que l'intervention de Me [U] et ses demandes en cause d'appel constituent un nouveau litige imposant le respect du principe du double degré de juridiction,

- dire et juger irrecevable cette intervention volontaire.

Au fond,

- déclarer recevable et bien fondé l'appel relevé par la Sci Fim Immo,

- réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a déclaré recevable l'action de la Sci Fim Immo contre la société Allianz, jugeant à nouveau,

- dire et juger que la Sci Fim Immo a justement attrait la SA Groupama qui vient aux droits de la société Gan Eurocourtage,

- prendre acte que la SA Groupama a appelé en garantie Allianz par assignation en date du 16 décembre 2013, qui a aussitôt réclamé la qualité d'assureur,

- déclarer recevable la Sci Fim Immo dans ses demandes, fins et conclusions.

Vu les actes interruptifs ou suspensifs de prescription,

- constater que la Sci Fim Immo, tiers au contrat d'assurance n'est pas soumise à la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances,

- dire et juger en conséquence que l'action intentée par la Sci Fim Immo n'est pas prescrite.

Subsidiairement sur la prescription

Vu l'article 2.3 du contrat d'assurance,

Vu l'article R. 112-1, L 114-1 et L 114.2 du code des assurances,

Vu la renonciation à se prévaloir de la prescription de la société Gan Eurocourtage,

- constater l'inopposabilité de toute déchéance à la Sci Fim Immo en sa qualité de tiers lésé,

- constater l'inopposabilité du délai de prescription à la Sci Fim Immo en sa qualité de tiers lésé,

- constater que la société Allianz n'a pas soulevé la prescription de l'action de la Sci Fim Immo à son encontre, ni émis des réserves en ce sens dans la procédure de référé comme dans l'instance d'appel en cause par Groupama et la procédure de mise en état,

- prendre acte en conséquence que la société Allianz a ainsi renoncé à se prévaloir de la prescription,

- dire et juger que l'action de la Sci Fim Immo n'est pas prescrite,

Subsidiairement sur le fondement des articles 1134, 1146 et 1147 (anciens) du code civil,

Vu les conditions particulières et générales du contrat d'assurance Gan,

Vu le tableau récapitulatif des dommages établi par l'expert mandaté par l'assureur,

Vu l'ordonnance de non-lieu du 4 mai 2016,

- constater que la société Allianz garantit tant les dommages matériels qu'immatériels dont son assuré serait responsable,

- constater que la société Allianz doit intégralement indemniser le tiers lésé,

- constater que la société Allianz n'est pas autorisée à réduire l'indemnité du tiers lésé dans quelques circonstances que ce soit,

- condamner solidairement les sociétés Allianz et Groupama venant aux droits de la société Gan Eurocourtage à verser à la requérante la somme de 901.320 € en indemnisation de la perte du bâtiment et des loyers,

- dire et juger que cette indemnité sera soumise à intérêts moratoires depuis le 10 septembre 2012, date de l'assignation en référé, avec capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil,

- dire en tout état de cause n'y avoir lieu à réduction ou de l'indemnité d'assurance due au titre de la responsabilité civile garantie par la société Allianz.

Vu le refus d'Allianz et de la société Groupama de procéder à l'indemnisation de la Sci Fim Immo depuis 60 mois,

Vu la résistance abusive de la société Allianz,

Vu la qualité de tiers lésé de la Sci Fim Immo qui n'est pas partie au contrat d'assurance,

Vu les dommages subis par la Sci Fim Immo du fait de la résistance et de l'attitude dilatoire de la société Allianz,

Sur le fondement l'article 1382 (ancien) du code civil,

- condamner en outre solidairement les sociétés Allianz et Groupama venant aux droits de la société Gan Eurocourtage à verser à la Sci Fim Immo la somme 150 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement d'une indemnité d'assurance,

- débouter la société Allianz de son appel incident comme étant mal fondé,

- condamner en outre solidairement les sociétés Allianz et Groupama venant aux droits de la société Gan Eurocourtage à payer à la Sci Fim Immo la somme de 9 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir que :

sur l'intervention volontaire

- Me [U] qui avait assigné la société Groupama venant aux droits de Gan Eurocourtage devant le Tribunal de commerce de Toulouse selon acte introductif du 27 décembre 2013 ne peut raisonnablement soutenir avoir ignoré la procédure judiciaire en cours devant le tribunal de grande instance du fait de l'identité des avocats, des pièces communiquées et des parties adverses,

- elle tente donc d'instaurer un litige nouveau en sollicitant l'attribution de toutes indemnités qui pourraient être allouées, au prétexte qu'elle bénéficierait du désistement de la gérante de la Sci Fim Immo alors que Me [U] n'a jamais réclamé un tel bénéfice,

sur la prescription

- les premiers juges se sont trompés sur la chronologie des faits et seule la société Gan Eurocourtage a conduit les investigations et l'instruction du dossier d'indemnisation,

- aucune réunion, avant celle du 10 août 2012, n'a été organisée pour l'indemnisation de la Sci Fim Immo,

- elle a formulé des demandes amiables,

- elle conteste tout désistement ou toute délégation de paiement au profit de Sud Ouest Construction, l'attestation du 5 mars 2012 étant seulement destinée à accélérer la reconstruction et à valider le marché accepté par son locataire,

- le Gan n'explique nullement pourquoi il aurait versé 75 % du coût total de la reconstruction dès le 20 mars 2012 alors même qu'à cette date personne ne connaissait le coût total de la reconstruction, aucun marché de travaux n'avait été signé, aucun architecte n'avait établi les plans de reconstruction du bâtiment, aucune démarche n'avait été accomplie concernant une demande de permis de démolition et de construction, aucun accord écrit n'avait été donné par la Sci Fim Immo et aucun accord écrit n'avait été donné par la société Gan elle-même,

- le Gan a formulé une offre unique d'indemnisation le 10 août 2012,

- le délai biennal de prescription est, en toute hypothèse inopposable pour non-respect de l'article R. 112-1 du code des assurances,

Sur le préjudice

- elle conteste toute communauté de gérance avec la société Sud Ouest Construction,

- l'acompte de 250.000 € a été versé à Sud-Ouest Construction au titre de sa perte d'exploitation,

- Allianz se méprend sur les termes des versements effectués par la société Gan en son temps et devra produire les justificatifs des travaux de reconstruction qui ont permis le versement des deux acomptes de 325.000 €,

- la Banque Populaire Occitane justifie qu'en 2012, la concluante n'avait aucune dette bancaire.

Par conclusions du 21 février 2019, la SA Allianz demande à la Cour au visa de la délégation de paiement consentie par la Société Fim Immo, des règlements opérés par la Société Gan Eurocourtage, des conditions contractuelles et de l'article L. 112-6 du code des assurances, de :

- statuer ce que de droit sur l'intervention volontaire aux débats de la Selas Egide.

En toute hypothèse :

- confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a débouté la Société Fim Immo de sa demande au titre du préjudice matériel à concurrence de la somme de 552.254 €,

- dire et juger que le mandataire liquidateur ne saurait, bien évidemment, avoir plus de droit que la Sci Fim Immo elle-même sur l'indemnité d'assurance portant sur la reconstruction de l'immeuble telle qu'elle sera arbitrée par la Cour,

- dire et juger que la créance de la Société Fim Immo à son encontre au titre des préjudices matériels ne saurait excéder la somme de 100.407 € sous déduction de la créance de la Banque Populaire que la Société Fim Immo devra justifier dans son quantum,

- débouter, en conséquence, la Sci Fim Immo du surplus de ses demandes, fins et conclusions, celles-ci n'étant nullement justifiées au titre de ses préjudices matériels.

