La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/10/2022 | FRANCE | N°20/01621

France | France, Cour d'appel de Metz, 6ème chambre, 20 octobre 2022, 20/01621


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS













N° RG 20/01621 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FKZY

Minute n° 22/00183





[D] DIVORCEE [J]

C/

[J], LE FONDS COMMUN DE TITRISATION (FCT) CASTANEA, S.A. SOCIETE GENERALE









Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de METZ, décision attaquée en date du 20 Mai 2020, enregistrée sous le n° 16/03532





COUR D'APPEL DE METZ



CHAMBRE COMMERCIALE
<

br>

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2022









APPELANT :



Monsieur [C] [D] DIVORCEE [J]

[Adresse 3]

[Localité 9]



Représenté par Me Laure-anne BAI-MATHIS, avocat au barreau de METZ









INTIMÉS :



Monsieur [X...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 20/01621 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FKZY

Minute n° 22/00183

[D] DIVORCEE [J]

C/

[J], LE FONDS COMMUN DE TITRISATION (FCT) CASTANEA, S.A. SOCIETE GENERALE

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de METZ, décision attaquée en date du 20 Mai 2020, enregistrée sous le n° 16/03532

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2022

APPELANT :

Monsieur [C] [D] DIVORCEE [J]

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représenté par Me Laure-anne BAI-MATHIS, avocat au barreau de METZ

INTIMÉS :

Monsieur [X] [J]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Non représentée

INTERVENANTE VOLONTAIRE

LE FONDS COMMUN DE TITRISATION (FCT) CASTANEA, ayant pour société de gestion, la société EQUITIS GESTION, société par actions simplifiée, et représenté par la société MCS ET ASSOCIES, société par actions simplifiée, agissant en qualité de recouvreur poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, Venant aux droits de la S.A SOCIETE GENERALE,

[Adresse 6]

[Adresse 7]

Représentée par Me Gilles ROZENEK, avocat au barreau de METZ

S.A. SOCIETE GENERALE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentée par Me Gilles ROZENEK, avocat au barreau de METZ

DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 19 Mai 2022 tenue par Mme Claire DUSSAUD, Magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans son délibéré, pour l'arrêt être rendu le 20 Octobre 2022.

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Jocelyne WILD

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Mme FLORES, Présidente de Chambre

ASSESSEURS : Mme DEVIGNOT,Conseillère

Mme DUSSAUD, Conseillère

ARRÊT : Réputé contradictoire

Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme FLORES, Présidente de Chambre et par Mme Jocelyne WILD, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Suivant offre acceptée le 12 juillet 2000, la SA Société générale a consenti à M. [X] [J] et à Mme [C] [J] née [D], qui s'engageaient solidairement, un prêt immobilier d'un montant de 1 020 000 francs, soit 155 497,99 euros, stipulé remboursable sur 180 mensualités de 8 779,50 francs, soit 1 338,43 euros chacune, au taux d'intérêt contractuel fixe de 5,70 % l'an.

Un avenant au contrat de prêt initial du 26 avril 2011 dénommé « modification contractuelle du montant des mensualités » a porté le nombre de mensualités à 204, a prévu une réduction du montant de l'échéance à 981,31 euros et a fixé le terme du prêt au 7 août 2017.

Faisant état de mensualités impayées et de la déchéance du terme, la SA Société générale mettait en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 10 juin 2016 M. et Mme [J] de lui verser la somme de 21 895,63 euros restant due.

Par actes d'huissier délivrés à la personne de M. [J] le 18 octobre 2016, et selon procès-verbal de recherches infructueuses établi le 3 novembre 2016 pour Mme [J] née [D], la SA Société générale a saisi la première chambre civile du tribunal de grande instance de Metz en demandant au tribunal, au visa des articles 1193 et suivants du code civil, de :

- condamner solidairement M. [J] et Mme [D] épouse [J] à payer à la SA Société générale la somme de 22 189,86 euros outre les intérêts au taux conventionnel de 8,70 % l'an à compter du 27 septembre 2016,

- ordonner conformément aux dispositions de l'article 1153 du code civil la capitalisation annuelle des intérêts,

- condamner solidairement M. [J] et Mme [D] épouse [J] à payer à la SA Société générale la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement M. [J] et Mme [D] épouse [J] en tous les frais et dépens,

- ordonner l'exécution provisoire.

