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14/12/2001 | FRANCE | N°2000/23665

France | France, Cour d'appel de Paris, 14 décembre 2001, 2000/23665


COUR D'APPEL DE PARIS 3è chambre, section C ARRET DU 14 DECEMBRE 2001 (N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/23665 Décision dont appel : Jugement rendu le 14/11/2000 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de CRETEIL 2ème Chambre - RG n : 2000/04334 - (Pt M. X...) Date ordonnance de clôture : 28 Septembre 2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision :

REFORMATION APPELANTE : LA SOCIETE S.C.I. Y... ayant son siège : 3 rue de Trouq - 94320 THIAIS agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux représentée par la SCP COSSEC, av

oué assistée de Maître Z... BOURG Yves, avocat au barreau de Paris, ...

COUR D'APPEL DE PARIS 3è chambre, section C ARRET DU 14 DECEMBRE 2001 (N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/23665 Décision dont appel : Jugement rendu le 14/11/2000 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de CRETEIL 2ème Chambre - RG n : 2000/04334 - (Pt M. X...) Date ordonnance de clôture : 28 Septembre 2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision :

REFORMATION APPELANTE : LA SOCIETE S.C.I. Y... ayant son siège : 3 rue de Trouq - 94320 THIAIS agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux représentée par la SCP COSSEC, avoué assistée de Maître Z... BOURG Yves, avocat au barreau de Paris, Toque A 361 INTIME : Maître Gilles PELLEGRINI demeurant : 4 Z... Parvis de Saint Maur - 94100 SAINT MAUR DES FOSSES ès qualités de liquidateur judiciaire de la SA COFADIS GASTRONOME représenté par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoué assisté de Maître HENDI Véronique, avocat au barreau de paris, Toque D 882 INTIME : Maître Z... TAILLANTER demeurant : 22 avenue Victoria - 75001 PARIS ès qualités d'ancien administrateur judiciaire de la SA COFADIS GASTRONOME représenté par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoué assisté de Maître HENDI Véronique, avocat au barreau de Paris, Toque D 882 COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré : PRESIDENT :

Monsieur ALBERTINI A... :

Madame Z... B... et Monsieur BOUCHE C... : A l'audience publique du 9 novembre 2001 GREFFIER :

Lors des débats et lors du prononcé de l'arrêt : Madame FALIGAND Z... dossier a été communiqué au Ministère public ARRET : Contradictoire - prononcé publiquement par Monsieur ALBERTINI, Président lequel a signé la minute avec Madame FALIGAND, greffier au prononcé de

l'arrêt.

Vu l'appel relevé par la s.c.i Y... du jugement rendu le 14 novembre 2000 par le tribunal de commerce de Créteil qui constate sa fictivité, prononce en vertu de l'article 7 de la loi du 25 janvier1985, l'extension du redressement judiciaire de la société Cofadis gastronomie à la s.c.i Y... avec mise sous patrimoine commun, fixe au 1er octobre 1997 la date de la cessation des paiements, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et déboute la s.c.i Y... de ce chef ;

Vu les conclusions déposées au greffe le 14 mars 2001 pour la s.c.i Y... qui prie la cour de réformer le jugement, dire n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Vu les conclusions déposées au greffe le 5 avril 2001 pour Me Gilles Pellegrini, ès qualités de liquidateur de la société Cofadis gastronomie, et pour Me Yvon Z... Taillanter, ès qualités d'ancien administrateur judiciaire de la société Cofadis gastronomie qui prient la cour de confirmer le jugement, de mettre hors de cause Me Z... Taillanter, ès qualités, et de condamner la s.c.i Y... au paiement de la somme de 20.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; SUR CE, LA COUR

Considérant que le jugement de liquidation judiciaire a mis fin à la mission d'administrateur judiciaire de Me Z... Taillanter et que celui-ci est fondé à solliciter sa mise hors de cause ;

Considérant que la société anonyme Cofadis gastronomie créée en 1987 avait pour objet social l'achat, la vente de produits alimentaires et comestibles; que son capital était réparti entre M. Roger Y... (99,76 %) et diverses personnes de l'entourage familial de celui-ci, son activité se subdivisait en une activité de vente de produits

alimentaires dans le cadre d'animation en grandes surfaces et dans une activité de vente en demi-gros, hors activité d'animation;

Considérant qu'elle a été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Créteil en date du 17 janvier 1991 ; que son plan de redressement par voie de continuation d'une durée de huit ans a été arrêté le 19 décembre 1991 ;