Confirmant la décision de première instance en ce qu'elle a débouté la Société Fim Immo de sa demande au titre du préjudice immatériel à concurrence de la somme de 349.066 €,

- dire et juger que la créance de la Société Fim Immo à son encontre au titre des préjudices immatériels n'est pas due, faute pour la Sci Fim Immo d'avoir reconstruit l'immeuble,

- débouter, en conséquence, la Sci Fim Immo du surplus de ses demandes, fins et conclusions, celles-ci n'étant nullement justifiées au titre du préjudice immatériel.

- dire et juger que l'actualisation du préjudice se heurte à la prescription biennale de l'article L. 114-1 du Code des Assurances,

- dire et juger que la période d'indemnisation des pertes locatives est limitée à 24 mois,

- dire et juger que les sommes dues au titre de la perte de loyers n'ont pu excéder la somme complémentaire de 4 012,72 €.

Vu les dispositions de l'article 1147 du code de procédure civile,

Confirmant la décision de première instance,

- débouter la société Fim Immo de sa demande de condamnation de la société Allianz au paiement à titre de dommages et intérêts d'une somme complémentaire de 150 000 €,

- rejeter la demande de la société Fim Immo au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Fim Immo au paiement de la somme complémentaire de 8 000 € au titre des frais irrépétibles devant la Cour,

- condamner la société Fim Immo aux entiers dépens avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle expose que :

- dûment autorisée par une décision du 14 septembre 2012 qui a pris effet le 1er octobre 2012 avec effet rétroactif au 1er janvier 2012, Allianz est devenue titulaire des droits et obligations du contrat d'assurance souscrit initialement auprès de la SA Gan et elle est intervenue dès la procédure de référé provision et une fois assignée par la Société Groupama, le 16 décembre 2013, elle est intervenue dans la procédure au fond,

- le bâtiment à usage commercial abritant ses locaux appartenait à la Sci Fim Immo créée en 2002, dont la moitié du capital social était détenu par M. [G] [E],

- la société Fim Immo a entendu déléguer à son locataire le coût d'indemnisation des travaux de reconstruction ainsi qu'il ressort de l'attestation établie par la gérante de la société Fim Immo, le 5 mars 2012, sur une initiative de TR Expertises, expert des deux assurées, et la société Gan Eurocourtage a réglé directement entre les mains de la société Sud Ouest Construction une somme totale de 325.000 € à titre provisionnel,

- la Sci Fim Immo n'a jamais informé la société Gan Eurocourtage de la mise en liquidation judiciaire de la société Sud Ouest Construction,

- la société Fim Immo soutient dans ses conclusions n° 3, et pour la première fois en cause d'appel qu'il n'y aurait jamais eu de délégation de paiement et que ces 2 acomptes de 75 000 et 250 000 € n'étaient pas destinés à la reconstruction du bâtiment et versés à valoir sur son indemnité définitive,

- selon l'alinéa 1er de l'article L. 112-1 du code des assurances, la personne morale pour le compte de laquelle l'assurance est souscrite a la qualité de tiers lésé si elle démontre que son dommage trouve son origine dans la responsabilité civile d'un autre assuré dans le cadre du même contrat,

- la société Fim Immo a la qualité d'assuré pour compte dans le cadre d'un contrat d'assurance de dommages comportant également un volet « responsabilité civile », mais non souscrit, la seule garantie souscrite par le locataire étant une garantie « RC exploitation » ne couvrant pas le risque incendie affectant le bâtiment,

- c'est en ajoutant au contrat un élément qu'il ne comportait pas que le tribunal a estimé qu'au titre du risque incendie, le bailleur avait la qualité de tiers,

- l'article L. 124-3 concernant l'action directe contre l'assureur du responsable dans le cadre d'un contrat de responsabilité civile est en l'espèce inopérant,

- la prescription biennale est opposable à la société Fim Immo que ce soit en qualité d'assuré ou en qualité de bénéficiaire,

- le sinistre, à savoir l'incendie, s'est produit le 8 janvier 2012, l'assignation du 17 septembre 2012 a été délivrée à l'encontre de la seule société Gan Eurocourtage et la prescription est acquise depuis le 8 janvier 2014,

- la jurisprudence citée par la Sci Fim Immo, sur les dispositions de l'article R. 112-1 du code des assurances, est inopérante ; en effet :

* l'article 1.9 de la police visé par la Société Fim Immo correspond à l'étendue géographique de la garantie,

* l'article 4.2 sur la prescription est conforme aux exigences légales,

- Allianz n'a jamais renoncé à se prévaloir de la prescription,

- Gan Eurocourtage a respecté ses obligations en réglant une provision de 325.000 € et elle ne pouvait payer le solde de l'indemnité dans les 15 jours en l'absence d'accord sur l'indemnité,

- le supplément d'indemnité pour valeur à neuf est, selon la police, versé au fur et à mesure de la reconstruction des bâtiments et aménagements sur production de mémoires ou de factures,

- la perte locative résulte pour sa majeure partie de la liquidation judiciaire de Sud Ouest Construction et du fait que celle-ci n'a pas utilisé les fonds que la SCI Fim Immo lui avait délégués pour débuter la reconstruction de l'immeuble,

- la provision de 325.000 € doit être déduite de l'indemnité à percevoir,

- la perte locative ne peut être calculée que sur la base de 401,28 € par mois.

Par conclusions du 7 mai 2018, Groupama demande à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé qu'à effet du 1er janvier 2012, la société Allianz était titulaire des droits et obligations du contrat d'assurances souscrit initialement auprès de la SA Gan Eurocourtage,

- dire et juger la société Groupama hors de cause,

- dire et juger qu'il serait inéquitable de laisser à sa seule charge les frais irrépétibles de l'instance,

- condamner la Sci Fim Immo à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Sci Fim Immo en tous les dépens avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle expose que le contrat d'assurances de la Sci Fim Immo a été cédé antérieurement à l'opération de fusion absorption dans le cadre du transfert du portefeuille de contrats à la société d'assurances Allianz Iard dont le siège social est à [Adresse 13], ce qu'Allianz reconnaît.

