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29/09/2004 | FRANCE | N°04/00003

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 29 septembre 2004, 04/00003


Attendu que Joséphine X... a interjeté appel le 30 décembre 2003 d'un jugement du juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Montpellier qui a rejeté sa fin de non recevoir, a fixé à 13.032 euros l'indemnité due par la commune de Saint Jean de Védas pour l'expropriation de la parcelle cadastrée BR n°46 lieudit "LA JONCASSE" d'une superficie de 695 m et a condamné la commune de Saint Jean de Védas au paiement de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas discutée, que ri

en au dossier ne conduit la cour à le faire d'office ; que la justif...

Attendu que Joséphine X... a interjeté appel le 30 décembre 2003 d'un jugement du juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Montpellier qui a rejeté sa fin de non recevoir, a fixé à 13.032 euros l'indemnité due par la commune de Saint Jean de Védas pour l'expropriation de la parcelle cadastrée BR n°46 lieudit "LA JONCASSE" d'une superficie de 695 m et a condamné la commune de Saint Jean de Védas au paiement de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas discutée, que rien au dossier ne conduit la cour à le faire d'office ; que la justification de la date de notification du jugement déféré ne figure pas au dossier et que dès lors il faut considérer que le délai d'appel n'a pas couru ; que l'appel principal de Joséphine X... est recevable ;

Attendu que le mémoire de l'appelant a été déposé avant l'expiration du délai fixé par l'article R 13-49 alinéa 1 du Code de l'expropriation à peine de déchéance ;

Attendu que dans son mémoire du 13 février 2004, notifié, venant au soutien des moyens invoqués à l'appui de la déclaration d'appel, Joséphine X... demande à la cour d'annuler à titre principal la procédure et subsidiairement de l'indemniser sur la base du prix d'achat du bien et de condamner l'expropriant au paiement de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; qu'elle soutient :

- que le mémoire ayant saisi le juge de l'expropriation ne mentionnait pas les textes prévus par l'article R 13-22 du Code de l'expropriation,

- que le mémoire du 08 octobre 2002 n'est pas le même que celui du 12 novembre 2003,

- que le maire n'a pas été autorisé pour poursuivre l'expropriation, - que la présence du commissaire du gouvernement viole les dispositions de l'article 6-1 de la CEDH,

- qu'elle est victime d'une discrimination dans la mesure où l'expropriante n'a pas usé de son droit de préemption et qu'il en résulte un détournement de pouvoir,

- que même si le bien est classé en zone ND ne peut en restreindre l'usage qu'elle souhaite en faire ;

Attendu que par mémoire du 23 mars 2004, notifié, la commune de Saint Jean de Védas, formant appel incident demande à la cour de fixer à 5.400,51 euros l'indemnité se décomposant en 3.811,23 euros pour le bâti, 1.589,28 euros pour le terrain nu, indemnité de remploi en sus ; qu'elle soutient :

- que le bien ne peut servir d'habitation et que la construction qu'il supporte a toujours été un abri agricole même s'il est desservi par les réseaux,

- que l'évaluation retenue par le juge de l'expropriation est exagérée,

- que les fins de non recevoir invoquées ne sont pas fondées,

- que son évaluation se fonde sur des termes de comparaison récents, - que l'indemnité ne saurait être fixée au prix exagéré d'acquisition du terrain ;

Attendu que par conclusions du 14 juin 2004, le commissaire du gouvernement demande à la cour de fixer à 8.000 euros toutes indemnités comprises, l'indemnisation de Madame X... ; qu'il soutient :

- que les fins de non recevoir invoquées par l'expropriée ne sont pas fondées,

- qu'il convient d'évaluer le bien selon la méthode "terrain intégré", le terrain étant assujetti comme terrain bâti,

- que l'évaluation retenue par le premier juge sera confirmée ;

Attendu que la cour se réfère au jugement déféré pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties en première instance ;

Attendu qu'il convient de rappeler pour une bonne compréhension du litige :

- que par arrêté du 04 mars 2002, le Préfet de l'Hérault a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement des espaces naturels en bordure de la rivière La Mosson,

- qu'après notification des offres préalables concernant l'acquisition de la parcelle, aucun accord n'étant intervenu, la commune de Saint Jean de Védas a saisi le 15 octobre 2002 le juge de l'expropriation pour faire fixer l'indemnité due à Madame X... ; Sur les fins de non recevoir