Considérant qu'elle a fait l'objet d'une nouvelle procédure de redressement judiciaire ouverte ler avril 1999 à la demande de l'u.r.s.s.a.f, créancière d'une somme de 3.259.031,55 francs ; que par jugement complétif en date du 9 décembre 1999, rendu sur requête de Me Pellegrini, ès qualités de représentant des créanciers, le tribunal a prononcé la résolution du plan de redressement et dit que la procédure devrait se poursuivre dans les termes de l'article 80 de la loi du 25 janvier 1985 avant sa modification du 10 juin 1994; que par arrêt en date du 29 septembre 1999 la cour, réformant cette décision de ce dernier chef, a dit que la procédure était soumise aux dispositions de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction issue de la loi du 10 juin 1994 ; que la liquidation judiciaire a été prononcée le 28 novembre 2000 ;

Considérant que la s.c.i Y... constituée en 1994 entre M. Roger Y..., (14.997 parts sur 15.000) Laurent Y..., Jean-Louis Y... et Pascal Y..., s'est portée acquéreur d'un local professionnel de 600 m situé à Thiais, 3/5 rue de Travy ; que suivant acte en date du 28 septembre 1994 ce local a été donné à bail à la société Cofadis gastronomie pour une durée de neuf années à compter du 1er septembre 1994 moyennant un loyer hors taxe de 540.000 francs et un dépôt de garantie de 270.000 francs, soit six mois de loyer;

Considérant que motif pris de ce que la s.c.i n'était qu'une fiction destinée à faire échapper l'immeuble aux poursuites des créanciers de

la personne morale commerciale, Me Z... Taillanter et Me Pellegrini agissant respectivement comme administrateur judiciaire et représentant des créanciers de la société Cofadis gastronomie ont fait assigner la s.c.i Y... à l'effet de voir étendre à celle-ci la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de celle-la ;

Considérant que telles sont les circonstances dans lesquelles a été prononcé le jugement déféré qui pour constater que la s.c.i était une société fictive énonce notamment que la société commerciale avait accepté de voir tripler son loyer en 1989, alors qu'elle traversait une période délicate où elle devait honorer les échéances de son plan de continuation, que rien ne l'obligeait à passer d'une surface de 230 m à une surface de 600 m et que les conditions du bail étaient "systématiquement favorables " à la s.c.i ;

Considérant que la liquidation judiciaire d'une personne morale ne peut être étendue à une autre qu'en cas de confusion de leurs patrimoines ou de fictivité de l'une d'entre elles ;

Considérant que Me Pellegrini, réitérant son argumentation initiale, soutient que la s.c.i n'est qu'une fiction dont la constitution, certes légale, n'a d'autre objet que d'être le propriétaire juridiquement indépendant du seul actif immobilier de Cofadis gastronomie et n'a d'autre but que de faire échapper l'immeuble aux poursuites des créanciers de la personne morale ; qu'il en veut pour preuve les faits suivants :

- la s.c.i Y... et la société Cofadis gastronomie ont les mêmes associés et le même dirigeant et le même siège social ;

- la s.c.i Y... tire ses ressources des seuls loyers versés par la société commerciale ;

- celle-ci a pris en charge d'importants travaux de rénovation qui resteront acquis à la société civile immobilière, sans contrepartie,

- toutes les charges, dans le cadre du bail commercial, pouvant être mises à la charge du locataire l'ont été en l'espèce ;

- les loyers ont été payés régulièrement jusqu'au prononcé de la seconde procédure de redressement judiciaire ;

- une réduction du loyer en cours de bail pour le moins anormale et qui n'est en aucune façon causée ou justifiée,

- Cofadis gastronomie a accepté de voir tripler son loyer par rapport à son loyer antérieur, au moment même où elle commençait à enregistrer une retard envers l'u.r.s.s.a.f;

Mais considérant que, contrairement à ce que soutient le liquidateur, la communauté d'associés et de dirigeant et la localisation à une même adresse des sièges sociaux sont impropres à caractériser la fictivité ou la confusion des patrimoines ;

Considérant que la s.c.i a un objet social déterminé dans le champ duquel s'inscrivent l'acquisition à ses frais de l'immeuble et sa mise en location; que le fait que le bien ait été donné à bail à la société Cofadis gastronomie par la s.c.i Y... pour un loyer constituant l'unique ressource de cette dernière, n'établit pas que le principe de l'autonomie patrimoniale, corollaire de la personnalité morale, a été transgressé ; qu'il en est a fortiori de même de la circonstance que ce loyer a été payé jusqu'à l'ouverture de la seconde procédure de redressement judiciaire ;