Par conclusions d'intervention volontaire n° 2, la Selas Egide demande à la cour de :

- donner acte à Maître [D] de la Selas Egide désigné en remplacement de Me [U], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Sud Ouest Construction de son intervention volontaire dans l'instance d'appel à l'encontre du jugement du 21 avril 2017 entre la Sci Fim Immo d'une part et la Société Allianz d'autre part,

- dire que toute somme due par la Société Allianz à la Sci Fim Immo au titre des réparations et reconstructions de l'immeuble assuré par l'intermédiaire de la société Sud Ouest Construction reviendra à la liquidation judiciaire de cette dernière sur le fondement de l'attestation de délégation du bénéfice de l'assurance de la Sci Fim Immo du 5 mars 2012,

- condamner tout succombant au principal à payer à Maître [D] ès qualités la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

Elle expose que :

- la société Gan ayant cédé une partie de son portefeuille à la société Allianz avec effet rétroactif au 1er janvier 2012, il apparaît que seule Allianz est concernée par la gestion de ce litige,

- Me [U] a intenté une action directe contre la Société Allianz devant le Tribunal de Commerce de Toulouse pour obtenir la condamnation de l'assureur au paiement d'une indemnisation au titre de la perte d'exploitation couverte par la police et appris au cours de cette instance l'existence du jugement frappé d'appel,

- le mandataire liquidateur a manifestement intérêt à être présent dans l'instance en sa qualité d'assuré, dès lors que :

* le contrat d'assurance prévoit tant l'indemnisation du préjudice de perte d'exploitation, dont l'indemnisation est sollicitée directement par la société Sud-Ouest Construction devant le Tribunal de Commerce que l'indemnisation de la reconstruction du bâtiment détruit appartenant à la société Fim Immo dans le cadre de l'assurance pour compte

* il résulte de l'attestation du 5 mars 2012, que toutes indemnisations au titre de la reconstruction des locaux détruits doivent revenir à la Sarl Sud-Ouest Construction représentée aujourd'hui par son liquidateur,

- l'appréciation de l'intérêt à agir de l'intervenant volontaire et du lien suffisant qui doit exister entre ses demandes et les prétentions originaires relève du pouvoir souverain du juge du fond,

- la Sci Fim Immo et Allianz ont déjà débattu des effets de l'attestation du 5 mars 2012 invoquée par le mandataire liquidateur pour revendiquer le montant de l'indemnisation au titre de la reconstruction et le débat n'est pas nouveau,

- la Sci Fim Immo sollicite au titre de la perte du bâtiment la somme de 717.509,02 € TTC et en août 2012 le Gan a chiffré l'indemnité au titre du bâtiment à 480.223 €, vétusté déduite,

- elle conclut à la confirmation du jugement sur la recevabilité de l'action intentée par la Sci Fim Immo et s'associé à l'argumentation de celle-ci sur la validité de l'action entreprise et sur l'obligation de la société Allianz d'exécuter le contrat d'assurance,

- la créance de la société Sud-Ouest Construction à l'encontre de la société Allianz est entrée dans le patrimoine de la concluante antérieurement à l'ouverture de la procédure collective de redressement puis de liquidation judiciaire,

- le mandataire liquidateur percevra l'indemnisation de la valeur de ce dernier conformément au titre III chapitre IV article 4.1.2 des conditions générales du contrat d'assurance qui prévoit l'indemnisation sur la base de la valeur économique des bâtiments,

- les acomptes perçus par la société Sud-Ouest Construction doivent être imputés sur la perte d'exploitation de cette société,

- seule la valeur à neuf comportant un supplément d'indemnité était soumise à l'obligation de reconstruction dans un délai de deux ans à partir de la date du sinistre.

MOTIFS

Sur la qualité d'assureur de la société allianz

La société Sud Ouest Construction a contracté avec le Gan Eurocourtage pour son compte et celui de son bailleur la Sci Fim Immo, une police multirisques commerciale référence bureaux dite ' tous risques sauf ' (sic) de vos bureaux.

Selon l'article L. 324-1-2 du code des assurances en sa rédaction applicable en 2012, les entreprises de réassurance mentionnées au 1° du III de l'article L. 310-1-1, ou leurs succursales, peuvent être autorisées, dans les conditions définies au présent article, à transférer tout ou partie de leur portefeuille de contrats ou de sinistres à payer à une ou plusieurs entreprises de réassurance ou d'assurance ayant leur siège social en France, dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou à leurs succursales établies sur le territoire de l'Espace économique européen....

Il résulte de l'attestation du 24 avril 2013 de transfert partiel de portefeuille de contrat d'assurance entre Groupama SA et Allianz Iard que :

- Groupama SA est venue aux droits et obligations de Gan Eurocourtage à la suite d'une fusion absorption du 31 décembre 2012,

- Gan Eurocourtage était la société du groupe Groupama dédiée au marché de courtage en assurances,

- le 7 juin 2012, Gan Eurocourtage et Allianz ont conclu un contrat de cession du portefeuille d'assurance relatif au marché Iard entreprises et particuliers qui a pris effet le 1er octobre 2012 avec effet rétroactif au 1er janvier 2012,

- ce transfert de portefeuille a été approuvé par une décision n° 2012-C-72 du 14 septembre 2012, publiée au J.O du 25 septembre.

Le portefeuille d'assurances 'Iard entreprises et particuliers' transféré à la société Allianz rétroactivement à compter du 1er janvier 2012, était sorti du patrimoine d'Eurocourtage à la date de sa fusion absorption par Groupama effective au 31 décembre de la même année.

Il en résulte que par l'effet de cette cession, seule Allianz était l'assureur de la société Sud Ouest Construction et de la Sci Fim Immo à la date du sinistre, ce que la Sci Fim Immo ne peut prétendre ignorer dès lors que par conclusions du 13 décembre 2012, Allianz est intervenue aux droits de Groupama lors de l'instance en référé et qu'elle a fait signifier à la Sci Fim Immo l'ordonnance rendue le 18 février 2013, par un acte portant la mention « à la demande de SA Allianz venant aux droits de la Société Gan Eurocourtage ayant son siège [Adresse 5] ». Au demeurant la police spécifiait (p. 34) que Groupama n'était que le gestionnaire de la garantie. Et il est indifférent que l'acompte de 250 000 € ait été payé par la société Gan Eurocourtage par chèque tiré sur la banque Groupama le 20 mars 2012 dès lors qu'à cette date, l'acte de cession du 7 juin 2012 n'était pas encore signé.

En conséquence la SA Groupama sera mise hors de cause, sa demande au titre de l'article 700 1° du code de procédure civile étant examinée en fin d'arrêt.

Sur l'intervention volontaire de la selas egide

Selon les articles 70, 325 et 554 du nouveau code de procédure civile, peuvent intervenir en cause d'appel les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité, dès lors qu'elles y ont intérêt, et que l'intervention se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.

L'appréciation de l'intérêt à agir de l'intervenant volontaire et du lien suffisant qui doit exister entre ses demandes et les prétentions originaires relève du pouvoir souverain des juges du fond.

Le lien peut être considéré comme suffisant lorsque les demandes formées en appel ne font que prolonger et compléter celles de première instance, en tendant aux mêmes fins.

Le 10 septembre 2012, la Sci Fim Immo a fait assigner son assureur afin d'obtenir paiement des indemnités d'assurance dues à la suite de l'incendie dont ses locaux, loués à la société Sud Ouest Construction, ont fait l'objet. Les débats ont notamment porté sur l'attestation du 5 mars 2012 par laquelle Mme [S], gérante de la Sci Fim Immo, s'est désistée 'sur les remboursements de travaux de reconstruction des locaux au profit de la société Sud Ouest Construction ' (sic).

Le 27 décembre 2013, Me [U], mandataire liquidateur de la société Sud Ouest Construction, a intenté une action directe contre Groupama venant aux droits d'Eurocourtage devant le Tribunal de Commerce de Toulouse pour obtenir la condamnation de l'assureur au paiement d'une indemnisation de 1.520.199 € au titre de la perte d'exploitation couverte par la police et a conclu devant le tribunal de commerce au sursis à statuer dans l'attente de l'issue du litige soumis à la cour d'appel portant sur l'affectation des acomptes versés à la société Sud Ouest Construction à la suite de la lettre de désistement de Mme [S].

