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28/05/2019 | FRANCE | N°17/04536

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 28 mai 2019, 17/04536


VC





N° RG 17/04536





N° Portalis DBVM-V-B7B-JHDM





N° Minute :




















































































































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Notifié le :








Copie exécutoire délivrée le :











Me Annette PAUL





M. C... A...








AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE GRENOBLE





Ch. Sociale -Section A


ARRÊT DU MARDI 28 MAI 2019











Appel d'une décision (N° RG F 16/00342)


rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE


en date du 05 septembre 2017


suivant déclaration d'appel du 26 Septembre 2017





APPELANTE :





SASU ETABL...

VC

N° RG 17/04536

N° Portalis DBVM-V-B7B-JHDM

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Annette PAUL

M. C... A...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 28 MAI 2019

Appel d'une décision (N° RG F 16/00342)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE

en date du 05 septembre 2017

suivant déclaration d'appel du 26 Septembre 2017

APPELANTE :

SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION Prise en la personne de son représentant légal,

[...]

[...]

représentée par Me Annette PAUL, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant

Ayant pour avocat plaidant Me Aurélien TOUZET, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :

Madame T... S... épouse H...

née le [...] à Alger

de nationalité Française

[...]

représentée par M. C... A... (Délégué syndical ouvrier)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Philippe SILVAN, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseiller,

Monsieur Frédéric BLANC, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Hélène LOCONTE, Greffier placé délégué à la Cour d'appel de Grenoble

DÉBATS :

A l'audience publique du 25 Mars 2019, Madame CHARBONNIER, conseiller est entendue en son rapport.

Les parties ont été entendues en leurs observations et plaidoiries.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

Exposé du litige :

Mme H... a été embauchée par la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION le 1er septembre 2003 en contrat à durée déterminée dans un premier temps puis en contrat à durée indéterminée en qualité d'employée de bureau.

Suivant avenant en date du 5 novembre 2007 à effet du même jour, Mme H... a été promue aux fonctions d'assistante administrative.

Le 1er février 2012, Mme H... a été promue au poste d'assistante logistique avec une période probatoire de 6 mois du 1er février 2012 au 31 juillet 2012.

Le 18 juillet 2012, Mme H... est placée en congé maternité.

le 26 juillet 2012, la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION adressait un courrier à Mme H... l'informant que sa période probatoire n'avait pas été concluante et qu'elle serait donc replacée dans ses fonctions antérieures d'assistante administrative à compter du 1er août 2012.

Mme H... a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement économique qui s'est déroulé le 20 octobre 2015 puis licenciée pour motifs économique par courrier en date du 20 octobre 2015 dans lequel on lui fait trois propositions de reclassement et lui adresse le contrat de sécurisation professionnelle.

Le 10 novembre 2015, Mme H... refuse les postes proposés et adhère au contrat de sécurisation professionnelle.

Par courrier en date du 2 décembre 2015, Mme H... demande à bénéficier de la priorité de réembauchage.

Mme H... a saisi le conseil des prud'hommes de Valence en date du 21 juin 2016, aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement économique, dénoncer le non respect de la priorité de réembauchage, constater l'existence de discriminations syndicale et en raison de son état de grossesse, d'un harcèlement moral et obtenir les indemnités afférentes.

Par jugement en date du 5 septembre 2017, le conseil des prud'hommes de Valence a :

' dit que le licenciement de Mme H... est sans cause réelle et sérieuse

' condamné la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION à lui verser les sommes suivantes :

'20.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

'3.676 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 367,60 € au titre des congés payés afférents

'3.676 € au titre de dommages et intérêts pour non respect de la priorité de réembauchage

'7.352 € de dommages et intérêts pour situation de harcèlement et discriminations

'750 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

' dit que la moyenne des salaires de Mme H... est de 1.838 €.

' condamné la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION aux entiers dépens de l'instance

La décision a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception le 6 septembre 2017.

La SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION représentée par son conseil, a interjeté appel de la décision en sa globalité par déclaration en date du 26 septembre 2017.

Par conclusions récapitulatives en date du26 avril 2018, par l'intermédiaire de son conseil, la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION demande à la Cour d'appel de :

' Infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de VALENCE du 5 septembre 2017 en ce qu'il a dit que le licenciement de Madame H... était sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné la société SOGAL FABRICATION à verser à Madame H... les sommes suivantes:

- 20.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.676 € d'indemnité compensatrice de préavis,

- 367,60 € au titre des congés payés afférents,

- 3.676 € de dommages et intérêts pour non-respect de la priorité de réembauchage,

- 7.352 € de dommages et intérêts pour situation de harcèlement et de discrimination,

- 750 € sur le fondement de l'article 700 du CPC.