Considérant qu'il n'est pas discuté que la prise à bail de nouveaux locaux était rendue nécessaire par les modifications de la réglementation sanitaire applicable à l'activité de la société Cofadis Gastronomie ; qu'il n'est pas démontré que celle-ci avait cessé de faire face à ses charges sociales dès l'année 1994 ; que si le jugement d'ouverture du 1er avril 1999 énonce que l'u.r.s.s.a.f invoquait l'existence d'un arriéré de cotisations remontant à 1994,

la mise ne demeure du 4 septembre 1998 n'en fait pas état ;

Considérant que la première défaillance dans le respect des engagements financiers inscrits au plan d'apurement n'est survenue qu'en 1999 ; qu'en toute hypothèse, à supposer qu'il soit, pour tout ou partie, la cause de cette défaillance ou celle de la création d'un nouveau passif ayant motivé l'ouverture de la nouvelle procédure collective, le triplement de la charge de loyer résultant de l'opération critiquée, n'est pas davantage de nature à caractériser l'existence de relations financières anormales ou à établir que la s.c.i était fictive ;

Considérant que les rapports de droit entre la société bailleresse et la société preneuse ont été organisés par un contrat qui a fixé le loyer à 900 francs le m , soit dans la partie basse de la "fourchette" de prix préconisée par le cabinet "Dulieu - Hilaire", conseil spécialisé en matière de transactions commerciales, industrielles et immobilières, en son rapport du 20 mai 1994 ;

Considérant que si la société commerciale a financé des installations et équipements dans les locaux de la s.c.i , à hauteur de la somme de 4.103.014,84 francs, M. D..., son commissaire aux comptes, certifie (lettre en date du 8septembre 2000 et détail des immobilisations) qu'ont été, ce faisant, prises en charge les seules immobilisations nécessaires à l'activité commerciale, dont des matériels pour un montant de 1.840.478,68 francs ; qu'il est en outre établi par l'attestation de l'installateur Pierre Loche (3 janvier 2000) que les chambres froides réalisées sont entièrement démontables et transportables et qu'elles peuvent être remontées en un autre lieu ; que cette prise en charge n'est pas de nature à caractériser l'existence de relations financières anormales ;

Considérant que si le bail du 28 août 1994 mettait à la charge de la société Cofadis gastronomie les grosses réparations telles que

définies à l'article 606 du code civil et sa quote-part d'impôt foncier, cette clause n'est pas contraire aux usages commerciaux ;

Considérant que la réduction du loyer avec effet rétroactif au premier janvier 1998, est intervenue après l'ouverture de la nouvelle procédure collective et qu'elle n'a eu aucune incidence sur le compte entre les parties ; qu'il n'en est résulté aucune transgression du principe de l'autonomie patrimoniale de chaque personne morale ;

Considérant en définitive que rien ne vient établir que la constitution de la s.c.i n'avait d'autre but que de permettre à l'actionnaire principal de se constituer un patrimoine immobilier, derrière une s.c.i fictive aux frais de la société commerciale et au détriment des créanciers de cette dernière ; PAR CES MOTIFS Met hors de cause Me Yvon Z... Taillanter, Réforme le jugement déféré, Déboute Me Gilles Pellegrini, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Cofadis gastronomie, de sa demande d'extension à la s.c.i Y..., de la liquidation judiciaire ouverte à l'égard de la société Cofadis gastronomie ; Z... déboute de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de Me Gilles Pellegrini, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Cofadis gastronomie; Admet Me Cossec, avoué, au bénéfice des dispositions d le'article 699 du nouveau code de procédure civile. Z... GREFFIER Z... PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 2000/23665
Date de la décision : 14/12/2001

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Ouverture - Cas - Confusion des patrimoines - Critères

La liquidation judiciaire d'une personne morale ne peut être étendue à une autre qu'en cas de confusion de leurs patrimoines ou de fictivité de l'une d'entre elles. S'agissant d'une société prétendue fictive ayant un objet social déterminé dans le champ duquel s'inscrivent l'acquisition à ses frais de l'immeuble et sa mise en location, le fait qu'elle ait donné le bien à bail à une société commerciale pour un loyer constituant l'unique ressource de cette der- nière, n'établit pas que le principe de l'autonomie patrimoniale, corollaire de la personnalité morale, a été transgressé et il en est a fortiori de même de la cir- constance que ce loyer a été payé jusqu'à l'ouverture de la seconde procédu- re de redressement judiciaire. Par ailleurs, la communauté d'associés et de di- rigeants et la localisation à une même adresse des sièges sociaux sont impropres à caractériser la fictivité ou la confusion des patrimoines. Dans ces conditions, rien ne vient établir que la constitution de la société prétendue ficti- ve n'avait d'autre but que de permettre à l'actionnaire principal de se constitu- er un patrimoine immobilier, derrière une société fictive aux frais de la société commerciale et au détriment des créanciers de cette dernière


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2001-12-14;2000.23665 ?
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