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11/10/2018 | FRANCE | N°16/04105

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 11 octobre 2018, 16/04105


MDM



N° RG 16/04105



N° Minute :









































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :





Me Hervé X...



Me Delphine Y...



Me Anne-Marie Z...







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



CO

UR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 11 OCTOBRE 2018

SECURITE SOCIALE



Appels d'une décision (N° RG 20124130)

rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE

en date du 10 juin 2016

suivant déclarations d'appel des 12 et 22 Août 2016



APPELANTS ET INTIMES:



Monsieur Xavier A...

né le [...] à MACON

de nationalité Française

[...]
...

MDM

N° RG 16/04105

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Hervé X...

Me Delphine Y...

Me Anne-Marie Z...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 11 OCTOBRE 2018

SECURITE SOCIALE

Appels d'une décision (N° RG 20124130)

rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE

en date du 10 juin 2016

suivant déclarations d'appel des 12 et 22 Août 2016

APPELANTS ET INTIMES:

Monsieur Xavier A...

né le [...] à MACON

de nationalité Française

[...]

représenté par Me Hervé X... de la SELARL X..., avocat au barreau de GRENOBLE

SA COMPAGNIE GENERALI IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié [...]

représentée par Me Juliette B..., avocat au barreau de PARIS substitué par Me Nicolas C..., avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

MSA DES ALPES DU NORD La MSA des ALPES DU NORD, dont le siège social est au [...] (73016), prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié [...]

représentée par Me Delphine Y... de la SELARL GALLIZIA Y... L..., avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Mélody D..., avocat au barreau de GRENOBLE

SAS BOIS DU DAUPHINE prise en la personne de son représsentant légal domicilié [...]

représentée par Me Anne-Marie Z..., avocat au barreau de LYON

SA AXA FRANCE IARD

313 Terrasses de l'Arche

[...]

représentée par Me Laurence E... de la SELARL L. E...-K... - JB PETIT, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Anne F..., avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Mme Dominique DUBOIS, Président,

Mme Magali M..., Conseiller,

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 Juillet 2018

Madame Magali M... chargée du rapport, a entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistée de Madame Chrystel ROHRER, Greffier, en présence de Madame Elodie BAYLE, Greffier stagiaire, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 11 Octobre 2018, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 11 Octobre 2018.

Le 27 novembre 2009, M. A..., âgé de 34 ans pour être né le [...], exerçant la profession de conducteur de machine sur pupitre au sein de la société Bois du Dauphiné depuis le 20 mars 2000, a été victime d'un accident du travail dans les circonstances suivantes : un élévateur à fourche d'une empileuse, machine qui sert à couper le bois et à empiler les planches produites, est tombé lorsqu'il a décroché l'attache de la chaîne moteur et l'a écrasé.

La MSA des Alpes du Nord a pris en charge les soins consécutifs à cet accident.

Par jugement du 24 janvier 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble a notamment :

- dit que l'accident du travail dont M. A... a été victime le 27 novembre 2009 est dû à la faute inexcusable de son employeur, la société Bois du Dauphiné ;

- dit que la rente d'incapacité permanente qui sera allouée à M. A... par la Caisse de Mutualité Sociale Agricole des Alpes du Nord après consolidation sera majorée au maximum ;

- dit que M. A... doit être indemnisé du préjudice représenté par les aménagements de son logement, nécessaires en raison de son incapacité mais sursis à statuer sur ce chef d'indemnisation jusqu'à ce que M. A... justifie d'un logement stable, dont les aménagements pourraient donner lieu à expertise ;

- avant dire droit sur la liquidation des préjudices indemnisables, ordonné une expertise médicale confiée au Dr B...,

- alloué à M. A... une provision de 100.000 € à valoir sur l'ensemble de ses préjudices indemnisables.

Le 17 juin 2013, M. A... a présenté une requête en omission de statuer aux fins de voir la mission de l'expert complétée du chef suivant : donner un avis sur les aides techniques, actuelles et futures, liées à la réduction d'autonomie consécutive à son handicap.