Par jugement avant dire droit du 26 avril 2018, le tribunal, au vu du procès-verbal de recherches infructueuses concernant Mme [J] née [D], a :

- enjoint à M. [J] de produire le jugement de divorce le concernant lui et Mme [D],

- enjoint à la SA Société générale de délivrer une nouvelle assignation à Mme [D],

- ordonné pour ce faire la réouverture des débats,

- ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture,

- renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état parlante se tenant le 22 juin 2018 pour les conclusions des parties.

La SA Société générale a fait signifier le jugement du 26 avril 2018 et fait délivrer une nouvelle assignation par acte d'huissier signifiée le 25 septembre 2018 à Mme [D], l'assignation ayant été faite par remise à l'étude de l'huissier.

Par jugement du 20 mai 2020, le tribunal judiciaire de Metz a :

- condamné M. [J] et Mme [D] divorcée [J] au titre du prêt n°00198007304 à régler solidairement à la SA Société générale prise en la personne de son représentant légal la somme de 22 189,86 euros outre intérêts au taux conventionnel de 5,70% l'an à compter du 28 septembre 2016 sur celle de 20 963,39 euros et au taux légal sur celle de 876,85 euros à compter du jugement jusqu'à complet paiement,

- dit et jugé que les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière en application de l'article 1343-2 du code civil,

- débouté la SA Société générale pour le surplus de ses demandes,

- condamné solidairement M. [J] et Mme [J] née [D] aux dépens ainsi qu'à régler solidairement à la SA Société générale prise en la personne de son représentant légal la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- prononcé l'exécution provisoire du présent jugement.

Pour se déterminer ainsi, les premiers juges ont considéré qu'il résulte du prêt n°100198007304 que le montant en capital est de 1 002 000 francs, soit 155 498,00 euros, remboursable sur 180 mois au taux contractuel fixe de 5,70% et que, selon les mentions qui figurent au contrat, les époux [J], emprunteurs, agissent solidairement entre eux, et sont considérés comme un seul débiteur aux termes de l'article 1200 du code civil.

Le tribunal indique que, selon les termes d'un avenant paraphé, accepté et signé par M. [J] et Mme [D] épouse [J] du 26 avril 2021 dénommé « modification contractuelle du montant des mensualités », M. et Mme [J] ont demandé à la SA Société Générale de modifier les modalités d'amortissement du prêt et qu'il en résulte, de convention expresse, que les parties n'ont pas entendu, par l'effet de l'avenant, mettre fin au contrat initial de sorte que les conditions de ce dernier sont demeurées applicables.

Le tribunal judiciaire a relevé qu'il résulte des pièces produites que la SA Société générale a adressé des courriers par lettres recommandées du 4 mars 2016 à M. [J] et à Mme [D] épouse [J], dont il ressort qu'elle les a mis en demeure de régler sous huitaine la somme de 5 008,76 euros au titre des échéances impayées, en leur rappelant que le non paiement d'une échéance peut entraîner l'exigibilité du prêt. Le tribunal judiciaire a également relevé que par deux autres courriers du 10 juin 2016 la banque a avisé les époux [J] de l'exigibilité anticipée du prêt et les a mis en demeure de régler 21 895,63 euros incluant l'indemnité contractuelle. Le tribunal a estimé que la première échéance impayée du prêt est celle du 7 octobre 2015, que, en raison de la déchéance du terme, les sommes restant dues en raison du prêt consenti à l'emprunteur sont devenues exigibles et que, au vu des pièces produites, la banque a parfaitement rapporté la preuve de sa créance.

