Grosses délivrées
RÉPUBLIQUE FRANOEAISE
aux parties le :
AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
1ère Chambre - Section H
AUDIENCE SOLENNELLE
ARRÊT DU 10 MAI 2005
(no , 4 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :
2004/20748 Décision déférée à la Cour : saisine sur déclaration de renvoi après cassation partielle de la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation du 13 juillet 2004, d'un arrêt de la Cour d'appel de PARIS, 1ère chambre section H du 14 janvier 2003, prononcé sur recours contre la décision no95-D-76 du conseil de la concurrence en date du 29 novembre 1995 ; DEMANDEUR AU RECOURS : - la société QUILLE prise en la personne de son directeur général dont le siège social est : 4 Rrue Saint Eloi - BP 1048 - 76172 ROUEN CEDEX assistée de Maître Cyril DUTEIL, du cabinet GRIFFITHS DUTEIL associés, avocat au barreau de LISIEUX 1, rue des Mathurins - BP 44152 - 14104 LISIEUX CEDEX EN PRÉSENCE DE : - M. LE MINISTRE DE X..., DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE 59 boulevard Vincent Auriol 75703 PARIS CEDEX 13 représenté lors des débats par M. Michel Y..., muni d'un pouvoir régulier COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 Mars 2005, en audience publique, devant la Cour composée de :
- Mme RIFFAULT-SILK, Présidente
- M. REMENIERAS, Conseiller
- M. MAUNAND, Conseiller
- Mme Z..., Conseillère
- M. FRANCHI, Conseiller
qui en ont délibéré Greffier, lors des débats : M. Benoît TRUET-CALLU MINISTERE A... : représenté lors des débats par M. WOIRHAYE, avocat général, qui a fait connaître son avis. ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par Mme RIFFAULT-SILK, Président
- signé par Mme RIFFAULT-SILK, présidente et par M. TRUET-CALLU, greffier présent lors du prononcé. * * *
Le 23 novembre et le 26 juillet 1991, le ministre de l'économie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques d'ententes constatées à l'occasion de marchés de grands travaux dans le secteur du génie civil.
Il était reproché à 53 entreprises relevant du secteur du BTP de s'être concertées, préalablement au dépôt de leurs offres, lors des procédures de mise en concurrence initiées pour l'édification de différents ouvrages d'art (ponts de Normandie, de Rochefort, de Gennevilliers et de Plougastel) et pour la construction des lignes du TGV Nord, de son interconnexion ainsi que du TGV Rhône-Alpes, la société Quille étant elle-même mise en cause à raison de son implication, comme filiale de la société Bouygues, dans la concertation générale concernant la construction des ponts.
Par décision no 95-D-96 du 29 novembre 1995, le Conseil a infligé des sanctions pécuniaires d'un montant compris entre 5.200 francs et 148.700.000 francs à 31 entreprises et notamment une sanction de 9.000.000 francs (1.372.041,10 euros) à la société Quille. Cette dernière et vingt trois autres des entreprises sanctionnées ont introduit un recours contre cette décision.
Par arrêt du 6 mai 1997 suivi d'un arrêt rectificatif du 27 mai 1997, la 1ère chambre H de cette cour a notamment -maintenu les sanctions
prononcées par le Conseil pour les sociétés Bouygues, Campenon-Bernard, Fougerolle, Nord-France Entreprise, Quille, Quillery et Spie-Citra, -après avoir annulé les sanctions prononcées par le Conseil, condamné les sociétés Bec Frères, Entreprise Chagnaud, Chantiers Modernes, Entreprise Industrielle, Guintoli, Sogea, Entreprise Jean Spada et Spie-Batignolles à des sanctions comprises entre 100.000 francs et 17.120.000 francs et dit n'y avoir lieu à sanction contre la société Auxiliaire d'Entreprise, -réformant pour le surplus la décision attaquée, fixé les sanctions pécuniaires infligées aux sociétés Demathieu et Bard, Deschiron, DTP Terrassement, Gagneraud Père et Fils, Muller TP, Pertuy, Prigent et Valerian à des montants compris entre 200.000 francs et 750.000 francs.
Sur le pourvoi formé par 15 des entreprises sanctionnées, la chambre commerciale de la Cour de Cassation, par arrêt du 5 octobre 1999, vu la violation des dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme résultant de la présence du rapporteur au délibéré du Conseil, a cassé et annulé l'arrêt en toutes ses dispositions concernant les quinze entreprises mentionnées dans son dispositif et renvoyé les parties devant la même cour autrement composée.
Saisie par 13 de ces sociétés, la cour de renvoi a, par arrêt du 14 janvier 2003, -déclaré recevables les recours des sociétés requérantes et notamment de la société Quille, -rejeté le moyen de prescription et les moyens de nullités soulevés par les requérantes, -annulé la décision du Conseil en ce qui concerne les treize entreprises requérantes, -statué à nouveau à leur égard et prononcé à leur encontre les sanctions suivantes :
-la société Bouygues : 22.500.000 euros,
-la société Vinci Construction anciennement CampenonBernard :
4.700.000 euros,
-la société Eiffage TP : 3.400.000 euros,
-la société Fougerolle : 2.400.000 euros,
-la société Quille : 1.200.000 euros,
-la société Sogea : 650.000 euros,
-la société Bec Frères : 90.000 euros
-la société DTP Terrassement : 80.000 euros,
-la société Chagnaud : 75.000 euros,
-la société Demathieu et Bard : 75.000 euros
-la société Deschiron : 60.000 euros,
-la société Entreprise Jean Spada : 60.000 euros,
-la société Muller TP : 60.000 euros, -rejeté tous autres demandes et moyens.
