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03/03/2020 | FRANCE | N°19/05296

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 03 mars 2020, 19/05296


N° RG 19/05296 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MQHW









Décisions :

- Tribunal de Grande Instance de SAINT ETIENNE

Au fond du 23 février 2016



RG : 14/01067

1ère chambre civile



- Cour d'Appel de LYON

du 07 décembre 2017

RG : 16/02487

3ème chambre A



- Cour de Cassation Civ.3

du 09 mai 2019

Pourvoi n°H 18-12.682

Arrêt n°374 F-D









[S]



C/



Société FRANCE QUICK





RÉP

UBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 03 Mars 2020



statuant sur renvoi après cassation







APPELANT :



M. [S] [S]

né le [Date naissance 1] 1951 à SAINT ETIENNE (42)

[Adress...

N° RG 19/05296 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MQHW

Décisions :

- Tribunal de Grande Instance de SAINT ETIENNE

Au fond du 23 février 2016

RG : 14/01067

1ère chambre civile

- Cour d'Appel de LYON

du 07 décembre 2017

RG : 16/02487

3ème chambre A

- Cour de Cassation Civ.3

du 09 mai 2019

Pourvoi n°H 18-12.682

Arrêt n°374 F-D

[S]

C/

Société FRANCE QUICK

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 03 Mars 2020

statuant sur renvoi après cassation

APPELANT :

M. [S] [S]

né le [Date naissance 1] 1951 à SAINT ETIENNE (42)

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représenté par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, toque : 475

Assisté de Me Brigitte MANEVAL-PASQUET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉE :

La SAS FRANCE QUICK, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 4]

[Adresse 5]

Représentée par Me Géraldine VILLAND, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

Assistée de Me Daniel FAUQUET, avocat au barreau de PARIS

******

Date de clôture de l'instruction : 28 Janvier 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 04 Février 2020

Date de mise à disposition : 03 Mars 2020

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Florence PAPIN, conseiller

- Laurence VALETTE, conseiller

assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier

A l'audience, Françoise CARRIER a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

Par acte sous seing privé des 2 mai et 10 juillet 1995, M. [S] [S] a consenti à la société FRANCE QUICK un bail commercial portant sur des locaux situés [Adresse 6] moyennant un loyer égal à 4% du chiffre d'affaires HT.

Ce bail prévoyait en son article 8-3 qu'en cas de mise en gérance libre du fonds, le preneur devrait notifier au bailleur la mise en gérance libre et lui remettre une copie du contrat.

En juillet 1995, M. [S] a donné mandat au cabinet [D] d'assurer la gestion du bien immobilier donné à bail.

Par acte sous seing privé du 30 septembre 2005, la société FRANCE QUICK a donné son fonds de commerce en location gérance à la société COMBAULT RESTAURATION.

Un avenant du 31 juillet 2007 a prorogé de dix ans le contrat de location gérance.

Le 1er septembre 2009, un second bail commercial, à effet du 1er août 2007 au 31 juillet 2019, a été conclu entre les mêmes parties moyennant un loyer fixé à 5% du chiffre d'affaires HT avec un loyer minimum garanti de 76 220 € HT par an. Ce bail comportait la même clause 8-3 que le précédent.

Selon acte authentique du 23 juin 2011, M. [S] a cédé les locaux pris à bail à la société COMBAULT RESTAURATION. Cette dernière est donc devenue le bailleur de la société FRANCE QUICK.

C'est en cette qualité qu'elle a engagé dès octobre 2011, une première procédure contre la société FRANCE QUICK aux fins d'obtenir un rattrapage de loyer sur les cinq ans précédant la vente pour un montant de 98 000 000 € et la résiliation de bail. Dans le cadre de cette procédure, elle a reproché à la société FRANCE QUICK de n'avoir pas informé M. [S] de la mise en location gérance à son profit et a versé aux débats une attestation de ce dernier en ce sens.

Cette procédure s'est achevée par un jugement du 1er avril 2014 par une décision de débouté. Une seconde procédure en contestation des redevances de location gérance, introduite en novembre 2011 par la société COMBAULT RESTAURATION à l'encontre de la société FRANCE QUICK devant le tribunal de commerce de PARIS, s'était également terminée par un jugement de débouté assorti de dommages et intérêts en date du 31 octobre 2013.

