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08/11/2007 | FRANCE | N°06/3217

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 08 novembre 2007, 06/3217


RG No 06 / 03217
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU JEUDI 08 NOVEMBRE 2007
Appel d'une décision (No RG 20040739) rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE en date du 02 juin 2006 suivant déclaration d'appel du 19 juillet 2006

APPELANTE :

La S.A.R.L. FERRO BULLONI FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège Z.A. Les Charbonneaux 38490 CHIMILIN

Représentée par Me Marie-Josèphe PETITJEAN-DOMEC (avocat au barreau de LYON)

INTIMES :
r>Monsieur Mustapha X...... 38110 LA BATIE MONTGASCON

Représenté par Me MILLET substituant la SCP T...

RG No 06 / 03217
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU JEUDI 08 NOVEMBRE 2007
Appel d'une décision (No RG 20040739) rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE en date du 02 juin 2006 suivant déclaration d'appel du 19 juillet 2006

APPELANTE :

La S.A.R.L. FERRO BULLONI FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège Z.A. Les Charbonneaux 38490 CHIMILIN

Représentée par Me Marie-Josèphe PETITJEAN-DOMEC (avocat au barreau de LYON)

INTIMES :

Monsieur Mustapha X...... 38110 LA BATIE MONTGASCON

Représenté par Me MILLET substituant la SCP TEJTELBAUM-TARDY / CHARVET (avocats au barreau de BOURGOIN-JALLIEU)
La Société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 40 Grande Rue 38630 LES AVENIERES

La Société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 5 Place de la Bascule 38500 VOIRON

Toutes deux représentées par Me Alain SOUBRILLARD (avocat au barreau de GRENOBLE)
La CPAM DE GRENOBLE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 2 Rue des Alliés 38100 GRENOBLE

Représentant : Mme Y...munie d'un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre, Madame Dominique JACOB, Conseiller, Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme LEICKNER, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 11 octobre 2007, Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 08 novembre 2007.
L'arrêt a été rendu le 08 novembre 2007.

* * *

EXPOSE DU LITIGE

Mustapha X...a été embauché par la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE en qualité d'agent de production. Il a été mis à la disposition de la société FERRO BULLONI à compter du 29 janvier 2001 pour occuper un poste d'agent de fabrication.

Le 9 février 2001, il a été victime d'un accident du travail : alors qu'il utilisait une machine à tisser le fil, ses doigts de la main gauche ont été pris dans la machine, ce qui lui a occasionné des blessures graves.
Il s'est vu notifier par la CPAM une rente avec un taux d'incapacité de 12 %.
Le 14 juin 2004, la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Grenoble d'une demande de prise en charge du coût de l'accident par la société FERRO BULLONI, en présence de la CPAM de Grenoble (premier dossier).
Le 10 décembre 2004, Mustapha X...a saisi le Tribunal en vue de voir reconnaître la faute inexcusable de la société FERRO BULLONI à l'origine de l'accident (deuxième dossier).
Le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a, par jugement du 2 juin 2006 :-ordonné la jonction des deux instances,-déclaré recevable et non prescrite la demande en reconnaissance de la faute inexcusable formulée par Mustapha X...,-dit que l'accident était dû à la faute inexcusable de la société FERRO BULLONI,-fixé au maximum le taux de majoration de la rente de Mustapha X...,-dit que la CPAM de Grenoble fera l'avance à Mustapha X...de l'indemnisation complémentaire de ses préjudices visés à l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale, à charge pour elle d'en récupérer le montant auprès de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE,-ordonné, avant dire droit sur la détermination de l'indemnisation complémentaire du préjudice, une expertise médicale judiciaire,-dit qu'aucune faute inexcusable de la part de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE n'est établie, à l'origine de l'accident,-condamné la société FERRO BULLONI à garantir la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE de toutes les conséquences financières de sa faute inexcusable,-condamné la société FERRO BULLONI à payer à Mustapha X...800 € par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,-déclaré le jugement commun à la CPAM de Grenoble.

La société FERRO BULLONI a relevé appel le 19 juillet 2006 du jugement qui lui a été notifié le 12 juillet 2006.
Elle soulève, à titre principal, l'irrecevabilité de l'action en reconnaissance de faute inexcusable dirigée contre elle, entreprise utilisatrice, alors que seule la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE, en sa qualité d'entreprise de travail temporaire, est tenue vis à vis du travailleur intérimaire, à charge pour elle d'exercer une action récursoire à l'encontre de l'entreprise utilisatrice. Elle conteste le fait que le Tribunal ait statué sur une lettre de saisine de Mustapha X...contre son employeur, lettre qui n'a jamais été évoquée ni produite aux débats par le demandeur et qui n'a pas été régulièrement enregistrée. Elle soutient ensuite que l'action intentée contre la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE est prescrite, comme n'ayant pas été engagée dans les deux ans de l'accident ; que la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE ne peut invoquer de suspension du délai du fait de l'action pénale qui n'a été engagée que contre la société FERRO BULLONI et n'a pas été rendu opposable à la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE.

