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02/12/1999 | FRANCE | N°1999-15112

France | France, Cour d'appel de Paris, 02 décembre 1999, 1999-15112


COUR D'APPEL DE PARIS 2ème chambre, section B ARRET DU 2 DECEMBRE 1999

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1999/15112 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 03/06/1999 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS - Chambre des Ventes Immobilières - RG n :1999/3992 Date ordonnance de clôture : / Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : INFIRMATION APPELANTE :

Madame DE LUZ Christiane Valérie Jeanne épouse séparée de biens de X... James demeurant Domaine de Saint Marc 78350 JOUY EN JOSAS représentée par la SCP BOMMART-F

ORSTER, avoué assistée de Maître DIXSAUT, avocat INTIMEE : La S.A. BANQUE S...

COUR D'APPEL DE PARIS 2ème chambre, section B ARRET DU 2 DECEMBRE 1999

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 1999/15112 Pas de jonction Décision dont appel : Jugement rendu le 03/06/1999 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS - Chambre des Ventes Immobilières - RG n :1999/3992 Date ordonnance de clôture : / Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : INFIRMATION APPELANTE :

Madame DE LUZ Christiane Valérie Jeanne épouse séparée de biens de X... James demeurant Domaine de Saint Marc 78350 JOUY EN JOSAS représentée par la SCP BOMMART-FORSTER, avoué assistée de Maître DIXSAUT, avocat INTIMEE : La S.A. BANQUE SCALBERT DUPONT prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 33 avenue le Corbusier 59000 LILLE représentée par la SCP LECHARNY-CALARN, avoué assistée de Maître de GRANVILLIERS, avocat COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats :

Madame KAMARA, magistrat rapporteur, a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, puis elle en a rendu compte à la Cour dans son délibéré; Lors du délibéré : PRESIDENT : Madame KAMARA CONSEILLER : Madame SCHOENDOERFFER CONSEILLER : Monsieur LAURENT-ATTHALIN DEBATS A l'audience publique du 5 NOVEMBRE 1999 GREFFIER (Lors des débats et du prononcé de l'arrêt) Madame FLOTTERER ARRET Contradictoire. Prononcé publiquement par Madame KAMARA, Président, laquelle a signé la minute avec Madame FLOTTERER, Greffier.

Suivant acte notarié du 14 juin 1995, la BANQUE SCALBERT DUPONT a consenti à Mme de LUZ épouse X... un prêt de 1.355.000 F que l'emprunteur s'est engagée à utiliser au paiement du solde du découvert existant sur les livres de la banque ainsi que du solde des trois prêts qui lui avaient été précédemment accordés par la même

banque les 7 juin 1991, 11 mai 1992 et 28 janvier 1994, pour un montant respectif de 100.000 F, 800.000 F et 200.000 F, ledit prêt remboursable à l'expiration d'une durée d'un an avec un intérêt au taux effectif global de 11,92 % l'an, à l'exclusion des commissions des organismes tiers, une hypothèque en 4ème rang, derrière la banque elle-même, étant consentie sur des biens et droits immobiliers dépendant d'un immeuble sis à Paris 8ème, 32 et 5 rue Duras.

Mme X... n'ayant pas remboursé le prêt à son échéance, la BANQUE SCALBERT DUPONT lui a fait délivrer le 23 octobre 1998 un commandement afin de saisie immobilière, publié le 10 décembre 1998. Se prononçant sur les dires et conclusions déposés par Mme X..., la chambre des saisies immobilières du tribunal de grande instance de Paris a, par jugement du 3 juin 1999, rejeté les prétentions de celle-ci ainsi que les demandes de dommages-intérêts et d'indemnité pour frais irrépétibles formées par la BANQUE SCALBERT DUPONT.

*

Mme X..., appelante, demande à la Cour de :

- annuler ce jugement pour défaut de motivation ;

- subsidiairement, l'infirmer et statuant à nouveau,

- déclarer nulle et de nul effet la procédure de saisie immobilière diligentée par la BANQUE SCALBERT DUPONT ;

- constater que le prêt notarié du 14 juin 1995 a été intégralement remboursé par prélèvements sur ses comptes bancaires n 110/114/25873 et n 330/116/70218 ;

- débouter la BANQUE SCALBERT DUPONT de toutes ses prétentions ;

- déclarer nul et de nul effet le prêt du 14 juin 1995 faisant office

de titre à la procédure poursuivie par la banque ;