Les deux assurés ont intenté deux actions distinctes envers l'assureur mais réclament toutes deux, dans chacune des instances intentées devant des juridictions distinctes, le bénéfice des indemnités à percevoir au titre des réparations et reconstructions de l'immeuble assuré par l'intermédiaire de la société Sud Ouest Construction. Il existe donc un risque de contradiction de jugement. L'identité de cette demande caractérise un lien suffisant pour rendre recevable l'intervention volontaire en cause d'appel de la Selas Egide es qualités.

sur la police souscrite

Les conditions générales 40113-1120096 stipulent :

- p. 7, a la qualité d'assuré

1. le souscripteur du présent contrat. S'il s'agit d'une personne morale : la société souscriptrice et ses représentants légaux dans l'exercice de leurs fonctions, ainsi que les personnes substituées dans la direction générale de l'entreprise,

2. les personnes physiques ou morales (y compris leurs représentants légaux) pour le compte desquels le souscripteur déclare agir,

- p 10 :

$gt; a la qualité de souscripteur le preneur d'assurance, personne physique ou morale, qui souscrit le contrat d'assurance,

$gt; est tiers :

* toute personne autre que l'assuré responsable du dommage,

* tout assuré victime d'un dommage corporel, matériel ou immatériel consécutif causé par un autre assuré (les assurés sont considérés comme tiers entre eux) ...

Selon l'avenant du 9 novembre 2010 :

- le souscripteur est la société Sud Ouest Construction et l'objet de l'avenant est une assurance pour compte du propriétaire et du locataire (sic),

- le souscripteur est locataire d'une surface de 500 m², en rez-de-chaussée ou sous-sol,

- sont garantis 'tous dommages sauf' bâtiments et matériels professionnels, frais et pertes après sinistre 30 %, frais supplémentaires d'exploitation, catastrophes naturelles, responsabilité civile exploitation, protection juridique, assistance professionnelle.

Dans les conditions générales, le § 1.1 du chapitre I Dommages aux bâtiments est intitulé 'Evénements couverts tous dommages sauf' et stipule 'Nous garantissons tous les dommages matériels causés aux biens assurés résultant directement de tous événements soudains et imprévisibles, sauf ceux expressément exclus'. L'incendie figure parmi les dommages garantis.

La police garantit en outre le risque 'responsabilité civile exploitation' au § 7.2 du chapitre VII 'Les responsabilités'. L'objet de cette garantie est défini comme étant 'les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant vous incomber en raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers du fait de l'exploitation de l'entreprise et résultant de vos activités et des personnes dont vous répondez (préposés et sous-traitants, de vos animaux domestiques ou de garde et de vos biens meubles ou immeubles'.

Cette police est une assurance de dommage à caractère indemnitaire en ce que sont assurés d'une part les biens immobiliers appartenant à la Sci Fim Immo, d'autre part la dette de responsabilité de la société Sud Ouest Construction dans le cadre de la seule garantie responsabilité civile exploitation.

La Sci Fim Immo, bénéficiaire de la garantie dans le cadre d'une assurance pour compte, a la qualité d'assuré et dispose d'une action directe contractuelle envers son assureur. Elle n'a pas à fonder sa demande sur l'action directe légale édictée par l'article L. 124-3 du code des assurances.

Sur la recevabilité de l'action de la sci fim immo envers la sa allianz

Aux termes de l'article R. 112-1 du code des assurances, les polices d'assurance doivent rappeler les dispositions de la loi concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance et l'inobservation de ces dispositions est sanctionnée par l'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du même code.

L'assureur doit rappeler dans le contrat d'assurance le délai biennal de la prescription, les différents points de départ du délai de prescription et les causes, mêmes ordinaires, d'interruption de la prescription.

Le contrat définit l'assuré et les tiers comme précisé plus haut.

Dans les conditions particulières de la police signées de la société Sud Ouest Construction le 9 novembre 2010, le souscripteur reconnaît avoir eu connaissance des conditions générales 40113 qui lui sont ainsi opposables.

Cependant, la prescription définie au § 4.2 en p. 58 des dites conditions ne répond pas aux exigences légales en ce que si elle rappelle l'existence du délai biennal, elle mentionne ensuite 'bien entendu, ce délai de prescription peut être interrompu par tout moyen de droit commun, notamment citation en justice, ou par lettre recommandée avec accusé de réception (articles L .114-1 et L. 114-2 du code des assurances)'.

Cette mention est insuffisante en ce sens qu'elle ne rappelle pas les différents points de départ de la prescription, toutes les causes d'interruption de celle-ci prévues par l'article L. 114-2 du code des assurances ainsi que les causes ordinaires d'interruption de la prescription. En l'état de cette insuffisance, la prescription est inopposable à la Sci Fim Immo en tant qu'assuré bénéficiaire de la stipulation pour autrui ayant qualité pour exiger l'exécution du contrat d'assurance.

Pour ce qui est de la prescription quinquennale de droit commun, son application se heurte à la règle selon laquelle les règles spéciales dérogent aux règles générales.

Et la substitution de ce délai au délai dérogatoire de deux ans ne peut avoir non plus pour effet de pallier un manquement de l'assureur tel celui qui résulte de la rédaction d'une clause non conforme aux dispositions susvisées.

L'action de la Sci n'est donc pas prescrite, ce qui rend sans objet l'examen des moyens tirés de l'interruption et/ou de la renonciation à prescription.

Sur la qualité de tiers lésé

Selon l'article L. 124-1, dans les assurances de responsabilité, l'assureur n'est tenu que si, à la suite du fait dommageable prévu au contrat, une réclamation amiable ou judiciaire est faite à l'assuré par le tiers lésé.

Il n'existe pas de définition légale ou réglementaire du 'tiers lésé' visé par cet article. Et le cumul des qualités d'assuré et de tiers n'est refusé qu'en cas d'assuré unique, puisque l'assuré ne peut être responsable envers lui-même du dommage qu'il s'est causé.

La police stipule que les assurés sont considérés comme tiers entre eux et cette stipulation a pour objectif de permettre à la personne assurée d'être couverte pour les dommages causés aux tiers par un autre assuré. En effet, en l'absence d'une telle clause nécessaire pour étendre le champ de la garantie offerte, la qualité d'assuré exclut, en principe, la garantie, au titre de la responsabilité civile, des dommages que les assurés se sont causés les uns aux autres.

Si la Sci Fim Immo peut ainsi se prévaloir de la qualité de tiers lésé, elle doit, pour voir prospérer son action, démontrer que la garantie souscrite par son locataire a vocation à s'appliquer.

La société Sud Ouest Construction a souscrit une garantie responsabilité civile exploitation (§ 7.1.3) mais n'a pas souscrit la garantie 7.1.2 'responsabilité du locataire en raison des dommages matériels et immatériels consécutifs résultant d'un événement garanti et causés aux bâtiments loués ou occupés.'

Sa responsabilité ne peut donc être recherchée que dans le cadre de la garantie responsabilité civile exploitation dont l'objet a été rappelé ci-dessus.

Une enquête pénale et une information judiciaire ont été ouvertes sur l'hypothèse d'un incendie volontaire par l'assurée, étayée par la présence de deux foyers de départ de feu et d'un accélérateur de combustion. Cependant, en l'état de l'ordonnance de non- lieu du 4 mai 2016, un acte malveillant à l'origine de l'incendie a été écarté. La cause de l'incendie demeure inexpliquée, l'INPS ayant envisagé un aléa électrique ou la négligence d'un fumeur et l'expert du Gan un départ de feu provenant d'un appareil électrique défectueux.

