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27/01/2015 | FRANCE | N°13/08063

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 27 janvier 2015, 13/08063


R.G : 13/08063















Décision du

Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 17 septembre 2013



ch n°

RG : 12/00925







SARL FAYARD PERE ET FILS



C/



Organisme AG2R PREVOYANCE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 27 Janvier 2015







APPELANTE :

>
SARL FAYARD PERE ET FILS

[Adresse 2]

[Adresse 2] (LOIRE)







Représentée par la SELARL UROZ PRALIAUD & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON











INTIMEE :



Organisme AG2R PREVOYANCE [Adresse 1]

[Adresse 1]







Représentée par la SELAS JACQUES BARTHELEMY ET ASSOCIES,...

R.G : 13/08063

Décision du

Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE

Au fond

du 17 septembre 2013

ch n°

RG : 12/00925

SARL FAYARD PERE ET FILS

C/

Organisme AG2R PREVOYANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 27 Janvier 2015

APPELANTE :

SARL FAYARD PERE ET FILS

[Adresse 2]

[Adresse 2] (LOIRE)

Représentée par la SELARL UROZ PRALIAUD & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Organisme AG2R PREVOYANCE [Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par la SELAS JACQUES BARTHELEMY ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 16 Avril 2014

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 04 Décembre 2014

Date de mise à disposition : 27 Janvier 2015

Audience présidée par Jean-Jacques BAIZET, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Patricia LARIVIERE, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- François MARTIN, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Patricia LARIVIERE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire .

*****

EXPOSE DE L'AFFAIRE

En vertu d'un avenant n°83 du 24 avril 2006 de la convention collective nationale des entreprises artisanales de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie, il a été institué un régime obligatoire de remboursement complémentaire des frais de santé qui a été confié à la société AG2R Prévoyance.

Un arrêté ministériel du 16 octobre 2006 entré en vigueur le 1er janvier 2007 a prononcé l'extension de cet avenant à toute la branche de la boulangerie pâtisserie sur l'ensemble du territoire national.

L'avenant instaure une clause de migration qui prévoit notamment que ses dispositions s'appliquent y compris pour les entreprises ayant un contrat de complémentaire santé auprès d'un autre organisme assureur avec des garanties identiques ou supérieures à celles définies par l'avenant.

L'institution de prévoyance AG2R Prévoyance a assigné la société Fayard Père et Fils afin qu'il lui soit ordonné de régulariser son adhésion.

Par jugement du 17 septembre 2013, le tribunal de grande instance de Saint Etienne a ordonné à la société Fayard Père et Fils de régulariser son adhésion à AG2R Prévoyance en retournant complété et signé l'état nominatif du personnel ainsi que les bulletins individuels d'affiliation de tous les salariés, accompagnés des justificatifs, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours, et de payer, dans les 30 jours de l'appel de cotisations, les cotisations de l'ensemble des salariés prévues à l'avenant 83, et dues depuis le 1er janvier 2007, et a condamné la société Fayard Père et Fils à payer à AG2R Prévoyance la somme de 2.000 euros à titre de dommages intérêts et la même somme au titre de ses frais de défense.

La société Fayard Père et Fils a interjeté appel du jugement dont elle sollicite la réformation.

Elle demande à la cour de :

- faire application de la jurisprudence civile interne consacrant un principe de liberté d'adhésion aux entreprises entrant dans le champ d'application de la convention collective en cause,

- dire que l'article L912-1 du code de la sécurité sociale n'avait pas vocation à s'appliquer et à emporter migration dès lors qu'en 2007 le niveau de garantie offert par AG2R était inférieur à celui souscrit auprès des autres organismes,

- tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel qui confirme sa position depuis de nombreuses années,

- dire illégale et non conforme à la Constitution la clause de migration et la clause de désignation visées dans l'avenant en cause au principal,

En conséquence,

- dire que la créance de l'organisme AG2R n'est ni liquide ni exigible,

- rejeter les demandes en paiement des cotisations et de rappel de cotisation,

A tout le moins,

- déclarer irrecevables les demandes de l'organisme AG2R pour les motifs ci avant exposés (prescription et absence de base légale),

Sur le plan du droit communautaire et ensuite de l'arrêt de la CJUE du 3 mars 2011,