Il indique également que le versement de deux chèques de 300 euros est postérieur à la déchéance du terme et que le montant du capital dû au 27 septembre 2016, les prenant en compte, s'élève à 20 963,39 euros et les intérêts hors pénalités à 349,62 euros. Il admet le montant de l'indemnité forfaitaire de 876,85 euros réclamé par la banque.

Le tribunal ajoute que M. [J] et Mme [D] n'ont contesté ni le principe ni le montant de la demande en paiement.

Il souligne que, s'agissant des intérêts de retard, la SA Société Générale demande le remboursement immédiat des sommes qui lui sont dues et que, par conséquent, il doit être fait application d'un taux contractuel de 5,70% l'an.

Sur la capitalisation des intérêts, le tribunal rappelle qu'en vertu de l'article 1343-2 du code civil les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise.

Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Metz du 09 septembre 2020, Mme [D] a interjeté appel aux fins d'annulation, subsidiairement infirmation du jugement rendu le 20 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Metz en ce qu'il a :

- condamné Mme [D] divorcée [J] solidairement avec M. [J] au titre du prêt n° 100198007304 à régler à la SA Société générale prise en la personne de son représentant légal la somme de 22 189,86 euros outre intérêts au taux conventionnel de 5,70 % l'an à compter du 28 septembre 2016 sur celle de 20 963,39 euros et au taux légal sur celle de 876,85 euros à compter du jugement jusqu'à complet paiement,

- dit et jugé que les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière en application de l'article 1343-2 du code civil,

- condamné Mme [D] divorcée [J] solidairement avec M. [J] aux dépens ainsi qu'à régler solidairement à la SA Société générale prise en la personne de son représentant légal la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- prononcé l'exécution provisoire du présent jugement.

La déclaration d'appel et les conclusions justificatives d'appel de Mme [D] ont été signifiées à la requête de celle-ci à M. [X] [J] par acte d'huissier de justice en date du 17 décembre 2020 déposé en l'étude.

Par acte du 3 mars 2021 intitulé « conclusions et intervention volontaire », il a été précisé par 1) la SA Société Générale et 2) le Fonds Commun de Titrisation (FIT) Castanea, ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion, SAS, et représenté par la société MCS et Associés, SAS, venant aux droits de la SA Société Générale, que la créance de la SA Société générale a été cédée au Fond commun de placement qui intervient volontairement aux débats et qui réclame le bénéfice du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Metz le 20 mai 2020.

Ces conclusions du 3 mars 2021 ont été signifiées à la requête de la SA Société Générale et du Fonds Commun de Titrisation à M. [X] [J] par acte d'huissier de justice en date du 17 mars 2021 remis à sa personne.

M. [X] [J] n'a pas constitué avocat dans la procédure d'appel.

Par conclusions du 7 octobre 2021, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, Mme [D] demande à la cour de :

- dire et juger l'appel de Mme [D] à l'encontre du jugement du tribunal judiciaire de Metz du 20 mai 2020 recevable en la forme et bien fondé,

En conséquence, y faire droit,

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- dire et juger que la déchéance du terme du contrat de prêt est nulle et non avenue,

- débouter la SA Société générale de sa demande en paiement,

Subsidiairement,

- débouter la SA Société générale de sa demande en paiement,

- débouter la Société générale de sa demande en paiement de la somme de 876,85 euros au titre de l'indemnité de résiliation,

Subsidiairement,

- réduire le montant de l'indemnité de résiliation à l'euro symbolique ou à de plus justes proportions,

- dire n'y avoir lieu à la capitalisation des intérêts vis-à-vis de Mme [D],

- accorder à Mme [D] des délais de paiement sur 24 mois pour s'acquitter de la dette,

- prendre acte de l'intervention volontaire du Fonds commun de titrisation Castanea, ayant pour société de gestion la SAS Equitis gestion, représenté par la SAS MCS et associés et statuer ce que de droit sur sa demande,

