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15/03/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946085

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 15 mars 2005, JURITEXT000006946085


PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement rendu le 17 juin 2002 par le Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER, qui a déclaré François X... mal fondé à se prévaloir de la prescription de l'article 2270-1 du Code Civil et de l'usucapion de l'article 2265, et a ordonné une expertise pour déterminer la superficie de chacune des propriétés et le prix applicable au m , dire si l'exhaussement du mur mitoyen est conforme à la législation et s'il est dommageable à l'une ou l'autre des parties;

Vu l'appel régulièrement interjeté par les époux X... et la S

CI LA RECHE, et leurs conclusions du 10 décembre 2004 tendant à déclarer l'act...

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement rendu le 17 juin 2002 par le Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER, qui a déclaré François X... mal fondé à se prévaloir de la prescription de l'article 2270-1 du Code Civil et de l'usucapion de l'article 2265, et a ordonné une expertise pour déterminer la superficie de chacune des propriétés et le prix applicable au m , dire si l'exhaussement du mur mitoyen est conforme à la législation et s'il est dommageable à l'une ou l'autre des parties;

Vu l'appel régulièrement interjeté par les époux X... et la SCI LA RECHE, et leurs conclusions du 10 décembre 2004 tendant à déclarer l'action prescrite, subsidiairement irrecevable comme contraire à la chose transigée le 14 mai 1974; encore plus subsidiairement, dire qu'à supposer qu'il y ait empiétement, il a été usucapé; déclarer l'action infondée; en tout état de cause, condamner in solidum les époux Y... à leur payer 6.000 ä à titre de dommages-intérêts et

2.000 ä sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C. et aux entiers dépens;

Vu les conclusions notifiées le 19 janvier 2005 par les époux Y..., tendant à déclarer l'appel irrecevable; subsidiairement, confirmer le jugement; condamner les appelants au paiement de la somme de 1.000 ä sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C. et aux entiers dépens;

M O T Z... V A T Z... O N Z... - SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL

Pour faire déclarer l'appel irrecevable, les intimés font valoir que l'usucapion rejetée par le premier juge n'est pas un moyen de fond mais une fin de non recevoir visée à l'article 2265 du Code Civil, lui-même inséré dans une section III intitulée " de la prescription par dix ou 20 ans" au même titre que l'article 2270-1; que de plus, l'article 122 du Nouveau Code de Procédure Civile qui définit la fin de non recevoir comme tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond, fait référence à "la prescription", sans distinguer entre la prescription acquisitive ou la prescription extinctive".

Or l'invocation de la prescription acquisitive, en ce qu'elle tend à la reconnaissance d'un droit réel immobilier au profit de celui qui l'invoque, est un moyen de fond, et non une fin de non recevoir sans examen au fond de l'action engagée à son encontre par une autre partie.

Il en résulte qu'en rejetant la demande des époux X... tendant à faire juger qu'ils sont devenus propriétaires par usucapion du mur litigieux, le premier juge a tranché une partie du principal au sens de l'article 544 du Nouveau Code de Procédure Civile, et que leur appel est dès lors est recevable. II- SUR LA DEMANDE EN PAIEMENT DE DOMMAGES-INTERETS

Les époux Y..., qui font valoir que le mur de clôture construit en 1974 par les époux X... empiète sur leur fonds, ne sollicitent pas sa suppression, mais l'indemnisation de leur préjudice qui résulterait:

- d'une part, de cet empiétement qui aurait généré une privation de jouissance de 28 m pendant 26 ans et l'impossibilité d'obtenir un certificat de conformité pour leur maison;

- d'autre part, du rehaussement du mur et du relèvement du niveau du sol réalisés en 1988, à l'origine d'une perte d'ensoleillement et de luminosité et de la nécessité de conforter le mur par des apport de terre.

Ils se fondent sur les articles 659, 662 et 1382 du Code Civil, expressément visés dans leur assignation du 2 février 2001.

Contrairement à ce qu'ils soutiennent, le second dommage dont ils demandent la réparation n'est pas une aggravation du premier. Il s'agit de chefs de préjudice totalement distincts tant par leur cause

que par leur nature. En effet, le premier consisterait en une perte de surface et de droits d'urbanisme générée par la mauvaise implantation du mur, tandis que le second résiderait en une privation d'ensoleillement et une obligation de conforter l'ouvrage, causées par le fait qu'en 1988, ce mur qui était grillagé a été surélevé et maçonné.