Et, statuant à nouveau, il est demandé à la Cour de dire et juger Madame

H... infondée en ses demandes et l'en débouter.

' Dire et juger recevable et bien fondée a société ETABLSSEMENTS SOGAL FABRICATION en ses demandes reconventionnelles,

' Condamner Madame H... à payer à la société ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens

Par conclusions en réponse en date du 16 mars 2018 Mme H..., par l'intermédiaire de son conseil demande à la Cour d'appel de :

' confirmer le jugement du le conseil des prud'hommes en date du 5 septembre 2017

' condamné la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION à lui payer la somme de 1.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 février 2019 et l'affaire a été fixée à plaider le 25 mars 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

Le délibéré est fixé au 28 mai 2019 par mise à disposition au greffe.

SUR QUOI :

Sur l'exécution du contrat de travail, le harcèlement moral et les discriminations :

Sur le harcèlement moral :

Aux termes des articles L.1152-1 et L. 1152- 2 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés

Suivants les dispositions de l'article L1154-1 du même code, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral; dans l'affirmative, il appartient ensuite à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Le harcèlement moral n'est en soi, ni la pression, ni le surmenage, ni le conflit personnel ou non entre salariés, ni les contraintes de gestion ou le rappel à l'ordre voire le recadrage par un supérieur hiérarchique d'un salarié défaillant dans la mise en 'uvre de ses fonctions ;

En l'espèce, Mme H... soutient que son employeur lui a demandé de faire une demande écrite de congé parental à 40 % avant son retour de congé maternité et que dès son affectation au service logistique le 1er février 2013, en remplacement de Mme W..., sa supérieure hiérarchique, Mme O..., va lui faire vivre des situations douloureuses par le biais de brimades, reproches sur son travail de façon humiliante qui vont la contraindre à consulter un psychiatre dès le mois de mars 2013 et qu'elle sera l'objet d'un arrêt de travail du 24 juin 2013 jusqu'au 9 mars 2013.

' s'agissant du congé parental, Mme H... ne produit que la réponse de l'employeur en date du 18 janvier 2013 à «votre demande de congé parental d'éducation à 40 %» indiquant « nous faisons suite à votre demande... » sans autre élément probantrelatif à une demande de l'employeur en ce sens;

' s'agissant du harcèlement de sa supérieure hiérarchique, Mme H... verse, pour étayer son argumentation, :

' des courriers syndicaux reprenant les plaintes de Mme H...

'une attestation de M. I... F..., conseiller du salarié qui relaie la parole de Mme H...

'la plainte de Mme H... auprès des services de police de Valence en date du 17 décembre 2014

'les certificats médicaux d'un psychiatre et d'une psychologue consultés par Mme H... qui ne font que constater l'existence d'un syndrome anxio-dépressif et relaient les déclarations de la salariée sur les raisons de la pathologie qui seraient liées au contexte professionnel.

'Le paragraphe du compte rendu de réunion du CHSCT du 16 juillet 2013 de l'inspection du travail concernant une alerte sur des situations de souffrances au travail dans l'établissement et la nécessité pour l'employeur de prendre des mesures et d'évaluer les risques psycho-sociaux qui ne vise la situation précise de Mme H... et ne suffit pas à établir les faits allégués cocnernant celle-ci.

Les documents susvisés, soit émanent uniquement de Mme H... soit ne font que reprendre ses direset les éléments rapportés par la salariée sont d'ordre général sans précision des faits, de leur date et du contexte ou du lieu dans lesquels ils se seraient déroulés.

Ainsi en l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est donc pas démontrée. Les demandes relatives au harcèlement doivent par conséquent être rejetées par voie de réformation.

Sur les discriminations :

Sur la discrimination syndicale:

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'action, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de ses activités syndicales ;

L'article L.2141-5 du code du travail interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail ;

L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles

Mme H... soutient d'abord avoir été victime de discrimination syndicale.