- dire et juger l'appel en garantie de Mme [D] à l'encontre de M. [J] recevable en la forme et bien fondé,

En conséquence, y faire droit,

- condamner M. [J] à garantir Mme [D] de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit de la SA Société générale en principal, intérêts, frais, article 700 du code de procédure civile et dépens,

- subsidiairement, condamner M. [J] à payer à Mme [D] à titre de dommages et intérêts une somme équivalente au montant de la somme que Mme [D] serait amenée à payer à la SA Société générale,

- condamner M. [J] à payer à Mme [D] une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la SA Société générale de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [J] aux frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel.

L'appelante fait valoir qu'elle n'a pas été touchée tant par les courriers adressés par la SA Société générale que par l'assignation en justice.

Mme [D] estime que la lettre de mise en demeure avant déchéance du terme doit laisser au débiteur un délai raisonnable pour régulariser la situation débitrice et qu'un délai de 8 jours est trop bref pour considérer qu'il est raisonnable et puisse permettre au débiteur de se refinancer auprès d'un autre organisme bancaire ou trouver une solution à sa situation.

Elle soutient que le courrier adressé par la SA Société générale le 4 mars 2016 n'est pas clair, alors que la lettre de mise en demeure ne doit laisser aucun doute sur les intentions de la banque. Elle considère que la mise en demeure adressée le 4 mars 2016 est, en conséquence, nulle, de sorte que la déchéance du prêt est non avenue.

Mme [D] souligne que la SA Société générale ne justifie pas du montant de sa créance, celle-ci se contentant de produire un décompte à compter du 7 octobre 2015, date du premier incident de paiement non régularisé, et que le décompte d'intérêts fait par la banque est incompréhensible.

Sur l'indemnité de résiliation, l'appelante indique que l'immeuble acquis grâce au concours financier de la SA Société générale a été vendu le 2 mai 2004 pour une somme de 214 000 euros, et que la banque, interrogée par le notaire, n'a pas demandé à être désintéressée du solde du prêt immobilier, ce qu'elle trouve curieux. Elle ajoute que, dans le cadre de la procédure de divorce, M. [J] s'était engagé à prendre en charge le règlement des échéances du prêt consenti par la SA Société général sans recours contre elle et que M. [J] a failli à cet engagement. Elle conclut au rejet ou à la réduction à l'euro symbolique de l'indemnité de résiliation.

Enfin elle formule un appel en garantie à l'encontre de M. [X] [J] qui s'est engagé à prendre en charge les échéances du prêt dans la procédure de divorce et qui a, selon elle, failli à cet engagement alors que qu'il en a été tenu compte dans les décisions sur les mesures financières du divorce. A titre subsidiaire elle demande sa condamnation sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

Par conclusions déposées le 12 janvier 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la SA Société générale et le Fonds commun de titrisation Castanea, ayant pour société de gestion la SAS Equitis gestion, représenté par la SAS MCS et associés demandent à la cour de :

- Constater que le Fonds commun de titrisation Castanea, ayant pour société de gestion la SAS Equitis gestion, représenté par la SAS MCS et associés intervient en lieu et place de la SA Société générale,

- Recevoir l'intervention volontaire du Fonds commun de titrisation Castanea, ayant pour société de gestion la SAS Equitis gestion, représenté par la SAS MCS et associés,

Ce fait,

- rejeter l'appel formé par Mme [D] divorcée [J],

- la débouter de toutes demandes, fins et conclusions dirigées contre la banque,

- confirmer le jugement entrepris sauf à préciser que la condamnation bénéficiera au Fonds commun de titrisation Castanea, ayant pour société de gestion la SAS Equitis gestion, représenté par la SAS MCS et associés,

- condamner Mme [D] divorcée [J] aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2 500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée indique à titre liminaire que la créance objet du litige a été cédée, par acte de cession de créances en date du 3 août 2020, par la SA société générale au Fonds commun de titrisation Castanea, ayant pour société de gestion la SAS Equitis gestion, représenté par la SAS MCS et associés.

