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14/01/2020 | FRANCE | N°17/02956

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 14 janvier 2020, 17/02956


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2° chambre



ARRET DU 14 JANVIER 2020



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/02956 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NFVK







Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 DECEMBRE 2016

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER N° RG 15/05720 et jugement rectificatif du 20 DECEMBRE 2016 N° RG 16/07413 N° RG 16/07413





APPELANTE :



ASSURANCE MUTUELLE DES MOTAR

DS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Francis TOUR de la SCP THEVENET, TOUR, av...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2° chambre

ARRET DU 14 JANVIER 2020

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/02956 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NFVK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 DECEMBRE 2016

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER N° RG 15/05720 et jugement rectificatif du 20 DECEMBRE 2016 N° RG 16/07413 N° RG 16/07413

APPELANTE :

ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Francis TOUR de la SCP THEVENET, TOUR, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES et pour elle le Directeur Régional Des Finances Publiques d'[Localité 3] et de [Localité 4] ' Pôle juridictionnel judiciaire élisant domicile en ses bureaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Raymond ESCALE de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 31 Octobre 2019

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 NOVEMBRE 2019, en audience publique, Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre

Madame Anne-Claire BOURDON, conseiller

Madame Marianne ROCHETTE, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Hélène ALBESA

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, greffier.

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

La société Assurances Mutuelle des Motards (la mutuelle), société d'assurance mutuelle régie par les articles L. 322-26-1 et suivants du code des assurances, a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité au titre des années 2009 et 2010 de la part de la direction générales des finances publiques, direction des vérifications nationales et internationales.

Celle-ci lui a notifié, le 13 décembre 2012, une proposition de rectification, maintenue après recours amiable le 5 avril 2013, portant sur une somme totale de 1 024 325 euros (dont 109 421 euros d'intérêts de retard), le service vérificateur ayant estimé, d'une part, que les droits d'adhésion versés par les nouveaux adhérents devaient être imposés à la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA), non pas au taux de 9 % prévu à l'article 1001-6° du code général des impôts, mais aux taux appliqués aux primes perçues par la mutuelle au titre des différentes garanties couvertes et, d'autre part, qu'il y avait lieu de soumettre la garantie « Equipement du conducteur » au tarif de 18 % fixé par l'article 1001-5° du code général des impôts pour les assurances des véhicules terrestres à moteur.

Les impositions supplémentaires découlant de cette rectification ont été mises en recouvrement par voie d'avis n° 14 04 05006 émis par l'administration fiscale le 12 mai 2014.

Par décision du 30 juillet 2015, la direction générale des finances publiques, direction des vérifications nationales et internationales, a rejeté la réclamation formée le 16 juillet 2014 par la mutuelle, qui faisait notamment valoir que les droits d'adhésion ne devaient pas être soumis à la taxe spéciale sur les conventions d'assurance, que la garantie « Equipement du conducteur » devait être assujettie au taux de 9 % prévu à l'article 1001-6° du code général des impôts et non au taux de 18 % prévu par le 5° du même article et que la rectification opérée aurait dû être calculée à partir, non pas du montant des primes hors-taxes encaissées par elle, mais à partir du montant de la prime diminuée de la TSCA calculée au taux de 18 %.

Par exploit du 9 septembre 2015, la mutuelle a déféré cette décision de rejet au tribunal de grande instance de Montpellier qui, par jugement du 13 décembre 2016, rectifié le 20 décembre 2016, a notamment :

- débouté la mutuelle de sa demande en nullité de la proposition de rectification du 13 décembre 2012 et de l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014, émis par l'administration fiscale,

- dit bien-fondée la décision du 30 juillet 2015 de la direction des vérifications nationales et internationales de la direction générale des impôts, par laquelle celle-ci a rejeté la réclamation contentieuse formée le 16 juillet 2014 par la mutuelle,

