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03/07/2003 | FRANCE | N°2000/02272

France | France, Cour d'appel de Paris, 03 juillet 2003, 2000/02272


COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section B ARRET DU 3 JUILLET 2003 (N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/02272 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 25/10/1999 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 1/3è Ch. RG n :

1998/00749 Date ordonnance de clôture : 16 Mai 2003 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION APPELANTS :

Monsieur X... Y... tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de son fils mineur Simon X... né le 24-10-1987 demeurant 3 rue Léonard de Vinci 75116 PARIS rep

résenté par la SCP BOLLING-DURAND-LALLEMENT, avoué assisté de Maître GUEZ ...

COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section B ARRET DU 3 JUILLET 2003 (N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/02272 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 25/10/1999 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 1/3è Ch. RG n :

1998/00749 Date ordonnance de clôture : 16 Mai 2003 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION APPELANTS :

Monsieur X... Y... tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de son fils mineur Simon X... né le 24-10-1987 demeurant 3 rue Léonard de Vinci 75116 PARIS représenté par la SCP BOLLING-DURAND-LALLEMENT, avoué assisté de Maître GUEZ Linda, avocat au Barreau de Paris, C651 Madame Z... A... épouse X... tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de son fils mineur Simon X... né le 24-10-1987 demeurant 45 rue Thiers 92600 BOULOGNE représentée par Maître BAUFUME, avoué assistée de Maître VAISSE, avocat au Barreau de Paris, R038 INTERVENANT VOLONTAIRE et comme tel APPELANT : Madame B... C... es qualités d'administrateur ad hoc de l'enfant mineur Simon X... né le 24-10-1987 Intervenante volontaire sur les suites et fins de l'appel interjeté par les époux X... en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur Simon X... ... par la SCP GOIRAND, avoué assisté de Maître SERRE, avocat au Barreau de Paris, E512 INTIMES : CENTRE MEDICAL MIROMESNIL prise en la personne de ses représentants légaux sis 6 Avenue de Messine - 75008 PARIS et aussi 63 rue de Mirosmenil -75008 PARIS et dont le siège social est 66 rue de la Chaussée d'Antin - 75009 PARIS représenté par la SCP GIBOU-PIGNOT-GRAPPOTTE-BENETREAU, avoué assisté de Maître PAGANI, avocat au Barreau de Paris, P184 SCP ELKAM Madame RAZY VEUVE D... E... demeurant 8 rue des Morillons 75015 PARIS Mlle D...

France-sophie Marion demeurant 8 rue des Morillons 75015 PARIS Mlle D... Elodie F... ... par la SCP BOURDAIS-VIRENQUE, avoué assistées de Maître CHASTANT MORAND, avocat au Barreau de Paris, P72 SCPA GARAUD SALOME CHASTANT BERRUX C.P.A.M. DES HAUTS DE SEINE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 113 rue des Trois Fontanots 92000 NANTERRE représentée par Maître MELUN, avoué COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré Président : Monsieur ANQUETIL G... :

Madame BRONGNIART G... : Monsieur DIXIMIER H... : lors des débats et du prononcé de l'arrêt H... : Madame I... MINISTERE J... : à qui le dossier a été préalablement communiqué : représenté aux débats par Madame K..., Substitut général, qui a présenté des observations orales. DEBATS : A l'audience publique du 23 mai 2003 ARRET : prononcé publiquement par Monsieur ANQUETIL, Président, qui a signé la minute avec Madame I..., H.... Par jugement contradictoire rendu le 25 octobre 1999, le Tribunal de Grande Instance de PARIS a débouté les époux X... de leurs demandes formées tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de leur fils Simon X... né le 24 octobre 1987, à l'encontre du CENTRE MÉDICAL MIROMESNIL et du Docteur Etienne D..., aux obligations duquel ils avaient appelé Madame E... L... veuve D..., Mademoiselle Elodie D... et Mademoiselle France-Sophie D... en leur qualité d'héritières d'Etienne D... décédé en cours de procédure le 29 septembre 1998; Il a dit n'y avoir lieu à appliquer l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; Les premiers juges avaient été saisis dans les circonstances suivantes:

A... X..., née Z..., avait débuté une grossesse en février 1987 qui avait été suivie jusqu'au 2 juin 1987 par le Docteur D... au CENTRE MEDICAL

MIROMESNIL; elle avait été amenée à effectuer des sérodiagnostics de la rubéole, n'étant pas immunisée contre cette maladie; la sérologie de la rubéole effectuée le 5 juin 1987 par le laboratoire PEPIN avait montré une séro-conversion entraînant un risque de rubéole congénitale; L'enfant Simon X... devait naître le 24 octobre 1987 avec une absence de rein droit sans rapport avec une rubéole congénitale, celle-ci s'étant par contre traduite par une surdité bilatérale sévère entraînant une incapacité permanente fixée à 60%; Les époux X... imputaient au Docteur D... et au CENTRE MEDICAL MIROMESNIL un retard dans le diagnostic de la séropositivité rubéolique de la mère et, les considérant responsables des troubles subis par l'enfant, demandaient donc réparation tant de leur préjudice que de celui de leur fils Simon; C'est de ce jugement que les époux X... sont appelants tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leur fils mineur Simon; Les époux s'étant séparés au cours de la procédure d'appel (ordonnance de non-conciliation du 3 juillet 2001 du juge aux affaires familiales de Nanterre), ils ont poursuivi séparément leur action; A la demande des parents, fondée sur les dispositions de la Loi n°2002-303 du 4 mars 2002, un administrateur ad hoc a été désigné le 17 juillet 2002 par le juge des Tutelles du Tribunal d'Instance de BOULOGNE BILLANCOURT, en la personne de C... B..., pour représenter les intérêts de Simon X...; Par dernières conclusions en date du 2 mai 2003, A... Z... épouse X..., appelante, demande en son nom personnel de: - déclarer recevable l'intervention volontaire de C... B... es-qualités aux fins de solliciter l'indemnisation des préjudices de l'enfant Simon X..., - dire que les premiers juges ont commis une erreur dans leur motivation quant au délai dans lequel A... Z... aurait pu recourir à une interruption médicale de grossesse, - déclarer le Docteur D... et le CENTRE MEDICAL

