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25/01/2000 | FRANCE | N°1999/12669

France | France, Cour d'appel de Paris, 25 janvier 2000, 1999/12669


COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 25 JANVIER 2000

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1999/12669 Pas de jonction Décision dont recours : Decision de la Commission des opérations de bourse en date du 04/05/1999 Nature de la décision :

contradictoire Décision : irrecevabilité DEMANDEUR AU RECOURS :

Monsieur DOMAS X... ,... par Maître HUYGHE,52, Boulevard de Sébastopol 75003 PARIS Assisté de Maître SENDEK,250, bis Boulevard Saint-Germain 75007 PARIS -Toque D 68- EN PRESENCE DE : -La Commission des Opérations de Bourse,

17, Place de la Bourse 75082 PARIS CEDEX 2 Représentée aux débats par Monsieur Y...

COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 25 JANVIER 2000

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1999/12669 Pas de jonction Décision dont recours : Decision de la Commission des opérations de bourse en date du 04/05/1999 Nature de la décision :

contradictoire Décision : irrecevabilité DEMANDEUR AU RECOURS :

Monsieur DOMAS X... ,... par Maître HUYGHE,52, Boulevard de Sébastopol 75003 PARIS Assisté de Maître SENDEK,250, bis Boulevard Saint-Germain 75007 PARIS -Toque D 68- EN PRESENCE DE : -La Commission des Opérations de Bourse,17, Place de la Bourse 75082 PARIS CEDEX 2 Représentée aux débats par Monsieur Y..., muni d'un mandat régulier. COMPOSITION DE LA COUR : Z... des débats et du délibéré, Madame FAVRE , Président Monsieur LACABARATS, Président Monsieur REMENIERAS, Conseiller Madame RADENNE, Conseiller Monsieur LE DAUPHIN, Conseiller GREFFIER : Z... des débats : Madame JAGODZINSKI Z... du prononcé de l'arrêt : Madame A... MINISTERE B... : Monsieur C..., Substitut Général DEBATS : A l'audience publique du 14 Décembre 1999, ARRET : Prononcé publiquement le VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE, par Madame FAVRE, Président, qui en a signé la minute avec Madame A..., Greffier.

* * *

Après avoir, à l'audience du 14 Décembre 1999, entendu le conseil du requérant, les observations de Monsieur le représentant de la Commission des opérations de bourse et celles du Ministère B...;

Vu les mémoires, pièces et documents déposés au greffe à l'appui du recours, et les autres pièces du dossier ;

*

*

*

Depuis sa création en 1980, la société MAXI LIVRES PROFRANCE, dont les titres sont négociés sur le Second Marché, s'est développée autour du concept de vente de livres neufs à prix réduits et de la réédition d'ouvrages. Elle intervient en tant que centrale d'achats vis-à-vis de ses filiales et sous-filiales et à l'égard d'autres distributeurs, telles que les sociétés T.D.S. et LITTERAL DIFFUSION. Le 21 mai 1997, le président de la Commission des opérations de bourse a décidé d'ouvrir une enquête sur l'information financière diffusée par la société MAXI LIVRES PROFRANCE en 1996 et 1997.

Au vu des résultats de cette enquête la Commission des opérations de bourse a notifié le 4 août 1998 à X... DOMAS, président de la société MAXI-LIVRES PROFRANCE, des griefs sur le fondement des articles 2 et 3 du réglement n° 90-02 relatif à l'obligation d'information du public.

Retenant le manquement de X... DOMAS aux dispositions des articles 2 et 3, alinéa 1er, du réglement n° 90-02 à l'occasion de la

diffusion de communiqués publiés le 15 novembre 1996 dans le quotidien "La Tribune", les 31 janvier et 1er février 1997 dans le quotidien "Les Echos" et de la publication du rapport d'activité de la société pour le premier semestre 1996-1997 au B.A.L.O. du 28 février 1997, la Commission des opérations de bourse a décidé le 4 mai 1999 qu'il y a lieu de prononcer une sanction pécuniaiaire de 50.000F à l'encontre de X... DOMAS.

X... DOMAS a formé un recours contre cette décision le 15 juin 1999.