- condamner la BANQUE SCALBERT DUPONT, au besoin en enjoignant à celle-ci de produire les éléments comptables correspondants, à lui restituer le montant des frais, agios et intérêts indûment débités et capitalisés sur ses comptes bancaires ;

- condamner la BANQUE SCALBERT DUPONT à lui payer la somme de 3.000.000 F, outre intérêts au taux légal, à titre de dommages-intérêts pour dol, manquement à son devoir de conseil, fraude et soutien abusif ;

- ordonner, le cas échéant, la compensation entre sa créance indemnitaire et la créance prétendue de la BANQUE SCALBERT DUPONT ;

- condamner cette dernière à lui payer la somme de 500.000 F pour procédure abusive ;

- subsidiairement, nommer un expert avec mission de faire les comptes entre les parties et d'établir le montant des intérêts, frais et indemnités indûment perçus par la BANQUE SCALBERT DUPONT ;

- réduire le montant de la clause pénale invoquée par la banque en ce qu'elle a d'excessif ;

- lui octroyer tous délais de grâce ;

- condamner l'intimée à lui verser la somme de 50.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

*

La BANQUE SCALBERT DUPONT conclut à la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a débouté Mme X... de toutes ses demandes tendant à entendre prononcer la nullité de la procédure de saisie immobilière et contestant la réalité de sa créance.

Appelante incidente pour le surplus, elle requiert la condamnation de Mme X... à lui verser la somme de 100.000 F à titre de

dommages-intérêts en application de l'article 1134 alinéa 3 du code civil pour résistance infondée à la saisie et celle de 75.000 F pour couvrir ses frais irrépétibles.

CELA ETANT EXPOSE,

LA COUR,

Sur la nullité du jugement

Considérant qu'en vertu de l'article 455 du nouveau code de procédure civile, le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, et qu'il doit être motivé ; Qu'il est satisfait à l'exigence de l'exposé des moyens présentés par les parties lorsque la motivation de la décision fait apparaître que le tribunal répond aux moyens invoqués ;

Qu'en l'espèce, le jugement déféré a résumé l'essentiel des moyens de procédure et les moyens de fond développés par Mme X... ;

Que le fait que la décision entreprise ait pu ne pas répondre à l'intégralité des moyens développés par la partie saisie ne peut entraîner la nullité de ladite décision, qui est par ailleurs suffisamment motivée ;

Sur les moyens de procédure

Considérant que lorsque, en matière de saisie immobilière, le premier juge s'est prononcé sur des moyens de procédure et de fond, l'appel n'est recevable que des chefs relatifs aux moyens de fond ;

Que, toutefois, la suite du présent arrêt rend inutile une réouverture des débats pour recueillir les observations des parties sur l'éventuelle irrecevabilité, en cause d'appel, des moyens de procédure invoqués par Mme X... ;

Sur le fond

Considérant qu'il est constant que Mme X... a, suivant acte notarié du 14 juin 1995, souscrit auprès de la BANQUE SCALBERT DUPONT un prêt de 1.355.000 F en s'engageant à l'utiliser pour le règlement du solde du découvert existant sur les livres de la banque ainsi que du solde des trois prêts qui lui avaient été précédemment accordés par la même banque les 7 juin 1991, 11 mai 1992 et 28 janvier 1994, pour un montant respectif de 100.000 F, 800.000 F et 200.000 F ; que ce prêt était assorti d'un taux effectif global de 11,92 % l'an, à l'exclusion des commissions des organismes tiers ; qu'il était prévu que le prêt serait utilisé sous forme de compte de prêt avec remboursements périodiques et serait comptabilisé dans un compte spécial ;

Considérant que Mme X... n'ayant pas remboursé le prêt à l'échéance convenue, soit le 14 juin 1996, le compte spécial n 211 604 103007, sur lequel ledit prêt avait été comptabilisé, a été, à cette date,

soldé à hauteur de 0 F ;

Que, le 28 juin 1996, la somme de 1.388.402,77 F, correspondant au prêt litigieux impayé, a été débitée du compte de chèques n 211 11011425873, puis créditée sur ce même compte en date du 1er juillet 1996 ; qu'il a été débité de ce compte, le 30 juin 1996, des agios sur la somme susdite au taux effectif global de 18,134 % à concurrence de 11.106,85 F et une somme de 189 F pour tenue de compte, ports et frais ; qu'enfin, il a été crédité, le 1er juillet 1996, un "impayé sur prêt n 211 11011425873" pour un montant de 11.295,85 F (représentant le total des agios et des frais de tenue de compte susmentionnés) ;