MIROMESNIL solidairement responsables des préjudices considérables, matériels et moraux, subis par la concluante en raison de leurs fautes commises en violation de leurs obligations d'information et de conseil et de leur carence à effectuer les diligences nécessaires; - en conséquence infirmer le jugement entrepris et débouter les intimés de leurs demandes, - statuer ce que de droit sur le préjudice de l'enfant dont l'indemnisation est sollicitée par son représentant ad hoc, - condamner in solidum les ayants-droits du Docteur D... à lui payer la somme de 2 279 287ä en réparation de ses préjudices moraux et économiques, outre une somme de 15 250ä au titre de ses frais irrépétibles; Par dernières conclusions du 20 septembre 2002, Y... X..., appelant, demande en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de son fils mineur Simon X..., de: - déclarer recevable l'intervention de C... B... es-qualités aux fins de solliciter l'indemnisation de ses préjudices de l'enfant Simon X..., - déclarer recevable sa propre action en réparation de son préjudice personnel, distinct de celui de son épouse, - déclarer le Docteur D... et le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL solidairement responsables des préjudices subis par le concluant en raison de leurs fautes commises, - en conséquence infirmer le jugement entrepris et débouter les intimés de leurs demandes, - condamner in solidum le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL et les ayants droits du Docteur D... à lui payer à titre personnel, en réparation de son préjudice moral 46 000ä, pour les troubles dans sa vie quotidienne et le manque à gagner du fait que la famille a vécu avec un seul salaire, 51 240ä, au titre des frais matériels, 8 509,55ä, outre la somme de 7 625ä pour ses frais irrépétibles; Par dernières conclusions du 14 mars 2003, C... B... es-qualités, intervenante volontaire appelante, demande de: - déclarer recevable son intervention tendant soit à l'indemnisation du préjudice subi par Simon X... et résultant de sa naissance avec

handicap, soit subsidiairement à l'indemnisation du handicap causé, aggravé ou non atténué par la faute du médecin, demandes compatibles avec la loi du 4 mars 2002; - condamner solidairement les ayants-droits du Docteur D... et le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL, en raison des fautes par eux commises et qui ont causé la naissance avec handicap de Simon X... ou du moins une perte de chance d'éviter son handicap, à verser à la concluante ex-qualités, au titre de l'incapacité permanente partielle subie par l'enfant, la somme de 182 938ä, en réparation du préjudice moral de celui-ci, 900 000ä et en réparation de son préjudice professionnel, 900 000ä; - subsidiairement, au titre de l'incapacité permanente partielle subie par l'enfant la somme de 182 938ä, en réparation de son préjudice esthétique, 8 000ä, de son pretium doloris, 80 000ä, de son préjudice d'agrément, 80 000ä, de son préjudice professionnel, 152 500ä; Par dernières conclusions du 16 mai 2003, les consorts D..., intimés, soutiennent que le Docteur D... n'a commis aucune faute en relation de causalité avec les préjudices allégués, qu'en tout état de cause une interruption médicale de grossesse était encore possible quand la mère a su la séro- conversion; que la demande de réparation du préjudice de l'enfant est irrecevable tant au regard de la Jurisprudence de la Cour de Cassation que de la loi du 4 mars 2002; que la demande d'indemnisation du préjudice moral des parents, dont le quantum est critiqué, n'est pas fondée en l'absence de faute ou de lien de causalité; que la demande de réparation du préjudice matériel est nouvelle en cause d'appel et comme telle irrecevable; que les demandes de la Caisse primaire d'assurance maladie doivent de même être rejetées; une somme de 2 300ä au titre des frais irrépétibles est sollicitée contre les consorts X... Z...; Par dernières conclusions du 16 mai 2003, le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL, intimé, conclut à l'irrecevabilité de la totalité des demandes

d'indemnisation, formées au nom de l'enfant ou au nom personnel des parents, par application de la loi du 4 mars 2002; subsidiairement au fond, il conteste l'existence d'une faute démontrée en lien de causalité avec les préjudices invoqués et du reste non justifiés; il considère les demandes de Monsieur X... nouvelles en appel et comme telles irrecevables; il conclut en tout cas au sursis à statuer sur la liquidation du préjudice soumis à recours dans l'attente de la communication de la créance définitive de la CPAM. Il sollicite pour ses frais irrépétibles 1524,49ä; Par dernières conclusions du 12 février 2003, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES HAUTS DE SEINE, intimée, s'en rapporte à justice sur l'appréciation des responsabilités encourues dans la survenance de l'affection rubéolique congénitale dont l'enfant Simon X... a été victime à sa naissance; dans l'hypothèse d'une responsabilité retenue contre le Docteur D... ou le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL, elle demande d'inclure les prestations en nature versées par la concluante en raison de ladite affection congénitale, pour un montant de 29 792,94ä, dans l'évaluation du préjudice corporel subi par l'enfant et soumis à recours, sous réserve des prestations non encore connues; et de condamner in solidum les consorts D... et le CENTRE MEDICAL à lui rembourser cette somme de 29 762,94ä, avec intérêts légaux à compter de la première demande; L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 mai 2003; un délai de huit jours a été accordé aux parties pour répliquer aux observations développées par le Ministère public à l'audience;