- débouté en conséquence celle-ci de ses entières demandes,

- condamné la mutuelle à payer à la direction des vérifications nationales et internationales la somme de 1500 euros titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer comme il l'a fait, le premier juge a considéré que la proposition de rectification du 13 décembre 2012 et l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014 étaient réguliers au regard des dispositions des articles L. 48l et L. 256-1 du livre des procédures fiscales, que le droit d'adhésion devait être soumis à la TSCA conformément à l'article 991 du code général des impôts qui permet d'inclure dans l'assiette de la taxe tous les versements effectués par l'assuré au profit de l'assureur, que la garantie « Equipement du conducteur » était taxable au taux de 18 % en application du 5° bis de l'article 1001 du même code dès lors que celle-ci ne peut jouer qu'à l'occasion d'un sinistre mettant en cause un véhicule terrestre à moteur et que les rectifications au titre de la TSCA devaient faire l'objet d'un calcul « en dehors », cette taxe constituant un accessoire du prix convenu et ne bénéficiant pas à l'assureur, qui en est seulement le redevable légal.

Par déclaration reçue le 24 mai 2017 au greffe de la cour, la mutuelle a régulièrement relevé appel de ce jugement avant qu'il ne lui soit signifié, le 1er juin 2017.

En l'état de ses dernières conclusions dites « finales et récapitulatives », déposées le 31 octobre 2019 via le RPVA, elle demande à la cour d'infirmer les jugements des 13 décembre 2016 et 20 décembre 2016, de prononcer le dégrèvement des droits et pénalités de taxe sur les conventions d'assurance payés par elle et portés sur l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014 pour un montant de 914 904 euros en droits et 109 421 euros en pénalités, soit un total de 1 024 325 euros, de prononcer la restitution du montant de la TSCA réglée initialement au taux de 9 % sur les droits d'adhésion au titre des années 2009 et 2010 pour les montants respectifs de 133 477 euros et 132 979 euros, de prononcer, à défaut, sur les rectifications maintenues par la cour d'appel, d'ordonner de procéder à un calcul en dedans des rectifications de TSCA (sic) et de condamner la direction des vérifications nationales et internationales à lui payer la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, elle fait valoir pour l'essentiel que :

- la proposition de rectification, qui lui a été adressée le 13 décembre 2012, ne contient pas, de manière motivée, l'indication des conséquences financières du contrôle, en méconnaissance des dispositions des articles L. 48 et L. 57 du livre des procédures fiscales,

- l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014 est irrégulier au regard des dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'il ne vise aucune nature d'impôt par référence à un texte du code général des impôts et que la proposition de rectification, qui y est visée, ne contient pas elle-même les conséquences financières du contrôle,

- le droit d'adhésion à une société d'assurances mutuelles ne constitue pas une somme stipulée au profit de l'assureur au sens de l'article 991 du code général des impôts et n'est donc pas soumis à la taxe spéciale sur les conventions d'assurance, comme l'a jugé le Conseil d'État dans une décision du 22 novembre 2017 (CE 8e-3ch. 22.11.2017 n° 406943, Sté Mutuelle Assurance des commerçants et industriels de France),

- à la suite de cet arrêt, l'administration fiscale a modifié sa doctrine, le bulletin officiel des finances publiques actualisé le 2 avril 2019 ayant supprimé le paragraphe n° 80 précédemment publié le 12 septembre 2012, qui considérait que les sommes dont le versement est exigé par les sociétés d'assurances mutuelles au titre de droits d'adhésion sont soumises à cette taxe,

- la garantie « Equipement du conducteur » est dissociable des garanties responsabilité civile ou dommages matériels comme le montre une étude statistique, en sorte qu'elle doit être tarifée au taux de droit commun de 9 % prévu au 6° de l'article 1001 du code général des impôts.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées le 30 octobre 2019 par le RPVA, la direction générale des finances publiques représentée par le directeur régional des finances publiques d'[Localité 3] et de [Localité 4], sollicite de voir :

- prendre acte des dégrèvements en cours concernant les versements spontanés et rehaussés portant sur le droit d'adhésion au titre des années 2009 et 2010,

- pour le surplus, dire et juger la société Assurances Mutuelle des Motards non fondée en son appel des jugements rendus les 13 et 20 décembre 2016 par le tribunal de grande instance de Montpellier,

- confirmer en conséquence le jugement entrepris,

- rejeter sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- l'en débouter ainsi que de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 31 octobre 2019.

