COUR D'APPEL DE PARIS 14è chambre, section A ARRÊT DU 21 FÉVRIER 2001 (N , 6 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2001/01569 Décision dont appel : Ordonnance de référé rendue le 11/01/2001 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS - RG n : 2000/12736 Francis DELPHIN, Vice-Président Procédure à jour fixe Nature de la décision :
CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION APPELANTE : La Société DE GESTION DE LA SALLE DE BAINS -S.G.S.B. - SARL prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 15 avenue Victor Hugo - 75016 PARIS représentée par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoué assistée de Maître Isabelle DROUILLAT, Toque P 354, SCP PINOT DE VILLECHERON INTIMÉE : La Société COMPAGNIE D'ORGANISATION DES SALONS DES PROFESSIONS SA prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 22 avenue Franklin Roosevelt - 75008 PARIS représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoué assistée de Maître Daniel FAUQUET, Toque N 701, Avocat au Barreau de NANTERRE, Bureau Francis LEFEBVRE COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré : Président : M. LACABARATS X... : Mme Y... et M. PELLEGRIN Z... : aux débats et au prononcé de l'arrêt, Mme LEBRUMENT A... : à l'audience publique du 30 janvier 2001 ARRÊT : contradictoire Prononcé publiquement par M. LACABARATS, Président, lequel a signé la minute de l'arrêt avec le greffier. Vu l'appel interjeté le 15 janvier 2001 par la société de Gestion de la salle de Bain ( S.G.S.B.) d'une ordonnance de référé prononcée le 11 janvier 2001 par le président du tribunal de grande instance de Paris qui, à la demande de la société Compagnie d'Organisation des Salons des Professions (C.O.S.P.) a ordonné , sous astreinte la poursuite du contrat signé le 4 mai 1999 par S.G.S.B. et la C.O.S.P. jusqu'à ce qu'une décision exécutoire au fond ait été rendue ; Vu l'assignation à plaider à jour fixe devant la cour d'appel signifiée le 24 janvier
2001 par la S.G.S.B. qui demande à la cour d'infirmer l'ordonnance, d'annuler une requête et une ordonnance du 22 septembre 2000, de dire n'y avoir lieu à référé sur la demande de la C.O.S.P. et de condamner celle-ci à lui payer la somme de 50.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Vu les conclusions du 30 janvier 2001 par lesquelles la C.O.S.P. demande à la cour de confirmer l'ordonnance, de la préciser en constatant qu'en vertu du contrat du 4 mai 1999 la C.O.S.P. est bien titulaire d'une licence de marque, du droit exclusif d'organiser le salon 2002 prévu par le contrat et que la S.G.S.B. ne dispose pas du droit de choisir ou fixer la date d'organisation de ce salon, d'ordonner à titre conservatoire le respect par la S.G.S.B. de ces droits issus du contrat, de condamner la S.G.S.B. à lui payer la somme de 150.000 francs pour abus de procédure et une indemnité du même montant sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant qu'il résulte des écritures des parties et des pièces versées aux débats:
. que la S.G.S.B., émanation de la Fédération des industries de la salle de bains, a pour activité la communication dans le domaine de la salle de bains pour le compte des fabricants de ce secteur ;
. qu'elle est titulaire d'une marque dénommée "Salles de bains d'aujourd'hui" ;
. qu'elle s'est rapprochée de la C.O.S.P. spécialisée dans l'organisation de salons professionnels afin que sa marque soit exploitée dans le cadre d'un salon biennal de la salle de bains ouvert aux professionnels et au grand public ;
. qu'à cette fin les parties ont signé le 4 mai 1999 un "contrat de concession de licence de marque pour l'exploitation d'un salon professionnel " ;
. que selon les principales stipulations de ce contrat, la S.G.S.B. a