SUR CE, LA COUR, Considérant qu'aux termes de l'article 1er-I de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002, "Nul ne peut se

prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance. "La personne née avec un handicap dû à une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l'acte fautif a provoqué directement le handicap ou l'a aggravé, ou n'a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l'atténuer. "Lorsque la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d'un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice; ce préjudice ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l'enfant, de ce handicap; la compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale. "Les dispositions du présent I sont applicables aux instances en cours, à l'exception de celles où il a été irrévocablement statué sur le principe de l'indemnisation." Considérant que les parties ne discutent pas que ce texte soit applicable à la présente espèce, en l'absence de décision définitive statuant sur l'indemnisation; qu'au demeurant les régimes de responsabilité prévus à l'alinéa 2 au profit de l'enfant et à l'alinéa 3 au profit des parents n'appellent pas d'autres dispositions pour en préciser la portée; que leur entrée en vigueur n'a pas été subordonnée par le législateur à celle du régime de compensation également prévu à l'alinéa 3 au profit de l'enfant, qui les complète en visant un préjudice considéré par le législateur comme sans lien de nature à justifier sa réparation par l'auteur de la faute; que le texte s'applique donc à l'espèce; Sur l'action en réparation engagée au nom de l'enfant Simon X..., mineur comme né le 24 octobre 1987 Considérant que les parents de l'enfant avaient initialement engagé cette action en leur qualité de représentants légaux; que pendant la procédure d'appel, ils ont fait désigner par ordonnance du 17 juillet 2002 un administrateur ad hoc pour le

représenter dans la présente instance; que C... B..., désignée comme administratrice ad hoc par cette ordonnance, est donc procéduralement recevable à poursuivre l'action de l'enfant aux fins d'obtenir réparation des chefs de préjudice qu'il a personnellement subis; Considérant que C... B... es-qualités soutient que l'article 1er de la Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002: - en son alinéa 1er, vise le seul fait de la naissance, et nullement le fait de la naissance avec un handicap, - en son alinéa 2, vise les fautes médicales à l'origine d'un handicap constaté lors de la naissance, - en son alinéa 3 vise le cas de l'enfant qui naît avec un handicap non décelé pendant la grossesse par suite d'une faute d'un professionnel ou d'un établissement de santé; qu'elle interprète ce texte, en ce qu'il précise que les parents peuvent obtenir réparation de leur seul préjudice personnel, comme ne faisant pas obstacle au droit de l'enfant d'être indemnisé de son préjudice propre; que le texte ne concerne pas le fond même du droit à réparation, mais seulement la qualité des parents pour agir au nom de l'enfant mineur et pour faire valoir le droit de ce dernier à être indemnisé de son préjudice propre; que sauf à être inconstitutionnel, ce texte ne peut supprimer le principe de la responsabilité pour faute personnelle et y substituer l'intervention de la solidarité nationale; que toute autre solution serait contraire à l'article 6 OE1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, à l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention et à la Jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme; Considérant de même que A... Z... épouse X..., mère de l'enfant, conclut que l'alinéa 1 du texte susvisé ne concerne pas la présente espèce, mais que l'alinéa 2 vise les espèces dans lesquelles des fautes médicales sont à l'origine d'un handicap constaté lors de la naissance et qu'il est applicable à la présente

espèce; qu'il existait en effet un traitement par injection de gammaglobulines spécifiques de nature à empêcher le développement du handicap par la suite constaté à la naissance, qui aurait pu être pratiqué; qu'elle donne de l'alinéa 3 du texte susvisé une interprétation analogue à celle développée par C... B...; Considérant encore que Y... X..., père de l'enfant, conclut à la recevabilité de l'action de l'enfant représenté par un administrateur ad hoc, les parents n'ayant plus qualité, en application de l'article 1er alinéa 3 de la loi du 4 mars 2002, pour demander la réparation du préjudice personnel qu'il a subi; qu'il soutient, sur le fondement du 2ème alinéa, que la non-prescription d'un traitement par injection de gammaglobulines est fautive et a fait perdre une chance au foetus d'éviter la rubéole contractée par la mère, ou d'en atténuer les effets; qu'il soutient encore qu'en ne prévenant pas assez tôt la mère des risques de contamination et de la nécessité de procéder à une interruption de grossesse, le Docteur D... a commis une faute en relation de cause à effet avec le fait de naître handicapé; qu'un tel préjudice, distinct de celui de naître, est réparable nonobstant les termes de l'alinéa 1 du texte susvisé; Considérant qu'en réplique le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL conclut à l'irrecevabilité de la demande, ne pouvant être soutenu que les fautes prétendues auraient aggravé le handicap de l'enfant ou qu'en leur absence, celui-ci aurait été amoindri; qu'en réalité les préjudices invoqués sont en relation avec la naissance en état de handicap de Simon X..., de sorte que ce dernier est irrecevable à agir en réparation de son préjudice; qu'il conteste l'interprétation de l'article 1er de la loi du 4 mars 2002 faite par les appelants; Considérant que pour leur part, les consorts D... opposent l'article 1er de la loi du 4 mars 2002, qui s'applique et est compatible avec les conventions internationales selon l'avis du Conseil d'Etat du 6 décembre 2002;