Il n'est donc pas prouvé que l'incendie est la conséquence de l'exploitation de l'entreprise ou résulte de ses activités et des personnes dont elle répond, de sorte que la garantie responsabilité civile exploitation ne peut être utilement mobilisée.

Allianz soutient ainsi à juste titre d'une part que l'incendie ne trouve pas son origine dans un fait dommageable couvert par la garantie responsabilité civile exploitation de la société Sud Ouest Construction, d'autre part que la responsabilité civile 'occupant' qui n'a pas été souscrite.

sur l'affectation de la provision de 325.000 €

Les parties sont contraires sur les effets de l'attestation du 5 mars 2012, libellée par Mme [S] dans les termes suivants : ' Je soussignée, Mme [S], gérante de la SCI FIM IMMO me désiste sur les remboursements des travaux de reconstruction des locaux sis [Adresse 10], au profit de la Sarl Sud Ouest Construction '.

Allianz et le mandataire liquidateur prétendent que cette attestation entraîne délégation de la Sci au profit de sa locataire de toute indemnité au titre de la perte du bâtiment.

La Sci Fim Immo soutient que les sommes versées (325.000 €) l'ont été à titre d'acompte sur la perte d'exploitation de la société Sud Ouest Construction. Elle se réfère à la chronologie pour établir que les acomptes concernaient les pertes d'exploitation et fait valoir que l'attestation était destinée à accélérer la reconstruction et à valider le marché accepté par son locataire.

Si le tribunal a retenu à tort une communauté de gérance, les deux sociétés étaient cependant liées au-delà du bail commercial, [G] [E] gérant de la société Sud Ouest Construction étant le fils de [W] [E] associé fondateur de la Sci Fim Immo.

La police d'assurance stipule par ailleurs (§ 4.3 p. 58) que dans le cas de l'assurance pour compte, les notifications de l'assureur sont valablement faites au seul souscripteur qui s'engage à remplir et à exécuter toutes les obligations du contrat, tant pour son compte que pour celui des autres assurés. Dès lors, la Sci Fim Immo ne peut reprocher à Gan Eurocourtage de n'avoir pas été avisée des suites données à la déclaration de sinistre, cette obligation incombant à la société Sud Ouest Construction.

Il résulte également des statuts de la Sci Fim Immo que dans les rapports avec les tiers, Mme [S], gérante, engage la société par les actes entrant dans l'objet social (statuts p. 13 et 14 'pouvoirs du gérant').

Il est constant que Gan Eurocourtage a désigné en qualité d'expert le cabinet Polyexpert en la personne de MM. [C] et [P] et l'assuré a désigné TR Expertises en la personne de M. [K], expert agréé APSAD.

L'examen des pièces permet de reconstituer la chronologie suivante.

Par courriels des 18 et 23 janvier 2012, M. [K] (expert d'assuré) demande divers justificatifs à [G] [E].

Le 24 janvier 2012, la société Sud Ouest Construction conclut un bail avec M. [V] pour de nouveaux locaux professionnels.

Un mail de M. [C] du 3 février 2012 (pièce 50 d'Allianz) oppose à Sud Ouest Construction , un refus à une demande d'acompte de 250.000 €, formulée dans un mail du même jour de M. [K] (pièce 11 de la Sci Fim Immo, également reprise en annexe de la pièce20). Les motifs de refus sont les suivants : les chantiers en cours n'ayant pas de raison d'être interrompus, le besoin de financement ne s'explique pas, et il n'a pas été fourni d'état complet de nantissements.

Le 9 février 2012, l'état des nantissements est transmis.

Le 16 février 2012 (pièce 7), Me Esquirol, conseil de la Sci Fim Immo, demande à Gan Eurocourtage (par l'intermédiaire du groupe AMI 3F assurances) 'une provision afin de procéder aux premiers travaux', en faisant état d'un coût prévisionnel de reconstruction de 800.000 €. Il ne s'agit donc pas, à la différence de ce que soutient la Sci Fim Immo (conclusions p. 10/55), d'une demande d'acompte sur l'indemnisation au titre de la perte d'exploitation de la Sarl Sud Ouest Construction .

Le 20 février, la gérante de la Sci adresse un courrier recommandé à Sud Ouest Construction (AR du 24 février 2012) s'étonnant de ce que M. [K] réclame une attestation de paiement au bénéfice de la société Sud Ouest Construction et précise 'cette attestation pourrait être interprétée comme un renoncement (sic) à mes droits'. Mme [S] souligne que :

- la Sci Fim Immo doit obtenir un permis de démolir,

- le site doit être dépollué par un professionnel,

- Sud Ouest Construction n'a pas la capacité et la qualification nécessaires pour les travaux de bardage et de charpente métallique, pour lesquels un devis a été demandé à la société DL Garonne.

Elle ajoute qu'elle reviendra vers la société Sud Ouest Construction pour la réalisation du second oeuvre et que l'attestation remise à M. [K] au bénéfice de la société Sud Ouest Construction est destinée à débloquer l'indemnisation de cette société et lui permettre de reprendre le paiement des loyers dus et ne concernera que les lots dont la société Sud Ouest Construction aura la charge, après validation de l'architecte. Enfin, elle précise 'si les travaux venaient à tarder, je demanderai alors au Gan de m'indemniser directement'.

Le 21 février (pièce74), Mme [S] adresse à M. [K] un mail s'étonnant de l'absence d'indemnisation sur les loyers dus.

Le même jour, [G] [E] signe une quittance pour la somme de 75 000 €.

Le 22 février (pièce 75), le Gan répond au courrier du 16 février adressé à AMI 3F par Me Esquirol, considérant que Me Esquirol est le conseil de la société Sud Ouest Construction alors que ce dernier se présentait bien comme le conseil de la Sci Fim Immo. L'assureur fait état d'une demande de provision de 600.000 € alors que ce courrier du 16 février ne chiffrait pas la demande de provision.

Le 2 mars 2012, une réunion entre experts a lieu mais le compte-rendu n'est pas produit aux débats. Si un courrier du 26 mars 2013 (pièce 59 d'Allianz) adressé par M. [N] de TR Expertises à Me Esquirol mentionne un accord des experts au cours de cette réunion pour le versement d'un acompte sur perte d'exploitation réclamé par mail du 3 février 2012, cette lettre ne suffit à prouver ni une demande relative à la perte d'exploitation, ni le montant réclamé, ni enfin un quelconque accord. Et l'absence d'accord sur une quelconque provision est confirmée tant par la teneur du mail de M. [C] du 3 février (pièce 50 susvisée refusant l'acompte réclamé) que par le courrier adressé le 25 mai 2012 par le Gan à Me [J], huissier de justice, indiquant 'nous vous informons que le montant de l'indemnité due à notre assuré n'est pas encore définitivement arrêté'.

Le 5 mars, Mme [S] rédige l'attestation litigieuse.

Le 14 mars 2012, [B] [N], assistante de gestion APSAD, adresse à M. [C] l'attestation de désistement et le restant dû sur le prêt en cours 'afin de pouvoir débloquer la demande d'acompte urgente pour notre client' sans préciser de quelle assurée il s'agit.

Le 20 mars 2012, le Gan adresse à AMI3F courtier en assurance un chèque de 250.000 € au nom de la société Sud Ouest Construction .

Le 27 mars 2012, la société DL Garonne établit un devis de 284.267,67 €.

[G] [E] signe une deuxième quittance d'acompte (non datée) pour la somme de 250 000 € et le virement au crédit de la société Sud Ouest Construction est en date du 28 mars 2012.