chargé en exclusivité la C.O.S.P. de l'organisation en 2000, 2002, 2004 et 2006 d'un salon dénommé "salles de bains d'aujourd'hui" et lui a concédé à ce titre, moyennant le paiement d'une redevance, une licence d'exploitation de sa marque, que la S.G.S.B. disposait d'un "droit de veto" pour éventuellement s'opposer à la date du salon proposée par la C.O.S.P. , qu'elle avait également le droit de vérifier ou faire vérifier la comptabilité que C.O.S.P. devait établir de manière spécifique pour ce salon, qu'un droit de résiliation était ouvert aux parties dans les conditions prévues par l'article 11 de la convention ;
. qu'un litige est né entre les parties sur la date du salon 2002, la C.O.S.P. ayant prévu sa tenue pour la période du 28 mai au 2 juin 2002 alors que la S.G.S.B. a estimé qu'il devait avoir lieu au mois de février 2002 ;
. que le 14 décembre 2000, la S.G.S.B. a notifié sa décision de "résilier à effet immédiat le contrat du 4 mai 1999, en interdisant à la C.O.S.P. d'utiliser ou d'exploiter la marque "salles de bains d'aujourd'hui", la licence exclusive consentie par le même contrat étant "expressément résiliée" ;
. que la S.G.S.B. a fait signifier à la C.O.S.P. le 21 décembre 2000 une assignation devant le tribunal de grande instance pour voir notamment dire que la C.O.S.P. a manqué à ses obligations contractuelles et "prononcer la résiliation du contrat du 4 mai 1999 au 14 décembre 2000, date de l'envoi de la lettre de résiliation par la S.G.S.B." ;
. que la C.O.S.P. a pris l'initiative de la présente procédure de référé par une requête du 22 décembre 2000 en autorisation d'assigner d'heure à heure, ladite autorisation ayant été accordée par ordonnance du même jour, puis par une assignation en référé délivrée le 26 décembre pour une audience du 28 décembre 2000 ; Sur la
régularité de la procédure de première instance Considérant que la S.G.S.B. invoque la nullité de la requête afin d'assigner d'heure à heure et de l'ordonnance conférant cette autorisation en faisant valoir que ces actes sont fondés à tort sur l'article 811 du nouveau code de procédure civile; Considérant cependant que l'erreur de visa ainsi commise est sans conséquence sur la validité de la procédure dès lors que la demande de la C.O.S.P. tendait manifestement à la mise en oeuvre de l'action prévue par l'article 485 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile , que la S.G.S.B. ne s'est nullement méprise sur la nature des prétentions émises par la requérante et qu'elle n'établit pas le grief que lui aurait causé cette prétendue irrégularité ; que l'exception soulevée doit être rejetée ; Sur le bien-fondé de l'appel Considérant que la S.G.S.B. soutient que le juge des référés n'a pas constaté la réalité de l'imminence d'un dommage ou d'un trouble manifestement illicite, que la C.O.S.P. a violé ses obligations contractuelles en employant des manoeuvres pour fixer la date du salon 2002 sans permettre à la S.G.S.B. d'exercer son droit de veto et en refusant à cette société tout accès à sa comptabilité, que la décision de poursuite du contrat crée pour la S.G.S.B. un trouble manifestement illicite puisqu'elle se trouve privée de son droit légal et contractuel de résilier le contrat; Considérant qu'il est constant qu'au sens de l'article 809 alinéa 1er du nouveau code de procédure civile , le trouble manifestement illicite justifiant l'intervention du juge des référés peut être constitué par la violation d'une stipulation contractuelle ; Considérant qu'en l'espèce les parties ont signé un contrat donnant à chacune une faculté de résiliation unilatérale susceptible d'être exercée selon les modalités suivantes (article 11 alinéa 4) :
"En cas d'inexécution par l'une ou l'autre des parties de l'une quelconque de ses obligations au titre du présent contrat et après