Ces réclamations obéissant à des règles juridiques différentes, il convient de les examiner successivement. Sur la réparation du préjudice causé par l'implantation fautive du mur

Tendant à l'indemnisation d'un préjudice résultant d'une faute, et non à la démolition d'un ouvrage irrégulièrement implanté, cette demande relève exclusivement par son objet de la responsabilité civile extra-contractuelle de droit commun régie par les dispositions de l'article 1382 du Code Civil. A ce titre, elle est soumise à la prescription décennale de l'article 2270-1 qui court à compter de la "manifestation du dommage".

En l'espèce, il s'agit de la date à laquelle les époux Y... ont su que le mur construit par les époux X... empiétait sur leur propriété.

Dans une lettre du 14 novembre 1984 adressée à Monsieur X... par l'intermédiaire de son conseil, Monsieur Y... "confirme d'une manière définitive que le mur de clôture a été construit dans sa propriété" .

Cette correspondance traduit en termes clairs et de manière incontestable le fait qu'à cette date, il avait conscience d'être

victime d'un empiétement dommageable, ce qui a suffi à faire courir le délai de prescription de l'article 2270-1 du Code Civil, ce texte n'exigeant pas que la victime du dommage ait été en mesure à ce stade d'avoir une connaissance parfaite et exhaustive de l'étendue de ce dommage dans toute son ampleur et toutes ses conséquences, tant au niveau de la mesure de la surface perdue que de ses implications éventuelles au regard des règles d'urbanisme.

Au surplus, il convient d'observer que les époux Y... ne rapportent pas la preuve qu'ils n'ont eu connaissance qu'en 2003 du refus opposé le 16 mai 1975 à leur demande de permis de construire rectificatif, ni même que cette décision est en relation avec l'implantation du mur litigieux.

Le délai décennal ayant expiré le 14 novembre 1994, force est de constater, sans qu'il y ait lieu d'examiner d'autres moyens, que la prescription était acquise lors de l'assignation du 2 février 2001.

Sur la réparation du préjudice causé par l'exhaussement du mur séparatif

Relevant des dispositions de l'article 659 du Code Civil, et soumise à la prescription trentenaire de droit commun de l'article 2262, cette demande est recevable.

Il ressort du constat d'huissier établi le 13 octobre 2003 à la requête des époux Y... que la hauteur de la clôture rehaussée est d'environ 2 mètres au niveau de l'entrée et sur le côté de la maison, pour atteindre 2,20 mètres au niveau de la terrasse avec un maximum de 2,60 mètres au bout de celle-ci.

En revanche, l'huissier n'a pas constaté une perte d'ensoleillement ou de luminosité et les époux Y... n'ont formulé auprès de lui aucune doléance à ce sujet. Ni les photographies annexées au constat ni un quelconque élément objectif du dossier ne leur permet d'en rapporter la preuve.

De même, ils ne produisent aucune attestation technique d'un professionnel concluant à un risque d'affaissement de ce mur et à la nécessité de le conforter par des piliers ou un apport de terre.

En l'absence de démonstration d'un préjudice résultant du rehaussement du mur séparatif, ils seront en conséquence déboutés de leur demande de dommages-intérêts.

Succombant, les époux Y... paieront en équité aux époux X... et à la SCI LA RECHE une somme de 2.000 ä sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C., sans que soit cependant établi de leur part un abus dans l'exercice de la procédure de nature à ouvrir droit à indemnisation.

P A R C E A... M O T Z... F A...

Infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau:

Déclare irrecevable comme prescrite la demande des époux Y... en indemnisation du préjudice résultant de l'empiétement du mur de

clôture.

Les déboute de leur demande de réparation du préjudice résultant de l'exhaussement de ce mur.

Les condamne à payer aux époux X... et à la SCI LA RECHE la somme de 2.000 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Condamne les époux Y... aux entiers dépens, avec droit de recouvrement pour ceux d'appel au profit de la SCP ARGELLIES-TRAVIER-WATREMET.

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946085
Date de la décision : 15/03/2005

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Défense au fond - Définition

Procédure civile - défense au fond - définition - prescription acquisitive L'invocation de la prescription acquisitive, en ce qu'elle tend à la reconnaissance d'un droit réel immobilier au profit de celui qui l'invoque, est un moyen de fond, et non une fin de non recevoir sans examen au fond de l'action engagée à son encontre par une autre partie.


Références :

Article 2265, 2270-1 du code de procédure civile

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2005-03-15;juritext000006946085 ?
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