Ceci étant, considérant que les dispositions de l'article 1er-I de la loi du 4 mars 2002 régissent le droit à réparation de l'enfant et non pas les conditions de sa représentation en justice pour faire valoir ce droit; qu'en vertu de l'alinéa 1, Simon X... ne peut rechercher les fautes du Docteur D... et/ou du CENTRE MEDICAL MIROMESNIL ayant contribué à ne pas déceler pendant la grossesse qu'il risquait de naître avec un handicap, et ayant ainsi empêché ses parents d'éviter sa naissance, notamment en décidant une interruption volontaire ou médicale de grossesse de la mère; que le législateur a entendu en effet interdire l'action d'un enfant qui ne pouvait que naître handicapé ou ne pas naître; qu'à titre personnel, en application de l'alinéa 2, Simon X... peut rechercher l'acte fautif qui a provoqué directement son handicap ou l'a aggravé, ou qui n'a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l'atténuer; que l'alinéa 3 du texte ne vise que l'action des parents d'un enfant né avec un handicap qui n'a pas été décelé pendant la grossesse en raison d'une faute d'un professionnel ou d'un établissement de santé, pour en limiter la portée au strict préjudice personnel qui en est résulté pour eux; que l'enfant peut seulement dans cette hypothèse demander à bénéficier de la solidarité nationale; Considérant que l'application, en cours de procédure, de ces nouvelles dispositions affecterait, selon les appelants, le droit à réparation dont se prévaut Simon X... au regard de la jurisprudence prise en son dernier état et modifierait également l'équilibre des chances entre les parties, de sorte qu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la France; Mais considérant que la sécurité juridique ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence immuable; qu'il convient en outre d'observer que ce n'est qu'en cours de procédure, et non avant l'introduction de celle-ci, que les solutions jurisprudentielles ont évolué dans un sens favorable à une

réparation mise à la charge du professionnel de santé fautif dans le cas d'un enfant né handicapé, lorsque les fautes commises par ce professionnel dans l'exécution de son contrat formé avec la mère avait empêché celle-ci d'exercer son choix d'interrompre sa grossesse afin d'éviter la naissance de l'enfant; Considérant que le législateur, en adoptant le texte susvisé, dans le cadre d'une réforme d'ampleur concernant les droits des malades et la qualité du système de santé, n'a pas cherché à s'ingérer dans l'administration de la Justice dans le but d'influer sur le dénouement judiciaire du présent litige, mais, tenant compte de débats publics particulièrement nourris et d'une opinion publique troublée, a réformé un système de droit qu'il ne jugeait pas satisfaisant et conforme à l'intérêt général; qu'au regard des liens directs de causalité qu'il a jugés établis entre les fautes possibles des professionnels ou institutions de santé et les préjudices subis d'une part par les parents et d'autre part par l'enfant né handicapé, il a précisé les conditions et les limites de leurs recours respectifs; qu'en tout état de cause, l'enfant, qui ne peut légitimement se plaindre d'être né, même avec un handicap et même si ses parents ont été privés de la possibilité d'éviter sa naissance, dispose pour son préjudice propre résultant directement de la faute d'un professionnel ou d'un établissement de santé, de l'action en responsabilité régie par l'alinéa 2 du texte; qu'ainsi les nouvelles dispositions ont été prises pour des motifs d'intérêt général et tenant à des raisons d'ordre éthique, à la bonne organisation du système de santé et au traitement équitable de l'ensemble des personnes handicapées, motifs suffisants pour justifier les atteintes aux droits susvisés, qui restent proportionnées; que ces nouvelles dispositions ne sont donc pas contraires, comme le prétendent les appelants, au principe constitutionnel de la responsabilité pour faute personnelle (le juge

judiciaire n'étant au demeurant pas compétent pour statuer sur la constitutionnalité des lois), ni surtout incompatibles avec les engagements internationaux de la France, en particulier l'article 6 OE1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales ou l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette convention ou la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme; Considérant qu'en l'espèce, la surdité de Simon X... trouve sa cause directe dans la rubéole congénitale dont il a été atteint; qu'ainsi qu'il a été dit, peuvent être recherchées les seules fautes du Docteur D... et/ou du CENTRE MEDICAL MIROMESNIL consistant à ne pas avoir pris les mesures susceptibles de supprimer ou d'atténuer les effets de cette maladie et de limiter le handicap consécutif avec lequel l'enfant est né, mais non pas les fautes commises dans la surveillance de la grossesse de sa mère ni le défaut d'information due à celle-ci, qui seraient à l'origine de la non-interruption de cette grossesse; que dès lors que C... B... es-qualités, est irrecevable à invoquer les fautes consistant pour le Docteur D...: - à ne pas avoir, avant même toute grossesse, informé la mère des risques liés à certaines maladies, en particulier la rubéole, - à ne pas avoir, dès prise de connaissance de l'état de grossesse de la mère, vérifier immédiatement l'état de son immunité contre la rubéole et la toxoplasmose, - à ne pas avoir, lors de l'éruption érythémateuse constatée chez la mère le 9 avril 1987, poursuivi les examens, mais de s'être contenté du résultat négatif du test de dépistage opéré, au risque d'un diagnostic erroné; de n'avoir ordonné que le 29 mai suivant un nouvel examen de dépistage; - ou consistant pour le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL à avoir perdu le dossier médical de A... Z..., ce qui traduirait un mauvais fonctionnement du Centre, ces fautes, à les supposer prouvées, n'ayant pas pu avoir pour

