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03/05/2012 | FRANCE | N°11/02304

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 03 mai 2012, 11/02304


RG N° 11/02304



N° Minute :





















































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU JEUDI 03 MAI 2012





Appel d'une décision (N° RG F10/00206)

re

ndue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 21 avril 2011

suivant déclaration d'appel du 02 Mai 2011



APPELANT :



Monsieur [K] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Comparant et assisté par Me François SIMON (avocat au barreau de CHAMBERY)





INTIMÉE :



La SAS POMAGALSKI prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié...

RG N° 11/02304

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 03 MAI 2012

Appel d'une décision (N° RG F10/00206)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 21 avril 2011

suivant déclaration d'appel du 02 Mai 2011

APPELANT :

Monsieur [K] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Comparant et assisté par Me François SIMON (avocat au barreau de CHAMBERY)

INTIMÉE :

La SAS POMAGALSKI prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Jean FOLCO (avocat au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller, faisant fonction de président,

Madame Hélène COMBES, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

DEBATS :

A l'audience publique du 04 Avril 2012,

Monsieur Bernard VIGNY, chargé du rapport, et Madame Hélène COMBES, assistés de Melle Sophie ROCHARD, Greffier, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoirie(s), conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Notifié le :

Grosse délivrée le :

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 03 Mai 2012, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 03 Mai 2012.

RG 11/2304BV

M.[Y] a été embauché le 16 février 1976 par la société Pomagalski, en qualité d'attaché de direction. En dernier lieu il a occupé le poste de directeur général adjoint.

Par courrier du président du directoire de la société daté du 18 novembre 2008, M. [Y] a été informé de ce que, remplissant toutes les conditions, il serait à la retraite le 31 janvier 2010.

M. [Y] a répondu à son employeur qu'il souhaitait poursuivre son activité au-delà des 65 ans révolus.

Des courriers ont été échangés entre M. [Y] et son employeur qui a confirmé sa position.

M. [Y] a saisi le conseil des prud'hommes en référé pour obtenir la suspension de la mesure de mise à la retraite.

Par ordonnance du 20 janvier 2010, le conseil des prud'hommes a débouté M. [Y] de sa demande.

M. [Y] a saisi le conseil des prud'hommes pour faire juger que sa mise à la retraite est illicite et pour obtenir le paiement de diverses sommes (préavis, indemnité conventionnelle de licenciement et dommages-intérêts 660'000 € à ce titre...).

Par jugement du 21 avril 2011 M. [Y] a été débouté de toutes ses demandes.

M. [Y] qui a relevé appel demande de dire que sa mise à la retraite est illicite et sollicite la condamnation de la société à lui payer les sommes suivantes :

- 66'372 € au titre du préavis outre les congés payés afférents

- 7683 € au titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 660'000 € à titre de dommages-intérêts en raison de la rupture brutale du contrat.

- 7000 € en application de l'article 700 du CPC.

Il expose que :

- la mise à la retraite décidée par l'employeur sans le consentement du salarié est possible si ce dernier a acquis tous les trimestres et bénéficie d'une pension à taux plein. Il a été mis à la retraite le 18 novembre 2008 ; il relevait de la loi du 21 août 2003 qui a repoussé à 65 ans l'âge de la retraite d'office prononcée par l'employeur.

Il y a une concomitance suspecte entre la réforme des retraites et sa mise à la retraite. Son employeur connaissant le dispositif législatif, a souhaité notifier un départ 14 mois à l'avance afin d'éluder les dispositions de la nouvelle loi qui ne permettent plus de mettre à la retraite à 65 mais à 70 ans.

- ce sont les dispositions légales en vigueur à la date de la mise à la retraite qui doivent être appliquées sauf fraude. La jurisprudence est très ferme en la matière.

Un délai de 14 mois et 12 jours avant la date d'effet n'est pas un délai normal de préavis.

La DRH a écrit : il pourrait être astucieux que nous puissions envisager par anticipation et avant les publications des nouvelles dispositions législatives une mesure de mise en retraite... C'est un aveu.

Les fonctions occupées depuis la fermeture de la filiale Poma Otis n'avaient plus lieu d'être.

Son préjudice est extrêmement lourd.

La société Pomagalski conclut à la confirmation du jugement et, à titre subsidiaire demande de constater que l'appelant ne justifie pas de la réalité de son préjudice.

Elle fait valoir que :

-la Cour de Cassation a maintes fois dit par des décisions de principe non contingentes à des dispositions législatives particulières que s'il convenait de se placer à la date d'expiration du contrat de travail pour apprécier si les conditions prévues à l'article L1237-5 du code du travail étaient réunies, c'est à la date de notification de la rupture qu'il fallait se placer pour déterminer quelles étaient les dispositions légales qui fixent ces décisions.

-au jour de la notification par la société de sa décision de mettre M. [Y] à la retraite d'office, l'article L 1237-5 du code du travail disposait : « la mise à la retraite s'entend de la possibilité donnée à l'employeur de rompre le contrat de travail d'un salarié ayant atteint l'âge mentionné premier de l'article L351-8 du code de la sécurité sociale ».

L'âge mentionné à l'article L351-8 du CSS était alors de 65 ans. L'appelant a atteint cet âge le 21 janvier 2010.

-La décision de la société est intervenue en conformité avec les dispositions en vigueur ; elle ne pouvait pas par hypothèse avoir été prise en contradiction avec des dispositions inexistantes.