Il ressort des éléments versés aux débats que suite à une restructuration juridique des sociétés du groupe (NAP INDUSTRIE devenant SOGAL FABRICATION), La SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION a annoncé le transfert des délégués du personnel et des membres du CHSCT mais a oublié les quatre membres du comité d'entreprise dont Mme H.... L'employeur a ensuite rectifié son information auprès de l'inspection du travail par courrier du 30 juin 2011. Toutefois par courrier du 19 juillet 2011, l'inspection du travail a refusé le transfert de Mme H... car effectuée en infraction avec l'article R. 2421-7 du code du travail, c'est-à-dire faute du respect par l'employeur du délai de 15 jours entre la demande et le transfert. L'employeur a toutefois organisé des élections professionnelles en décembre 2011 ne réintégrant Mme H... qu'en janvier 2012,et celle-ci n'a ainsi pu se présenter aux élections du comité d'entreprise.

En l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale au sens des textes ci-dessus est établie, Mme H... n'ayant pu se présenter aux élections du comité d'entreprise du fait de l'employeur.

En réponse, la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION qui ne conteste pas avoir omis le transfert des membres du comité d'entreprise et en avoir informé par courrier complémentaire la DIRECCTE en date du 30 juin 2011, soutient qu'il s'agissait en réalité d'une erreur involontaire puisque Mme H... n'était pas la seule personne concernée et que c'est l'inspection du travail qui n'a pas tenu compte de la rectification effectuée.

Toutefois la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION qui n'a pas respecté les dispositions de l'article L.2414 et suivants du code du travail s'agissant des délais dans le transfert de salariés investis de mandats représentatifs, a induit, malgré rectification a posteriori effectuée auprès de la DIRECCTE, un retard dans la délivrance de l'autorisation de transfert des quatre membres du comité d'entreprise qui n'ont été ensuite transférés officiellement qu'en janvier 2012, Mme H... n'ayant pu se présenter aux élections professionnelles organisées par l'employeur en décembre 2011 en connaissance de cause.

Or, la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION ne donne aucune élément permettant de justifier son omission, ayant par ailleurs valablement et dans les temps demander le transfert des délégués du personnel et des membres du CHSCT.

Le seul fait que l'inspection du travail n'ait pas retenu en juillet 2011, l'infraction dans un Procès Verbal « en l'absence d'élément intentionnel » démontré, n'empêche pas de constater que ce fait a empêché les quatre membres du comité d'entreprise, dont Mme H..., par la suite de se présenter aux élections professionnelles organisées en décembre 2011 et il convient de rappeler que le juge judiciaire n'est pas tenu par l'appréciation des faits donnée par l'inspection du travail au regard du principe de la séparation des pouvoirs.

L'employeur échouant ainsi à démontrer que les faits matériellement établis par Mme H... sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la discrimination syndicale est établie par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur la discrimination en raison de l'état de grossesse :

L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article1er de la loi n°2008-496 du 27mai2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Mme H... soutient qu'elle a également été victime d'une discrimination compte tenu de son état de grossesse.

Il résulte des éléments versés aux débats que la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION a mis fin de manière anticipée à la période probatoire de Mme H... le 26 juillet 2012 sur le poste d'assistante logistique, alors qu'elle devait se terminer le 31 juillet 2012 et qu'elle était en congé maternité depuis le 18 juillet 2012, sans aucun entretien ou courriers de reproches malgré un compte-rendu d'entretien professionnel en date du 28 février 2012 qui mettait en exergue son expérience, son adaptabilité et ses compétences.

En l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'une discrimination en raison de l'état de grossesse au sens des textes ci-dessus est établie, Mme H... n'ayant pu terminer sa période probatoire ni s'expliquer sur les éléments reprochés et qui s'opposaient à sa prise de fonction en qualité d'assistante logistique.

L'employeur conclut en réponse que Mme H... n'a pas contesté cette décision à l'époque «à la suite de plusieurs entretiens » mais ne justifie pas de l'existence de ces entretiens ni d'éléments objectifs et vérifiables à l'origine de la rupture de la période probatoire quelques jours avant la fin prévue de celle-ci et quelques jours après la grossesse déclarée et le début du congé maternité de Mme H....

La SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION soutient également que le compte rendu d'entretien du 28 février 2012 faisait apparaître nombre de points à améliorer qui ne l'ont pas été, justifiant la rupture de la période probatoire. Toutefois l'employeur ne démontre ni que ces points n'aient pas été améliorés par la salariée entre temps ni que ces faits aient été effectivement débattus lors d'un entretien concernant la période probatoire avec la salariée.

L'employeur échouant ainsi à démontrer que les faits matériellement établis par Mme H... sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la discrimination liée à l'état de grossesse de Mme H... est établie par voie de confirmation du jugement déféré.

Il y a lieu de confirmer le droit à indemnisation de Mme H... en raison de discriminations d'ordre syndical et liées à son état de grossesse mais de condamner la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION à lui verser la somme de 5.000 € à ce titre par voie de réformation.

