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31/05/2001 | FRANCE | N°2000/16719

France | France, Cour d'appel de Paris, 31 mai 2001, 2000/16719


COUR D'APPEL DE PARIS 24è chambre, section C ARRÊT DU 31 MAI 2001

(N 341 , 7 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

2000/16719 Décision dont appel : Ordonnance rendue le 18/07/2000 par le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL 8ème Ch - Cab. H - RG n : 2000/05351 Date ordonnance de clôture : 5 Avril 2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION PARTIELLE APPELANT : Monsieur X... Y... ... par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoué assisté de Maître RAOUL-DUVAL Isabelle, Avocat Toque R241 INTIME : Mad

ame Z... divorcée X... Gisèle demeurant 5 Domaine de Grosbois - 94470 BOI...

COUR D'APPEL DE PARIS 24è chambre, section C ARRÊT DU 31 MAI 2001

(N 341 , 7 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

2000/16719 Décision dont appel : Ordonnance rendue le 18/07/2000 par le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL 8ème Ch - Cab. H - RG n : 2000/05351 Date ordonnance de clôture : 5 Avril 2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION PARTIELLE APPELANT : Monsieur X... Y... ... par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoué assisté de Maître RAOUL-DUVAL Isabelle, Avocat Toque R241 INTIME : Madame Z... divorcée X... Gisèle demeurant 5 Domaine de Grosbois - 94470 BOISSY SAINT LEGER représentée par Maître BODIN-CASALIS, avoué assistée de Maître LE PASTEUR, Avocat COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré : Président :

Mondane COLCOMBET Conseiller : Danielle BELLOT Conseiller : Viviane GRAEVE GREFFIER : Philippe BLAISE ayant assisté aux débats et au prononcé de l'arrêt DÉBATS : A l'audience non publique du 26 avril 2001 ARRÊT Prononcé publiquement par Mondane COLCOMBET, Président, laquelle a signé la minute avec Philippe BLAISE, Greffier

----------------- La Cour est saisie d'un appel de Monsieur X... d'une décision du 18 juillet 2000 du juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Créteil qui a :

-condamné Monsieur X... à verser à Madame Z... en substitution forfaitaire à la rente qu'il servait jusqu'à présent à cette dernière un capital d'un million de francs,

-dit que ce capital sera payé à concurrence de 900.000F dans le délai

de quinze jours après la date où la décision sera passée en force de chose jugée qui porteront intérêt à 1% par mois au-delà (tant que la somme ne sera pas versée en totalité) et à concurrence de 100.000F dans le délai de six mois après la même date et avec les mêmes intérêts moratoires,

-condamné Monsieur X... à payer à Madame Z... une indemnité de 5.000F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile et aux dépens. Référence faite à la décision déférée pour l'exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties et aux dernières conclusions de l'appelant du 28 février 2001 et de l'intimée du 16 février 2001 en ce qui concerne leurs demandes et moyens actuels, il convient de rappeler que le divorce des parties a été prononcé par jugement du 26 novembre 1988 qui a homologué la convention définitive qui prévoyait le versement à l'épouse d'une prestation compensatoire de 114.000F par an avec indexation, étant précisé qu'en cas de changement imprévu de ses ressources ou de ses besoins, chacun des époux pourrait demander au juge de réviser cette prestation. D'un commun accord, les parties ont réduit à compter du premier mars 1997 à 7.500F le montant de la rente mensuelle initialement fixée à 9.500F. Par requête du 5 juin 2000, Monsieur X... a saisi le juge aux affaires familiales d'une demande de révision de cette rente au motif qu'il connaissait une diminution drastique de ses revenus. PRÉTENTIONS DES PARTIES Monsieur X... demande à la Cour de :

-le déclarer recevable et fondé en son appel, et en conséquence,

-infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, Vu les dispositions des articles 20,23, 3, 4, 6, 7, 10, 11 et 15 de la loi n°2000-596 du 30 juin 2000 ainsi que l'article 272 du Code civil, A titre principal,