Elle fait valoir que le courrier de mise en demeure du 4 mars 2016 est strictement conforme aux exigences réglementaires et jurisprudentielles, étant clair, précis, non équivoque et dépourvu de toute ambiguïté, que celui-ci mentionne bien le délai accordé à l'emprunteur pour régulariser la situation et que le délai de huit jours permettait à Mme [D] de prendre attache avec la banque pour tenter de trouver un accord de règlement.

Elle rappelle que Mme [D] s'est engagée solidairement avec M. [J], aux termes d'une convention unique et indivisible et que ses rapports avec M. [J] sont inopposables à la banque.

L'intimée souligne qu'il appartenait à Mme [D] d'informer la SA Société générale de tout changement de domicile par lettre recommandée avec accusé de réception, tel que prévu par l'article 16 des conditions générales de l'offre de prêt.

Elle conclut que le décompte versé aux débats mentionne bien le détail des intérêts, que le principal de 20 963,39 euros comprend le capital restant dû de 12 256,38 euros ainsi que la somme de 8 437,01 euros correspondant aux échéances impayées et aux intérêts.

L'intimée ajoute que l'anatocisme est de droit, les conditions étant remplies et que Mme [J] ne justifie aucunement être éligible aux conditions légales requises pour que lui soient accordés des délais de paiement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 3 février 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'intervention volontaire du Fonds Commun de Titrisation Castanea :

Le Fonds Commun de Titrisation intervient volontairement en la procédure.

Il y a lieu de constater, ainsi qu'il le sollicite, qu'il intervient en lieu et place de la Société Générale.

Sur la déchéance du terme :

Le contrat de crédit, la mise en demeure du 4 mars 2016 et la déchéance du terme du 10 juin 2016, sont antérieurs à l'entrée en vigueur le 1er octobre 2016 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, de sorte que les dispositions du code civil issues de cette ordonnance ne sont pas applicables au litige.

Si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier, sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

Conformément à l'ancien article 1139 du code civil, dans sa version applicable au litige, la mise en demeure du débiteur est constituée d'une sommation ou d'un acte équivalent, telle une lettre missive lorsqu'il ressort de ses termes une interpellation suffisante.

En l'espèce le contrat de prêt conclu par la SA Société Générale et M. et Mme [J] contient à l'article 11 des conditions générales une clause d'exigibilité anticipée du prêt pour non paiement à son échéance d'une mensualité ou de toute somme due à un titre quelconque.

La lettre du 4 mars 2016 adressée par la SA Société Générale en recommandé avec accusé de réception à Mme [C] [J] d'une part, et à M. [X] [J] d'autre part, indique notamment :

- le montant des échéances impayées, 5008,76 euros, dont la banque demandait le règlement,

- le délai laissé aux emprunteurs pour régler cette somme, dans les huit jours à compter de la réception de la lettre,

- et le rappel, en caractères gras que, le non règlement d'une seule échéance peut entraîner l'exigibilité du prêt sous référence.

Cette lettre recommandée rappelant de manière visible le risque d'exigibilité du prêt en cas de défaut de règlement d'une seule échéance, les alertant clairement sur la nécessité de payer les échéances non soldées totalisant 5008,76 euros, et sur les conséquences financières d'un défaut de paiement, comporte une interpellation suffisante pour les débiteurs et caractérise une mise en demeure.

Par ailleurs le délai de huit jours laissé aux débiteurs pour régler les échéances impayées est un délai suffisant dès lors qu'il leur laisse le temps de faire un virement, ou de prendre contact avec leur banquier pour tenter de chercher des solutions.

Enfin le défaut de réception par son destinataire d'une mise en demeure envoyée par lettre recommandée avec avis de réception à son adresse effective n'affecte pas sa validité.