conséquence directe de provoquer ou aggraver le handicap de Simon X..., mais seulement d'empêcher la mère de déciderces fautes, à les supposer prouvées, n'ayant pas pu avoir pour conséquence directe de provoquer ou aggraver le handicap de Simon X..., mais seulement d'empêcher la mère de décider d'avorter; Considérant par contre que C... B... es-qualités est recevable à invoquer à l'encontre du Docteur D... la faute consistant à ne pas avoir ordonné un traitement par injonction de gammaglobulines, qui pour être efficace, devait être mise en oeuvre le plus tôt possible après le contage, soit environ une semaine après ce dernier, ce traitement étant supposé pouvoir éviter ou atténuer les conséquences dommageables de la rubéole de la mère sur le foetus; Mais considérant qu'il résulte du rapport d'expertise du Professeur RAVINA, et notamment de sa réponse à la question de "l'existence d'un traitement susceptible d'éviter les conséquences dommageables pour le foetus de la rubéole contractée par la mère", qu'aucune publication n'avait à cette date apporté la preuve de la réelle efficacité préventive d'un tel traitement; qu'il n'est pas prouvé qu'un traitement susceptible d'éviter lesdites conséquences dommageables, ait pu être mise en oeuvre; que le Docteur D..., qui avait seulement l'obligation d'apporter des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science à la date des soins, n'a donc pas commis de faute; que les demandes de C... B... es-qualités, tendant à la réparation du préjudice subi personnellement par Simon X..., seront donc rejetées;

*** Sur l'action en réparation engagée par les parents de Simon X...

en leur nom personnel: Considérant que les époux X... qui, à l'origine, avaient engagé conjointement leur action en réparation, ont préféré, en appel, se constituer par avoué séparé, compte tenu de la séparation de leur couple intervenue depuis le jugement déféré et officialisée par une ordonnance de non-conciliation en date du 3 juillet 2001; qu'ils sont procéduralement recevables à poursuivre leur action pour les chefs de préjudice qu'ils ont chacun personnellement subis; Considérant que A... Z... épouse X..., réplique aux conclusions adverses que son préjudice est principal, le préjudice de Simon étant celui par ricochet, de sorte qu'elle est recevable à agir; que visant l'alinéa 3 de l'article 1er de la loi du 4 mars 2002, elle dénonce à l'encontre du docteur D... et du CENTRE MEDICAL MIROMESNIL les fautes caractérisées suivantes: 1- la tromperie sur la qualité du Docteur D..., prétendant qu'en 1986 elle avait demandé à consulter un spécialiste gynécologue et que le CENTRE l'avait orientée vers le Docteur D... alors qu'elle a appris au cours de l'expertise que ce dernier n'était pas spécialiste gynécologue mais seulement médecin généraliste diplômé en échographie gynécologique et obstétricale; qu'elle en déduit ne pas avoir reçu les soins auxquels elle avait droit; 2- l'erreur d'avoir prescrit le 9 avril 1987, jour même de l'éruption cutanée, les analyses à effectuer, alors que leurs résultats ne pouvaient être probants que si les analyses étaient effectuées 48 heures après l'éruption cutanée constatée; de même l'erreur d'interprétation du résultat du 5 juin 1987, au vu duquel le Docteur D... n'a pas diagnostiqué la séro-conversion rubéolique de sa patiente; 3- la violation des obligations de précaution et de surveillance résultant de l'article 32 du Code de Déontologie médicale, alors que le Docteur D... n'a prescrit aucune nouvelle analyse rubéolique entre le 9 avril 1987, date de l'éruption cutanée, et le 29 mai 1987, malgré le risque

couru, les symptômes constatés, l'absence de caractère probant de l'analyse du 9 avril trop précoce, le foetus ayant été probablement contaminé à cette date selon l'expert; qu'elle en déduit que le Docteur D... a fait preuve d'une carence inadmissible; qu'en réplique aux explications de ce dernier, elle ajoute qu'il appartenait à ce médecin de s'efforcer d'obtenir la bonne exécution de ses prescriptions, en vertu de l'article 34 du Code de déontologie médicale; 4- la violation du Docteur D... et du CENTRE MEDICAL MIROMESNIL à leur obligation d'information; que se fondant sur les conclusions de l'expert, elle relève que les résultats du 5 juin 1987 de l'analyse prescrite le 29 mai précédent, ont bien été adressés au CENTRE et que dès lors le Docteur D... devait en être informé; que si tel n'a pas été le cas, il y a faute; qu'au demeurant le médecin doit s'informer du résultat de ses prescriptions et qu'il engage sa responsabilité à ne pas communiquer les résultats des tests et à ne pas informer la patiente des résultats ou anomalies existantes; qu'il devait procéder aux examens complémentaires nécessaires; qu'à défaut il y a violation de son obligation de renseignement, qui, remplie, aurait permis à la patiente de prendre une décision éclairée quant à l'interruption de la grossesse; que la charge de la preuve de la bonne information donnée pèse sur le médecin; Qu'elle soutient encore que la privation de mettre en oeuvre son droit à recourir à une interruption volontaire puis médicale de grossesse est patente, alors qu'elle n'a pas tardé à prendre rendez-vous chez un spécialiste après le 5 juin et que ce n'est que le 15 juillet qu'elle a eu la certitude de la contamination de l'enfant; qu'à cette date, il ne lui était plus possible de procéder à une interruption médicale de grossesse, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges; que cette situation résulte des fautes commises par le Docteur D..., qui l'avaient déjà empêché antérieurement de procéder à une interruption