-fixer à 180.000F le montant complémentaire de prestation

compensatoire en capital dont Monsieur X... devra s'acquitter à titre de paiement forfaitaire et définitif en lieu et place de la rente précédemment allouée par jugement du 26 novembre 1988 du Tribunal de grande instance de Créteil,

-dire et juger que Monsieur X... devra s'acquitter de ce capital à l'égard de Madame Z... en trois versements de 60.000F dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir, A titre subsidiaire, -réduire à 1000F par mois le montant de la rente versée à titre de prestation compensatoire et ce, dans le délai de huit ans à compter de l'arrêt à intervenir,

-condamner Madame Z... à verser à Monsieur X... la somme de 20.000F au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile et aux dépens. Il expose que la loi nouvelle du 30 juin 2000 est applicable à la présente instance conformément aux dispositions particulières et transitoires des articles 20 et suivants, qu'à la rente à vie peut être désormais substitué un capital forfaitairement versé, que la révision de la rente et la substitution d'un capital peuvent être conjuguées, que le nouvel article 276-3 du Code civil ainsi que l'article 279 dans sa nouvelle rédaction prévoient expressément la révision en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties, que la demande de révision doit donc être examinée au regard de l'évolution de sa situation mais également au vu de l'amélioration de celle de la créancière. Il fait valoir qu'il a subi une diminution durable et très importante de ses revenus, de l'ordre de 60% du fait de deux licenciements alors que ses charges sont restées identiques, que, pour sa part, Madame Z... a actuellement une situation confortable puisqu'elle a un emploi de secrétaire à temps partiel dans l'activité familiale florissante d'élevage et d'entraînement des chevaux de course, que sa famille

fortunée, propriétaire d'un important patrimoine, a constitué un GFA dont Madame Z..., qui a bénéficié de donations-partage, possède avec son frère la nue-propriété des parts, qu'elle a pu se constituer une épargne sur les montants versés au titre de la prestation compensatoire et qui s'élèveront lors de la décision prévisible de la Cour à plus de 1.300.000F. Il ajoute qu'il est remarié, que son épouse n'exerce plus d'activité professionnelle et que lui-même compte tenu de son âge ne retrouvera pas sa situation professionnelle antérieure. Il reproche à la décision déférée de contenir des contradictions flagrantes et d'avoir pour effet de lui faire supporter un montant supérieur à celui fixé initialement. Madame Z... demande à la Cour de :

-déclarer Monsieur X... non fondé en son appel,

-l'en débouter ainsi que de l'ensemble de ses demandes,

-la recevoir en son appel incident, y faisant droit et infirmant dans cette mesure la décision entreprise,

-dire n'y avoir lieu à révision de la prestation compensatoire,

-fixer à la somme de 2.700.000F le montant du capital dû à cette dernière en substitution de la rente de 7.500F convenue,

-débouter Monsieur X... de toutes prétentions plus amples et contraires,

-le condamner au paiement d'une somme de 15.000F en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel. Elle expose que c'est par suite d'une appréciation erronée des éléments qui lui étaient soumis que le premier juge a pu considérer qu'il y avait lieu à révision de la prestation compensatoire prévue par les parties, que la loi nouvelle ne saurait avoir pour effet de porter atteinte aux droits régulièrement acquis sous l'empire de la législation antérieure, que les demandes de révision et de substitution du capital sont

totalement indépendantes, que la demande de Monsieur X... ne peut s'analyser qu'au regard de la clause de révision insérée dans la convention définitive de divorce et au regard des changements intervenus dans les seuls revenus et besoins de l'époux demandeur et non de l'autre époux. Elle fait valoir que, jusqu'en mars 2000, Monsieur X... a perçu un revenu mensuel de 52.910F, que sa situation actuelle est provisoire, qu'il a perçu près d'un million de francs lors de son licenciement, a des indemnités de chômage et les conditions de révision de la rente ne sont pas réunies. Elle ajoute que s'agissant de la substitution d'un capital à la rente, elle doit s'opérer de façon à ce que le crédit rentier ne soit pas lésé, que le capital représentatif doit correspondre, dans l'esprit et le temps, à la rente viagère précédemment décidée et convenue, que, compte tenu de son âge et de son espérance de vie, elle est fondée à prétendre au versement d'un capital de 2.700.000F.