Suivant arrêt du 7 juillet 2016, infirmant le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble en date du 7 avril 2014, la cour a fait droit à cette requête.

Le 19 août 2015, le Dr G... désigné en remplacement du Dr B... en qualité d'expert, a déposé un rapport aux termes duquel il conclut ainsi qu'il suit :

- Date de consolidation acquise au 30 novembre 2012

- Souffrances endurées 5,5/7

- Déficit fonctionnel temporaire de 100% du 27/11/2009 au 27/07/2010 puis du 11/04/2012 au 18/04/2012 et partiel à 75% du 27/11/2009 au 27/07/2010 puis du 11/04/2012 au 18/04/2012

- Préjudice d'agrément caractérisé au regard de l'impossibilité de se livrer aux activités antérieures, reprise d'activités sportives en utilisant des moyens adaptés et avec une aide

- Préjudice esthétique : 4,5/7

- Préjudice sexuel caractérisé et en relation avec les séquelles neurologiques imputables à la fracture du rachis. Difficultés d'érection, les rapports sexuels complets ne sont plus possibles, pas de possibilité de pénétration, pas d'éjaculation, pas d'orgasme.

- Aménagement du véhicule automobile : boîte à vitesse automatique avec accélérateur et frein au volant

- Assistance par tierce personne : 2h / jour se décomposant de la façon suivante :

- aide pour les courses : 2h / semaine

- aide pour les déplacements et loisirs : 5 h / semaine

- aide pour les activités ménagères : environ 1 h / jour

- Aides techniques : poste non évalué

Le 16 octobre 2017, le Dr G... a rendu un complément d'expertise suite à l'arrêt du 7 juillet 2016 ayant complété sa mission du chef suivant : «donner un avis sur les aides techniques, actuelles et futures, liées à la réduction d'autonomie consécutive à son handicap.»

L'expert a listé les aides techniques lui apparaissant nécessaires.

Par jugement du 10 juin 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble a :

- rejeté l'exception de litispendance s'agissant des aides techniques,

- dit que le tribunal des affaires de sécurité sociale n'est pas compétent pour statuer sur la garantie due par les assureurs à la société Bois du Dauphiné, ni pour décider que la MSA récupérera les sommes dont elle a fait l'avance auprès des compagnies d'assurances,

- condamné la société Bois du Dauphiné à payer à M. A... la somme de 239.936,07 € à titre de complément de l'indemnisation due par suite de l'accident du travail du 27 novembre 2009, après déduction de la provision de 100.000 € déjà versée, outre intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2012,

- ordonné la capitalisation des intérêts par année entière à compter du 25 mai 2012,

- rappelé que cette somme n'inclut pas l'indemnisation des frais de logement qui a été expressément réservée par jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble du 24 janvier 2013,

- dit que conformément aux dispositions de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, cette somme sera versée à M. A... par la MSA des Alpes du Nord qui en récupérera le montant auprès de la société Bois du Dauphiné,

- dit que le recours de la MSA portera également sur l'indemnité forfaitaire spécifique déjà versée à M. A... pour un montant de 17.921,64 €,

- condamné la société Bois du Dauphiné à payer à M. A... la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement au titre du complément d'indemnisation dans la limite de 120.000€,

- déclaré le jugement commun et opposable à AXA France IARD et à la compagnie Generali Assurances.