Sur les motifs du licenciement :

Conformément à l'article L. 1233-3 du code du travail applicable aux faits de l'espèce, constitue un licenciement économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à de mutations technologiques ;

S'ajoutent aux causes ci dessus énumérées, la réorganisation de l'entreprise ou du secteur d'activité pour sauvegarder sa compétitivité, et la cessation d'activité.

Les difficultés rencontrées par l'entreprise doivent être réelles et sérieuses pour justifier un licenciement économique. Lorsqu'une entreprise fait partie d'un groupe, les difficultés économiques de l'employeur doivent s'apprécier tant au sein de la société, qu'au regard de la situation économique du groupe de sociétés exerçant dans le même secteur d'activité, sans qu'il

y ait lieu de réduire le groupe aux sociétés ou entreprises situées sur le territoire

national. La cessation totale d'une entreprise appartenant à un groupe constitue une cause économique du licenciement sous réserve que ses salariés ne soient pas dans une situation de coemploi à l'égard d'une autre société du groupe.

Les motifs invoqués doivent être précis, objectifs et matériellement vérifiables.

Mme H... soutient que le poste édition qu'elle occupait n'a en réalité pas été supprimé puisque toujours tenu par Mme W... et avant par Mme Y... et qu'elle n'occupait ce poste édition qu'à 70 %, les 30 % de fonctions restantes étant purement administratives. Elle fait valoir qu'en réalité la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION ne subit pas de difficultés économiques mais opère une réorganisation et que des embauches ont été opérées en juillet et août 2015 en contrat à durée indéterminée.

La SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION répond que le licenciement dit de compétitivité est appréhendé comme un licenciement préventif destiné à tempérer les conséquences d'une menace porteuse de difficultés économiques si aucune mesure n'est prise en temps utile comme c'était le cas en l'espèce, puisque devant subir une hausse inconsidérée du prix des matières premières telles que aluminium particulièrement utilisé dans la production et que les deux personnes citées en référence par la salariée occupaient des fonctions de nature différente des siennes. Enfin, elle soutient que la suppression d'un emploi n'implique pas nécessairement la disparition des tâches dévolues au salarié licencié qui peuvent être réparties sur d'autres salariés ou reprises par un autre salarié présent dans les effectifs, le juge n'ayant pas à exercer son contrôle sur le choix et l'appréciation de l'employeur des mesures à mettre en place.

Il appert que la lettre de licenciement de Mme H... en date du 13 novembre 2015 fait mention du contexte économique auquel l'employeur est confronté le contraignant à une réorganisation entraînant la suppression du poste de Mme H.... La lettre de convocation à l'entretien préalable fait état de l'existence d'un contexte de tensions sur le pouvoir d'achats et la politique d'investissement des ménages, les pratiques concurrentielles particulièrement agressives des concurrents en terme de prix et un chiffre d'affaire consolidé qui a chuté de 17,6 % sur la période 2011-2014, avec un résultat opérationnel inférieur de 30 % à 2011 et des perspectives à court terme ne dessinant aucune amélioration. La SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION précise la nécessité de préserver sa compétitivité induisant l'informatisation du poste d'édition occupé par Mme H... et entraînant sa suppression.

Il ressort du registre unique du personnel de l'entreprise que Mme Y... est présente sur les registres du personnel en qualité d'ouvrier de fabrication depuis le 4 février 2008 ainsi que Mme W... en qualité de préparatrice de commande depuis le 24 mars 2003, Mme H... étant employée en qualité assistante administrative depuis le 1er juillet 2011 avec une date d'embauche au 9 décembre 2008.

Il n'est pas contesté par la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION qu'une partie des tâches effectuées par Mme H... ont été reprises par d'autres salariées déjà présentes dans l'entreprise, Mme Y... et Mme W... susvisées. Or, que la suppression d'un poste n'entraîne pas nécessairement la suppression de l'ensemble des taches et fonctions associées qui peuvent être reparties sur d'autres salariées déjà présentes dans les effectifs

Il ressort des différents éléments versés aux débats que Mme U... Aurélie a été embauchée en contrat à durée déterminée le 25 octobre 2010 et régularisée en contrat à durée indéterminée le 1er juillet 2015 soit avant la rupture du contrat de travail de Mme H... et sur un emploi différent d'assistante logistique

De la même façon, Mme R... a été employée en contrat à durée déterminée sur des fonctions de technicien de qualité depuis le 2 septembre 2013 et est passée en contrat à durée indéterminée le 29 août 2015.

