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15/09/2010 | FRANCE | N°09/01144

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 15 septembre 2010, 09/01144


RG N° 09/01144



N° Minute :



























































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU MERCREDI 15 SEPTEMBRE 2010







Appel d'un

e décision (N° RG 08/166)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de MONTELIMAR

en date du 26 février 2009

suivant déclaration d'appel du 06 Mars 2009





APPELANT :



Monsieur [H] [P]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représenté par Me Jean-Marie RIVOIRE (avocat au barreau de VALENCE)



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/003433 du 23/06/2009 accordée par le bureau d'aide ...

RG N° 09/01144

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU MERCREDI 15 SEPTEMBRE 2010

Appel d'une décision (N° RG 08/166)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de MONTELIMAR

en date du 26 février 2009

suivant déclaration d'appel du 06 Mars 2009

APPELANT :

Monsieur [H] [P]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Jean-Marie RIVOIRE (avocat au barreau de VALENCE)

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/003433 du 23/06/2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)

INTIMEE :

La S.A. TANAVI prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean Jacques DEUS (avocat au barreau de LYON)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller, faisant fonction de Président,

Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 28 Juin 2010,

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 15 Septembre 2010.

L'arrêt a été rendu le 15 Septembre 2010.

Notifié le :

Grosse délivrée le :

RG N° 09/1144 BV

Monsieur [P] a été engagé à compter du 7 novembre 2005 et pour une durée indéterminée par la S.A. Tanavi (Intermarché de [Localité 5] 3 Châteaux mois de 40 salariés) en qualité de manager de rayon, statut agent de maîtrise ; il a été affecté au rayon produits de la mer.

Il a fait l'objet d'un arrêt de travail pour maladie à compter du 24 juin 2006 prolongé jusqu'au 28 août 2006.

Il a souscrit le 25 août 2006 une demande de pris en charge d'une maladie professionnelle (sciatique par hernie discale) constatée pour la première fois le 24 juin 2006, demande qui a fait l'objet le 29 janvier 2007 d'un refus de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie au motif que la maladie ne présentait pas un caractère professionnel (avis du CRRMP du 10 janvier 2007). Par jugement du 8 janvier 2009 (devenu définitif), le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valence, après avoir recueilli l'avis d'un deuxième CRRMP, a dit que cette affection du 25 août 2006 ne relevait pas de la prise en charge au titre de la législation professionnelle tableau n° 98.

L'arrêt maladie s'est prolongé jusqu'au 4 février 2007.

A l'issue de la visite de reprise du 5 février 2007, le médecin du travail a estimé qu'il était apte à son poste, sous réserve 'de ne pas faire de manutention avec la glace.'

Monsieur [P] se serait présenté au travail le 5 février 2007 à 14 h. et l'employeur l'aurait renvoyé chez lui.

L'employeur a demandé au médecin du travail le 8 février 2007 d'organiser une seconde visite en lui expliquant qu'un système mécanique supprimait 90 % de la manutention manuelle lourde, les 10 % restants étant de la manutention légère non aménageable et indiqué le même jour au salarié qu'il avait obligation de reprendre son poste le 5 février 2007 sans restriction de fonctions. Une seconde visite de reprise aurait été programmée le 13 février 2007.

Il a repris son travail le 12 février 2007 à 6 h. Il a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 12 février 2007 à 7h. (en manipulant le présentoir plein de glace). L'employeur a contesté cet accident (affirmation d'avoir glissé, sans témoin). Il a fait l'objet d'un arrêt de travail pour AT du 12 février 2007 au 15 juin 2007.

Deux visites de reprise ont été organisées les 14 juin et 2 juillet 2007 :'inapte au poste, apte à un autre inapte à tous postes comportant des manutentions manuelles. Apte à un poste administratif ou à un poste à la caisse station service sans manutention'.

Interrogé sur son parcours professionnel, Monsieur [P] a répondu le 9 juillet qu'il était titulaire d'un BAC et d'un CAP, comptabilité. Les délégués du personnel ont été consultés le 17 juillet 2007 et ont constaté qu'il n'y avait pas de possibilité de reclassement.

Le 17 juillet 2007, l'employeur a informé Monsieur [P] de l'impossibilité de procéder à son reclassement (aucun poste disponible, le caissier de la station service fait de la manutention régulière de bouteilles de gaz). Il l'a convoqué le 18 juillet 2007 à un entretien préalable fixé le 22 juillet 2007.