Enfin, le 3 avril 2012, l'expert de Gan Eurocourtage a demandé à TR Expertises, la communication des documents suivants :

- l'organigramme du groupe, avec liste des établissements, bureaux de vente, etc '

- les statuts de la Société Sud Ouest Construction,

- la balance générale provisoire ou bilan définitif de l'exercice clos le 31décembre 2011,

- le grand livre provisoire ou définitif de l'exercice clos le 31 décembre 2011,

- les déclarations de TVA mensuelles ou trimestrielles de l'exercice 2011 ' journal des achats de l'exercice 2011 ' journal des ventes de l'exercice 2011,

- l'inventaire physique des stocks au 31 décembre 2011 ' état des immobilisations au 31 décembre 2011,

- la balance générale provisoire arrêtée au jour du sinistre ' grand livre provisoire arrêté au jour du sinistre ' historique des comptes fournisseurs ' historique des comptes clients,

- l'état des pertes bâtiment dans un délai d'un mois,

- pour la partie « perte d'exploitation », la liste des chantiers et contrats en cours, avec leur état d'avancement de reconstitution.

Il résulte de cette chronologie que s'agissant de Sud Ouest Construction :

- aucune pièce de la locataire réclamant une provision de 600.000 € n'est versée aux débats,

- la provision de 250.000 € réclamée par la société Sud Ouest Construction a été refusée par M. [C] le 3 février 2012,

- si l'état des nantissements a été produit, Sud Ouest Construction n'a pas justifié postérieurement son besoin de financement urgent ni produit les documents réclamés.

S'agissant de la Sci Fim Immo, une provision pour premiers travaux a été réclamée dès le 16 février. Et le 20 février, Mme [S] signe un courrier démontrant d'une part qu'elle a conscience de ce que l'attestation réclamée pourrait s'analyser en une renonciation à ses droits mais acceptant in fine de la signer pour débloquer l'indemnisation de Sud Ouest Construction afin de lui permettre de reprendre le paiement des loyers dus et sous la précision que l'attestation ne concernera que les lots dont la société Sud Ouest Construction aura la charge (lots de second oeuvre selon le début du courrier). La teneur de cette lettre démontre que par cette délégation d'indemnité, Mme [S] souhaitait non seulement percevoir un arriéré de loyers mais aussi affecter une partie de la somme au paiement, par anticipation, des travaux de second oeuvre qu'elle entendait confier à la société Sud Ouest Construction . Quant à la mention par laquelle elle ajoute 'si les travaux venaient à tarder, je demanderai alors au Gan de m'indemniser directement', elle est inopérante dès lors que le Gan n'a pas été avisé de ce courrier et que son seul interlocuteur au titre du sinistre était Sud Ouest Construction par application de la clause de la police (§ 4.3 p. 58 susvisé) prévoyant que le seul souscripteur s'engage à remplir et à exécuter toutes les obligations du contrat, tant pour son compte que pour celui des autres assurés.

Et c'est à la suite de l'attestation du 5 mars et de l'établissement du devis de DL Garonne le 27 mars que le virement de 250.000 € sera effectué sur le compte de la société Sud Ouest Construction. Quant à l'acompte de 75.000 € objet de la quittance du 21 février 2012, il est versé le 29 février à la suite de la demande de provision formulée par Me Esquirol le 16 février pour le compte de la Sci Fim Immo.

Quant à l'attestation rédigée par Mme [S] le 22 novembre 2012 par laquelle elle précise qu'elle n'a entendu le 5 mars 2012 qu'accélérer le processus de versement d'une provision à valoir sur la perte d'exploitation de la société Sud Ouest Construction, elle ne réfute pas utilement cette 1ère attestation, en ce que, d'une part, elle contredit les éléments factuels ci-dessus relevés et, d'autre part, elle est postérieure à la naissance du litige (assignation en référé du 17 septembre 2012) et à la liquidation judiciaire de Sud Ouest Construction.

Il sera en conséquence jugé que la somme de 325.000 € n'était pas affectée à une provision sur la perte d'exploitation subie par Sud Ouest Construction mais à une avance sur travaux de reconstruction.

Sur l'attribution des indemnités au titre de la reconstruction

La Selas Egide en sa qualité de mandataire liquidateur de Sud Ouest Construction soutient qu'au terme de l'attestation du 5 mars 2012 toutes indemnisations au titre de la reconstruction des locaux détruits doivent revenir au locataire.

Comme indiqué ci-dessus, cette attestation doit être interprétée à la lumière du courrier du 20 février, de sorte qu'en dépit de la généralité des termes employés, elle ne concerne que les travaux de second oeuvre, Sud Ouest Construction n'étant pas considérée par la Sci Fim Immo comme suffisamment compétente pour la réalisation des travaux de gros-oeuvre lesquels avaient fait l'objet d'une demande de devis à la société DL Garonne.

L'attestation doit également s'interpréter au regard des éléments connus de sa rédactrice le 5 mars, c'est à dire de son ignorance de la situation financière de Sud Ouest Construction qui se traduira par sa mise en redressement judiciaire le 10 mai 2012, puis à sa liquidation judiciaire le 21 juin 2012 de sorte qu'à ce jour, Sud Ouest Construction, qui ne devait réaliser qu'une partie des travaux de reconstruction, n'est plus en mesure d'effectuer la contrepartie attendue et dont elle a été réglée par anticipation.

En conséquence, le complément d'indemnité que la Sci Fim Immo peut être amené à percevoir et qui sera examiné plus bas ne pourra revenir qu'au propriétaire des murs et la Selas Egide, mandataire liquidateur de Sud Ouest Construction, sera déboutée de sa demande.

Sur l'indemnité due en application de la police

S'agissant de l'indemnisation il convient de se référer au § 4.1.2 « valeur économique des bâtiments » (p. 48) et à l'article 4.3.1 « indemnisation en valeur à neuf » (p.49), la Sci Fim Immo ne démontrant pas en quoi la clause de l'article 4.1.3 des conditions générales concernant « le bâtiment construit sur le terrain d'autrui » serait applicable.

En cas de reconstruction, le montant des dommages est estimé à la valeur de reconstruction vétusté déduite à la condition que la reconstruction du bâtiment soit effectuée dans un délai de deux ans à compter de la date du sinistre ' Le montant de la différence entre l'indemnité obtenue à partir de la valeur de reconstruction, vétusté déduite, et l'indemnité obtenue à partir de la valeur économique n'est versée qu'une fois achevée la reconstruction (ou les réparations) sur présentation de mémoires ou de factures (police § 4.1.2).

L'estimation des dommages aux bâtiments est la suivante : coût de remise en état à l'identique, à neuf, des bâtiments et aménagements endommagés, dans la limite de leur valeur de reconstruction, vétusté déduite, majorée de 33 % de leur valeur de reconstruction à neuf, sans pouvoir excéder cette dernière.

L'article 4.3.1« indemnisation en valeur à neuf » stipule que le supplément d'indemnité pour valeur à neuf est versé au fur et à mesure de la reconstruction des bâtiments et aménagements sur production de mémoires ou de factures. Le supplément d'indemnité n'est dû que si la reconstruction des bâtiments ou aménagements est effectuée, sauf cas de force majeure, dans un délai de deux ans à partir de la date du sinistre et sur l'emplacement des bâtiments sinistrés et sans modification importante de leur destination finale (p. 49 des conditions générales).