-Sur l'exécution déloyale du contrat de travail : la société a pris sa décision en considération de l'âge du salarié, de sorte qu'il est vain d'invoquer les dispositions de l'article L 1132-1 du code du travail. Cette décision s'inscrivait dans une politique d'entreprise cohérente : l'organigramme de la direction de la société avait vocation à être repensé au cours de l'année 2010 en raison du départ à la retraite de M. [B] (départ qui s'est confirmé). Les fonctions occupées par M.[Y] depuis la fermeture de la filiale Poma-Otis n'avaient plus lieu d'être maintenues.

Le délai de prévenance de six mois était approprié au niveau des fonctions occupées par l'appelant.

-La note invoquée par l'appelant du 5 novembre 2008 n'avait pour objectif que de préserver l'intérêt des salariés ayant vocation à partir de la retraite, en les faisant bénéficier par une décision notifiée suffisamment à l'avance de dispositions fiscales et sociales très favorables.

MOTIFS DE L'ARRET.

L'article L 1237-5 du code du travail, alors applicable dispose :

« La mise à la retraite s'entend de la possibilité donnée à l'employeur de rompre le contrat de travail d'un salarié ayant atteint l'âge mentionné au 1er de l'article L351-8 du code de la sécurité sociale ».

L'âge mentionné au 1er de l'article L351-8 du code de la sécurité sociale était, lors de la notification par la société Pomagalski à M.[Y] de sa mise à la retraite d'office, de 65 ans

S'il convient de se placer à la date d'expiration du contrat de travail pour apprécier si les conditions prévues à l'article ci-dessus mentionné sont réunies, ce sont les dispositions légales en vigueur à la date de la notification de la mesure qui fixent ces conditions.

M.[Y] étant né le [Date naissance 3] 1945, a atteint l'âge de 65 ans, le 21 janvier 2010. Il n'est pas contesté que M.[Y] bénéficiait au 21janvier 2010 d'une retraite de sécurité sociale à taux plein.

La décision de la société Pomagalski était conforme aux dispositions législatives en vigueur.

Contrairement à ce que soutient M.[Y], la concomitance entre la réforme qui devait aboutir à la loi du 17 décembre 2008, d'une part et sa mise à la retraite, d'autre part, ne suffit pas à établir que son employeur a agi de mauvaise foi, c'est-à-dire dans le but de se soustraire aux nouvelles conditions de mise à la retraite.

Pour démontrer la mauvaise foi de son employeur, M. [Y] invoque une note confidentielle émanant du directeur des ressources humaines de la société, en date du 5 novembre 2008, note dont il ne donne que des extraits dans ses conclusions.

Ainsi, il cite les passages suivants de ladite note :

« l'actualité sociale en matière de mise à la retraite évolue très rapidement, les dernières actualités semblent présager que le processus de report de la retraite s'accélère, et donc la possibilité, jusqu'au 31 12 2009 d'envisager une mise à la retraite à l'initiative de l'employeur s'amenuise. Il pourrait donc être astucieux' que nous puissions envisager, par anticipation et avant les publications des nouvelles dispositions législatives et décrets d'application, une mesure de mise en retraite'»

L'intégralité de la note confidentielle du directeur des ressources humaines du 5 novembre 2008 adressée à M. [B] président du directoire de la société est la suivante :

« L'actualité sociale en matière de mise en retraite évolue très rapidement et les dernières actualités semblent présager que le processus de report de l'âge de la retraite s'accélère et donc que la possibilité jusqu'au 31 12 2009 d'envisager une mise en retraite à l'initiative de l'employeur s'amenuise.

Il pourrait donc être astucieux dans l'intérêt de certains salariés que nous puissions envisager, par anticipation et avant les publications de nouvelles dispositions législatives et décrets d'application, une mesure de mise en retraite du fait de l'employeur qui apporte aux salariés concernés des conditions financières plus avantageuses d'indemnisation de cette rupture.

Exemple :

Un salarié demande à prendre sa retraite qui est à ce jour à taux plein de 65 ans soit pour lui début janvier 2010 :

-l'indemnité de départ en retraite et taux plein socialement serait de ( 35 ans d'ancienneté ):

4 mois soit 42700 euros bruts soit 33560 euros nets sociale et dont imposable 30510 euros.

-si l'entreprise envisage la mise en retraite du salarié à la même échéance dans le cadre conventionnel de la métallurgie article 31.2 avec un délai minimum de prévenance de six mois, l'indemnisation applicable pour plus de 30 ans d'ancienneté serait de six mois soit 64000 euros nette sociale et fiscale ».

Cette note, contrairement à ce que soutient l'appelant qui ne la prend pas en compte dans sa totalité, montre que la direction des ressources humaines de la société, informée des évolutions législatives en cours, était préoccupée de la préservation de l'intérêt des salariés devant partir à la retraite. Pour la direction des ressources humaines, la notification de la mise à la retraite avant la promulgation d'un nouveau dispositif législatif et de ses décrets d'application, était destinée, non à être favorable aux intérêts de la société, mais à être profitable aux intérêts des salariés concernés.

La décision que M. [Y] a critiquée comme portant préjudice à ses intérêts ne l'a été que dans le cadre d'une politique globale fondée sur la préservation des intérêts des salariés concernés par une mise à la retraite prochaine.

Il n'y a pas lieu à application de l'article 2 du décret numéro 2008-1515 du 30 décembre 2008, dès lors que ce sont les dispositions légales en vigueur à la date de la notification de la mise en retraite qui doivent recevoir application.

Le jugement frappé d'appel doit, dans ces conditions, être confirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS.

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi.

Confirme le jugement en toutes ses dispositions.

Condamne M. [Y] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt greffe de la cour, les parties yant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Signé par M.Vigny, président et par Melle Rochard, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/02304
Date de la décision : 03/05/2012

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°11/02304 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-03;11.02304 ?
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