Le 8 novembre 2019, la mutuelle a déposé de nouvelles conclusions dites « conclusions finales et récapitulatives » et sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture.

MOTIFS de la DECISION :

Il n'est justifié d'aucune cause grave au sens de l'article 784 du code de procédure civile, applicable par renvoi de l'article 907, de nature à justifier la révocation de l'ordonnance de clôture ; il y a donc lieu de déclarer irrecevables les conclusions de la mutuelle, déposées le 8 novembre 2019 après clôture de l'instruction.

1-la régularité de la proposition de rectification et de l'avis de mise en recouvrement :

L'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction en vigueur au moment de la mise en 'uvre de la procédure fiscale, dispose qu'à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications et que lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire, l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai ; le premier alinéa de l'article L. 57 énonce que l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation.

Il résulte de ces textes que la proposition de rectification doit indiquer le montant des droits, taxes et pénalités résultant de la rectification et être motivée afin de permettre au contribuable de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation.

Dans le cas présent, la proposition de rectification adressée le 13 décembre 2012 à la mutuelle comporte huit feuilles, comme indiqué sur la lettre avisant

celle-ci qu'elle dispose d'un délai de 30 jours pour faire part de ses observations, la huitième feuille, numérotée « 6 » en bas de page, s'achevant par le paragraphe suivant : Votre bonne foi n'étant pas mise en cause, les montants des droits, taxes et contributions supplémentaires qui vous sont proposées par la présente seront assorties de l'intérêt de retard au taux de 0,40 % par mois, conformément aux dispositions de l'article 1727 du code général des impôts ; il s'ensuit, contrairement à ce que soutient l'administration, que la feuille intitulée « conséquences financières du contrôle (article L. 48 du livre des procédures fiscales) » n'était pas jointe à la proposition de rectification.

Comme le retient à juste titre le premier juge, la proposition de rectification précise, en page 2, que le rappel des droits au titre de la TSCA est de 212 598 euros au titre de l'exercice 2009 et de 95 670 euros au titre de l'exercice 2010 et, en page 4 que le rappel des droits au titre de la taxe applicable à la garantie « Equipement du conducteur » est de 327 225 euros au titre de l'exercice 2009 et de 369 412 euros au titre de l'exercice 2010, en sorte que le montant des droits résultant de la rectification se trouve précisément indiqué.

En revanche, la proposition de rectification se borne, pages 5 et 6, à rappeler les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts, qui prévoit que toute somme n'ayant pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard, que le taux de l'intérêt de retard est de 0,40 % par mois calculé sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable et que cet intérêt de retard est calculé à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel l'impôt devait être acquitté jusqu'au dernier jour du mois du paiement ; le montant des intérêts de retard résultant de la rectification n'est pas toutefois indiqué, ce dont il résulte que la proposition de rectification, qui se borne à préciser le taux de l'intérêt de retard et son mode de calcul, ne satisfait pas aux exigences de l'article L. 48 susvisé ; il n'apparaît d'ailleurs pas, à la lecture du courrier du 15 février 2013 par lequel la mutuelle a fait part à l'administration, par l'intermédiaire de son avocat, de ses observations à la suite de la proposition de rectification, que celle-ci ait eu connaissance du montant des intérêts mis à sa charge.

Il s'ensuit que la mutuelle peut prétendre à être déchargée de la somme de 109 421 euros représentant le montant des intérêts de retard visé dans l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014.

Pour le surplus, la mutuelle n'est pas fondée à invoquer l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement au regard des dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, alors que celui-ci se réfère expressément à la proposition de rectification du 13 décembre 2012 qui contient l'énonciation précise des textes du code général des impôts fondant les rehaussements proposés et des montants des droits découlant de la rectification.