Monsieur [P] a été licencié le 31 juillet 2007 pour inaptitude physique et impossibilité de procéder à son reclassement sur un poste compatible avec son état de santé requérant l'absence de toute manutention. Il a perçu l'indemnité spéciale de licenciement et l'indemnité compensatrice de préavis.

Monsieur [P] avait entre temps saisi le conseil de prud'hommes de Montélimar. L'affaire a été radiée. Le 24 juin 2008 il a demandé la remise au rôle.

Par jugement du 26 février 2009, le Conseil de Prud'hommes de Montélimar a constaté que le licenciement de Monsieur [P] pour inaptitude était justifié, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné à verser une indemnité de 100 euros à la S.A. Tanavi par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [P] a relevé appel le 6 mars 2009. Il demande à la cour de réformer le jugement, de condamner son ancien employeur à lui verser 19.428,08 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, 19.438,08 euros de dommages-intérêts pour rupture abusive et une indemnité pour frais irrépétibles.

Il reproche à son employeur de n'avoir pas respecté son obligation de sécurité de résultat. Il soutient qu'il avait contraint de reprendre son travail le 12 février 2007 sur un poste non aménagé comportant la manipulation de pains de glace ce qui, selon son médecin traitant le Docteur [N], avait été directement à l'origine de son accident le jour même de la reprise et dans les premières heures de travail (contracture lombaire majeure irradiant par des douleurs membres inférieurs).

Il invoque une lettre de l'employeur en date du 8 février 2007 portant mise en demeure de reprendre son poste le 5 février 2007 'aux horaires habituels et sans restriction de fonction';

La S.A. Tanavi demande à la cour de confirmer le jugement, de porter à 1.200 euros l'indemnité pour frais irrépétibles de première instance et d'en ordonner une nouvelle de 1.200 euros. Elle conteste toute exécution déloyale du contrat de travail.

Elle fait valoir que l'avis du 5 février 2007 du médecin du travail constituait un avis d'aptitude avec réserves, qu'il n'avait fait l'objet d'aucun recours devant l'inspecteur du travail et que d'ailleurs l'employeur et le salarié admettaient qu'il était préférable que l'intéressé n'effectue plus de manutention de glace.

Elle invoque l'impossibilité de mettre en oeuvre les réserves formulées le 5 février 2007.

Elle explique que les aménagements en place limitaient au maximum cette manutention et ne pouvaient être encore améliorés (bancs sur roulettes et bac sur roulettes remplis directement sous une machine à glace distante de 3 mètres, ces bancs et le bac à glace étaient poussés sur un sol plat et égal, la glace devait simplement être pelletée sur les autres éventaires avec une pelle pesant, une fois chargée, moins de 4 kg)

Elle en déduit que le poste ne comprenait pas de manipulation de charges lourdes et qu'elle n'avait pas d'autre choix que de maintenir Monsieur [P] à son poste.

Elle considère qu'elle n'est pas responsable de l'accident du travail, à propos des circonstances duquel les explications du salarié avaient évolué (manipulation d'un présentoir plein de glace puis en cause d'appel soulèvement de pains de glace).

Elle soutient que la visite de pré-reprise du 14 juin pouvait être tenue comme constitutive de la première des deux visites de reprise.

L'employeur soutient s'être strictement conformé à la procédure sur le licenciement pour inaptitude ensuite d'un accident du travail et avoir cherché un poste de reclassement. Aucun poste n'existait dans cette structure, ce qu'avaient constaté les délégués du personnel.

****

MOTIFS DE L'ARRET :

La visite médicale du 5 février 2007 qui a eu lieu à la demande de Monsieur [P], a conclu à une aptitude du salarié avec 'réserve de ne pas faire de manutention avec la glace'.

Cet examen médical marque la fin de la suspension du contrat de travail de Monsieur [P].

L'employeur de Monsieur [P] l'a, nonobstant l'avis du médecin du travail, contraint, par lettre du 8 février 2007, à reprendre son poste dans les termes suivants:

'Vous avez l'obligation de reprendre votre poste de responsable du rayon poisson, à compter du 5 février 2007, aux horaires habituels, et ce sans restriciton de fonction.

A compter du 12 février 2007, Monsieur [P] a été en arrêt de travail, jusqu'au 15 juin 2007.

Pour Monsieur [P], il s'agit d'un accident de travail.