Quant aux autres chefs de préjudices, il sont indemnissé dans les termes du chapitre IV p. 20 au titre des 'frais et pertes' après sinistres consécutifs aux dommages matériels garantis et justifiés au moyen de factures :

- perte de loyers et perte d'usage des locaux pendant 24 mois,

- frais de réparations des détériorations immobilières

- frais de démolition et de déblai,

- frais de gardiennage et de clôture provisoire

- frais de reconstitution des informations (chapitre I titre II)

- tous frais et pertes sauf ceux expressément exclus, directement consécutifs à des dommages matériels garantis.

La Sci Fim Immo sollicite la condamnation solidaire des sociétés Allianz et Groupama venant aux droits de la société Gan Eurocourtage à lui verser la somme globale de 901.320 € dont 186.400 € de perte locative d'avril 2013 à février 2017. Elle réclame en conséquence la somme de 714.920 € au titre des autres postes de préjudices.

Allianz fait valoir que la somme à verser ne peut excéder 100.407 €, compte tenu de l'existence d'une indemnité différée sur justificatif des travaux de reconstruction, des mesures conservatoires à hauteur de 2.385 €, de l'indemnisation de 52.431 € due à Sud Ouest Construction au titre du contenu objet d'une provision de 14.796,91 € et de diverses oppositions des créanciers de cette dernière pour 56.422,19 €.

Allianz avait proposé à la Sci Fim Immo de signer une lettre d'acceptation pour une somme de 662.489 € dont 229.379 € en différé, soit 433.110 € par versement immédiat mais cette offre, refusée, est désormais caduque.

La demande de la Sci Fim Immo ne peut prospérer à l'encontre de Groupama, mise hors de cause.

Ne peut pas plus être accueillie la demande de la Sci Fim Immo sur la base d'une indemnité de 715.220 €. En effet, ce montant résulte d'un "calcul des indemnités" du Gan (pièces 10, 19 et 59 de l'appelante qui correspondent à la pièce n° 10 produite par l'assureur devant le juge de la mise en état), se présentant de la manière suivante :

Indemnité immédiate

bâtiment vétusté déduite425.407 €

contenu (plafond de garantie) 52.431 €

frais et pertes divers-

mesures conservatoires 2.385 €

En immédiat480.223 €

Indemnité différée

part de vétusté 72.331 €

frais et pertes divers165.051 €

à déduire 2.385 €

reste162.666 €

En différé234.997 €

Indemnité totale715.220 €

(la franchise de 300 € n'est pas déduite).

Allianz ne détaille pas le montant de l'offre de 662.489 € formulée en 2012.

Les montants figurant dans le calcul des indemnités ne sont pas en tant que tels contestés, non plus que le mode de répartition entre indemnités, immédiate et différée. La Cour les retiendra comme base de calcul.

L'indemnité de 715.220 € se réfère à un poste 'frais et pertes divers', limité à 30 % de 498 584 + 52.431 soit 165.051 €, et énumérant les préjudices à indemniser comme suit :

- démolition - déblai35.000 €

- mesures conservatoires

(frais de dépollution)2.385 €

- honoraires architectes 45.283 €

(8,5 % de 466 847 + 35.000)

- honoraires C.S.P.S, B.E.T, B.C9.000 €

- perte d'usage 14 mois à 4.000 56.000 €

- perte de loyers 14 mois à 401,285.618 €

- honoraires expert d'assuré

(10 % de 466.847 + 52.341) 55.017 €

Total208.303 €

Ce poste ressort du "tableau récapitulatif des dommages" émanant de TR Expertises, transmis en pièce jointe au mail de M. [K] du 3 février 2012 (pièces 20 et pièces 8 de l'appelant qui sont aussi la pièce 46 de l'assureur). Et il intègre les préjudices des deux assurées en ce qui concerne les pertes (locatives et d'usage) et les honoraires d'expert d'assuré. En conséquence, la Sci Fim Immo ne peut revendiquer la somme de 715.220 € à son seul profit et il convient de déterminer quel est son propre préjudice.

Le plafond contractuel de 165.051 € pour 'frais et pertes' n'est pas mis en cause dans son montant et doit être réparti entre les co-assurés en fonction de leurs préjudices respectifs.

Le calcul ci-dessus détaillé fait suite à un tableau récapitulatif des dommages au bâtiment qui fixe le coût de reconstruction du bâtiment à 497.738 €, la vétusté à 72.331 € et le plafond d'indemnisation du contenu à 52.431 €. Il sera considéré que le contenu constitue le préjudice de Sud Ouest Construction.

Les honoraires d'expert d'assuré sont calculés sur la base de 10 % des préjudices respectifs des deux assurés soit 49.773 € (ou 10 % de la reconstruction seule) pour la Sci et 5.243 € (ou 10 % de 52.431 €) pour Sud Ouest Construction .

Y figurent également une perte d'usage (5.618 €) et une perte de loyers (56.000 €), calculées sur 14 mois. Bien que non explicité dans les écritures, ce délai doit être considéré comme le délai de reconstruction du bâtiment admis par les parties.

La Sci Fim Immo sollicite désormais une indemnité de 186.400 € au titre d'une perte locative de 4.000 € par mois pendant 46 mois, d'avril 2013 à février 2017. Allianz réplique que la perte locative résulte, pour sa majeure partie, de la liquidation judiciaire de son locataire le 21 juin 2012 et du fait que la société Sud Ouest Construction n'a pas utilisé les fonds que la société Fim Immo lui avait délégués pour débuter la reconstruction de l'immeuble. Subsidiairement, elle demande à voir limiter la perte à 401,28 € par mois de fondant sur la mention 'perte de loyers 14 mois à 401,28".

S'agissant du loyer de 401,28 €, il s'évince d'une mention figurant sur un document intitulé 'Récapitulation générale' en annexe à la pièce 11 de l'appelante, qu'il s'agirait du loyer d'une Sarl Coach Ass, tiers à la procédure. Aucune des parties n'expliquant en quoi cette société aurait un lien avec le litige, ce poste de préjudice ne sera pas retenu.

Demeure la perte de 56.000 € identifiée comme une perte d'usage. La garantie 'perte d'usage', en droit des assurances, vise à réparer le préjudice subi par l'occupant du fait de l'impossibilité pour lui d'utiliser temporairement tout ou partie de ses locaux. Or, le montant de 56.000 € correspond au préjudice du bailleur qui ne peut plus percevoir le loyer mensuel de 4.000 € du fait de la destruction du bâtiment. Cette perte d'usage sera requalifiée en perte locative.

Sur la durée d'indemnisation, l'incendie a eu lieu le 8 janvier 2012 et la liquidation judiciaire de Sud Ouest Construction est intervenue le 21 juin 2012. Une possibilité de redressement avec poursuite du bail commercial a été envisagée en mai 2012 par l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.

Il ressort cependant de l'attestation de Mme [S] du 21 novembre 2012, des mentions du K bis de Sud Ouest Construction, du jugement de liquidation judiciaire et de l'ordonnance de non lieu que :

- Sud Ouest Construction avait un passif de 1.513.665 € au 31 décembre 2010,

- la date de cessation des paiements a été fixée au 3 octobre 2011,

- il existait un arriéré de loyers,

- une expertise financière de Sud Ouest Construction a mis en évidence que :

* les comptes annuels n'étaient plus déposés depuis 2009,

* il existait des défaillances majeures dans la gestion de l'entreprise (défauts de trésorerie, création d'une trésorerie artificielle par recours au crédit fournisseur en faisant de la rétention de TVA, dettes envers les sous-traitants).