2-l'assujettissement des droits d'adhésion à la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA) :

Aux termes de l'article 991 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au moment du fait générateur de l'imposition : « Toute convention d'assurance conclue avec une société ou compagnie d'assurances ou avec tout autre assureur français ou étranger est soumise, quels que soient le lieu et la date auxquels elle est ou a été conclue, à une taxe annuelle et obligatoire moyennant le paiement de laquelle tout écrit qui constate sa formation, sa modification ou sa résiliation amiable, ainsi que les expéditions, extraits ou copies qui en sont délivrés, sont, quelque soit le lieu où ils sont ou ont été rédigés, enregistrés gratis lorsque la formalité est requise. La taxe est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré. »

Dans le dernier état de ses conclusions, l'administration indique qu'à la suite d'un arrêt rendu le 22 novembre 2017 par le conseil d'État (CE - 8ème - 3ème chambres réunies - 22 novembre 2017, n° 406943), sur la requête de la société mutuelle d'assurance Mutuelle assurance des commerçants et industriels France (MACIF), elle va procéder au dégrèvement des sommes mises à la charge de la mutuelle au titre des droits d'adhésion par l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014 et à la restitution de la TSCA au taux de 9 % initialement réglée par celle-ci sur les droits d'adhésion au titre des années 2009 et 2010.

Dans l'arrêt précité du 22 novembre 2017, le Conseil d'État a ainsi annulé le paragraphe 80 des commentaires administratifs publiés le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-TCAS-ASSUR-20, après avoir notamment considéré que le droit d'adhésion à une société d'assurance mutuelle, qui contribue au financement du fonds d'établissement prévu aux 5° et 6° de l'article R. 322-47 du code des assurances, ne constitue pas une somme stipulée au profit de l'assureur au sens de l'article 991 du code général des impôts en contrepartie d'une opération d'assurance donnant droit à une prestation en cas de réalisation du risque assuré et ne doit pas, dès lors, être soumis à la taxe sur les conventions d'assurance.

Il en résulte que la mutuelle est fondée à obtenir le dégrèvement, sur l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014, de la somme de 112 598 euros, montant du rappel de TSCA sur l'exercice 2009, et de celle de 95 670 euros, montant du rappel de TSCA sur l'exercice 2010 ; elle peut également prétendre à la restitution du montant de la taxe réglée initialement au taux de 9 % sur les droits d'adhésion au titre des exercices 2009 et 2010 pour les montants respectifs de 133 477 euros et 132 979 euros.

3-le taux de la TSCA applicable à la garantie « Equipement du conducteur » :

Selon l'article 1001 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, le tarif de la taxe spéciale sur les contrats d'assurances est fixé (') à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur (5° bis) et à 9 % pour toutes autres assurances (6°).

En l'occurrence, l'article 3.4 des conditions générales du contrat d'assurance multirisque moto/scooter/auto, proposé par la mutuelle, dispose que sont garantis, lors d'un accident de la circulation avec le véhicule assuré, les effets vestimentaires de protection du conducteur, comprenant les vêtements spécialement adaptés pour la pratique du deux-roues (bottes, combinaison, pantalon, blouson, gants et protection dorsale), ainsi que le casque et sa visière, conçus et homologués pour la pratique du deux-roues, la personne assurée étant tout conducteur désigné aux conditions particulières ; cette garantie « Equipement du conducteur » couvre les dommages causés aux équipements portés par le conducteur du véhicule assuré lors d'un accident de la circulation impliquant le véhicule assuré, que le conducteur soit le propriétaire ou pas du véhicule ; elle ne peut donc jouer, comme le relève juste titre le premier juge, qu'à l'occasion d'un accident mettant en cause un véhicule terrestre à moteur dans lequel le conducteur subit des dommages matériels consécutifs à une détérioration de ses effets vestimentaires ou de son casque et sa visière, portés lors de l'accident ; la garantie ne peut jouer lorsque les dommages proviennent d'un sinistre ayant une autre cause que celle résultant d'un accident de la circulation, notamment du vol de l'équipement ou de sa dépréciation.

La garantie « Equipement du conducteur », qu'elle soit mise en 'uvre concomitamment à la garantie responsabilité civile ou la garantie dommages matériels ou de façon distincte de ces deux garanties, lorsque les dommages sont exclusivement subis par des tiers ou que le propriétaire du véhicule assuré n'est pas le conducteur, ne peut jouer qu'à l'occasion d'un accident de la circulation dans lequel le conducteur subit des dommages affectant son équipement ; la garantie « Equipement du conducteur » ne couvre pas, en effet, un risque distinct du risque automobile, cette garantie n'étant pas susceptible d'être mise en 'uvre en dehors d'un accident de la circulation, en sorte que le risque de dégradation de l'équipement du conducteur ayant pour fait générateur d'un tel accident entre nécessairement dans le cadre du 5° bis de l'article 1001 du code général des impôts, qui assujettit au taux de 18 % les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur.