Ces deux salariés occupant ainsi des fonctions différentes de Mme H... et n'ayant pas été embauchées après son licenciement comme allégué.

Par conséquent, il convient par voie de réformation de dire que le licenciement de Mme H... n'est pas dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur l'ordre des licenciements :

Selon les dispositions de l'article L1233-5 du code du travail aapliquable aux faits d'epèce, dès lors que l'employeur procède à un licenciement pour motifs économiques, individuel ou collectif, il doit fixer des critères lui permettant d'établir l'ordre des licenciements afin de déterminer le ou les salariés à licencier.

Ces critères prennent notamment en compte :

1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;

2° L'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise ;

3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;

4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.

Les critères d'ordre sont appliqués dans le cadre de l'entreprise à l'ensemble des salariés appartenant à la même catégorie professionnelles dont relèvent les emplois supprimés sauf si tous les emplois d'une même catégorie professionnelle sont supprimés.

La notion de catégorie professionnelle au sein de laquelle s'applique l'ordre des licenciements ne se réduit pas à un emploi déterminé mais doit viser l'ensemble des salariés qui exercent dans l'entreprise des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune.

La violation des critères d'ordre donne droit à l'allocation de dommages et intérêts et ne peut fonder l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement.

Mme H... ne démontre pas l'existence d'une même catégorie professionnelle au sein de laquelle travaillaient d'autres salariées auxquelles elle aurait du être comparée. Mme U... et Mme R... toutes deux citées dans les conclusions de Mme H..., exerçaient des fonctions d'assistante logistique et de technicienne qualité, et non d'assistante administrative comme l'appelante.

Par conséquent, faute d'exercer des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, il n'y a pas lieu d'appliquer à Mme H... de critères d'ordre vis à vis d'autres salariés de l'entreprise.

Mme H... sera par conséquent déboutée de sa demande de confirmation du jugement déféré à ce titre.

Sur le non respect de la priorité de réembauchage :

Aux termes des dispositions de l'article L.1233-45 du code du travail, le salarié licencié pour motifs économique bénéficie d'une priorité de réembauchage durant un délai de un an. Il n'en bénéficie qu'à la condition d'en manifester le désir dans un délai imparti. Elle suppose un poste vacant que l'employeur propose de pourvoir par un nouveau recrutement. Un emploi n'est pas vacant lorsqu'il est pourvu par des mutations internes et l'pmoyeur doit informer le salarié des emplois devenus disponibles et compatibles avec sa qualification.

Le salarié qui adhère à un CSP conserve son droit à priorité de réembauchage. L'employeur doit l'en informer au plus trad au moment de son adhésion.

Le non respect de la priorité de réembauchage est sanctionné par l'octroi au salarié d'une indemnité qui ne peut être inférieure à deux mois de salaire.

Mme H... a informé son employeur en date du 7 décembre 2015 de sa volonté de bénéficier de de la priorité de réembauchage et il ne ressort pas des éléments versés aux débats que la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION ait procédé à des embauches sur des postes relevant de sa qualification, les seuls postes pour lesquels des embauches ont été effectuées étant un poste de chauffeur livreur et un poste d'ouvrier de fabrication, des postes du même type ayant déjà été refusés par Mme H... dans le cadre du reclassement le 10 novembre 2015.

Par conséquent il y a lieu de considérer que la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION a respecté la priorité de réembauchage par voie de réformation.

Sur les demandes accessoires :

Il convient de condamner la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION aux entiers dépens de première instance et d'appel et à la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DÉCLARE la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION recevable en son appel ;

INFIRME le jugement déféré excepté en ce qu'il a condamné la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION pour situation de discrimination,

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y Ajoutant :

CONDAMNE la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION à verser à Mme H... la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des discriminations syndicales et dues à son état de grossesse subies ;

DÉBOUTE Mme H... de sa demande au titre du harcèlement moral ;

DIT que le licenciement de Mme H... est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

DÉBOUTE Mme H... de sa demande au titre du non respect de l'ordre des licenciements ;

DÉBOUTE Mme H... de sa demande au titre du non respect de la priorité de réembauchage ;

CONDAMNE la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION à payer à Mme H... la somme de 1.000 € à sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

CONDAMNE la SASU ETABLISSEMENTS SOGAL FABRICATION aux dépens de première instance et d'appel ;

Signé par Monsieur Philippe SILVAN, Président, et par Madame Valérie DREVON, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 17/04536
Date de la décision : 28/05/2019

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°17/04536 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-28;17.04536 ?
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