Les 12 et 22 août 2016, la compagnie Generali et M. A... ont respectivement interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la compagnie d'assurances Generali Iard demande à la cour de :

- la recevoir en ses conclusions et l'y dire bien fondée,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes formées par la MSA à son encontre,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à M. A... les indemnités qui suivent :

- 20 234,24 € au titre du déficit fonctionnel temporaire

- 30 000 € au titre des souffrances endurées

- 27 552 € au titre de l'assistance temporaire d'une tierce personne

- 22 000 € au titre du préjudice esthétique

- 30 000 € au titre du préjudice sexuel

- 12 562,96 € au titre de la mise en place de l'accélérateur et du frein au volant

- 15 000 € au titre du préjudice d'agrément

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. A... de sa demande formée au titre :

- de l'aménagement temporaire de logement,

- du remboursement des honoraires de Mme H...,

- de l'assistance d'une tierce personne après consolidation spécifique à l'aide ménagère

- du préjudice d'établissement

- du plateau de transfert, du coussin en mousse et du coffre toit destinés à équiper son véhicule automobile

- du dual ski et du ebuggy

- de la perte ou diminution de chance de promotion professionnelle

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a alloué une indemnisation à M. A... au titre de l'assistance par une tierce personne spécifiquement destinée aux loisirs, et statuant à nouveau, dire n'y avoir lieu à indemnisation du poste,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. A... la somme capitalisée de 33.781,50 € au titre de l'indemnisation du bras robot et statuant à nouveau, dire n'y avoir lieu à indemnisation du poste,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a alloué une indemnisation à M. A... au titre de l'adaptation du matériel sportif, et statuant à nouveau, dire n'y avoir lieu à indemnisation du poste,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé le point de départ des intérêts à la date de la requête déposée par M. A..., et statuant à nouveau, rappeler que le point de départ des intérêts ne peut être fixé qu'à la date de la décision allouant les indemnités venant réparer les préjudices personnels,

- débouter M. A... de son appel incident, et plus généralement, de toutes ses demandes, plus amples ou contraires,

- débouter la MSA de sa demande de condamnation de l'employeur ou de son assureur à lui régler la somme capitalisée de 141.328,46 € au titre de la prestation servie par les organismes sociaux sur le fondement de l'article L434-2 alinéa 3,

- dire n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à son encontre.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement à l'audience et auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, M. A... demande à la cour de :

- réformer le jugement déféré,

- condamner la société Bois du Dauphiné à lui régler avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2009, la somme de 1.653.227,43 € en réparation de son préjudice corporel,

- dire que ladite somme n'inclut pas celle à lui revenir au titre des frais de logement adapté qui sont expressément réservés,

- condamner la société Bois du Dauphiné à régler le montant capitalisé des intérêts par année entière,

- condamner la même à lui régler la somme complémentaire de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner en tant que de besoin la société Bois du Dauphiné aux dépens de première instance et d'appel,

- dire que, conformément à l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, cette somme lui sera versée directement par la MSA des Alpes du Nord qui en récupérera le montant auprès de l'employeur dans les conditions mentionnées audit article,

- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable aux assureurs appelés en la cause.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement à l'audience et auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société Bois du Dauphiné demande à la cour de :

- d'infirmer partiellement le jugement du 10 juin 2016 notamment sur l'indemnisation au titre de l'assistance temporaire d'une tierce personne après consolidation et sur l'indemnisation au titre de l'aménagement du véhicule,

- confirmer le jugement du tribunal sur les autres chefs de demande,

En tout état de cause,

- déclarer opposable le jugement à la société AXA Iard et à la compagnie Generali Iard,

- condamner la société Generali Iard à la garantir de toute condamnation.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement à l'audience et auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la compagnie d'assurances AXA France Iard demande à la cour de :

A titre principal,

- constater que toutes les demandes formulées à son encontre se heurtent à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt rendu par la cour de cassation le 5 octobre 2017,

- la mettre hors de cause,

- rejeter toutes demandes formulées à son encontre comme non fondées ni justifiées,

A titre subsidiaire,

- constater qu'elle oppose un refus de garantie, le dommage étant survenu avant la prise d'effet du contrat, et la réclamation étant intervenue postérieurement à sa résiliation, outre que la SARL Bois du Dauphiné avait connaissance du fait dommageable avant la souscription.