CECI ETANT EXPOSE, LA COUR, Considérant que la loi du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire, dont les travaux parlementaires traduisent le souci du législateur de faire bénéficier les rentes actuellement en cours du nouveau dispositif de révision et de transformation en capital, prévoit expressément en son article 23 "que ses dispositions sont applicables aux instances en cours qui n'ont pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée" ; que cet article concerne à la fois les demandes en fixation et en révision de la prestation compensatoire, les articles 20 et 21 prévoyant au titre des dispositions transitoires la révision des rentes viagères et temporaires attribuées avant l'entrée en vigueur de la loi ; Que la loi nouvelle est ainsi applicable à la présente instance aux fins de révision de la rente viagère initialement engagée par Monsieur X... le 5 juin 2000 sur le fondement de la

clause de la convention définitive des époux homologuée par jugement de divorce, laquelle prévoyait que "conformément aux dispositions de l'article 279 du Code civil, chacun des époux pourra en cas de changement imprévu de ses ressources et ses besoins, demander au juge de réviser la prestation compensatoire prévue au profit de Madame Z... " ; Que, sans distinction du mode judiciaire ou conventionnel de la fixation de la prestation compensatoire, l'article 20 de la loi nouvelle précise que la révision des rentes viagères attribuées avant l'entrée en vigueur de la loi peut être demandée dans les conditions de l'article 276-3 du Code civil lequel subordonne la révision, la suspension ou la suppression de la rente viagère à un changement important dans les ressources ou les besoins des parties ; Que la demande de Monsieur X... doit donc être appréciée au regard de ce texte et il appartient à la juridiction d'examiner les changements qui ont pu intervenir non seulement dans les ressources et besoins de Monsieur X... mais également dans ceux de Madame Z..., étant rappelé que le premier mars 1997, la rente mensuelle fixée initialement à la somme de 9.500F a été d'un commun accord entre les parties réduite à la somme de 7.500F, montant aujourd'hui remis en cause ; Considérant qu'il résulte ainsi des pièces produites que Monsieur X... déclarait en 1998 et 1999 un revenu professionnel de 679.780F et 739.905F et des revenus fonciers de 49.152F et 13.700F ; qu'il percevait en mars 2000 trois rémunérations mensuelles d'un montant net imposable de 26.571 F de l'AIP, de 24.619F d'Europe News et 3.920F d'HFA ; qu'il a fait l'objet d'un licenciement pour deux de ses activités en mars 2000 (AIP et HFA) et a ainsi perdu 55% de ses salaires environ alors que ses charges restaient identiques et qu'il devait rembourser, ainsi qu'il en justifie, plusieurs emprunts aux échéances de 9.825F, 1.541F, 1198F ainsi qu'un crédit à la consommation ; qu'il a perçu à l'occasion de son départ une indemnité

transactionnelle nette de 739.200F ainsi que des indemnités de licenciement d'un montant de 161.085F ; qu'il a 55 ans, que l'emploi qu'il a conservé s'inscrit dans le cadre d'un contrat d'un emploi à durée déterminée du 4 septembre 2000 au 30 juin 2001, l'employeur se réservant de reconduire éventuellement sa collaboration avec Monsieur X... ; qu'il est remarié avec une femme sans activité professionnelle ; que l'allocation unique dégressive perçue depuis le 26 mai 2000 (à taux plein jusqu'en mai 2002) s'élève à 476F soit 14.298F mensuels, ce qui compense partiellement et momentanément la perte de ses ressources ; Considérant que pour sa part, Madame Z... qui est âgée actuellement de 56 ans, habite dans des locaux appartenant à son père et travaille désormais à mi-temps en qualité de secrétaire dans la société familiale EARL Z... qui exploite un élevage de chevaux et bovins dont l'activité est prospère ; qu'en 1998, elle a déclaré un revenu professionnel annuel de 30.689F ; qu'en 1999, son salaire s'est élevé à 31.057F ; que la famille Z... a constitué un groupement foncier agricole en 1991 dont les propriétés rurales le composant ont été à cette date évaluées à 5.010.000F ; que suite à deux donations partage dont une intervenue en 1996, Madame Z... et son frère ont reçu chacun la nue-propriété de la moitié des parts de ce GFA, leurs parents en ayant l'usufruit ; que ce GFA donne à bail à l'EARL ECURIE Z... ses propriétés, objet d'une hypothèque d'un montant de 1.200.000F, pour l'activité d'élevage et entraînement des chevaux de course ; Qu'au vu de ces éléments, la perte de deux des trois activités professionnelles et la baisse sensible et progressive de ses revenus qui en résulte, dont rien ne permet d'affirmer qu'elle ne sera que provisoire, constituent un changement important dans la situation de Monsieur X... alors que dans le même temps, la situation de Madame Z... s'est améliorée, ce qui justifie la révision de la rente et donc sa réduction ;