Qu'ensuite, les 1er et 17 juillet 1996, le prêt impayé a été inscrit par la banque à hauteur de 1.388.402,77 F, avec un "impayé sur prêt" de 11.295,85 F (correspondant à l'impayé susmentionné), sur un compte ouvert le 17 juillet 1996 sous le n 211 33011670218 au nom de Mme X... et intitulé "compte de chèques", qui a fonctionné comme un compte courant, débité d'agios au taux effectif global de 15,399 %, de 14,529 % et de 14,109 % ;

Considérant qu'il en résulte que la banque a substitué au prêt objet de l'acte notarié un découvert en compte courant qui, maintenu depuis le mois de juillet 1996, s'analyse en une ouverture de crédit se distinguant du prêt notarié puisque, notamment, elle a donné lieu au débit d'agios à des taux effectifs globaux de 18,134 %, 15,399 %, 14,529 % et 14,109 %, différents de celui de 11,92 % l'an prévu par l'acte du 14 juin 1995, ladite opération pouvant, au demeurant, être tenue pour une novation ;

Considérant qu'il s'ensuit que le prêt consenti par l'acte authentique a fait l'objet d'un remboursement comptable et se trouve remplacé par une ouverture de crédit bancaire, fonctionnant dans des conditions distinctes de celles du prêt notarié ;

Qu'en conséquence, la BANQUE SCALBERT DUPONT, qui ne peut plus se prévaloir de l'acte authentique de prêt auquel elle a substitué une ouverture de crédit en compte courant, ne détient plus de titre exécutoire et ne pouvait valablement engager, en vertu dudit acte, une procédure de saisie immobilière ;

Considérant que, dès lors, infirmant le jugement entrepris, il convient d'annuler cette procédure ;

Considérant, sur le surplus des demandes de Mme X..., que seules constituent des incidents de saisie immobilière les contestations nées de la procédure de saisie et susceptibles d'avoir une influence immédiate et directe sur celle-ci, et que le juge de la saisie ne peut par ailleurs connaître que des moyens de fond tendant à l'anéantissement de la procédure de saisie immobilière ;

Que, dès lors, échappent à la connaissance de la Cour, juge d'appel de la saisie immobilière, les prétentions de l'appelante relatives à la restitution par la BANQUE SCALBERT DUPONT des frais, agios et intérêts indûment débités et capitalisés depuis plusieurs années sur ses différents comptes, à l'indemnisation du préjudice causé par le dol, le manquement au devoir de conseil, la fraude et le soutien abusif reprochés à la banque, à la compensation entre la créance indemnitaire et la créance alléguée par l'intimée, à la réduction du montant de la clause pénale, à l'octroi d'un délai de grâce et,

subsidiairement, à une expertise afin de rechercher le montant des intérêts, frais et indemnités qui auraient été indûment perçus par l'intimée ;

Considérant que les parties ne démontrent pas qu'elles auraient respectivement agi ou résisté fautivement ou abusivement ; que les demandes de dommages-intérêts seront donc rejetées ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement entrepris ;

Annule la procédure de saisie immobilière diligentée par la BANQUE SCALBERT DUPONT à l'encontre de Mme X... suivant commandement du 23 octobre 1998, publié le 10 décembre 1998 ;

Rejette toute autre demande ;

Met les dépens de première instance et d'appel à la charge de la BANQUE SCALBERT DUPONT, et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 1999-15112
Date de la décision : 02/12/1999

Analyses

PRET - Prêt d'argent

Lorsque une banque substitue au prêt notarié un découvert en compte courant, celui-ci s'analyse en une ouverture de crédit se distinguant du prêt notarié notamment lorsque elle donne lieu à des débits d'agios à des taux effectifs globaux différents de celui prévu à l'acte notarié. Cette opération peut-être tenue pour une novation. Il s'ensuit que le prêt consenti à l'acte authentique faisant ainsi l'objet par la banque d'un remboursement comptable se trouve remplacé par une ouverture de crédit bancaire, fonctionnant dans des conditions différentes de celles du prêt notarié, la banque ne peut se prévaloir de l'acte authentique de prêt et ne détient plus de titre exécutoire. Dès lors, elle ne peut plus valablement envisager une procédure de saisie immobilière


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;1999-12-02;1999.15112 ?
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