- dire que le tribunal n'est pas compétent pour trancher sa garantie,

- dire qu'aucune condamnation ne saurait être prononcée à son encontre,

En tout état de cause et subsidiairement,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a retenu le barème de la gazette du palais de 2013 pour capitaliser les préjudices et débouter M. A... de sa demande de voir retenir la nouvelle table de 2016 et dire qu'il sera fait application du barème issu de l'arrêté du 11 février 2015 modifiant celui du 27 décembre 2011,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a fixé le préjudice de M. A... comme il suit :

- Frais divers : 2 016.00 €

- DFT : 20 234.25 €

- Souffrances endurées : 30 000.00 €

- Assistance tierce personne temporaire : 27 552.00 €

- Préjudice esthétique temporaire : 7 000.00 €

- Préjudice sexuel : 30 000.00 €

- Préjudice esthétique permanent : 15 000.00 €

- Aménagement du véhicule : 46 344.46 €

- Préjudice d'agrément : 24 419.88 €

- débouter M. A... du surplus de ses prétentions, fins et conclusions et confirmer le jugement pour les postes de préjudices dont M. A... a été débouté,

- déduire la provision de 100.000 €,

- réduire les demandes présentées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à de plus justes proportions,

A titre infiniment subsidiaire,

- confirmer le jugement en ce qu'il a fixé à 137.396.48 € le préjudice d'aide tierce personne post consolidation,

- condamner qui mieux le devra à la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile à son profit.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement à l'audience et auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la MSA des Alpes du Nord demande à la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice quant à l'évaluation des postes de préjudices sollicités par M. A...,

- constater que deux provisions ont déjà été octroyées par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble et versées par la MSA des Alpes du Nord à M. A... pour un montant de 220.000 €,

- dire que le recours de la MSA des Alpes du Nord contre l'employeur ou son assureur portera également sur l'indemnité forfaitaire spécifique déjà versée à M. A... pour un montant de 17.921,64 €,

- dire que la MSA des Alpes du Nord récupérera auprès de l'employeur ou de son assureur la prestation complémentaire pour recours à tierce personne de niveau 1 pour une somme de 141.328,46 €,

- dire que la MSA des Alpes du Nord récupérera les sommes dont elle est tenue de faire l'avance auprès de l'employeur la société Bois du Dauphiné,

- condamner la société Bois du Dauphiné à rembourser ces sommes à la MSA des Alpes du Nord,

- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable aux assureurs appelés en la cause,

- condamner in solidum la société Bois du Dauphiné et ses assureurs à lui verser la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, distraction faite auprès de la SELARL Gallizia Y... L..., sur son affirmation de droit.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes concernant les compagnies d'assurances

C'est par de justes motifs que la cour adopte que les premiers juges se sont déclarés incompétents pour statuer sur la garantie due par les assureurs à la société Bois du Dauphiné et sur la récupération par la MSA des sommes dont elle aura fait l'avance en application des dispositions des articles L 452-2 et L 452-3 du code de la sécurité sociale, le tribunal des affaires de sécurité sociale ayant simplement compétence pour régler les différends auxquels donnent lieu l'application des règles afférentes à la sécurité sociale. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Le présent arrêt sera déclaré commun et opposable aux deux assureurs qui sont parties à la présente instance.

Sur les demandes indemnitaires

1 ' sur l'aménagement du logement

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a réservé l'aménagement du logement jusqu'à ce que M. A... justifie d'un logement stable, ce point n'étant pas contesté.

Sur l'aménagement temporaire du logement actuellement occupé par la victime à savoir le domicile de sa compagne Mme I..., M. A... sollicite la prise en charge de divers frais.