Considérant que l'article 20 de la loi du 30 juin 2000 prévoit au titre des dispositions transitoires que la substitution de capital peut être demandée dans les conditions de l'article 276-4 du Code civil ; qu'il convient de constater que rien ne s'oppose à ce que cette révision s'articule avec la substitution d'un capital à la rente, laquelle est sollicitée à la fois par Monsieur X... qui souhaite qu'il soit fixé à 180.000F et également par Madame Z..., qui s'y opposait en première instance et reste hostile à toute réduction de la prestation compensatoire, mais demande elle-même par voie d'appel incident la substitution d'un capital de 2.700.000F à la rente ; Que cette demande de substitution doit en conséquence être accueillie et par l'effet conjugué de la révision de la rente viagère et de sa capitalisation la Cour substitue à la rente viagère due à titre de prestation compensatoire pour l'avenir un capital de 850.000F payable immédiatement sans que la situation du débiteur ne justifie d'accorder des délais de paiement ; que le jugement sera réformé de ce chef ; Considérant qu'il y a lieu en conséquence par les motifs exprimés ci-dessus de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a accueilli les demandes en révision de prestation compensatoire de Monsieur X... et en subtitution à la rente d'un capital, mais de l'infirmer sur le montant dudit capital et sur ses modalités de règlement ; Sur les frais et dépens Considérant que, compte tenu de l'issue du litige, il n'est pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais et dépens d'appel, les frais et dépens de première instance restant répartis conformément à la décision déférée qui sera confirmée de ce chef ; PAR CES MOTIFS Vu le jugement du juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL en date du 26 novembre 1988, Vu les dispositions de la loi du 30 juin 2000, Confirme le jugement déféré, à l'exception du montant du capital substitué à la rente et de ses modalités de

règlement, Le réformant de ces chefs et statuant à nouveau, Dit que Monsieur X... devra verser à Madame Z... en substitution forfaitaire à la rente due à titre de prestation compensatoire un capital de huit cent cinquante mille francs (850.000F ou 129.581,66 euros) et ce pour l'avenir et à compter du présent arrêt, Dit n'y avoir lieu à délais de paiement, Déboute les parties de toute autre demande, Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d'appel. Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 2000/16719
Date de la décision : 31/05/2001

Analyses

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Règles spécifiques au divorce - Prestation compensatoire - Versement - Rente - Rente viagère - Révision - Conditions - Détermination - /

Il résulte de l'article 20 de la loi du 30 juin 2000, que la révision des rentes via- gères attribuées avant l'entrée en vigueur de cette loi, qu'elles aient été fixées par le juge ou par convention des époux, peut être demandée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties. Dés lors, c'est au regard des conditions de l'article 276-3 du Code civil qu'il convient d'apprécier la demande de révision de la rente viagère, la loi du 30 juin 2000 ayant affirmé, en son article 23, sa vocation à s'appliquer aux instances en cours qui n'ont pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée, et non au regard de la clause de ladite convention précisant les conditions de révision de la prestation compensatoire


Références :

Loi du 30 juin 2000, articles 20, 23 Code civil, article 276-3

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2001-05-31;2000.16719 ?
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