Reprochant à son tour à la société FRANCE QUICK de ne pas lui avoir remis copie du contrat de location gérance du 1er octobre 2005 ainsi que de l'avenant du 31 juillet 2007, M. [S], précédent propriétaire des murs, a, par acte d'huissier du 17 mars 2014, fait assigner la société FRANCE QUICK devant le tribunal de grande instance de SAINT ETIENNE pour obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 3 400 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la perte de loyers subie pendant la durée du bail ainsi que de celle survenue lors de la vente.

Par jugement du 23 février 2016, le tribunal a déclaré l'action de M. [S] prescrite et a condamné ce dernier à payer à la société FRANCE QUICK la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 7 décembre 2017, la cour d'appel de LYON a confirmé le jugement sauf sur la condamnation de M. [S] à payer à la société FRANCE QUICK la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts, débouté cette dernière de ce chef de demande et condamné M. [S] à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Sur pourvoi de M. [S] et par arrêt du 9 mai 2019, la cour de cassation a cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il déclare prescrite la demande de M. [S], l'arrêt rendu le 7 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de LYON au motif que,

- pour déclarer prescrite l'action en indemnisation du préjudice subi par M. [S] du fait de la perte de chance d'avoir pu négocier la vente de l'immeuble à un prix supérieur et de ne pas avoir pu négocier un loyer supérieur lors du renouvellement du bail,l'arrêt fixe le point de départ de la prescription quinquennale au 11 mars 2008, date de la découverte du manquement contractuel,

- qu'en statuant ainsi, alors que le premier dommage s'était manifesté au jour de la conclusion de la vente, soit le 23 juin 2011 et le second à la date de renouvellement du bail soit le 1er septembre 2009, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil.

M. [S] a saisi la cour de LYON désignée comme cour de renvoi par acte du 23 juillet 2019.

Au terme de conclusions notifiées le 9 janvier 2020, M. [S] demande à la cour de réformer le jugement et de :

- déclarer son action recevable,

- condamner la société FRANCE QUICK à lui payer la somme de 700 000 € en indemnisation de la perte de loyers subie pendant la durée du bail et la somme de 2 700 000 € en inrdemnisation du préjudice subi quant à la valeur de cession du bien,

- débouter la société FRANCE QUICK de ses demandes,

- condamner la société FRANCE QUICK à lui payer la somme de 7 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Au terme de conclusions notifiées le 27 janvier 2020, la société FRANCE QUICK demande à la cour de :

- déclarer M. [S] irrecevable en ses demandes,

- débouter M. [S] de ses demandes,

- condamner M. [S] à lui payer la somme de 150 000 € à titre de dommages et intérêts pour abus de droit, la somme de 30 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prescription

La société FRANCE QUICK fait valoir :

- qu'elle a notifié la mise en location gérance de son fonds et le contrat conclu avec la société CAMIX par lettre RAR du 26 septembre 1997 dont M. [S] a régulièrement signé l'avis de réception,

- que la seconde mise en location gérance conclue avec la société COMBAULT RESTAURATION a été notifiée à M. [S] par courrier simple le 11 octobre 2005, les faits de la cause démontrant que celui-ci a bien reçu cette lettre.

M. [S] fait valoir en réponse que le contrat de location gérance ne lui a pas été notifié le 11 octobre 2005 comme le soutient la défenderesse ; que son action, s'agissant d'une action en responsabilité contractuelle, n'est pas prescrite, la prescription n'ayant pu commencer à courir qu'à compter de la manifestation du dommage dont il demande la réparation à savoir soit la date de renouvellement du bail le 1er septembre 2009 soit la date de la vente de l'immeuble le 23 juin 2011.

Si le premier juge a justement retenu que, s'agissant d'un fait juridique, la preuve pouvait en être faite par tout moyen, l'envoi et la réception de la lettre simple en date du 11 octobre 2005 invoquée par la société FRANCE QUICK ne sauraient résulter de ce que M. [S] a eu ou pu avoir, postérieurement et par d'autres biais, connaissance de l'existence du contrat de location gérance.

Si l'on peut tirer des procédures introduites par la société COMBAULT RESTAURATION à l'encontre de la société FRANCE QUICK à compter de 2011 et de la concomitance entre la fin de ces procédures et la date d'introduction de la présente instance, l'existence d'une entente entre M. [S] et la société COMBAULT RESTAURATION, la cour ne peut en tirer l'affirmation que la lettre litigieuse aurait été envoyée et reçue par M. [S].

L'action s'analysant en une action en responsabilité contractuelle fondée sur un manquement de la société FRANCE QUICK à son obligation de lui dénoncer le contrat de location gérance, elle a pour point de départ la date de la manifestation du dommage.