Il résulte de l'article L 431-1 du code de la sécurité sociale qu'en cas d'accident du travail, sont notamment pris en charge par l'organisme social les frais médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et accessoires, les frais liés à l'accident afférents aux produits et prestations inscrits sur la liste prévue à l'article L 165-1 et d'une façon générale, les frais nécessités par le traitement, la réadaptation fonctionnelle, la rééducation professionnelle et le reclassement de la victime ; la liste des produits et prestations remboursables dressée en application de ce dernier texte prévoit le remboursement à l'assuré de dispositifs médicaux et appareils de maintien à domicile et d'aide à la vie pour malades et handicapés. Si l'article L 452-3 tel qu'interprété par le conseil constitutionnel dispose qu'en cas de faute inexcusable de l'employeur, la victime peut demander à celui-ci, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux qui y sont énumérés, c'est à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts, même de manière restrictive, par le livre IV du code de la sécurité sociale.

En l'espèce, les frais de matelas, tapis de sol et fauteuil de baignoire constituent des dépenses de santé et d'appareillage au sens de l'article L 431-1 du code de la sécurité sociale et seront rejetés.

En revanche, la pose de barre d'appui, le changement de l'évier de la cuisine afin que M. A... puisse approcher et les socles en contreplaqué permettant le passage de la salle à manger au balcon constituent des aménagements ne relevant pas de l'article L 431-1 du code de la sécurité sociale.

Le principe de réparation intégrale du préjudice implique une indemnisation en fonction du besoin de la victime et non pas de la dépense effectivement engagée. Il en résulte que la production de devis est suffisante pour l'évaluation de ce poste de préjudice.

Au vu des pièces produites, il sera alloué la somme de 1.753,60 € au titre des aménagements permettant l'accessibilité du logement actuellement occupé par la victime, infirmant le jugement de ce chef.

2 ' sur l'indemnité forfaitaire spécifique

La somme de 17 921,64 € au titre de l'indemnité forfaitaire spécifique ne fait pas l'objet de contestation par les parties. Le jugement sera confirmé.

3 ' sur les frais divers

Le coût de l'intervention du Dr J... en qualité de médecin conseil lors des opérations d'expertise judiciaire a été à juste titre retenu par les premiers juges.

S'agissant des honoraires de Mme H... qui est intervenue à la demande de M. A... en qualité d'ergo-thérapeute, il convient de faire droit à la demande de la victime dès lors que ce rapport a été soumis au débat contradictoire et qu'il présente une utilité dans le cadre du litige quand bien même le poste relatif à l'aménagement du logement est réservé, étant observé que le tribunal l'a d'ailleurs pris en compte notamment pour le poste relatif à l'aménagement du véhicule.

Il sera donc alloué à la victime la somme de 4 713,72 € au titre des frais divers par voie d'infirmation.

4 ' sur le déficit fonctionnel temporaire

L'expert a défini selon ses conclusions les périodes de déficit fonctionnel temporaire total du 27/11/2009 au 27/07/2010 puis du 11/04/2012 au 18/04/2012 correspondant à 251 jours et les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel à 75 % du 11/07/2010 au 10/04/2012 puis du 19/04/2012 au 30/11/2012. Il convient d'observer que la période du 11 juillet au 27 juillet 2010 a déjà été prise en compte au titre du déficit fonctionnel temporaire total. Dans ces conditions, il sera retenu le calcul proposé par l'assureur soit une durée de 861 jours au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel.

Ainsi que l'a justement indiqué le tribunal, le taux d'incapacité permanente pris en compte par l'organisme social en l'espèce 100 % pour déterminer le montant de la rente allouée à la victime n'est pas de même nature que le taux correspondant au déficit fonctionnel temporaire lequel correspond à la perte d'autonomie personnelle que vit la victime dans ses activités journalières dont il n'est pas établi au vu des séquelles physiques présentées par la victime qu'il serait égal à 100 %.

L'évaluation faite par l'expert au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 75 % correspondant au barème de droit commun sera retenue ainsi que l'a justement décidé le tribunal.

Eu égard à la durée importante de la période de déficit fonctionnel temporaire et afin de tenir compte des préjudices d'agrément et sexuel temporaires subis au cours de cette période, il convient de retenir une indemnisation majorée sur la base de 28 € par jour.