Les lettres recommandées ont été envoyées à Mme [J] comme à M. [J] à une adresse située [Adresse 2]. Celle destinée à Mme [J] est revenue avec la mention « destinataire inconnu à cette adresse » cochée par le facteur. Toutefois Mme [J] ne soutient pas devant la cour qu'elle n'a jamais vécu à cette adresse, et elle ne prétend pas non plus avoir communiqué sa nouvelle adresse à la SA Société Générale. Il n'est ni allégué ni établi que l'adresse à laquelle la lettre du 4 mars 20216 a été expédiée n'était pas, à cette date, la dernière adresse de Mme [J] connue par la SA Société Générale.

En conséquence la lettre de mise en demeure préalable en date du 4 mars 2016 est valable et opposable aux deux emprunteurs. Faute de règlement des échéances impayées dans le délai imparti, la déchéance du terme notifiée par lettre recommandée du 10 juin 2016 est également justifiée et opposable à Mme [J] et à M. [J], de sorte que le capital restant dû sur le prêt est devenu immédiatement exigible à cette date. La demande tendant à l'annulation de la déchéance du terme est rejetée.

Sur le montant de la créance :

Selon l'ancien article L. 312-22 du code de la consommation, dans sa version applicable en la cause :

« En cas de défaillance de l'emprunteur et lorsque le prêteur n'exige pas le remboursement immédiat du capital restant dû, il peut majorer, dans des limites fixées par décret, le taux d'intérêt que l'emprunteur aura à payer jusqu'à ce qu'il ait repris le cours normal des échéances contractuelles. Lorsque le prêteur est amené à demander la résolution du contrat, il peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, ainsi que le paiement des intérêts échus. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 du code civil, ne peut excéder un montant qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat, est fixé suivant un barème déterminé par décret. »

L'ancien article L. 312-23 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, précise qu'aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L. 312-21 et L. 312-22 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation ou de défaillance prévus par ces articles.

Eu égard aux dispositions des articles L. 312-22 et L. 312-23 du code de la consommation, et aux dispositions contractuelles, l'application d'un taux d'intérêt contractuel majoré sur les échéances impayées n'est pas justifié, dès lors que le prêteur a sollicité le remboursement immédiat du capital dû. Le décompte de créance produit en pièce 7 est erroné quant au calcul d'intérêts au taux majoré sur les échéances impayées, et quant à l'imputation partielle du règlement de 600 euros sur ces intérêts majorés. En revanche ce document est pris en compte s'agissant de la date des échéances impayées, non contestées entre les parties, et de l'existence du règlement d'un montant total de 600 euros.

Par ailleurs conformément à l'article 1231-5 du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

En l'espèce l'indemnité contractuelle de 7 %, prévue par l'article 9 B des conditions générales du crédit, et qui a été calculée sur le capital restant dû après l'échéance du 7 juin 2016, n'est pas manifestement excessive. Il est observé que l'engagement par M. [J] envers Mme [D] de prendre en charge les échéances du prêt, n'est pas opposable au prêteur. Par ailleurs le fait que les emprunteurs aient vendu leur bien leur permettait de conserver des fonds pour assurer le remboursement du prêt.

Au vu des dispositions légales précitées, du contrat de prêt, de l'avenant, du nouveau tableau d'amortissement, de la déchéance du terme avec mise en demeure en date du 10 juin 2016, et du décompte de créance, le prêteur est en droit de réclamer le paiement des sommes suivantes :

- capital restant dû au 10.06.2016 : 12 526,38 euros,

- échéances impayées  : (9 × 981,31 = 8 831,79 euros) ' 600 euros payés = 8 231,79 euros,

Soit un total restant dû au titre du prêt de 20 758,17 euros, portant intérêts au taux contractuel de 5,70 % à compter de la mise en demeure,

- indemnité conventionnelle de 7 % sur le capital dû : 12 526,38 x 7 /100 = 876,85 euros produisant intérêts au taux légal à compter du jugement.