La Société intimée ne conteste plus le caractère professionnel de l'accident. Dans ses conclusions (page 15) elle note en effet que Monsieur [P] a été victime d'un accident du travail le 12 février 2007 et vise les arrêts de travail pour accident du travail qu'elle produit. En outre, la Société intimée a sollicité l'avis des délégués du personnel, conformément à l'article L 1226-10 du code du travail, ce qui manifeste bien qu'elle admettait que le fait accident du 12 février 2007 était professionnel.

Le certificat médical du 27 février 2007 du médecin traitant de Monsieur [P], le Docteur [N], relève que Monsieur [P].

'a, le 12 février 2007, soulevé des pains de glace, ce qui lui a immédiatement provoqué une contracture lombaire et des douleurs irradiant dans les deux membres inférieurs, tant à gauche qu'à droite

'présente une contracture lombaire majeure avec un signe de Lasègue lombaire bilatéral à 60 °, sans déficit neurologique.

Les avis du médecin du travail en date du 14 juin 2007 et 2 juillet 2007 ont été donnés en application de l'article R 4624-31 du code du travail.

Ils concluent à l'inaptitude de Monsieur [P] à tous postes comportant des manutentions manuelles et à son aptitude à une poste administratif ou à la caisse de la station service sans manutention.

La S.A. Tanavi a exécuté le contrat de travail de Monsieur [P] de façon déloyale. En effet, alors que le médecin du travail a conclu, le 5 février 2007, à une aptitude de Monsieur [P], assortie de réserve (non manutention de glace), l'employeur de celui-ci l'a obligé à reprendre ses fonctions qui nécessitent la manutention de glace. La Société intimée admet ne pas avoir suivi l'avis du médecin du travail, en raison du fait qu'il lui était impossible de l'observer.

Cette explication ne peut, de toute évidence, être admise.

La société intimée reconnaît expressément, dans ses écritures que Monsieur [P] a du nécessairement manipuler de la glace. Elle indique que le poids d'une pelle remplie de glace est de moins de quatre kilos.

Il appartenait à la S.A. Tanavi de se conformer à l'avis du médecin de travail ou de contester ledit avis devant l'inspection du travail.

Contrairement à ce que soutient la S.A. Tanavi, un employeur n'est pas fondé à refuser la mise en ouvre des préconisations du médecin du travail -qui ne sont pas comme elle le conclut des 'propositions'- dès lors que ce refus est selon elle 'justifié'. La Société Tanavi ne précise pas sur quelle disposition légale ou réglementaire elle se fonde.

Le 12 février 2007, Monsieur [P] a été à nouveau victime d'un accident du travail et ce dernier est la conséquence de l'obligation qui lui a été faite de reprendre ses fonctions, en contradiction avec l'avis du médecin du travail.

La S.A. Tanavi a méconnu son obligation d'exécuter le contrat de travail de Monsieur [P], de bonne foi.

La S.A. Tanavi sera condamnée à payer à Monsieur [P] la somme de 19.438,08 € à titre de dommages-intérêts.

****

Ainsi que cela a été précisé plus haut, les avis du médecin du travail en date du 14 juin 2007 et du 2 juillet 2007 sont intervenus en application de l'article R 4624-31 du code du travail.

Contrairement à ce que soutient Monsieur [P], la visite du 14 juin 2007, n'est pas une visite de pré-reprise. En effet, l'avis du médecin du travail mentionne 'type de visite. Reprise après maladie'. La visite se situe la veille de la fin de l'arrêt de travail de Monsieur [P].

Cette visite qui a conclu à une inaptitude au poste, a été suivie d'une deuxième visite, le 2 juillet 2007, soit dans le délai de deux semaines de la première visite.

La procédure suivie par la S.A. Tanavi est régulière.

La demande de dommages-intérêts de Monsieur [P], exclusivement fondée sur le fait qu'il n'avait subi qu'une seule visite de reprise ne peut qu'être rejetée.

****

L'équité commande la condamnation de la S.A. Tanavi à payer à Monsieur [P] 1.800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

****

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté Monsieur [P] de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive.

Statuant à nouveau

Dit que la S.A. Tanavi n'a pas exécuté le contrat de Travail de Monsieur [P] de bonne foi.

Condamne la S.A. Tanavi à payer à Monsieur [P] 19.438,08 euros à titre de dommages-intérêts.

Condamne la S.A. Tanavi à payer à Monsieur [P] 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne la S.A. Tanavi aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Monsieur VIGNY, Président, et par Madame VERDAN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/01144
Date de la décision : 15/09/2010

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°09/01144 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-09-15;09.01144 ?
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