- constater que les dispositions de l'avenant N°83 à la convention collective des entreprises artisanales de boulangerie et boulangerie-pâtisserie sont soumises au Traité de fonctionnement sur l'Union européenne,

- déclarer la clause de désignation contenue dans l'avenant N°83 à la convention collective des entreprises artisanales de boulangerie et boulangerie-pâtisserie contraire aux dispositions du Traité et notamment aux article 9 TFUE, 102 et 106 combinés du même traité en ce qu'aucune ouverture à concurrence n'a été faite dans le choix de l'organisme gestionnaire du régime en cause,

- déclarer de même que l'organisme AG2R a été choisi sans possibilité offerte à d'autres organismes de se positionner sur le marché et ce malgré l'arrêt Beaudout précité,

- constater de manière générale la violation de l'obligation de transparence imposée par le droit de l'Union européenne,

- dire que le choix de l'organisme AG2R est illégal et que ce dernier exploite abusivement sa position dominante sur le marché national des frais de santé des salariés de la boulangerie-pâtisserie,

- dire également que le contrôle de l'Etat dans la gestion du régime en cause est inexistant alors même qu'une contestation est élevée depuis plusieurs années à l'égard d'AG2R,

Subsidiairement,

- ordonner un nouveau renvoi préjudiciel à la CJUE dès lors qu'il éclaire toujours les juges du fond sur la solution à retenir, et concernant la validité de la clause de désignation, en posant la question : 'l'absence d'ouverture à concurrence dans le choix de l'organisme gestionnaire du régime en cause dans le cadre du monopole conféré est-il conforme au droit communautaire '';

- surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la CJUE,

En conséquence,

- rejeter les demandes d'adhésion et de paiements formulées par AG2R à son encontre,

De même,

- réformer le jugement de première instance s'agissant des condamnations entreprises au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamner l'organisme AG2R à lui payer la somme de 2.000 euros au titre des frais exposés en première instance,

Y ajoutant en cause d'appel,

- condamner AG2R à lui payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

AG2R Prévoyance a constitué avocat, mais n'a pas conclu.

MOTIFS

Attendu que les conclusions notifiées par la Société Fayard Père et Fils le 20 octobre 2014 postérieurement à l'ordonnance de clôture, sont irrecevables; que ses pièces 31 à 51, communiquées postérieurement à cette décision, doivent être écartées des débats;

Attendu que la demande de AG2R Prévoyance est fondée sur les articles 13 et 14 de l'avenant n°83 du 24 avril 2006 à la convention collective nationale des entreprises de boulangerie et boulangerie-pâtisserie du 19 mars 1978, étendu le 16 octobre 2006, et entré en vigueur le 1er janvier 2007;

Que l'article 13, qui contient une clause de désignation de AG2R Prévoyance, est rédigé comme suit :

'AG2R Prévoyance, institution de prévoyance régie par le code de la sécurité sociale, membre de GIE AG2R, [Adresse 1], est désigné comme organisme assureur du présent régime 'remboursements complémentaires de frais de soins de santé'.

Les modalités d'organisation de la mutualisation du régime seront réexaminées par la Commission Nationale Paritaire dans les 6 mois qui précèdent l'expiration d'un délai de 5 années à compter de la date d'effet du présent avenant, conformément aux dispositions de l'article L912-1 du code de la sécurité sociale.

Les partenaires sociaux de la branche demandent à AG2R Prévoyance en sa qualité d'organisme assureur désigné, de contracter un partenariat financier avec deux organismes reconnus par la branche, à savoir, ISICA Prévoyance et la mutuelle 'les risques civils de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie française' dans le cadre de conventions de réassurance.

Cette demande repose sur une volonté des partenaires sociaux de créer une solidarité financière forte dans la gestion du régime 'remboursements complémentaires de frais de soins de santé' grâce à des partenaires financiers le permettant.';

Que l'article 14, qui contient une clause de migration, stipule :

'L'adhésion de toutes les entreprises relevant du champ d'application de la convention collective nationale des entreprises artisanales de la boulangerie et boulangerie-pâtisserie au régime 'remboursements complémentaires de frais de soins de santé' et l'affiliation des salariés de ces entreprises auprès de l'organisme assureur désigné ont un caractère obligatoire à compter de la date d'effet, visé à l'article 16 du présent avenant.