C'est par ailleurs, par des motifs pertinents, que le premier juge a considéré que si la garantie dommages corporels du conducteur bénéficie du taux de base réduit à 9 % en application de la doctrine de l'administration fiscale applicable aux périodes d'imposition en cause, il ne peut en être déduit que la garantie complémentaire « Equipement du conducteur » doit également bénéficier de ce taux, en l'absence d'une dérogation spécifique octroyée par l'administration.

4-les modalités de calcul de la rectification liée à la substitution du taux de 18% au taux de 9% :

La mutuelle a soutenu subsidiairement, en première instance, que la rectification aurait dû être calculée à partir du montant de la prime d'assurance perçue diminué de la TSCA au taux de 18 % (calcul « en dedans »), l'administration ayant opéré le calcul de la rectification sur la base du montant hors-taxes de la prime (calcul « en dehors »).

Il résulte de l'article 954 du code de procédure civile que les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures et qu'à défaut, elles sont réputées les avoirs abandonnés, la cour ne statuant que sur les dernières conclusions déposées ; en l'espèce, dans ses dernières conclusions dite « finales et récapitulatives », déposées le 31 octobre 2019, la mutuelle ne reprend pas le moyen initialement proposé visant à ce que le calcul de la rectification soit effectué à partir du montant hors-taxes des primes encaissées ; un tel moyen est dès lors réputé abandonné.

En toute hypothèse, il est de principe qu'aux termes de l'article 991 du code général des impôts, la TSCA est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et sur celui de tous accessoires dont il bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré, que cette taxe n'est pas un élément de la prime et doit se calculer sur l'ensemble de celle-ci et que la méthode de calcul consistant à asseoir la taxe sur une somme égale au prix effectivement payé par l'assuré, diminué du montant de la taxe rappelée, conduirait à retenir une assiette reconstituée inférieure au montant de la prime hors-taxes initialement convenue entre les parties, conduisant ainsi à exclure de l'assiette de la taxe une partie des sommes stipulées au profit de l'assureur.

5-les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Au regard de la solution apportée au règlement du litige, chacune des parties conservera à sa charge les dépens personnellement exposés en première instance et en cause d'appel ; il y a lieu, dans ces conditions, de rejeter les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare irrecevables les conclusions de la société Assurances Mutuelle des Motards (la mutuelle), déposées le 8 novembre 2019,

Au fond, infirme dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier en date du 13 décembre 2016, rectifié le 20 décembre 2016, et statuant à nouveau,

Ordonne le dégrèvement de la somme de 109 421 euros représentant le montant des intérêts de retard visé dans l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014,

Ordonne également le dégrèvement, sur l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014, de la somme de 112 598 euros, montant du rappel de TSCA sur l'exercice 2009, et de celle de 95 670 euros, montant du rappel de TSCA sur l'exercice 2010,

Ordonne la restitution du montant de la taxe réglée initialement au taux de 9 % sur les droits d'adhésion au titre des exercices 2009 et 2010 pour les montants respectifs de 133 477 euros et 132 979 euros,

Dit, pour le surplus, bien fondée la décision du 30 juillet 2015 de la direction générale des finances publiques, direction des vérifications nationales et internationales, par laquelle celle-ci a rejeté la réclamation contentieuse formée le 16 juillet 2014 par la mutuelle, relativement au taux de la TSCA applicable à la garantie « Equipement du conducteur » fixé à 18 % et aux modalités de calcul de la rectification liée à la substitution du taux de 18% au taux de 9 %,

Rejette toutes autres demandes,

Dit que chacune des parties conservera à sa charge les dépens personnellement exposés en première instance et en cause d'appel,

Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

JLP


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17/02956
Date de la décision : 14/01/2020

Références :

Cour d'appel de Montpellier 02, arrêt n°17/02956 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-14;17.02956 ?
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