volontaire de grossesse; qu'en tout état de cause à six mois de gestation de l'enfant qu'elle sentait bouger, elle n'était pas en état psychologique de pratiquer une interruption médicale de grossesse comme elle l'aurait été, au contraire, en avril ou même juin lorsqu'une interruption volontaire était encore possible; Qu'elle rappelle enfin, s'agissant du lien de causalité, qu'outre la privation de son droit d'avorter, elle a été amenée à mettre au monde un enfant atteint de graves handicaps causés, sans aucun doute selon l'expert, par la rubéole; Considérant que pour sa part, Y... X..., père de Simon, souligne la mauvaise foi du Docteur D... et du CENTRE MEDICAL MIROMESNIL qui devant l'expert n'ont fait que "brouiller les pistes" en invoquant la perte du dossier médical de A... Z... ou une mémoire défaillante pour échapper à leur responsabilité; qu'il relève encore le comportement incompréhensible du Docteur D... averti de la rubéole contractée par la mère, ainsi que l'indique l'expert; qu'il retient à charge: 1- le défaut de surveillance de la grossesse de la mère, constitué notamment pour ne pas avoir demandé à examiner l'éruption signalée par la mère, et s'être limité à un seul dosage sérologique le jour de l'éruption, ce qui était sans intérêt; qu'il en déduit l'incompétence du Docteur D... qui de plus avait usurpé son titre en totale complicité avec le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL; qu'il relève encore le manque de contrôle périodique de la sérologie de la mère non immunisée et la non-prescription d'une nouvelle analyse auprès du même laboratoire peu après les résultats du 9 avril; qu'il soutient aussi que le Docteur D..., qui n'a pas appelé à la cause le laboratoire, ne peut sérieusement dire qu'il n'a pas été informé des résultats de l'analyse, et qu'en tout état de cause il lui appartenait de s'enquérir des résultats de l'analyse du 5 juin 1987; 2- le défaut d'information au vu de la séro-conversion du 5 juin 1987 de la part

tant du médecin que du Centre Médical, le manquement à l'obligation de conseil, à l'obligation de "science et conscience"; qu'il retient que si, à cette date, une interruption de grossesse était encore possible, elle ne l'était plus après 24-26 semaines du fait de la viabilité possible du foetus; qu'il en déduit que Madame X... a bien été privée du choix d'interrompre sa grossesse du fait de l'absence ou de la mauvaise information reçue, résultant des fautes du Docteur D... et du CENTRE MEDICAL MIROMESNIL; Qu'à titre subsidiaire, il soutient que ceux-ci auraient pu appeler à la cause le Docteur M... pour faire établir un éventuel partage de responsabilité; Considérant qu'en réplique les consorts D... relèvent que les parties sont en désaccord sur les dates et que Madame X... a évolué dans la présentation des faits; que le Docteur D... a toujours contesté avoir eu communication du résultat de la sérologie du 5 juin 1987 qu'il avait prescrite le 29 mai, et a fortiori de les avoir commentés avec sa patiente; qu'ils notent que cette analyse n'a pas été pratiquée par le même laboratoire et que l'indication du nom du prescripteur ne prouve pas toujours que celui-ci est destinataire des résultats, que ceux-ci ont pu être remis en double exemplaire à la patiente pour qu'elle puisse les adresser au médecin de son choix; qu'ils soutiennent que, si le Docteur D... avait reçu les résultats, il aurait réagi à coup sûr; qu'ils rappellent que Madame X... n'a plus consulté le Docteur D... après le 2 juin, alors qu'à cette date les résultats n'étaient pas connus; que la patiente n'a consulté un autre médecin que quinze jours plus tard; Qu'ils dénient l'existence d'un traitement curatif et soutiennent qu'à l'époque des faits le traitement par gammaglobulines était abandonné dans le cadre d'une protection rubéolique; qu'ils considèrent qu'une interruption médicale de grossesse restait possible ainsi qu'il est reconnu par l'expert; ils concluent à l'absence de rôle causal des