A cette fin, les entreprises concernées recevront un contrat d'adhésion et des bulletins d'affiliation.

Ces dispositions s'appliquent y compris pour les entreprises ayant un contrat de complémentaire santé auprès d'un autre organisme assureur avec des garanties identiques ou supérieures à celle définie par le présent avenant.';

Attendu que l'avenant du 24 avril 2006 constitue un accord professionnel pris dans le cadre de l'article L912-1 du code de la sécurité sociale, qui dispose que lorsque les accords professionnels ou interprofessionnels prévoient une 'mutualisation des risques' dont ils organisent la couverture auprès d'un ou plusieurs organismes de prévoyance, 'et auxquels adhèrent alors obligatoirement les entreprises relevant du champ d'application de ces accords, ceux-ci comportent une clause fixant dans quelles conditions et selon quelle périodicité les modalités d'organisation de la mutualisation des risques peuvent être réexaminées. La période de durée et examen ne peut excéder cinq ans';

Que selon l'alinéa 2 du même article, lorsque les accords mentionnés précédemment 's'appliquent à une entreprise qui, antérieurement à leur date d'effet a adhéré ou souscrit à un contrat auprès d'un organisme différent de celui prévu par les accords pour garantir les mêmes risques à un niveau équivalent', les stipulations de l'accord de niveau supérieur doivent primer, conformément à ce que prévoient les dispositions de l'article L2253-2 du code du travail;

Attendu que saisi de la conformité à la Constitution des dispositions de l'article L912-1 du code de la sécurité sociale, le Conseil constitutionnel a, par sa décision n°2013-672-DC du 13 juin 2013, déclaré l'article L912-1 du code de la sécurité sociale contraire à la Constitution, en précisant que la déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la publication de la décision et qu'elle n'est pas applicable aux contrats pris sur ce fondement en cours lors de cette publication et liant les entreprises à celles qui sont régies par le code des assurances, aux institutions relevant du titre III du code de la sécurité sociale et aux mutuelles relevant du code de la mutualité; que par décision n°2013-349 QPC du 18 octobre 2013, le Conseil constitutionnel a précisé qu'à compter de la date de publication de la décision du 13 juin 2013, soit le 16 juin 2013, l'article 912-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 23 mars 2006, ne peut plus être appliqué; qu'il s'en suit qu'à compter du 16 juin 2013, l'article 912-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que les textes pris pour son application, tels l'avenant du 24 avril 2006, l'arrêté d'extension du 16 octobre 2006 et l'avenant du 27 mai 2011 ne peuvent plus être appliqués aux contrats d'assurance complémentaire santé, à l'exception des seuls contrats en cours à la date du 16 juin 2013;

Attendu que les contrats en cours ayant fait l'objet de la réserve posée par le Conseil constitutionnel ne peuvent s'entendre de la convention collective négociée au niveau de la branche, c'est à dire en l'espèce de l'avenant n°83 du 21 avril 2006 et de l'avenant n°100 du 27 mai 2011, puisqu'aux termes mêmes de la décision du Conseil constitutionnel, il s'agit des contrats 'liant les entreprises à celles qui sont régies par le code des assurances, aux institutions relevant du titre III du code de la sécurité sociale et aux mutuelles relevant du code de la mutualité', c'est à dire en l'espèce des contrats d'assurance complémentaire santé conclus antérieurement au 16 juin 2013 par les entreprises de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie avec la société AG2R Prévoyance;

Attendu en conséquence que dès lors que la société Fayard Père et Fils n'était pas tenue par un contrat conclu avec la société AG2R Prévoyance à la date du 16 juin 2013, cette dernière doit être déboutée de ses demandes tendant à ce qu'il soit ordonné à l'appelante de régulariser son adhésion et de régler ses cotisations;

Attendu que la AG2R Prévoyance, qui succombe, doit être déboutée de sa demande de dommages intérêts, et condamnée à supporter les dépens et une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevables les conclusions notifiées par la société Fayard Père et Fils le 20 octobre 2014,

Ecarte des débats ses pièces n°31 à 51,

Réforme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Déboute la société AG2R Prévoyance de ses demandes,

Condamne la AG2R Prévoyance à payer à la société Fayard Père et Fils la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société AG2R Prévoyance aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 13/08063
Date de la décision : 27/01/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°13/08063 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-01-27;13.08063 ?
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