Sur le pourvoi formé contre cet arrêt par 10 des entreprises sanctionnées, la chambre commerciale de la Cour de Cassation, par arrêt du 13 juillet 2004, a cassé et annulé cet arrêt pour manque de base légale, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Quille à une sanction pécuniaire de 1.200.000 euros et a renvoyé les parties devant la même cour autrement composée.
LA COUR,
Vu la déclaration enregistrée au greffe le 10 novembre 2004, par laquelle la société Quille a saisi la Cour aux fins d'annulation de la décision no 95-D-76 rendue le 29 novembre 1995 par le Conseil de la concurrence, laquelle décision lui a infligé une sanction pécuniaire de 1.372.041 euros (9.000.000 francs) et a mis les dépens à sa charge et à celle des autres requérants , faisant en outre observer que l'arrêt de la Cour de Cassation ne lui a pas été notifié ;
Vu l'exposé des moyens produit le 10 novembre 2004 à l'appui de la saisine, soutenu par un mémoire en réponse déposé le 4 février 2005,
par lesquels la société Quille demande à la Cour de -constater que la décision no 95-D-76 du Conseil est définitive à son égard en ce qu'elle l'a mise hors de cause d'avoir participé à une entente anticoncurrentielle pour l'attribution du marché du pont de Normandie, -prononcer l'annulation de cette décision en ce qu'il a considéré qu'elle s'était livrée à des pratiques anticoncurrentielles prohibées en participant à la concertation ou aux échanges d'informations constatés entre neuf entreprises, dont les principales du secteur, en vue de répartir entre elles les travaux de construction des ponts, -ordonner en conséquence les mesures de remise en état et dire que le Trésor A... sera tenu à restitution et paiement à son profit avec intérêts au taux légal à compter des dates de règlement, capitalisés en application de l'article 1154 du Cde civil, de la somme de 1.372.041 euros ainsi que du montant des coûts des publications décidées par le Conseil dans la décision attaquée ;
Vu les observations écrites déposées par le ministre chargé de l'économie demandant à la cour de rejeter le recours tendant à l'annulation ou à la réformation de la décision du Conseil et, usant de son pouvoir d'évocation, de statuer de nouveau sur cette affaire sur le cas de la requérante en prenant en compte son implication dans l'élaboration des accords généraux négociés en amont des appels d'offres ;
Vu la lettre du 7 janvier 2005 par laquelle le Conseil a précisé qu'il n'entendait pas user de la faculté de présenter des observations écrites ;
Après avoir, à l'audience publique du 1er mars 2005, entendu le conseil de la requérante,
Ou' en leurs observations orales le ministre chargé de l'économie et le ministère public, ce dernier constatant que les moyens développés
par la requérante s'avèrent inopérants en ce qu'ils tendent à l'annulation d'une décision inexistante puisque déjà annulée définitivement, et concluant au renvoi de l'affaire au Conseil pour un nouvel examen ;
La requérante ayant eu la parole en dernier,
Vu la note en délibéré déposée le 4 avril 2005 par la société Quille, concluant à ce qu'il soit statué en droit et en fait par la Cour sur cette affaire ;
Vu la note en délibéré déposée le 4 avril 2005 par le ministre chargé de l'économie, demandant à la Cour d'user de son pouvoir d'évocation et de se prononcer sur la base des éléments dont elle dispose, sur la participation de la requérante à l'infraction ;
Considérant qu'il ressort des dispositions des articles 1032 et 1033 du nouveau Code de procédure civile que la juridiction de renvoi après cassation est saisie par déclaration à son secrétariat contenant les mentions exigées pour l'acte introductif devant elle ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 19 octobre 1987 relatif aux recours exercés devant la cour d'appel de Paris contre les décisions du Conseil de la concurrence, la déclaration de recours doit préciser, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, l'objet du recours ;
Considérant que la déclaration de saisine du 10 novembre 2004 se borne à demander l'annulation de la décision no 95-D-76 rendue le 29 novembre 1995 par le Conseil de la concurrence, alors que par l'effet de l'annulation déjà prononcée par la cour dans son arrêt du 14 janvier 2003 non critiqué sur ce point par la Cour de Cassation dans son arrêt du 13 juillet 2004, la décision du Conseil, définitivement annulée, est inexistante ;
Qu'il en résulte que la déclaration de saisine est irrecevable, comme ne contenant pas l'objet du recours, étant observé qu'à défaut de
signification de l'arrêt de la Cour de cassation, l'instance portée devant la cour de renvoi est soumise au délai prévu par l'article 386 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Déclare la saisine irrecevable,
Condamne la société Quille aux dépens. LE GREFFIER,
LA PRÉSIDENTE,