une mise en demeure d'avoir à se conformer à ces obligations, restée infructueuse dans un délai de trois mois à compter de sa réception par lettre recommandée avec accusé de réception, le présent contrat pourra être résilié par l'autre partie qui sera en droit de percevoir de la partie défaillante une indemnité égale à 15 % du chiffre d'affaires du dernier salon réalisé " ; Considérant qu'il n'appartient en aucune manière à la juridiction des référés saisie en première instance par la C.O.S.P. et en appel par la S.G.S.B. de se prononcer sur l'imputabilité de la rupture du lien contractuel ayant existé entre les parties, sur les conditions dans lesquelles a été fixée la date du salon prévu pour l'année 2002, sur une éventuelle entrave apportée à l'exercice par la S.G.S.B. de ses prérogatives quant au choix de cette date et plus généralement sur les divers manquements contractuels reprochés à la C.O.S.P. ; Considérant en revanche que, contrairement à ce que prétend l'appelante, aucune circonstance ne l'autorisait à notifier à la C.O.S.P. une résiliation du contrat avec effet immédiat ; qu'il convient à cet égard de souligner que si, par lettre du 20 octobre 2000 , la C.O.S.P. a été invitée à négocier un accord portant notamment sur les dates du prochain salon, c'est seulement par celle du 14 décembre 2000 que la S.G.S.B. a manifesté la volonté de se prévaloir des stipulations relatives à la résiliation du contrat pour lui faire produire effet le même jour ; Considérant pourtant que, par des énonciations dépourvues de toute ambigu'té et ne nécessitant aucune interprétation, l'article 11 du contrat du 4 mai 1999 indique que toute violation par une partie de ses engagements contractuels doit, si l'autre partie décide de mettre en oeuvre son droit de résiliation, donner lieu à une procédure de mise en demeure et de préavis dont les modalités sont très précisément définies, qu'étant tenue, quel que soit le comportement de l'autre partie et la nature
du manquement incriminé, de se conformer aux prévisions de la convention qui fait la loi des cocontractants et n'admet aucune exception à l'exigence formulée, la S.G.S.B. a, par sa lettre de rupture du 14 décembre 2000, violé de manière évidente et dans des conditions constitutives d'un trouble manifestement illicite les termes du contrat ; Considérant que le pouvoir conféré au juge des référés par l'article 809 alinéa 1er du nouveau code de procédure civile de prononcer les mesures de remise en état qui s'imposent pour faire cesser un tel trouble l'autorise à prescrire la continuation de relations commerciales irrégulièrement rompues ; qu'en dépit de ce que prétend la S.G.S.B., une mesure de cette nature ne la prive nullement de son droit de résilier le contrat dès lors qu'elle rappelle seulement aux cocontractants la nécessité de se conformer à la procédure de résiliation qu'elles ont définie et qu'en toute hypothèse elle présente un caractère provisoire ne préjugeant en rien de la décision des juges du fond ; que l'ordonnance attaquée doit dès lors être confirmée, sans qu'il y ait lieu toutefois comme le souhaiterait la C.O.S.P. d'ajouter à la décision les précisions requises, celles-ci se bornant à reprendre les prérogatives conférées à la C.O.S.P. par le contrat dont les effets sont provisoirement prorogés ; Considérant que, bien que non fondé, l'appel de la S.G.S.B. n'a pas été formé dans des conditions fautives justifiant l'allocation à la C.O.S.P. de dommages-intérêts pour abus de procédure ; Considérant en revanche que la S.G.S.B., qui succombe en son appel, doit être condamnée aux dépens et au paiement à l'intimée d'une indemnité pour ses frais de procédure non compris dans les dépens ; PAR CES MOTIFS Rejette l'exception de nullité soulevée par la S.G.S.B., Confirme l'ordonnance déférée, Rejette toutes autres demandes, Condamne la S.G.S.B. à payer à la C.O.S.P. la somme de 50.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure
civile , Condamne la S.G.S.B. aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le Z...,
Le Président,