Le jugement est infirmé quant au montant de la créance, et toute demande supérieure aux montants ci-dessus est rejetée. En revanche le point de départ des intérêts au taux contractuel, fixé au 28 septembre 2016 par le jugement n'est pas contesté et sera donc retenu. La Société Générale et le Fonds Commun de Titrisation (FCT) Castanea demandent à ce qu'il soit précisé que la condamnation bénéficiera à ce dernier. Il y a dès lors lieu de condamner solidairement les emprunteurs à payer au FCT Castanea les montants déterminés ci-dessus.

Sur la capitalisation des intérêts :

Selon l'ancien article L. 312-23 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés à l'article L. 312-22 ne peut être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation ou de défaillance prévus par ces articles.

Cette disposition fait obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts prévue par le code civil.

En conséquence le jugement est infirmé en ce qu'il dit que les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière en application de l'article 1343-2 du code civil.

Sur la demande de délais de paiement :

Selon l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Mme [D] sollicite des délais de paiement sans indiquer quels sont ses revenus et son patrimoine, et sans produire de pièces justificatives concernant sa situation financière. Sa demande en délais de paiement est rejetée.

Sur l'appel en garantie contre M. [X] [J] :

Selon l'article 1317 du code civil entre eux, les codébiteurs solidaires ne contribuent à la dette que chacun pour sa part, et celui qui a payé au-delà de sa part dispose d'un recours contre les autres à proportion de leur propre part.

Conformément à l'article 331 du code de procédure civile, un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d'agir contre lui à titre principal.

En vertu de l'article 334 du code de procédure civile un appel en garantie simple peut être formé par une partie qui est poursuivie comme personnellement obligée.

Il résulte de ces textes que si le recours en paiement du débiteur solidaire suppose qu'il a payé, il n'en est pas de même de l'appel en garantie, lequel est ouvert contre l'appelé qui est personnellement obligé.

En l'espèce Mme [D] forme un appel en garantie contre M. [J] avant d'avoir elle-même payé le prêteur. Afin de démontrer que son appel en garantie est fondé il incombe à Mme [D] d'établir que M. [J] s'est personnellement obligé envers elle à prendre seul en charge les échéances du crédit immobilier sans recours contre elle.

Cependant à cet égard Mme [D] ne produit qu'une photocopie d'une simple lettre de M. [X] [J] en date du 10 mai 2012, dans laquelle il indique vouloir régler à l'amiable les effets du divorce et formule diverses propositions de mesures, dont un engagement à rembourser le crédit envers la SA Société Générale. De telles propositions de mesures financières, formulées dans le contexte d'un litige entre époux et d'une recherche de règlement amiable, devaient soit être suivies d'une convention entre époux respectant les formes prévues par l'article 229-1 du code civil et déposée au rang des minutes d'un notaire, soit être soumises au contrôle du juge aux affaires familiales.

Mme [D] ne produit pas de convention prévue par l'article 229-1 du code civil, ni de jugement de divorce, et ne justifie pas de mesures prises ou homologuées par le juge aux affaires familiales, qui imposeraient à M. [J] de payer la totalité des échéances du crédit immobilier, et la déchargeraient entièrement dans ses rapports avec lui.

La simple lettre de M. [J] est dépourvue d'effet juridique et de force exécutoire.

Les autres pièces produites par Mme [D] sont une attestation et un chèque du 2 mai 2004 de Me [O] (pièce 2 et 3) qui concernent la vente de la maison d'habitation située à [Adresse 10], et le jugement du 11 janvier 2005 qui concerne le changement de régime matrimonial entre époux (pièce 4 de Mme [D]). Il demeure qu'après le changement de régime matrimonial les deux époux sont restés tenus solidairement envers la SA Société Générale.

Mme [D] ne démontre pas que M. [J] s'est personnellement et définitivement obligé envers elle à prendre seul en charge les échéances du crédit immobilier. L'appel en garantie contre lui avant paiement n'est pas fondé. La demande correspondante est rejetée.