Il n'est pas établi que le dommage allégué se soit manifesté plus de cinq ans avant l'introduction de l'instance de sorte que la fin de non recevoir de prescription doit être rejetée.

Sur le fond

M. [S] fait valoir :

- que ni le contrat de location gérance conclu avec la société COMBAULT RESTAURATION ni l'avenant du 31 juillet 2007 prorogeant la durée de ce contrat de dix ans ne lui ont été notifiés,

- que le manquement de la société FRANCE QUICK à son obligation d'information contractuelle lui a causé un préjudice en le privant d'informations primordiales pour négocier au mieux le renouvellement du bail en cours,

- que les dispositions du contrat de location gérance permettaient à FRANCE QUICK de percevoir des redevances mensuelles de l'ordre de 40 000 € alors que, dans le même temps, le loyer des murs s'établissait entre 7 000 et 12 000 €, que s'il avait connu ces conditions, M. [S] n'aurait jamais accepté un loyer fixé à 5% du chiffre d'affaires mais à 11%,

- que le comportement de FRANCE QUICK l'a empêché de négocier un loyer plus favorable, qu'il en va de même s'agissant du prix de vente dès lors que la valeur des murs se calcule sur la base de la rentabilité locative.

La société FRANCE QUICK fait valoir en réponse :

- que la location gérance consentie à COMBAULT RESTAURATION a été publiée à trois reprises en 2005 dans un journal d'annonces légales et au registre du commerce de sorte qu'elle est opposable par l'effet de la loi à M. [S],

- que M. [S] connaissait l'existence de la location gérance pusique son mandataire établissait les loyers depuis 2006 à partir du chiffre d'affaires de la société COMBAULT RESTAURATION, de la même façon qu'il les avait établis antérieurement sur la base du chiffre d'affaires de la société CAMIX,

- que le renouvellement de la location gérance du 31 juillet 2007 a été également publié en 2007,

- que le nouveau bail a été négocié en toute connaissance de l'existence de la location gérance dont M. [S] n'a jamais demandé à avoir copie,

- que M. [S] lors de la vente des murs à COMBAULT RESTAURATION n'a pas cherché à augmenter son prix alors qu'il avait connaissance de l'existence de la location gérance,

- que rien n'établit que l'existence et le contenu du contrat de location gérance lui auraient permis de vendre plus cher et que l'acquéreur aurait acheté à ce prix,

- que sa propre négligence consistant à connaître l'existence du locataire gérant et à ne pas se plaindre de la non notification du contrat ni à chercher à en connaître le contenu est seule à l'origine du préjudice de M. [S].

La société FRANCE QUICK produit aux débats les déclarations de chiffre d'affaires adressées au cabinet [D], gestionnaire immobilier mandaté par M. [S], pour le calcul du loyer à compter de 2006. A ces déclarations sont jointes la déclaration certifiée par un commissaire aux comptes ou un expert comptable du chiffre d'affaires de la société franchisée, COMBAULT RESTAURATION.

Le locataire gérant était parfaitement identifiable sur ces documents. Le cabinet [D] a établi les factures de loyer pour le compte de son mandant sur la base de ces déclarations. M. [S], qui n'a jamais formulé de grief à l'encontre de son mandataire alors que celui-ci était tenu de lui rendre compte de sa mission, a nécessairement été informé de l'existence de la location gérance avant 2009.

Il était donc en mesure de connaître les clauses de la location gérance qui, selon lui, auraient pu lui permettre de louer puis de vendre à un meilleur prix tant à la date de conclusion du nouveau bail qu'à la date de la vente de ses murs de sorte que le préjudice qu'il invoque n'est pas en lien de causalité direct et certain avec le manquement qu'il impute à la société FRANCE QUICK.

Il convient en conséquence de le débouter de ses demandes.

Sur les demandes accessoires

L'exercice d'une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équivalente au dol.

Le caractère exorbitant et infondé des demandes et une analyse subjective des faits ne sauraient suffire à caractériser un abus de droit de sorte qu'il convient de débouter la société FRANCE QUICK de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

M. [S] qui succombe supporte les dépens et une indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré l'action de M. [S] [S] prescrite et condamné M. [S] [S] à payer à la société FRANCE QUICK la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau,

Déclare M. [S] [S] recevable en son action ;

L'en déboute ;

Déboute la société FRANCE QUICK de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne M. [S] [S] à payer à la société FRANCE QUICK la somme de 8 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le condamne aux dépens y compris ceux exposés dans le cadre de la première procédure d'appel.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 19/05296
Date de la décision : 03/03/2020

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°19/05296 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-03-03;19.05296 ?
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