L'indemnisation sera fixée ainsi qu'il suit :

- 251 jours x 28 € = 7.028 €

- 861 jours x 21 € = 18.081 €

soit un total de 25.109 € qui sera alloué à ce titre à la victime par voie de réformation.

5 ' sur les souffrances endurées

L'expert a évalué ce poste de préjudice à 5,5 sur 7 prenant en compte la fracture du rachis avec paraplégie, les 5 interventions chirurgicales, le traumatisme de l'épaule droite, la fracture de jambe gauche, les douleurs neuropathiques.

La somme de 35.000 € est de nature à indemniser le préjudice subi et sera allouée à la victime. Le jugement sera infirmé de ce chef.

6 ' sur l'assistance temporaire d'une tierce personne

L'expert a retenu que l'aide par tierce personne est une aide active non médicalisée afin d'aider la victime à assurer les activités ménagères, à faire les courses en grande surface, à l'accompagner dans certaines démarches ou activités de loisirs.

Il indique que cette aide peut se chiffrer à 2 heures par jour se décomposant de la façon suivante :

- aide pour les courses : 2h / semaine

- aide pour les déplacements et loisirs : 5 h / semaine

- aide pour les activités ménagères : environ 1 h / jour

L'indemnisation allouée par le tribunal à hauteur de 27 552 € sur la base d'un coût horaire de 16 € lequel correspond à une aide non spécialisée sera confirmée.

7 ' sur le préjudice esthétique

L'expert a évalué ce préjudice à 4,5 sur 7 depuis l'accident.

C'est par une exacte appréciation que le tribunal a alloué à la victime la somme de 7.000 € au titre du préjudice esthétique temporaire compte tenu de la durée importante entre l'accident et la consolidation et la somme de 15.000 € au titre du préjudice permanent.

8 ' sur les aides techniques

Se fondant sur le rapport établi par Mme H... ergothérapeute et sur le rapport complémentaire de l'expert, M. A... sollicite une indemnisation au titre de diverses aides techniques actuelles ou futures.

Ainsi qu'il a été rappelé dans le paragraphe relatif à l'aménagement du logement, si la victime peut demander devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux qui sont énumérés à l'article L 452-3, c'est à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts, même de manière restrictive, par le livre IV du code de la sécurité sociale. Le refus de prise en charge par la MSA des Alpes du Nord de certaines aides n'impliquent donc pas que lesdites aides ne seraient pas couvertes par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Au vu de la liste établie par la victime, il apparaît que les disques de rotation au sol, la planche de transfert à disque, le lit médicalisé, le matelas et les oreillers en mousse à mémoire de forme, le dispositif d'assise avec coussin et housses, le siège baignoire avec coussin, gel de douche et disque de rotation au sol, le 2ème fauteuil roulant et 2ème coussin gel de douche, le siège de douche, le fauteuil roulant en milieu humide, le fauteuil roulant Hélium comprenant le coussin d'assise, la 3ème roue, les roues tout terrain, l'assistance électrique stricker lipo lomo, le fauteuil roulant verticalisateur, les rampes, la tablette Ezenabler, le tapis de sol Airex et la pince à long manche constituent des dépenses de santé et d'appareillages au sens de l'article L 431-1-1° du code de la sécurité sociale de sorte que les aides dont la victime réclame réparation étaient déjà couverts et indemnisés au titre du livre IV du code de la sécurité sociale.

Le jugement sera confirmé.

9 ' sur l'assistance permanente d'une tierce personne pour l'aide ménagère

L'assistance par tierce personne après consolidation ne peut faire l'objet d'aucune indemnisation au titre de la faute inexcusable, s'agissant d'un préjudice déjà couvert par les dispositions de l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale qui prévoient en cas de recours à l'assistance d'une tierce personne, la majoration du montant de la rente. Le fait que la grille d'évaluation du besoin en tierce personne ne mentionne pas expressément les activités ménagères n'implique pas que ce préjudice ne serait pas visé par les dispositions de cet article, les actes précisés par l'article D 434-2 du code de la sécurité sociale ne servant qu'à la détermination du barème de la prestation.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. A... de ce chef de demande.