Par un mémoire déposé au greffe le 13 juillet 1999 il a demandé à la Cour d'infirmer et d'annuler la décision de sanction prononcée contre lui le 4 mai 1999 en soutenant que la Commission des opérations de bourse aurait dû tirer comme conclusion de son instruction, si insuffisante soit-elle dans cette affaire, que ne pouvait être retenue à la charge du requérant aucune information inexacte ou trompeuse, que les informations diffusées n'ont suscité aucune observation ou plainte de la part de quiconque et n'ont eu aucune incidence démontrée sur le marché du titre de la société MAXI-LIVRES PROFRANCE.

Par un mémoire déposé le 10 septembre 1999 la Commission des opérations de bourse a conclu au rejet du recours en soulignant que la procédure de sanction ouverte à l'encontre de X... DOMAS a été régulièrement conduite, dans le respect du principe du contradictoire et en soutenant, sur le fond, que le manquement prévu par les articles 2 et 3, alinéa 1er, du réglement n° 90-02 ne requiert pas la démonstration d'un élément intentionnel, que le défaut d'exactitude et de sincérité des informations communiquées est établi et que, par sa modération, la sanction prononcée a pris en considération le fait que la communication financière était rendue délicate en raison des sérieuses difficultés que la société MAXI-LIVRES PROFRANCE

connaissait à l'époque considérée.

X... DOMAS a déposé un mémoire en réponse le 30 septembre 1999.

Réitérant son argumentation sur l'inexistence du grief retenu contre lui, le requérant a ajouté que la procédure suivie devant la Commission des opérations de bourse viole les droits de la défense et les régles de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, l'organisme cumulant les pouvoirs de décision de l'engagement des poursuites, de procéder à l'instruction de l'affaire, de juger du bien fondé de la poursuite et de défendre devant la cour les décisions qu'elle a prises.

Par des observations récapitulatives déposées le 27 octobre 1999, la Commission des opérations de bourse a estimé que la procédure suivie devant elle n'a pas pour effet de porter atteinte à l'exigence d'un procès équitable et soutenu à nouveau, sur le fond, que les communiqués litigieux contenaient des informations inexactes ne concordant pas avec la situation réelle de la société.

X... DOMAS n'a pas déposé dans le délai fixé par la cour de mémoire en réplique aux écritures récapitulatives de la Commission des opérations de bourse.

Après avoir entendu, à l'audience du 14 décembre 1999, le conseil du requérant en sa plaidoirie, le représentant de la Commission des opérations de bourse en ses observations, le ministère public en ses observations tendant au rejet du recours, le conseil du requérant ayant eu la parole en dernier, pour répliquer aux conclusions du ministère public, la cour a mis l'affaire en délibéré au 25 janvier 2000. * * * Sur la procédure

Considérant que la contestation par X... DOMAS de la conformité de la procédure suivie devant la Commission des opérations de bourse aux prescriptions de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ne peut être déclarée recevable et n'a pas lieu d'être examinée dès lors

que le requérant se borne à évoquer une prétendue violation des droits de la défense sans demander à la cour d'annuler les actes de la procédure et qu'en toute hypothèse ce grief, qui apparait seulement sous cette forme dans le mémoire en réplique du 30 septembre 1999, n'a pas été présenté dans le délai d'un mois imposé par l'article 8, alinéa 3, du décret n° 90-263 du 23 mars 1990 ; Sur le fond

. Le communiqué publié le 15 novembre 1996 dans le quotidien "La Tribune"

Considérant que ce communiqué indique, d'une part que le chiffre d'affaires consolidé du groupe MAXI-LIVRES PROFRANCE a progressé de 28,9% sur les 6 premiers mois de l'année, par rapport à l'année précédente, d'autre part que "sauf événements exceptionnels, l'activité du groupe progressera de façon satisfaisante sur l'ensemble de l'exercice 96/97" ;