Sur la demande en dommages-intérêts formée contre M. [J] :

Selon l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Mme [D] ne démontre pas que M. [J] a engagé sa responsabilité délictuelle à son encontre, et n'invoque aucun moyen à cet égard. La demande en dommages-intérets à son encontre est rejetée.

Sur les dépens et l'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile :

Les dispositions du jugement statuant sur les dépens et indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance sont confirmées. Il est ajouté que la condamnation à l'indemnité prévue par l'article 700 pour la procédure de première instance bénéficiera au FCT Castanea.

Succombant au moins partiellement en ses prétentions, et restant débitrice envers le FCT Castanea, Mme [D] est condamnée aux dépens d'appel, et ses demandes au titre des dépens et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.

Il ne paraît pas équitable de faire droit à la demande de la SA Société Générale et du FCT Castanea sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Cette demande est également rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Constate que le Fonds Commun de Titrisation (FCT) Castanea, ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion, SAS, et représenté par la société MCS et Associés, SAS, venant aux droits de la SA Société Générale, intervient volontairement en la procédure, et déclare intervenir en lieu et place de la S.A. Société Générale ;

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- condamné Mme [D] divorcée [J] solidairement avec M. [J] au titre du prêt n° 100198007304 à régler à la SA Société générale prise en la personne de son représentant légal la somme de 22 189,86 euros outre intérêts au taux conventionnel de 5,70 % l'an à compter du 28 septembre 2016 sur celle de 20 963,39 euros et au taux légal sur celle de 876,85 euros à compter du jugement jusqu'à complet paiement,

- dit et jugé que les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière en application de l'article 1343-2 du code civil,

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées :

Condamne solidairement Mme [C] [D] et M. [X] [J] à payer au Fonds Commun de Titrisation (FCT) Castanea, ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion, SAS, et représenté par la société MCS et Associés, SAS, venant aux droits de la SA Société Générale, la somme de 20 758,17 euros au titre des sommes restant dues sur le prêt immobilier du 12 juillet 2000, et ce avec intérêts au taux contractuel de 5,70 % à compter du 28 septembre 2016 ;

Condamne solidairement Mme [C] [D] et M. [X] [J] à payer au Fonds Commun de Titrisation (FCT) Castanea, ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion, SAS, et représenté par la société MCS et Associés, SAS, venant aux droits de la SA Société Générale, la somme de 876,85 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de 7 %, et ce avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

Rejette toute demande plus ample ;

Rejette la demande de capitalisation des intérêts ;

Confirme le jugement en ce qu'il a condamné Mme [D] divorcée [J] solidairement avec M. [J] aux dépens ainsi qu'à régler solidairement à la SA Société générale prise en la personne de son représentant légal la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant 

Rejette la demande d'annulation de la déchéance du terme formée par Mme [C] [D] ;

Rejette la demande de réduction de l'indemnité de résiliation formée par Mme [C] [D]  ;

Rejette la demande de délais de paiement formée par Mme [C] [D] ;

Rejette l'appel en garantie formé par Mme [C] [D] à l'encontre de M. [X] [J] ;

Rejette la demande de condamnation formée par [C] [D] à l'encontre de M. [X] [J] ;

Dit que la condamnation à la somme de 1 000 euros à titre d'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance bénéficiera au Fonds commun de Titrisation (FCT) Castanea, ayant pour société de gestion la SAS Equitis gestion, représenté par la SAS MCS et associés ;

Condamne Mme [C] [D] aux dépens de la procédure d'appel ;

Rejette les demandes de Mme [C] [D] au titre des dépens ;

Déboute Mme [C] [D], la SA Société Générale, et le Fonds Commun de Titrisation (FCT) Castanea, ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion, SAS, et représenté par la société MCS et Associés, SAS, venant aux droits de la SA Société Générale, de leurs demandes respectives au titre de l'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

La greffièreLa présidente de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/01621
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;20.01621 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award