A titre subsidiaire, la société FERRO BULLONI soulève l'irrecevabilité de la demande de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE relative à la prise en charge du coût des prestations en espèces et en nature versées à la victime de l'accident, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale ne pouvant statuer que sur les contestations relatives à la répartition du coût de la rente ou du capital-décès, entre l'entreprise de travail temporaire et l'entreprise utilisatrice.
Sur cette question, la société FERRO BULLONI soutient qu'aucune faute inexcusable de sa part n'est démontrée ; que le Tribunal Correctionnel a déclaré la société FERRO BULLONI coupable de blessures involontaires et M. Z..., responsable de l'usine, coupable de défaut de formation pratique et appropriée en matière de sécurité au bénéfice de travail leurs liés par un contrat de travail temporaire, sans que la responsabilité de l'entreprise utilisatrice ne soit retenue au regard de ses obligations en matière de sécurité ; que, le jour de l'accident, soit le dernier jour de sa mission de 9 jours, Mustapha X...n'a pas respecté les consignes d'utilisation de la machine (à savoir la recommandation tenant à l'emploi d'une pince pour engager le fil dans l'engrenage) et qu'il a commis une faute à l'origine de l'accident.
La société FERRO BULLONI estime donc que le coût de la rente ne peut être mis à sa charge exclusive et sollicite la condamnation de Mustapha X...et de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE à lui verser la somme de 1 500 € chacun par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La CPAM de Grenoble s'en rapporte à justice en ce qui concerne la reconnaissance de la faute inexcusable et la répartition du coût de l'accident, et sollicite, pour le cas où la faute inexcusable serait reconnue, la condamnation de l'employeur à lui rembourser les sommes dont elle aura fait l'avance.
La société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de la société FERRO BULLONI à lui verser 3 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle affirme que l'accident est dû à la faute de la société FERRO BULLONI qui n'a pas respecté ses obligations en matière d'hygiène et de sécurité ; que, dès lors que le poste de travail occupé par Mustapha X...n'était pas identifié comme un poste à risque, il incombait à la société utilisatrice et à elle seule de former le salarié intérimaire à la sécurité ; que le défaut de formation a été retenu par le Tribunal Correctionnel ainsi que l'affectation de Mustapha X...sur une machine non conforme à la législation française et qui n'était pas munie de dispositif de sécurité.
Mustapha X...sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de la société FERRO BULLONI et de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE à lui verser 2 000 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience.

Sur la recevabilité de la demande formée contre la société FERRO BULLONI :

Il résulte de la combinaison des articles L. 412-6 et L. 452-3 du Code de la sécurité sociale qu'en cas d'accident survenu à un travailleur intérimaire et imputable à une faute inexcusable de l'entreprise utilisatrice, c'est l'entreprise de travail temporaire, employeur de la victime, qui est seule tenue envers la caisse du remboursement des indemnisations complémentaires prévues par la loi, l'entreprise utilisatrice étant seulement exposée à une action récursoire de la part de l'employeur. Il appartenait donc à Mustapha X...d'exercer son action à l'encontre de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE, son employeur juridique, ce qui n'a pas été le cas puisque les demandes formulées par la victime sont dirigées contre la société FERRO BULLONI, seul défendeur à la procédure, et que la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE n'a été que mise en cause par la CPAM de Grenoble. En effet, contrairement à ce qu'affirme le Tribunal, il n'est pas trouvé trace au dossier de première instance d'une requête de Mustapha X...dûment enregistrée à l'encontre de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE le 1er juin 2005, lui conférant la qualité de défendeur. De plus dans les dernières conclusions soutenues en première instance, la demande est ainsi libellée : " dire et juger que l'accident du travail dont a été victimeMustapha X...s'analyse par une faute inexcusable imputable à la société FERRO BULLONI, entreprise utilisatrice, dans le cadre du contrat de mission conclu avec la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE, employeur ". Aucune demande n'est expressément formée à l'encontre de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE.

La demande formée contre la société FERRO BULLONI doit donc être déclarée irrecevable et le jugement infirmé.
Sur la prescription de l'action en reconnaissance de faute inexcusable :
La prescription en la matière est de deux ans à compter de l'accident du travail, de la cessation du travail, du jour de la clôture de l'enquête ou du jour de la cessation du paiement des indemnités journalières. En l'espèce la prescription est acquise depuis le 9 février 2003 (2 ans de l'accident) ou même depuis le 12 juin 2005 (2 ans du jugement du Tribunal correctionnel prononcé contre la société FERRO BULLONI).

Le jugement doit donc être infirmé.

Sur les frais de défense :

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

-Infirme en toutes ses dispositions le jugement attaqué
-Déclare Mustapha X...irrecevable en sa demande formée à l'encontre de la société FERRO BULLONI
-Constate que l'action à l'égard de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE est prescrite.
-Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de la société ATOUT TRAVAIL TEMPORAIRE,
-Déboute Mustapha X...de sa demande formée au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame LEICKNER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06/3217
Date de la décision : 08/11/2007
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble, 02 juin 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2007-11-08;06.3217 ?
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