fautes reprochées; Considérant encore que le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL soutient que la mère est irrecevable à agir, en vertu tant des dispositions de l'alinéa 1er de l'article 1 de la loi du 4 mars 2002, que de celles de l'alinéa 2, son préjudice personnel n'étant, dans l'hypothèse prévue par ce texte, qu'un préjudice par ricochet au regard du préjudice principal subi par l'enfant, ou encore de celles de l'alinéa 3, dans la mesure où les fautes à l'origine du litige ne relèvent pas d'une situation de handicap non décelée durant la grossesse par suite d'une faute caractérisée; Qu'il explique, sur le fond, les causes possibles de la disparition du dossier médical de A... Z..., rappelle que la patiente n'a plus consulté le Docteur D... après le 2 juin 1987, soutient que rien ne prouve que ce médecin ait connu les résultats de l'examen sérologique prescrit le 29 mai précédent, ni selon les éléments portés par le laboratoire sur le compte rendu de résultats, ni sur l'initiative de la patiente elle-même qui a varié dans ses explications; qu'il relève la date tardive d'exécution de l'analyse prescrite le 29 mai, et la date tardive pour consulter le Docteur M...; qu'il dénie toute faute commise en l'absence de preuve de communication des résultats du 5 juin 1987 au Docteur D... ou de l'absence de transmission en raison d'un dysfonctionnement du CENTRE; Qu'il conclut que ni le CENTRE ni le Docteur D... ne sont responsables de l'infection rubéolique qui a atteint le foetus et qu'il n'est pas établi que la privation du droit d'interrompre la grossesse soit en lien avec une faute commise par eux; Ceci étant, considérant , sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article 1er de la loi du 4 mars 2004, que les parents de l'enfant seraient recevables à demander l'indemnisation de leur préjudice personnel consécutif au handicap de l'enfant, subi par ricochet; que cependant pour les motifs susvisés, il a été dit que la non-prescription du traitement par injections de gammaglobulines

n'était pas fautive; que dès lors, la demande en réparation sur ce fondement est mal fondée; Considérant, sur le fondement de l'alinéa 3 du texte susvisé, que lorsque la responsabilité d'un professionnel ou d'un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d'un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute caractérisée, c'est-à-dire dûment établie, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice, résidant dans la privation du droit à pouvoir recourir à un avortement pour motif thérapeutique; qu'en l'espèce, A... Z... ou Y... X... sont donc recevables à reprocher au Docteur D... et au CENTRE MEDICAL MIROMESNIL les fautes ayant eu pour effet de ne pas déceler en temps utile la rubéole contractée, de ne pas avoir informé la mère des conséquences possibles sur la santé de l'enfant, de fait né avec un handicap grave, et de l'avoir ainsi privée de son droit d'interrompre la grossesse; Mais considérant que la compétence professionnelle du Docteur D... à suivre la grossesse de A... Z..., n'a pas été remise en cause par l'expert RAVINA qui ne relève aucun lien de causalité entre les titres de ce médecin généraliste ayant obtenu le diplôme d'échographie gynécologique et obstétricale et les autres fautes invoquées; que la tromperie dont se plaint A... Z... n'a donc aucun rôle causal dans la réalisation des préjudices dont elle demande réparation; que la perte du dossier médical de la patiente, pour fâcheuse qu'elle soit dans l'administration de la preuve, n'a pas davantage de rôle causal dans la réalisation des préjudices dont les appelants demandent réparation; Considérant encore que A... Z... a été examinée en consultation par le Docteur D... le 5 mars 1987, le 24 mars, le 16 avril puis le 2 juin, outre le 13 mars et le 29 mai pour échographie; qu'ensuite elle n'a plus consulté ce praticien; que l'expert ne critique pas ce suivi médical, régulier et conforme aux règles de

l'art; Considérant, s'agissant de l'éruption cutanée dont A... Z... a été atteinte, que la date et les circonstances dans lesquelles elle a pu en informer le Docteur D... restent imprécises, la patiente étant en désaccord avec ce praticien sur la relation des faits et celui-ci n'en gardant aucun souvenir lors de l'expertise, huit ans après les faits, il est vrai; qu'il est prétendu sans preuve qu'elle aurait eu une éruption cutanée le 9 avril et qu'elle en aurait informé aussitôt le médecin; qu'il apparaît cependant peu vraisemblable que la prescription de l'examen sérologique pratiqué le même jour, et dont le résultat était négatif, soit en lien avec une telle information, alors qu'un examen pratiqué le jour même ne pouvait apporter de résultats probants, que son renouvellement sous quinzaine n'a pas été fait (comme c'est la règle et comme le compte rendu de résultats y invitait lui-même) et que la suite donnée par le Docteur D... qui suivait régulièrement la patiente, serait difficilement compréhensible s'il avait été réellement informé, ainsi que le souligne l'expert; qu'il serait encore plus invraisemblable, si l'éruption cutanée avait été évoquée le 9 avril, qu'à cette date ou lors de la consultation du 16 avril suivant, un nouveau test n'ait pas été ordonné, alors même que A... Z... décrit son propre comportement comme très prudent voire inquiet, ainsi que le relate encore l'expert; qu'en réalité, et comme le suggère l'expert, cet examen pratiqué le 9 avril est plus vraisemblablement la suite de la prescription de début de grossesse, ordonnée (lors de l'échographie du 13 mars ou de la consultation du 24 mars) par un médecin qui savait sa patiente non immunisée et qui devait la revoir le 16 avril dans le cadre de son suivi régulier; que l'analyse étant négative, le Docteur D... n'avait pas à prendre de dispositions spécifiques; qu'en l'absence d'une preuve dûment établie permettant de dire que le Docteur D... a été informé le 9 avril