10 ' sur le préjudice sexuel

L'expert a retenu un préjudice sexuel caractérisé et en relation avec les séquelles neurologiques imputables à la fracture du rachis. Il mentionne des difficultés d'érection, cette dernière ne pouvant être obtenues qu'en utilisant du viagra et avec une efficacité modérée. Il précise que les rapports sexuels complets ne sont plus possibles, qu'il n'y a pas de possibilité de pénétration, pas d'éjaculation, pas d'orgasme.

Compte tenu de l'âge de la victime et de l'importance des troubles subis, il lui sera alloué par voie d'infirmation la somme de 40 000 € à titre d'indemnisation.

En revanche, les frais de traitement des troubles érectiles constituent des dépenses de santé déjà couvertes par le livre IV du code de la sécurité sociale. Cette demande sera rejetée.

11 ' sur les frais de véhicule adapté

L'expert a retenu la nécessité d'un véhicule automobile avec une boîte à vitesse automatique avec un accélérateur et un frein au volant.

Au vu du rapport de Mme H... ergothérapeute, le coût de l'accélérateur et du frein au volant s'élève à la somme de 3.347 €. La durée de vie de ces équipements qui ne correspond pas nécessairement à la durée de vie du véhicule ni à la durée de garantie du matériel, sera fixée à 6 ans.

Pour la capitalisation de cette dépense il convient de retenir le barème 2016 lequel est le plus conforme aux données économiques actuelles à la date à laquelle la cour statue, ce qui représente la somme suivante :

3.347/6 = 557,83 € x 32,828 = 18.312,44 €.

M. A... sollicite également un coffre de toit et un bras robot. A juste titre le tribunal a relevé que ces deux équipements avaient le même objet à savoir charger le fauteuil à l'intérieur du véhicule ainsi que cela ressort du rapport de Mme H....

S'agissant du bras robot, l'expert a indiqué que l'utilisation d'un tel matériel préserve le rachis dorsal et les articulations des membres supérieurs et c'est à juste titre que le tribunal a retenu son utilité.

Sur la base d'un coût moyen de 9.000 € et d'une durée de vie de 6 ans, il sera alloué à la victime la somme de 9.000/6 = 1.500 x 32,828 soit 49.242 € à ce titre.

Enfin, M. A... sollicite un coussin dont l'utilité médicale n'est pas justifiée. Cette demande sera rejetée.

Il sera en conséquence alloué à la victime au titre de l'aménagement du véhicule le somme de 67.554,44 €.

12 ' sur le préjudice d'agrément

L'expert indique que compte tenu de sa paraplégie, des troubles sphinctériens avec des problèmes urinaires et des fuites fécales, M. A... ne peut plus s'adonner aux activités sportives antérieurement pratiquées telles que: ski, randonnées, vélo de route, danse.

L'expert précise que si la victime a pu reprendre une activité sportive, c'est en utilisant des moyens adaptés tels que le handbike, le dual ski avec une aide humaine et un choix de stations proposant des aménagements particuliers.

Compte tenu de l'âge de la victime, des pièces produites sur l'étendue du préjudice subi comprenant l'incidence financière liée à l'investissement de matériel adapté, il convient de lui allouer la somme de 40.000 € au titre du préjudice d'agrément.

S'agissant de l'aide humaine nécessaire à la réalisation d'activité de loisirs et reconnue par l'expert à hauteur de 5 heures par semaine, c'est à juste titre que le tribunal a considéré qu'elle n'était pas couverte par les dispositions de l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale et a alloué à la victime sur la base de 5 heures par semaine, de 16 € de l'heure et du barème conforme aux données économiques connu à la date du jugement, la somme capitalisée de 137.396,48 €.