Considérant pourtant que, dès le 19 février 1996, X... DOMAS avait informé le conseil d'administration de la croissance préoccupante des stocks ainsi que du montant élevé des encours, non rémunérés, générés par la progression des créances sur les sociétés T.D.S. et LITTERAL DIFFUSION; que ces difficultés et la dégradation de la situation financière de la société MAXI-LIVRES PROFRANCE ont à nouveau été constatées et analysées par le conseil d'administration lors de sa réunion du 22 juillet 1996, le rapport préparatoire à cette réunion mentionnant, au nombre "des causes qui ont entraîné les mauvais résultats", un "surstock de 50 millions" et l' "augmentation de la créance sur TDS/LITTERAL DIFFUSION" ;

Considérant en outre que, selon une analyse faite au mois de novembre 1996 des comptes de la société, la situation de trésorerie de celle-ci à cette époque était "particulièrement difficile" ou, comme l'ont indiqué les commissaires aux comptes de la société dans une

note du 18 novembre 1996, "extrêmement tendue" ;

Considérant qu'à défaut de circonstances nouvelles ou d'exécution du plan de maîtrise de l'endettement et de réduction du niveau des stocks proposé au conseil d'administration par son président, le communiqué litigieux ne pouvait passer sous silence de tels faits, de nature à affecter la rentabilité de l'entreprise et à contredire la présentation favorable faite par le requérant de l'état de la société ;

Considérant qu'il importe peu que, comme le souligne X... DOMAS, un communiqué diffusé le 8 août 1996 ait exposé une analyse plus détaillée des résultats financiers de la société dès lors que le texte mis à la disposition du public le 15 novembre 1996 ne comporte aucune référence ou allusion au précédent et révèle par lui-même, compte tenu des omissions constatées, un manquement de son auteur à l'obligation que lui imposait l'article 2 du réglement n° 90-02 de fournir au public une information exacte, précise et sincère ;

. Le communiqué publié dans le quotidien "Les Echos" des 31 janvier et 1er février 1997

Considérant que ce communiqué, relatif aux résultats semestriels 96/97 de la société MAXI-LIVRES PROFRANCE, indique notamment que "le résultat d'exploitation et le résultat courant avant impôt progressent plus rapidement que l'activité, ce qui démontre que les actions commerciales et les mesures de gestion prises au début de l'année 96 commencent à avoir des effets positifs" ; qu'il ajoute que "le résultat consolidé part du groupe avant impôt subit une baisse en raison de la prise en compte des difficultés et des conséquences des mesures de restructuration des sociétés qui n'appartiennent pas aux métiers de base du groupe "et comporte, sous le titre "perspectives", la conclusion suivante : "le recentrage engagé par le groupe MAXI-LIVRES PROFRANCE va s'accompagner d'une consolidation des

métiers considérés comme majeurs et d'une restructuration de l'ensemble des autres sociétés. Pour celles-ci, les mesures prises permettront de limiter progressivement les effets négatifs qui vont peser sur l'exercice 96/97. Les perspectives sur les métiers de base en terme de chiffre d'affaires et de rentabilité confirment les tendances favorables du premier semestre" ;

Considérant cependant que dans une note qualifiée de confidentielle adressée le 15 janvier 1997 à X... DOMAS, le directeur financier de la société, E. DUFAY, indiquait qu'après un répit du 15 décembre 1996 au 15 janvier 1997 dû aux ventes de fin d'année, la situation redevenait "très grave"; qu'en outre subsistaient à l'époque de cette note les causes des difficultés rencontrées par la société, liées en particulier à un accroissement préoccupant du niveau des stocks et des créances sur les sociétés T.D.S. et LITTERAL DIFFUSION, ces faits étant notamment évoqués par les commissaires aux comptes de la société MAXI-LIVRES PROFRANCE à l'occasion de la "procédure d'alerte" déclenchée par eux au mois de novembre 1996 puis au mois d'avril 1997 ainsi que dans le plan de reprise des activités de la société MAXI-LIVRES PROFRANCE présenté au mois d'octobre 1997 par la société OMNIUM DE PARTICIPATIONS ;

Considérant que dans ces conditions, le seul fait par X... DOMAS d'avoir fait diffuser un communiqué occultant des éléments d'appréciation essentiels de la situation financière réelle de la société, évoquant par un terme particulièrement vague les "difficultés" de celle-ci et annonçant, pour son évolution, des "tendances favorables" non confirmées par les faits de l'espèce caractérise une autre violation de l'article 2 du réglement n° 90-02 ;