1987 de l'irruption cutanée constatée par A... Z..., aucune faute caractérisée au sens de l'alinéa 3 de l'article 1er de la loi du 4 mars 2002 ne peut être retenue à son encontre; Considérant, s'agissant de l'examen sérologique du 5 juin 1987, qui avait été ordonné dès le 29 mai et dont le résultat positif était cette fois alarmant, que force est de constater que, même si A... Z... en a informé téléphoniquement le Docteur D..., comme elle l'a prétendu devant l'expert, il est constant qu'elle ne l'a pas consulté après le 2 juin mais a préféré faire choix d'un autre médecin; que le compte-rendu de résultats versé en double exemplaire aux débats ne permet que des supputations, le seul élément précis étant que les documents produits ne portent pas mention de l'adresse du Docteur D..., mentionné seulement comme prescripteur, ni celle du CENTRE MEDICAL MIROMESNIL; que le laboratoire, interrogé par l'expert, n'a pu certifier avoir adressé les résultats d'analyse à ce praticien ou ce Centre, compte tenu des pratiques et de leur remise directe au patient possible dans certains cas (lettre du 18/08/95); que si le Code de déontologie médicale fait obligation au médecin, dès lors qu'il a accepté de répondre à une demande, d'assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, et, dans ce cadre, d'assurer un contrôle rigoureux sur les examens qu'il a prescrits et d'informer le patient des suites éventuelles à y donner, encore faut-il que le patient ne rompe pas le contrat médical qui le lie à son médecin; qu'en l'espèce, A... Z... a bien, après le 5 juin, rompu le contrat avec le Docteur D... puisqu'elle a été consulter un autre praticien; qu'il n'est pas donc possible, dans ces circonstances incertaines, de retenir à l'encontre du médecin ou du Centre médical, une faute caractérisée au sens du texte susvisé; Considérant qu'en tout état de cause, s'il y avait eu faute, celle-ci n'aurait pas par

ailleurs les conséquences que retiennent A... Z... ou Y... X...; qu'en effet, selon l'expert, la mère pouvait procéder sans difficulté technique à une interruption médicale de grossesse jusqu'à la 24-26ème semaine (d'aménorrhée) et au 15 juillet 1987, date à laquelle A... Z... admet avoir été pleinement informée de la sérologie positive, elle en était à la 25ème semaine, selon le calendrier qu'elle-même produit aux débats; qu'elle ne peut davantage invoquer une impossibilité légale d'interrompre sa grossesse, l'interruption médicale pouvant intervenir à toute époque; qu'ainsi, comme le soutient le CENTRE MEDICAL MIROMESNIL, le risque de handicap de l'enfant avait donc été décelé en temps encore utile pendant la grossesse; que l'alinéa 3 de l'article 1er de la loi du 4 mars 2002 ne peut recevoir application; que A... Z... ou Y... X... sont donc mal fondés en leurs demandes; que par ailleurs le recours contre le Docteur M... aux fins d'un partage de responsabilité relève de la liberté des intimés et n'aurait aucun intérêt pour la solution du litige avec les appelants;

*** Considérant que l'action de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE des HAUTS DE SEINE ne saurait dans ces conditions aboutir; Considérant qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie ses frais irrépétibles d'appel;

******** PAR CES MOTIFS, et ceux non contraires du premier juge, Reçoit en leurs actions respectives C... B... es-qualités,

A... Z... épouse X... et Y... X..., mais les déclare mal fondés; Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions; Rejette toutes autres demandes des parties; Condamne in solidum C... B... es-qualités, A... Z... épouse X... et Y... X... aux dépens d'appel dont le montant pourra être recouvré directement par les avoués de la cause dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile et conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle. LE H... LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 2000/02272
Date de la décision : 03/07/2003

Analyses

JUGEMENTS ET ARRETS - Effets - Evolution de la jurisprudence - Sécurité juridique - Portée - /.

La sécurité juridique ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence immuable. Le législateur, en adoptant l'article 1er de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, dans le cadre d'une réforme d'ampleur concernant les droits des malades et la qualité du système de santé, n'a pas cherché à s'ingérer dans l'administration de la justice dans le but d'influer sur le dénouement judiciaire des instances en cours, mais, tenant compte de débats publics particulièrement nourris et d'une opinion publique troublée, a réformé un système de droit qu'il ne jugeait pas satisfaisant et conforme à l'intérêt général. Ces nouvelles dispositions ont été prises pour des motifs d'intérêt général et tenant à des raisons d'ordre éthique, à la bonne organisation du système de santé et au traitement équitable de l'ensemble des personnes handicapées, motifs suffisants pour justifier les atteintes aux droits susvisés, qui restent proportionnées

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin - Responsabilité contractuelle - Faute - Obstacle au choix d'une femme enceinte d'interrompre sa grossesse - Lien de causalité - Enfant né handicapé - Préjudice - Droit à réparation - Condition - /.

Les parents d'un enfant né handicapé ne peuvent bénéficier des dispositions de l'article 1er de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 dès lors que le suivi médical de la grossesse a été régulier et conforme aux règles de l'art, que la mère ne rapporte pas de preuve dûment établie permettant de dire que le gynécologue mis en cause a été informé de l'apparition d'une éruption cutanée propre à une infection rubéolique et qu'il n'est pas possible de retenir une faute caractérisée des autres praticiens consultés après cette infection dans la mesure où la patiente a rompu le contrat médical qui la liait à son gynécologue. Par ailleurs, cette dernière, qui admet avoir été pleinement informée de sa sérologie positive alors qu'elle en était à sa 25ème semaine de grossesse, pouvait demander une interruption médicale de grossesse


Références :

Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, article 1er

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2003-07-03;2000.02272 ?
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