13 ' sur la perte de chance de promotion professionnelle

Ainsi que l'a rappelé le tribunal, l'indemnisation de ce poste de préjudice suppose que la victime rapporte la preuve de l'existence au jour de l'accident de chances sérieuses de promotion professionnelle.

Or, en l'espèce, le fait que l'employeur ait émis des offres d'emploi postérieurement à l'accident est insuffisant pour démontrer que la victime avait une possibilité réelle et sérieuse d'y accéder étant observé qu'il n'avait connu aucune évolution de carrière depuis son embauche.

Il convient de confirmer le jugement qui l'a débouté de sa demande.

L'indemnisation des préjudices non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale sera fixé ainsi qu'il suit:

- 1.753,60 € au titre des aménagements permettant l'accessibilité du logement occupé par la victime

- 4 713,72 € au titre des frais divers

- 25.109 € au titre du déficit fonctionnel temporaire

- 35.000 € au titre des souffrances endurées

- 27 552 € au titre de l'assistance temporaire tierce personne

- 7.000 € au titre du préjudice esthétique temporaire

- 15.000 € au titre du préjudice esthétique permanent

- 40 000 € au titre du préjudice sexuel

- 67.554,44 € au titre de l'aménagement du véhicule

- 40.000 € au titre du préjudice d'agrément

- 137.396,48 € au titre de l'assistance humaine destinée aux loisirs

soit un total de 401.079,24 € hors aménagement du logement qui a été réservé et hors indemnité forfaitaire spécifique déjà versée par la MSA.

Il y a donc lieu de condamner la société Bois du Dauphiné à verser cette somme sous déduction des provisions allouées si elles ont été versées, outre intérêts à compter du 25 mai 2012 date de la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que conformément aux dispositions de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, cette somme sera versée à M. A... par la MSA des Alpes du Nord qui en récupérera le montant auprès de la société Bois du Dauphiné.

Il sera également confirmé en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts dus par année entière.

Sur les demandes accessoires

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. A... la totalité des frais irrépétibles engendrés par la présente procédure. Il y a donc lieu de lui allouer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité complémentaire de 3.000 €.

Il sera également alloué à la MSA la somme de 1.000 € sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en ses dispositions relatives :

- au poste relatif aux aménagements permettant l'accessibilité du logement occupé par la victime,

- aux frais divers,

- au déficit fonctionnel temporaire,

- aux souffrances endurées,

- au préjudice sexuel,

- à l'aménagement du véhicule,

- au préjudice d'agrément,

Statuant à nouveau,

Fixe ainsi qu'il suit les postes de préjudices non confirmés résultant pour M. A... de l'accident survenu le 27 novembre 2009, outre intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2012 :

- 1.753,60 € au titre des aménagements permettant l'accessibilité du logement occupé par la victime,

- 4 713,72 € au titre des frais divers,

- 25.109 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,

- 35.000 € au titre des souffrances endurées,

- 40 000 € au titre du préjudice sexuel,

- 67.554,44 € au titre de l'aménagement du véhicule,

- 40.000 € au titre du préjudice d'agrément.

Confirme le jugement déféré pour le surplus.

Y ajoutant,

Condamne la société Bois du Dauphiné à payer à M. A... la somme totale de 401.079,24 € hors aménagement du logement qui a été réservé et hors indemnité forfaitaire spécifique déjà versée par la MSA, sous déduction des provisions allouées si elles ont été versées.

Dit que conformément aux dispositions de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, cette somme sera versée à M. A... par la MSA des Alpes du Nord qui en récupérera le montant auprès de la société Bois du Dauphiné.

Déclare le présent arrêt commun et opposable à AXA France IARD et à la compagnie Generali Assurances.

Condamne la société Bois du Dauphiné à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 3.000 € à M. A... et celle de 1.000 € à la MSA des Alpes du Nord.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame DUBOIS, président et par Madame ROHRER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 16/04105
Date de la décision : 11/10/2018

Références :

Cour d'appel de Grenoble 13, arrêt n°16/04105 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-11;16.04105 ?
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