Ces faits contredisent formellement les affirmations du gérant de la société Sud Ouest Construction lors du dépôt de plainte, mentionnant un chiffre d'affaires supérieur à 8 000 000 € en 2011 et se targuant de l'obtention d'un prêt de consolidation de 425.000 €.

Ainsi s'il est manifeste que la perte des locaux commerciaux, du matériel, des archives et documents administratifs et comptables n'ont pu favoriser le redressement de Sud Ouest Construction, la rapidité avec laquelle le liquidation judiciaire a été prononcée six semaines après l'ouverture de la procédure collective démontre que la problématique financière antérieure a été déterminante dans la faillite du locataire commercial.

En conséquence, la perte de loyers de la Sci sera limitée non à 14 mois mais à 6 mois jusqu'au 21 juin, date de la liquidation judiciaire sans poursuite exceptionnelle d'activité.

Il résulte de ces éléments qu'en ce qui concerne la société Sud Ouest Construction, le poste 'frais et pertes divers' est de 5.243 € au titre des honoraires expert sur contenu et que son préjudice global s'élève à 57.674 € (ou 52.431 +5.243).

Les mesures conservatoires seront évaluées à 2 852,62 € et non 2 385 €, ayant été indemnisées pour ce montant à la suite d'une facture émise par la société 3ID le 23 février 2012.

Le poste 'frais et pertes' de la Sci Fim Immo est donc le suivant :

- démolition - déblai 35.000 €

- mesures conservatoires

(frais de dépollution)2.852,62 €

- honoraires architectes 45.283 €

(8,5 % de la reconstruction/démolition)

- honoraires C.S.P.S, B.E.T, B.C 9.000 €

- perte locative 24.000 €

- honoraires expert d'assuré 49.773 €

soit 165.908,62 €.

Les pertes et frais divers des deux assurées s'élèvent donc à 171.151,62 € (ou 5.243 + 165.908,62), montant supérieur au plafond (165.051 €) lequel sera réparti au prorata des préjudices respectifs des assurées soit 160.826,23 € pour la Sci et 4.224,77 € pour Sud Ouest Construction.

En définitive, l'indemnité devant revenir à la Sci Fim Immo s'établit de la manière suivante :

Indemnité immédiate

bâtiment vétusté déduite 425.407 €

frais et pertes divers -

mesures conservatoires 2.852,62 €

En immédiat428.259,62 €

Indemnité différée

part de vétusté 72.331 €

frais et pertes divers160.826,23 €

à déduire 2.852,62 €

reste157.973,61 €

En différé230.304,61 €

Indemnité totale658.564,23 €

Allianz ne peut en effet prétendre voir déduire de l'indemnité due à la Sci Fim Immo la provision allouée à Sud Ouest Construction sur la perte du contenu (14.796,51 €) ni les sommes objets de saisies ou oppositions à l'encontre de la seule locataire, chiffrées à 56.422,91 €.

Enfin, le 28 août 2012, le solde du prêt contracté par la Sci Fim Immo auprès de la Banque Populaire Occitane avait fait l'objet d'une évaluation en cas de remboursement anticipé à hauteur de 14.800,33 €. Le 10 février 2017, la Banque Populaire Occitane a attesté ne plus avoir de prêt immobilier en cours au nom de la Sci Fim Immo de sorte qu'aucune somme ne peut non plus être déduite au titre du solde d'un crédit immobilier.

De l'indemnité immédiate (428.259,62 €) doivent être soustraites les seules sommes de 2.852,32 € (frais de dépollution) et les deux provisions de 325.000 € déléguées à Sud Ouest Construction. En conséquence, il reste dû à la Sci Fim Immo la somme de 100.407 €.

Les intérêts seront dus sur cette somme à compter du présent arrêt et capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 nouveau (1154 ancien) du code civil.

Et l'indemnité différée sera fixée à 230.304,61 € et réglée une fois achevée la reconstruction (ou les réparations) et sur présentation de mémoires ou de factures.

Sur les autres demandes

Gan Eurocourtage a versé une somme de 327.852,32 € à titre de provision à l'assurée désigné par la police moins de 3 mois après l'incendie et elle a présenté une offre d'indemnisation dès le mois d'août 2012. Ayant de surcroît pris la précaution de solliciter une délégation d'indemnité de la Sci Fim Immo, aucune faute ne peut lui être reprochée. La non affectation de cette somme à son objet n'est pas de son fait et en l'absence de faute, aucune demande en dommages et intérêts ne peut prospérer à son encontre.

L'équité ne commande pas de faire droit aux demandes fondées sur l'article 700 1° du code de procédure civile, sauf au profit de Groupama auquel la Sci Fim Immo devra verser une somme complémentaire de 1.000 €.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la Sci Fim Immo aux dépens en ce compris les frais de l'expertise judiciaire (mention qui procède d'une erreur matérielle).

Les dépens de 1ère instance et d'appel seront supportés par Allianz qui succombe principalement.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare recevable l'intervention volontaire en cause d'appel de la Selas Egide prose en la personne de Me [D], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Sud Ouest Construction.

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- dit qu'à effet du 1er janvier 2012, la société Allianz était titulaire des droits et obligations du contrat d'assurance souscrit initialement auprès de la SA Gan Eurocourtage,

- déclaré recevable l'action de la Sci Fim Immo envers la société Allianz,

- débouté la Sci Fim Immo de ses demandes en dommages et intérêts au titre de la résistance abusive,

- condamné la Sci Fim Immo à payer à Groupama la somme de 800 € au titre de l'article 700 1° du code de procédure civile.

Infirme le jugement pour le surplus et y ajoutant,

Met hors de cause la S.A Groupama,

Condamne la Sci Fim Immo à lui verser la somme de 1.000 € au titre des frais irrépétibles en cause d'appel.

Dit que la somme de 325.000 € n'était pas une provision perte d'exploitation mais une avance sur les travaux de reconstruction et que cette somme doit être déduite de l'indemnité allouée au titre des dits travaux.

Déboute la Selas Egide, prise en la personne de Me [D] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Sud Ouest Construction, de sa demande d'attribution des indemnisations dues par la SA Allianz au titre de la reconstruction du bâtiment.

Fixe le montant des indemnités dues par la SA Allianz à la Sci Fim Immo en application de la police d'assurance à la somme de 658.564,23 € se décomposant en :

- indemnité immédiate428.259,62 €

- indemnité différée230.304,61 €

Après déduction des provisions versées, condamne Allianz à verser à la Sci Fim Immo la somme de 100.407 € au titre du solde de l'indemnité immédiate.

Dit que les intérêts seront dus sur cette somme à compter du présent arrêt et capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 nouveau (1154 ancien) du code civil.

Condamne Allianz à payer à la Sci Fim Immo une somme de 230.304,61 € au titre de l'indemnité différée à régler une fois achevée la reconstruction (ou les réparations) et sur présentation de mémoires ou de factures.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 1° du code de procédure civile au profit des parties autres que la S.A Groupama susvisée.

Condamne Allianz au paiement des dépens de 1ère instance et d'appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

M. BUTELC. BENEIX-BACHER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17/02881
Date de la décision : 27/06/2019

Références :

Cour d'appel de Toulouse 30, arrêt n°17/02881 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-27;17.02881 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award