Attendu qu'en application de l'article R 13.22 du Code de l'expropriation, le demandeur est tenu de notifier son mémoire au plus tard à la date de la saisine du juge ; que la demande prévue à l'article R 13-21 doit à peine d'irrecevabilité préciser la date à laquelle il a été procédé à cette notification ; que cette dernière est faite par l'expropriant, doit reproduire en caractères apparents les dispositions des articles R 13-23, R 13-24 alinéa 1 et R 13-25 ; Attendu que le premier juge relève que la commune de Saint Jean de Védas a saisi le juge de l'expropriation en vue de la fixation de l'indemnité le 15 octobre 2002 et a justifié avoir notifié préalablement son mémoire à Madame X... par lettre recommandée avec accusé de réception du 09 octobre 2002 ; que l'expropriant a omis de reproduire les dispositions des articles R 13-23, R 13-24

alinéa 1 et R 13-25 du Code de l'expropriation ; que néanmoins, il relève encore exactement que la nullité n'est encourue que si les intérêts d'une partie se trouvent compromis ; que Madame X..., qui a été représentée tout au long de la procédure, qui a disposé d'un délai suffisant pour répondre et qui a déposé deux mémoires au soutien de ses prétentions ne justifie pas de l'existence d'un grief porté à ses intérêts ;

Attendu que le juge de l'expropriation a encore exactement relevé qu'il avait été saisi par requête déposée le 15 octobre 2002 visant le mémoire du 08 octobre 2002 notifié par lettre recommandée avec accusé de réception et non le mémoire du 12 septembre 2003 déposé postérieurement au transport sur les lieux ; que dès lors aucune violation de l'article R 13 - 32 du Code de l'expropriation, invoque par l'appelante, n'est encourue (étant observé que cet article concerne les conclusions du commissaire du gouvernement) ; qu'il convient de noter qu'il n'est pas contesté que les conclusions de la commune de Saint Jean de Védas du 12 septembre 2003 ont été notifiées à l'appelante ; qu'elle y a d'ailleurs répliqué par ses mémoires du 31 octobre 2003 et du 21 novembre 2003 ; qu'il en résulte que le principe du contradictoire a été respecté et qu'aucun des principes directeurs du procès équitable n'a été méconnu ;

Attendu que l'article L 2122-22 du Code des collectivités territoriales prévoit que le maire peut, par délégation du conseil municipal, être chargé en tout ou partie et pour la durée de son mandat d'intenter au nom de la commune, les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions en justice intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal ;

Attendu qu'en l'espèce, il n'est pas justifié d'une délégation générale mais qu'il est versé aux débats une délibération du conseil municipal de la commune de Saint Jean de Védas du 13 septembre 2001

autorisant le maire à solliciter le Préfet de l'Hérault en vue d'obtenir la déclaration d'utilité publique de l'opération et la déclaration de cessibilité du terrain nécessaire à sa réalisation ;

Attendu que l'autorisation donnée le 13 septembre 2001 concernait spécialement la procédure tendant au transfert de propriété ; qu'il est de principe que la procédure de fixation des indemnités étant autonome par rapport à celle ayant conduit au transfert de propriété, à défaut d'autorisation donnée par le conseil municipal, le maire n'a pas qualité pour agir dans la procédure en fixation des indemnités ; qu'ainsi le maire de Saint Jean de Védas n'avait pas qualité pour agir dans la présente procédure ;

Attendu que le défaut d'autorisation de plaider donnée par le conseil municipal constitue une irrégularité de fond affectant la saisine du juge de l'expropriation en vue de la fixation de l'indemnité en date du 15 octobre 2002 ; que cette irrégularité sanctionnée par la nullité de cet acte pouvait être couverte jusqu'à la clôture des débats et ne l'a pas été ; qu'il y a lieu de constater que la saisine du juge de l'expropriation par le maire de la commune de Saint Jean de Védas est nulle et que l'action de la commune en fixation de l'indemnité d'expropriation est irrecevable ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Joséphine X... partie des frais non répétibles exposés par elle ; qu'il convient de lui allouer la somme de 750 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que les dépens seront laissés à la charge de la commune de Saint Jean de Védas qui succombe ; PAR CES MOTIFS

Dit que l'appel principal et l'appel incident sont recevables ;

Constate que la saisine du juge de l'expropriation par le maire de la commune de Saint Jean de Védas est nulle et que l'action de la commune en fixation de l'indemnité d'expropriation est irrecevable ;

Condamne la commune de Saint Jean de Védas à payer à Joséphine X... la somme de 750 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la commune de Saint Jean de Védas aux dépens. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT, CA/VS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 04/00003
Date de la décision : 29/09/2004

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE

En l'absence de délégation générale donnée au maire aux fins de représentation de la commune en justice, l'autorisation donnée par le conseil municipal en vue d'obtenir la déclaration d'utilité publique d'une opération d'expropriation et la déclaration de cessibilité du terrain ne donne pas au maire qualité pour agir dans la procédure en fixation des indemnités qui, par principe, est autonome par rapport à celle ayant conduit au transfert de propriété. Ce défaut d'autorisation constitue une irrégularité de fond affectant la saisine du juge de l'expropriation et celle-ci doit donc être annulée en l'absence de régularisation avant la clôture des débats


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2004-09-29;04.00003 ?
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