. Le rapport d'activité du groupe MAXI-LIVRES PROFRANCE pour le premier semestre 1996-1997 publié au B.A.L.O. du 28 février 1997

Considérant qu'après avoir évoqué les résultats de la société MAXI-LIVRES PROFRANCE, analysé notamment les causes du niveau élevé des frais financiers et de la baisse du résultat consolidé du groupe, ce rapport indique en conclusion, au titre des "perspectives", que "l'exercice 1996-1997 constitue une période de transition et de réorganisation qui favorisera la réalisation d'un exercice 1997/1998 en net redressement" ;

Considérant que X... DOMAS fait valoir à juste titre que le rapport en cause mentionne au nombre des difficultés subies par la société, celles liées à la nécessité d'écouler les stocks constitués et de diminuer des encours clients importants ;

Considérant néanmoins que l'information ainsi donnée au public ne peut être tenue pour exacte, précise et sincère, au sens de l'article 2 du réglement n° 90-02, dès lors que la conclusion du rapport est en contradiction avec les éléments de fait disponibles à l'époque considérée ; qu'en effet X... DOMAS lui-même avait indiqué au cours de la réunion du conseil d'administration tenue le 19 février 1997 que la trésorerie de la société "subit une forte tension, qui devrait durer 6 à 9 mois" ; que la société générale a confirmé dans un rapport du mois de février 1997 la situation délicate de l'entreprise, en soulignant notamment l'absence prévisible d'amélioration à court terme de l'état des stocks ; qu'en engageant une seconde "procédure d'alerte" le 28 avril 1997, les commissaires aux comptes de la société MAXI-LIVRES PROFRANCE ont estimé que les faits constatés étaient de nature à "compromettre la continuité de l'exploitation de la société" ; que dans ces conditions, faute de circonstances objectives corroborant le redressement évoqué par le communiqué, la violation du texte susvisé du réglement n° 90-02 est caractérisée ;

Considérant qu'il importe peu que les commissaires aux comptes de la

société n'aient en définitive, dans une attestation publiée par le même numéro du B.A.L.O., émis aucune objection sur la sincérité des informations diffusées, leur opinion n'étant pas susceptible d'exonérer X... DOMAS de sa responsabilité personnelle ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient encore le requérant, cette responsabilité est engagée par le seul fait qu'il a publié, en pleine connaissance de cause eu égard aux documents et avis dont il disposait, des informations tronquées ne donnant pas une image fidèle de la situation économique et financière de la société ;

Considérant qu'est indifférente l'absence d'incidence de l'information critiquée sur le cours du titre MAXI-LIVRES PROFRANCE ; qu'il suffit de constater que, par ses imprécisions et inexactitudes, elle a faussé la connaissance que pouvait avoir le marché de l'état de la société et a ainsi porté atteinte à l'égalité d'information et de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ;

Considérant que la Commission des opérations de bourse était en conséquence en droit, par application des articles 9-1 et 9-2 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, de prononcer une sanction pécuniaire à l'encontre du contrevenant ; qu'elle l'a fait, en adaptant son montant à la gravité relative du manquement commis ; que le recours de X... DOMAS doit dès lors être rejeté ; PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevables les moyens de procédure invoqués par X... DOMAS ;

Rejette le recours formé par X... DOMAS contre la décision prononcée le 4 mai 1999 par la Commission des opérations de bourse ; Condamne X... DOMAS aux dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 1999/12669
Date de la décision : 25/01/2000

Analyses

BOURSE DE VALEURS - Commission des opérations de Bourse - Sanction

Lorsqu'il est établi qu'eu égard aux documents et avis dont disposait le président d'une société mère celui-ci a fait diffuser un communiqué occultant des éléments d'appréciation essentiels de la situation financière réelle de la société, notamment en évoquant par un terme particulièrement vague les difficultés de celle-ci et annonçant pour son évolution des tendances favorables non confirmées, il s'ensuit que le président ne donnent pas une image fidèle de la situation économique et financière de la société au sens de l'article 9-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2000-01-25;1999.12669 ?
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